Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'interviens quelque peu à contre-courant.
En effet, je n'aborderai ni l'adaptation de notre enseignement supérieur aux exigences du XXIe siècle, ni l'accompagnement universitaire des pôles de compétitivités de demain, ni, encore, l'indispensable effort à réaliser dans le domaine de la recherche, condition de la compétitivité de notre économie et de la pérennité de nos entreprises.
En réalité, monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur une « vieille dame », qui vient de fêter ses deux cents ans, et qui aimerait que cet anniversaire puisse être suivi par beaucoup d'autres : je veux parler de la capacité en droit.
Voilà, certes, une formation assez étrangère à la mise en oeuvre du système LMD, et dont l'utilité pour l'accès à l'enseignement supérieur ne peut que diminuer avec la réussite d'une part sans cesse croissante d'une classe d'âge aux épreuves du baccalauréat.
Ce n'est pourtant pas par nostalgie que je souhaite défendre la pérennité de la capacité en droit, mais c'est tout simplement parce que cette formation est originale, qu'elle répond à une demande spécifique et qu'elle obtient des résultats exemplaires. Par conséquent, son grand âge ne peut suffire à la condamner.
Il s'agit d'abord d'une formation de la deuxième chance, offrant la possibilité à des jeunes, ou à des moins jeunes, qui, pour de multiples raisons, ont interrompu très tôt leur cursus scolaire, de le reprendre tout en exerçant, éventuellement, une activité professionnelle, et de rejoindre ainsi les filières traditionnelles d'enseignement supérieur, avant d'entamer des carrières juridiques ou judiciaires qui leur auraient été interdites sans une telle opportunité.
Il s'agit, en outre, d'une formation accueillante pour des adultes qui, même bacheliers, peuvent redouter l'assimilation à des étudiants beaucoup plus jeunes et aux préoccupations assez éloignées des leurs.
Il s'agit, enfin, d'une forme assez unique de formation continue « citoyenne », sorte d'instruction civique pour des adultes volontaires, au point que la réussite à l'examen ne constitue pas, loin s'en faut, la seule mesure de son utilité.
Si je profite ainsi de l'opportunité de ce projet de loi de finances pour m'exprimer sur le sujet, monsieur le ministre, c'est que la capacité en droit est en train de disparaître pour des raisons financières.
De nombreuses universités ont déjà mis fin à cet enseignement, et celles qui résistent encore les imiteront peu à peu si rien n'est fait.
La capacité en droit disparaîtra, victime de la norme SANREMO, ou système analytique de répartition des moyens, qui attribue aux universités un forfait correspondant au nombre d'heures possibles d'enseignement par étudiants.
Or, par rapport au cursus d'un étudiant de licence, celui d'un étudiant de capacité requiert des moyens financiers dix fois inférieurs.
Dans ces conditions, la capacité n'est pas rentable pour les universités puisqu'elle cumule le double handicap d'effectifs limités et de normes spécifiques pénalisantes.
Mon ambition, ce soir, monsieur le ministre, était simplement d'attirer votre attention sur une filière, qui est jusqu'ici bien peu médiatisée alors qu'elle ouvre l'université sur un public spécifique et tout particulièrement motivé.