Faut-il taxer l'effet d'aubaine lié au classement d'un terrain nu en terrain constructible ? Ce n'est pas la première fois que nous débattons de cette question. Je me souviens encore des échanges vifs ayant animé notre assemblée lors de l'examen du texte qui est devenu la loi portant engagement national pour le logement.
À l'époque, nous étions nombreux à estimer qu'un retour aux communes d'une partie des importantes plus-values réalisées par les propriétaires de terrains rendus constructibles était pleinement justifié par les investissements qui leur incombent en termes d'équipements publics. D’ailleurs, nous avions adopté, à l’issue de nos débats, une taxe facultative et, il faut bien le dire, a minima.
Posée dans le contexte de l'agriculture, cette question a un caractère plus sensible. On le voit bien, la vente de terrains nus, à bâtir ou non d'ailleurs, est devenue pour certains agriculteurs une variable d'ajustement, pour ne pas dire une nécessité, compte tenu de la faiblesse de leurs revenus et de leurs retraites. Cela a été dit à maintes reprises. Néanmoins, nous continuons de penser qu'il s’agit d’un enrichissement sans cause et qu’une taxe n'a rien d'anormal. En tout cas, elle permettra de décourager la spéculation sur les terres agricoles par des promoteurs ou des personnes étrangères au monde agricole, et de retarder la cession des terres par les agriculteurs eux-mêmes lorsqu'elles sont rendues constructibles.
Monsieur le ministre, votre amendement réintroduit la taxe prévue à l'article 13 du projet de loi initial et supprimée par la commission de l’économie. Nous aurions préféré, au lieu de la création d’une nouvelle taxe au profit de l'État, la généralisation de la taxe forfaitaire, dont le mécanisme est analogue, qui peut être instituée par les communes au titre de l'article 1529 du code général des impôts. C'était d'ailleurs l'objet de notre amendement n° 561 rectifié ter.
Cependant, nous avions aussi proposé de réintroduire la taxe au profit de l'État, en affectant son produit à un fonds de financement en faveur de l'installation. Vous nous avez suivis, et nous vous en remercions. Préserver le foncier agricole n'a évidemment de sens que si l’on maintient des agriculteurs. Vous avez vous-même tenu compte de ce souci, et nous vous en savons gré.
Toutefois, je tiens à le préciser, son niveau ne nous semble pas suffisant pour la rendre réellement dissuasive. L'Allemagne, qui a obtenu des résultats tangibles, a été beaucoup plus loin. Nous aurions en conséquence proposé de porter son taux à 20 %.
Néanmoins, monsieur le ministre, il s’agit là d’une avancée notable et, bien entendu, nous voterons cet amendement sans arrière-pensées.