Intervention de Ladislas Poniatowski

Réunion du 13 décembre 2006 à 15h00
Commission d'enquête sur les causes de la panne d'électricité du 4 novembre 2006 — Adoption des conclusions négatives du rapport d'une commission

Photo de Ladislas PoniatowskiLadislas Poniatowski, rapporteur :

À l'évidence, le fait de disposer d'un parc hydroélectrique important est un élément de stabilisation du réseau et il est bien dommage que la France ne soit pas capable d'accueillir davantage de barrages hydrauliques.

Par ailleurs, en ce qui concerne le second phénomène, à savoir les délestages, il convient de noter que la situation a, là aussi, été bien maîtrisée puisque, parmi les usagers prioritaires que sont notamment les hôpitaux et les laboratoires, mais aussi les particuliers qui ont besoin, pour des raisons de santé, d'être branchés en permanence à un réseau électrique à leur domicile, seul un incident a été relevé dans toute la France : il s'est produit dans les Hautes-Pyrénées, à l'hôpital de Lamnezan, et n'a duré que quelques minutes.

Le système a donc parfaitement fonctionné.

Il n'en reste pas moins que, dès aujourd'hui, des pistes d'amélioration peuvent être définies pour éviter qu'une telle panne ne se reproduise.

À cet effet, les idées défendues par RTE ou par les régulateurs énergétiques européens, comme la création d'un centre européen de coordination du transport d'électricité, une harmonisation des compétences des régulateurs ou un renforcement des interconnexions, sont de nature à renforcer la sûreté du réseau.

Pour autant, mes chers collègues, faut-il constituer une commission d'enquête sur la panne, de cinquante minutes, je vous le rappelle ?

Votre commission ne le croit pas, et cela pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, il n'y a pas matière à enquêter en France sur la panne puisque nos acteurs nationaux ont, tous, bien réagi, et je tiens ici à saluer RTE, EDF et tous leurs salariés.

Par ailleurs, l'origine de l'incident se situe en Allemagne, comme vous l'avez justement précisé, monsieur Billout, et il n'appartient pas à une commission d'enquête du Sénat français d'aller investiguer à l'étranger ou de faire venir des responsables allemands en France pour qu'ils répondent de leurs actes.

Au demeurant, deux enquêtes sont en cours : la première est menée par l'association des transporteurs européens d'électricité, la seconde par les régulateurs européens. Un bilan d'étape de l'enquête des transporteurs a été rendu public vendredi 1er décembre dernier et les résultats définitifs des deux enquêtes seront connus avant la fin de février 2007. Une éventuelle commission d'enquête rendrait donc ses travaux quand toutes les conclusions auront été tirées et serait dès lors inutile.

En outre, votre commission a estimé que la création d'une commission d'enquête, de par son caractère symbolique et solennel, devait être réservée aux sujets plus lourds. J'assume mes responsabilités en affirmant cette position qui, je le sais, monsieur Billout, ne vous plaît pas et je me réfère aux précédents très récents, par exemple à la commission d'enquête sur Outreau ou encore à celle sur le naufrage du Prestige.

D'ailleurs, l'incident dont nous parlons est sans commune mesure, en termes de conséquences pour les ménages et les entreprises, avec d'autres pannes qui ont frappé la France par le passé, et vous avez bien voulu rappeler les pannes que j'ai citées dans mon rapport, celles de 1978 et 1987, qui n'avaient pas conduit à la création de commission d'enquête.

En revanche, le second sujet évoqué dans la proposition de résolution de nos collègues semble beaucoup plus propice à la conduite d'investigations complémentaires. La question de la sécurité des approvisionnements électriques de la France et de l'Europe est en effet un vrai sujet de préoccupation.

Soyons clairs, la panne du 4 novembre ne peut être imputée à une insuffisance de moyens de production. Juste avant l'incident, la France était d'ailleurs en situation d'exportatrice nette. Sur ce point, je vous renvoie, mes chers collègues, au rapport dans lequel nous avons montré, à partir de la documentation qui provient de RTE, que cette situation, où nous exportons plus d'électricité que nous n'en importons, était assez fréquente.

Toutefois, on constate que notre pays est régulièrement à la limite de l'équilibre offre-demande lors des périodes de forte consommation et ne peut compter que sur son propre parc de production pour franchir les pics. À titre d'exemple, le 28 février 2005, journée particulièrement froide, la France a importé plus de 3 000 mégawatts.

De même, il apparaît que les interconnexions entre les États européens ne se sont pas suffisamment développées au cours des dernières années au regard de l'évolution de la production et de la consommation en Europe, aggravant ainsi les risques de défaillance du réseau électrique.

Certes, les opérateurs français ont des plans d'investissements conséquents dans la production. Je vous rappelle, mes chers collègues qu'EDF, qui prévoit d'investir plus de 26 milliards d'euros en France et à l'étranger dans les deux ans, a programmé la mise en service de 5 200 mégawatts avant 2012. Toutefois, la question se pose de savoir si ces efforts d'investissements en France et en Europe sont suffisants.

Pour toutes ces raisons, la commission des affaires sociales a conclu au rejet de la demande de création d'une commission d'enquête et a en revanche à l'unanimité décidé, sur proposition de son président, M. Jean-Paul Emorine, et de votre rapporteur, de constituer une mission d'information sur la question de la sécurité d'approvisionnement.

Nous avons indiqué qu'une telle mission devrait associer à ses travaux, de manière pluraliste, tous les groupes politiques et que toutes les commissions intéressées pourraient y participer.

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