Cet amendement, déposé sur l’initiative de Robert Tropeano, vise à réduire le droit de circulation sur les vins, à défaut de pouvoir réduire à 5, 5 % la TVA qui leur est applicable.
Au-delà de son objet, sans doute irréaliste, voire surréaliste, il est surtout l’occasion d’appeler votre attention, monsieur le ministre, sur les graves difficultés que connaît la viticulture, en particulier celle des régions méridionales.
En dépit des immenses efforts qu’elles ont engagés depuis quelques années en faveur de la qualité, désormais reconnue, de nombreuses exploitations sont en perdition avec des revenus qui ont chuté au cours des deux dernières années de 40 % à 60 %, voire plus encore dans l’Hérault. Les causes sont connues – baisse particulièrement sévère des exportations au bénéfice des autres vins européens, notamment italiens et espagnols, et de ceux du « Nouveau Monde », effondrement des prix, hausse des coûts de production – mais les solutions, malheureusement, le sont un peu moins.
Certes, les vignerons ont pu bénéficier de certaines des mesures du plan de soutien à l’agriculture, mais l’enveloppe allouée est loin de pouvoir satisfaire les demandes.
Sont-ils alors condamnés à l’arrachage ? En vingt ans, le Languedoc-Roussillon a déjà perdu plus de la moitié de ses vignes, dont certaines étaient ancrées dans ce terroir depuis le Moyen Âge. Cette région représente 76 % de la surface autorisée à l’arrachage lors des deux dernières campagnes, avec plus de 20 000 hectares arrachés. Quel gâchis !
Depuis des années, les viticulteurs se sont appliqués à améliorer leurs cépages, à changer leurs cuves, pour atteindre une technicité hors pair. Aujourd’hui, le Languedoc-Roussillon a les moyens de ses ambitions. La diversité et la complémentarité de ses vins, son image d’authenticité et la qualité de ses produits comptent parmi ses meilleurs atouts.
Ce système de primes à l’arrachage n’est-il pas absurde, monsieur le ministre ? On ferait mieux de financer les vignerons pour les maintenir sur leurs terres, pour les aider à moderniser. La viticulture a un rôle économique, touristique, paysager et écologique. Bientôt, il n’y aura plus que de la garrigue, et les incendies pourront courir de Montpellier à la mer !
Pourquoi avoir privilégié l’arrachage avec cessation d’activité et non l’arrachage ciblé des vignes les moins productives ? Bref, au moment où se négocie la réforme de l’Organisation commune de marché, cette question est stratégique, d’autant que la consommation mondiale semble remonter.
L’autre sujet qui inquiète la filière viticole française tient à la libéralisation des droits de plantation. Alors que, voilà quelques années, a été révélé le chiffre de 400 000 hectares de plantations illicites dans plusieurs pays du sud de l’Europe, comment admettre l’arrachage, qui est un crève-cœur pour beaucoup de viticulteurs français ? Va-t-on laisser faire n’importe quoi n’importe où ?
Monsieur le ministre, je vous rejoins sur la nécessité de renforcer la promotion de nos vins sur les marchés extérieurs. Il faut aider et encourager les acteurs de la filière à se regrouper et à investir, afin de mieux équilibrer l’offre à la demande et d’acquérir un poids et une visibilité réelle à l’exportation. De ce point de vue, les dispositions du projet de loi vont dans le bon sens.
Enfin, et je conclurai sur ce point, il doit certainement être possible, plutôt que de diaboliser le vin, fleuron de l’image et de la gastronomie française, de le valoriser tout en respectant les exigences de santé publique.
Le matin, alors qu’on est à jeun, est le meilleur moment pour parler sereinement de la qualité des vins français.