C'est ainsi que le médecin pourra porter à la connaissance du procureur de la République, sans que l'accord de la victime soit nécessaire, les faits de violences conjugales qu'il pourrait constater. Actuellement, je le rappelle, il peut saisir le procureur de tels faits, mais uniquement avec l'accord de la victime. Il ne peut se passer de cet accord et lever le secret professionnel que dans le cas où la victime est mineure.
Les femmes seraient-elles dénuées de discernement au point qu'il faille les traiter comme des mineures ? Apparemment oui, si l'on en juge par les dispositions que le Gouvernement souhaite nous faire adopter.
Allons un peu au-delà : se pose évidemment le problème de la confiance que la patiente accorde à son médecin.
M. le rapporteur parle, à juste titre, de loi du silence. C'est un fait : les femmes ne révèlent pas facilement les violences conjugales dont elles sont victimes, celles-ci survenant, chacun le sait, dans l'intimité de leur couple. Elles doivent donc pouvoir se confier à des personnes avec qui elles se sentent en confiance. Il est très important pour elles d'être accueillies dans un environnement neutre, où elles peuvent être écoutées avec respect, sans être jugées.
Bien évidemment, le travail des professionnels, des médecins, des travailleurs sociaux ou des autres personnes en qui ces femmes ont confiance est de les amener progressivement à accepter de dévoiler cette intimité, qui est ressentie comme étant honteuse et dont il leur est très difficile de parler à leur entourage.
Pensez-vous vraiment que, sachant que leur médecin n'est plus tenu au secret médical et qu'il peut saisir le procureur de la République, les femmes se confieront à l'interlocuteur privilégié qu'il est pour elles ?
Cette levée du secret professionnel ne pourra être ressentie que comme une trahison. Elle risque fort de remettre en cause la relation de confiance établie entre les patientes et leurs médecins. Elles continueront de subir des violences, mais n'en parleront pas, comme autrefois.
Cette disposition est franchement inacceptable et révèle une méconnaissance du sujet, que je ne pensais pas possible de la part du Gouvernement.