C’est sur ce dernier point que je voudrais attirer votre attention : les alinéas 53 et 59 de la section II disposent que des conventions peuvent prévoir que des parties de service sont mises à disposition de la métropole par le département ou la région en cas de transfert de compétences. Les alinéas 75 et 79 pressent le pas : « dans un délai de six mois ». Enfin, les alinéas 77 et 80 donnent le ton : « À défaut de convention passée dans le délai précité », le préfet propose un projet de convention et, si celui-ci n’est pas signé par les élus dans un délai d’un mois, le ministre des collectivités territoriales établit la convention par arrêté !
Ce qui est facile à écrire sur le papier peut être beaucoup plus complexe et douloureux à accomplir dans la réalité.
Prenons l’exemple de la compétence construction et entretien des lycées ou des collèges. Dans l’équipe d’un service ingénierie, chacun joue un rôle : le service achats, le service pilotage des EMOP, ou équipes mobiles d’ouvriers professionnels, les ressources techniques sur l’énergie des lycées, la Haute qualité environnementale ou HQE, le contentieux, le suivi des plans – 3 millions de mètres carrés dans le Nord-Pas-de-Calais –, la gestion des logements de fonction – plus de 1 000 dans le Nord-Pas-de-Calais –, la veille patrimoniale, la sécurité et la conduite de travaux.
En dehors des agents TOS, les agents techniciens, ouvriers, et de service, et éventuellement d’une antenne décentralisée avec conduite de travaux et sécurité, quel personnel allez-vous donc transférer à la métropole ? Dans cet écosystème fonctionnel de ressources humaines, à quoi correspond la partie de service correspondant aux missions prises par la métropole ?
Il n’y a pas, dans les services d’une région, un « monsieur lycée de la ville X » qui ferait tout à la fois les appels d’offres, la sécurité, la construction, le suivi et la gestion du bâti ! Ce sont des fonctions transversales qui s’exercent dans tous les lycées, et les recréer induira une dépense supplémentaire.
Alors, vous avez envisagé une telle possibilité et, pour l’empêcher, vous écrivez à l’alinéa 88 : « Aucun emploi territorial permanent […] ne peut être créé dans les trois ans suivant les transferts de services ou parties de services […] en remplacement des agents transférés à la métropole […] ». Ne restera donc plus que la solution du démantèlement, de l’appauvrissement de l’équipe et du changement de fonction des hommes.
Dans ces conditions, monsieur le secrétaire d’État, je vous alerte solennellement sur les tensions que vous allez inévitablement engendrer au sein du personnel des collectivités par la déstabilisation que provoqueront ces mouvements s’ils ne sont pas élaborés avec les salariés concernés, qui sont les mieux à même de mettre en évidence ce qui est logique et faisable et ce qui ne l’est pas, ainsi que le montre l’exemple que je viens de vous décrire.
À cet égard, l’avis des comités techniques compétents sera nécessaire, mais non suffisant.
La souffrance au travail, c’est avant tout l’empêchement de bien faire son travail, notamment par le parachutage de règles identifiées par le salarié comme non opérationnelles et nuisibles à la mission qu’il remplit. Gardez-vous donc, en jouant au bonneteau avec les compétences, de malmener ceux qui les rendent possibles.