Intervention de Marie-Christine Blandin

Réunion du 27 janvier 2011 à 9h00
Indépendance des rédactions — Rejet d'une proposition de loi

Photo de Marie-Christine BlandinMarie-Christine Blandin :

La fusion entre L’Est Républicain et La Liberté de l’Est, ces titres devenant Vosges Matin, a fait tomber le lectorat de 50 000 exemplaires quotidiens en 2007 à 43 000. Les rachats nient la sociologie des lecteurs qui peut être différente entre deux départements, entre la ville et la campagne ou simplement d’un style à l’autre. Dans le présent cas de figure, aucun nouveau projet éditorial n’a été proposé pour faire revenir les lecteurs déçus, et les journalistes ont été tenus à l’écart de la réflexion.

La proposition de loi que nous examinons permet de garantir l’autonomie des rédactions face aux actionnaires et, pour le citoyen, la transparence.

L’article 2 vise l’inscription dans l’ours du nom des actionnaires détenant plus de 10 % du capital. Or le rapporteur objecte que cette disposition serait inscrite dans la proposition de loi de simplification et d’amélioration de la qualité du droit. Nous considérons, pour notre part, que cette règle a toute sa place dans le texte que nous vous soumettons, mes chers collègues, et nous préférons tenir que courir. En effet, la proposition de loi précitée fait actuellement l’objet de la navette, et l’Assemblée nationale sait très bien gommer les acquis du Sénat. On nous assurait hier que la directive sur les œuvres orphelines était « imminente » ; un moyen commode pour élaguer une proposition de loi. Nous avons plus confiance dans la déontologie des journalistes que dans celle des actionnaires et de ceux qui les servent, qui confondent souvent informations et intérêts de leurs annonceurs.

La période est difficile pour la presse, qui a besoin de soutien. Au cours d’une réunion du syndicat national des journalistes, le SNJ, dans laquelle j’ai représenté le président de la commission de la culture Jacques Legendre en raison d’un retard des horaires du colloque, les journalistes se sont félicités de l’article 34 de la Constitution, qui place « le pluralisme et l’indépendance des médias » dans le domaine de la loi. Néanmoins, ils s’interrogent sur l’application réelle de ces dispositions en période de concentration des médias. Ils ont exprimé également d’une part, leur satisfaction à l’égard des dispositions relatives à la protection des sources, mais, d’autre part, leur inquiétude au vu des dérogations possibles et des graves incidents ayant suivi l’application de ces mesures.

Les rédactions ont besoin de gages ; elles sont tiraillées entre leur déontologie et les demandes des actionnaires. C’est pour cela qu’il revient au législateur de tout mettre en œuvre pour garantir la qualité de l’information dans une démocratie. Un article sur la crise bancaire sera-t-il traité de façon indépendante si l’un des actionnaires est une banque ?

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