Comment oublier la conférence de Paris ? Certes, elle n’a pas abouti à rétablir la paix entre la Palestine et Israël. Est-ce pour autant la faute de la France ?
Il est faux de prétendre que la France a été absente. La conférence de Paris a mobilisé des efforts, suscité des gestes politiques qui étaient indispensables sur cette douloureuse question.
Certes, au Liban, nous n’avons pas gagné. Est-ce pour autant la faute de la France ? Je veux pour ma part rendre hommage au ministre qui s’est beaucoup mobilisé, qui s’est efforcé de cultiver les chances de la paix contre des forces multiples, internes et externes, qui, hélas ! débouchent aujourd’hui sur une situation dramatique.
On ne peut pas oublier que les conclusions de la rencontre interlibanaise qui s’est tenue au château de la Celle-Saint-Cloud ont été reprises par la Ligue arabe. C’est en s’appuyant sur ces conclusions que l’on pourra demain, je l’espère, apporter des chances supplémentaires à la paix.
Bien entendu, nous aspirons tous à des résultats tangibles. Néanmoins, mes chers collègues, qui peut prétendre que la France pouvait à elle seule, et en un an, changer radicalement le cours du monde tout en conservant la possibilité de mener sa politique à la fois en son propre nom et par le canal européen ?
J’estime pour ma part très injuste de présenter comme un geste consenti aux États-Unis ou à l’OTAN un changement de stratégie qui vise à nous donner des chances supplémentaires de réussir l’Europe de la défense. J’ai tenu à exprimer ce sentiment, parce que je crois que notre pays a besoin de mesurer la chance qu’il a de pouvoir porter des messages dans le monde.
Pour autant, quand je ne suis pas d’accord, j’ose le dire. Or un point m’inquiète, et je ne parle là qu’à titre personnel : je suis inquiet de constater que, dans le cadre du projet de réforme institutionnelle, certains de nos collègues et amis députés envisagent certes de supprimer les référendums portant sur les élargissements de l’Union, mais d’introduire pour l’adhésion de la Turquie une clause spéciale visant à maintenir cette voie.
Mes chers collègues, chacun sait bien que le problème de l’adhésion de la Turquie n’a aucune chance d’être résolu avant dix ou quinze ans. Nous sommes engagés dans des négociations, il nous faut respecter notre engagement. Prendre une mesure particulière en maintenant le référendum dans ce seul cas serait une très grave erreur à l’égard de ce peuple qui a droit à notre respect, qui fait des progrès, qui sort d’un système pour aller vers un autre, et qui peut être aussi un facteur d’équilibre : les pays musulmans laïques, excusez-moi, ne sont pas si nombreux sur la planète ! J’ose l’affirmer ici : nous aurions sans doute mieux à faire que de risquer de leur donner à penser qu’ils sont mis à part et que, pour des raisons multiples, nous oublions leurs propres réalités et la chance que – à mes yeux – ils représentent pour l’équilibre du monde.
Vous constatez donc, mes chers collègues, que je ne suis pas idolâtre de la politique qui a été menée. Je voudrais cependant que, de temps en temps, on en rappelle les atouts exceptionnels. Pour ma part, je considère que la grande action qu’a développée le Président de la République depuis un an, c’est d’avoir sauvé l’Europe.