Intervention de Évelyne Didier

Réunion du 16 juin 2005 à 10h00
Catastrophes naturelles et mouvements de terrain — Adoption des conclusions modifiées du rapport d'une commission

Photo de Évelyne DidierÉvelyne Didier :

Développer le fret ferroviaire et le transport combiné, véritables alternatives au tout routier, apparaît pourtant comme la seule voie raisonnable. Ce n'est pas celle que le Gouvernement a choisie.

Je vous pose une question : devrons-nous attendre que les catastrophes naturelles se multiplient avant d'en rechercher les causes profondes et de prendre vraiment les mesures qui s'imposent ?

Dans ce sens, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen avaient, en 2000, déposé une proposition de loi tendant à conférer à la lutte contre l'effet de serre et à la prévention des risques liés au réchauffement climatique la qualité de priorité nationale. Ils n'ont malheureusement pas été entendus.

Revenons plus précisément sur la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle et sur le régime d'assurance de ces risques, notamment en ce qui concerne les mouvements de terrains consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols, sujets qui nous occupent aujourd'hui.

La loi du 13 juillet 1982 a retenu deux critères pour la reconnaissance de cet état : l'existence de dommages matériels dus à l'intensité anormale d'un agent naturel et l'impossibilité de prévenir les dommages par les mesures habituelles.

Concernant particulièrement le phénomène de retrait et de gonflement des argiles, la vague de sécheresse des années 1989 à 1991 a rendu nécessaire son intégration dans le champ d'application de la loi de 1982.

L'Etat, jugeant sans doute que ces dispositifs coûteraient trop cher à l'avenir, a, dans une circulaire du 28 avril 2000, précisé de manière limitative les critères de la loi de 1982 en introduisant la notion de déficit hydrique des sols.

Conséquence immédiate : en 2003, les critères en vigueur ne permettent pas la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle des 6 800 communes sinistrées, malgré une sécheresse exceptionnelle et malgré les dégâts constatés !

L'incompréhension est alors très forte dans de nombreux départements, notamment en Lorraine et en Ile-de-France où s'est développé un sentiment d'injustice lorsque les premières listes ont été publiées.

Aussitôt la question des critères utilisés est posée. A la suite de nombreuses interventions, protestations, questions écrites et autres, le Gouvernement est revenu sur ce sujet.

Il s'agit en fait, ici, d'une rupture contrevenant au principe constitutionnel de solidarité et d'égalité des citoyens devant les charges résultant des calamités nationales.

L'Etat doit demeurer le garant de l'intérêt général, de l'intérêt des populations et il ne doit pas être le garant des intérêts sectoriels des entreprises privées.

A ce sujet, nous ne pouvons accepter la dernière phrase de l'article 3, qui fait peser la charge de la preuve sur les sinistrés, en stipulant que la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle ne crée pas de présomption de droit à indemnisation. On se demande pourquoi !

D'ailleurs, lorsque j'entends parler d'effet d'aubaine, j'ai toujours l'impression que l'on cherche à transformer les victimes en coupables, à l'instar de ce que l'on fait actuellement à propos du chômage !

Cette précision dans la loi rendra nécessairement plus difficile la démarche individuelle des administrés envers leur compagnie d'assurances en vue d'être indemnisés, même si l'état de catastrophe naturelle est reconnu et s'ils en sont les principales victimes. Parler d'effet d'aubaine dans ces circonstances me semble totalement excessif. C'est en tout cas essayer de transformer les victimes en coupables !

A l'issue de la canicule de l'été 2003, une réflexion approfondie aurait dû être engagée ainsi que le proposait l'Association des maires d'Ile-de-France.

En effet, ils avaient encouragé le Gouvernement à nommer un expert pour qu'une enquête sérieuse soit menée afin de définir de nouveaux critères plus adaptés pour caractériser la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle.

Il aurait également été souhaitable d'accéder à la proposition des sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen qui demandaient la création d'une commission d'enquête sur les conséquences de la sécheresse et la gestion de ses effets.

Le Gouvernement et sa majorité parlementaire n'ont pas souhaité mener ce travail de fond.

Il nous faudra pourtant bien répondre concrètement aux questions qui nous sont posées sur les procédures permettant la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle et sur les critères retenus par la commission interministérielle.

Le Fonds de prévention des risques naturels majeurs, créé par la loi du 2 février 1995, ne permettra pas de régler ces questions pour la simple et bonne raison que sa mission est uniquement préventive.

Lui donner pour mission de réaliser des études en aval des catastrophes naturelles est une bonne chose. Lui permettre de faire de la prévention l'est également. Pour autant, cela n'est pas suffisant.

Nous proposerons des amendements qui visent à préciser les dispositions de la loi de 1982 et à définir plus clairement les critères caractérisant l'état de catastrophe naturelle, notamment celui de la composition géologique des sous-sols.

Si ce projet de loi n'était pas amendé, il ne permettrait sans doute pas d'aller au fond du problème ni de satisfaire les besoins des collectivités et des sinistrés.

Pour conclure, je précise que, dans tous les cas, ce texte ne réglera pas la situation de détresse des sinistrés, victimes de la sécheresse de 2003.

D'ailleurs, monsieur le ministre, je ne suis pas certaine en fin de compte que tout le monde soit satisfait. Vous nous avez dit qu'un certain nombre de communes supplémentaires pourraient être éligibles. Quoi qu'il en soit, nous n'arriverons pas à satisfaire les 6 800 communes !

Je fais appel une nouvelle fois au Gouvernement afin que, dans un esprit de responsabilité, il permette la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle à l'ensemble des collectivités qui en ont fait la demande.

En effet, je suis persuadée que ces collectivités n'ont pas déposé des dossiers uniquement pour le plaisir. Elles ont mieux à faire ! Les dégâts sont réels et il faudra bien que nous prenions en compte toutes les situations.

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