La protection du foncier agricole est devenue aujourd’hui un enjeu majeur. Vous l’avez rappelé à plusieurs reprises, monsieur le ministre, pas moins de deux cents hectares de terres agricoles disparaissent chaque jour en France.
L’urbanisation galopante à la périphérie des villes est d’ailleurs en grande partie responsable. Le prix des terres agricoles connaît aussi une étonnante envolée dans un contexte agricole plutôt morose. Dans certaines régions, les urbains achètent plus de terres agricoles que les agriculteurs, et à des prix près de deux fois supérieurs. Leurs motivations sont diverses : volonté de disposer d’espace, retour à la nature, avec notamment le développement de l’élevage de chevaux, ou encore anticipation spéculative.
Ces phénomènes s’expliquent par plusieurs raisons, et d’abord par une absence de stratégie globale d’aménagement de l’espace. Certes, il y a bien les SCOT et les plans départementaux d’aménagement rural. Cependant, il faut bien l’admettre, chaque commune a tendance à faire comme il lui plaît, chacune dans son coin.
Anticipons ensemble ! Il est possible de répondre à l’ensemble des demandes, tout en consommant moins de foncier, à condition de positionner intelligemment les besoins sur le terrain ; à condition, aussi, de ne pas encourager la construction dans des secteurs où elle n’est pas utile, comme l’ont fait malheureusement les dispositifs fiscaux de type Scellier et Robien.
Par ailleurs, comment ne pas comprendre l’envie des agriculteurs eux-mêmes de vendre leurs terres à bon prix ou de les voir converties en zones à bâtir ? Quand on voit leurs revenus et leurs retraites de misère, on imagine que c’est plus souvent par nécessité que par gaieté de cœur qu’ils se séparent de leur patrimoine !
Le résultat est qu’aujourd’hui le foncier agricole, de par sa rareté et son prix, devient inaccessible pour des jeunes qui veulent s’installer. Il y a donc urgence, monsieur le ministre !
Face à cette situation, que proposez-vous ? D’abord, une taxe sur la cession des terrains rendus constructibles, ensuite, la création d’un observatoire de la consommation des espaces agricoles ainsi que l’instauration de commissions départementales.
Nous ne sommes pas convaincus que ces mesures répondent au problème grave de la surconsommation et de l’inflation du foncier agricole. La taxe n’est, à notre avis, pas assez dissuasive, mais nous en reparlerons à l’article 13.
Quant aux nouvelles structures, nous ne voyons pas très bien leur utilité.
L’observatoire se contentera-t-il d’élaborer des outils pour mesurer le changement de destination des terres agricoles ? Les commissions départementales, quant à elles, seront consultées sur certaines procédures ou autorisations d’urbanisme ayant pour conséquence une réduction de ces espaces ; mais leurs avis auront-ils vraiment de la valeur ? Pourquoi ajouter de nouvelles instances alors même qu’il existe des commissions départementales d’orientation de l’agriculture qui auraient pu jouer ce rôle ? Quelles sont les actions concrètes qu’elles pourront mettre en œuvre pour atteindre l’objectif national, pour le moins ambitieux, que vous avez fixé, de réduire de moitié d’ici à 2020 le rythme de raréfaction artificielle des terres agricoles ?
Monsieur le ministre, nous aimerions être convaincus de l’intérêt de ces mesures. Peut-être allez-vous faire preuve de persuasion dans votre réponse, mais, dans cette attente, nous proposons de supprimer les 2° et 3° de cet article 12.
J’ajouterai, en conclusion, que la création de deux observatoires dans un même texte est assez paradoxale dans le contexte de la révision générale des politiques publiques.