Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, avec les autres membres du groupe du RDSE, je tiens à saluer l’initiative de notre collègue Richard Tuheiava, dont la proposition de loi – tous les orateurs l’ont souligné ce matin – est le fruit d’un remarquable travail de concertation entre les organisations syndicales, les collectivités territoriales et les représentants de l’État en Polynésie française.
Cette tâche de réflexion, qui a su dépasser les clivages partisans, montre qu’il est possible de parvenir à un consensus raisonnable, au service de l’intérêt général des citoyens de nos collectivités ultramarines. Cette proposition de loi l’illustre avec pertinence.
Comme l’ont rappelé les orateurs qui m’ont précédé à cette tribune, les ordonnances du 4 janvier 2005 et du 5 octobre 2007 ont mis en application les dispositions du nouveau statut créé par la loi organique du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la Polynésie française. Même si l’ensemble des décrets et arrêtés d’application n’ont toujours pas été publiés, les règles de la démocratie locale et du principe de libre administration des collectivités territoriales, dont jouissent les communes relevant du droit commun, sont en voie d’extension, dans la perspective du 1er janvier 2012. D'ailleurs, trente-sept des communes polynésiennes ont déjà mis en œuvre cette faculté.
Cet alignement d’une collectivité d’outre-mer sur le droit commun des collectivités territoriales revêt, bien sûr, un intérêt particulier pour l’élu ultramarin que je suis, tant – vous le savez, mes chers collègues – le débat sur l’évolution institutionnelle de la Guadeloupe est d’actualité.
Pour ma part, je me réjouis que nos compatriotes polynésiens, élus ou non, aient refusé l’immobilisme pour, au contraire, faire le choix d’une autonomie responsable et adulte dans le cadre des lois de la République.
La proposition de loi de notre collègue vise deux objectifs ambitieux et légitimes, auxquels nous souscrivons pleinement : rapprocher le statut des 4 547 agents communaux de celui des autres fonctions publiques et tenir compte des difficultés rencontrées lors de la large concertation qui s’est tenue sur l’évolution de ce statut.
En effet, l’extension des dispositions du code général des collectivités territoriales n’a pas été sans soulever des difficultés pratiques pour les agents communaux, dont la grande hétérogénéité des statuts doit encore aujourd’hui être combinée avec la géographie et les contraintes spécifiques auxquelles se heurtent les communes polynésiennes et leurs groupements.
L’absence de mise en œuvre d’un statut des agents locaux, pourtant décidée en 1994 par le législateur, a eu pour conséquence le maintien de règles de recrutement et de conditions de travail disparates. Celles-ci s’inscrivent en effet entre le contrat de droit privé soumis au code du travail polynésien et l’application de la convention collective des agents non fonctionnaires communaux ou encore du statut communal ad hoc.
Il nous paraît évident que la faiblesse des ressources financières propres et des bases d’imposition des communes, qui placent ces dernières dans une situation de dépendance à l’égard des transferts financiers de l’État, empêche aujourd’hui les municipalités d’exercer pleinement les compétences que la loi leur a octroyées. Cette inertie regrettable appelle également une harmonisation des statuts, afin de ne pas disperser inutilement l’usage des deniers publics et de favoriser le développement des compétences professionnelles des agents.
Dans un territoire où l’intercommunalité reste aussi peu développée, il est souhaitable que cette harmonisation accompagne la mutualisation des moyens des communes au service de l’intérêt général local, par exemple dans les domaines sur lesquels notre collègue Bernard Frimat vient de mettre l’accent, c'est-à-dire l’assainissement, le traitement des déchets ou la distribution d’eau potable.
Ce sont précisément ces carences qui ont conduit le congrès des communes de Polynésie française à mener le travail de réflexion dont est issue pour partie la présente proposition de loi.
Sur le fond, ce texte place les règles de la fonction publique communale de Polynésie française en conformité avec les évolutions législatives intervenues depuis la publication de l’ordonnance du 4 janvier 2005 : développement de la formation professionnelle et valorisation de l’expérience professionnelle par les lois du 2 février 2007 et du 19 février 2007, assouplissement de la mobilité au sein des trois fonctions publiques par la loi du 3 août 2009, modernisation du dialogue social par la loi du 5 juillet 2010.
Je ne peux donc qu’approuver la sécurisation des conditions de recrutement et de déroulement de carrière ainsi que la consolidation de la protection sociale des agents auxquelles procède cette proposition de loi. N’oublions pas non plus que, dans des territoires marqués par des contraintes géographiques parfois très fortes, les fonctionnaires jouent un rôle économique et social majeur. Ce sont eux qui permettent de préserver le lien social en faisant vivre les services publics ; ce sont eux également qui servent de relais à la mise en œuvre des politiques de développement dont ont nécessairement besoin les communes et leurs habitants.
J’ai entendu moi aussi les remarques de M. Tuheiava sur certains points du texte qui mériteraient certainement d’être précisés. Je ne doute pas que ces observations feront l’objet d’un débat et que nous parviendrons à un consensus constructif lors de la discussion des articles.
Aussi, comme l’ensemble de mes collègues du groupe du RDSE, j’apporterai un soutien sans réserve à cette proposition de loi.