Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous voici aujourd’hui parvenus à l’épilogue de la réforme des institutions de la Ve République. Il y a plusieurs mois, une telle perspective était séduisante. Les conclusions du comité Balladur pouvaient présager un débat serein, constructif, marqué par un réel souci de laisser plus de place au Parlement, et, ce faisant, à l’opposition.
La prise en compte de la population des collectivités territoriales dans l’élection des sénateurs, le non-cumul des fonctions de membre du Gouvernement et d’un mandat d’élu local, la publicité des débats des commissions, autant de propositions qui auraient pu concourir à l’objectif que nous nous étions fixé : donner plus de pouvoirs au Parlement, plus de droits aux citoyens et encadrer le pouvoir exécutif.
Par ailleurs, plusieurs propositions, comme le droit de vote des résidents étrangers, absente des conclusions du comité Balladur, méritaient également une discussion à la hauteur d’une révision constitutionnelle annoncée comme la plus importante depuis 1958.
Depuis, nous avons traversé une série de péripéties qui ont transformé cette révision en non-événement. Dans un esprit totalement contraire à l’objet de cette réforme, nous avons dû subir l’irrédentisme de la majorité sénatoriale, incapable de démontrer sur ce texte une once d’ouverture. Mes chers collègues, permettez-moi de vous le dire, le Sénat fut une caricature de lui-même !
Tous les citoyens que je rencontre depuis le début de l’examen de ce projet de loi sont déçus : déçus de l’inertie dont nous avons fait preuve, déçus du manque d’audace des parlementaires, notamment du Sénat, égal à lui-même, comme ils disent. Chambre conservatrice devant l’Éternel, la Haute Assemblée a marqué de son immobilisme la réforme engagée.
En lieu et place d’un débat serein, la majorité a réduit cette révision à une mascarade politique. Comment accepter que, dans un débat où doivent s’exprimer toutes les oppositions, où toutes les audaces peuvent trouver leur place, vous n’ayez eu de cesse de réduire l’effet utile de cette réforme en la transformant en exercice cosmétique ?
Dans cette réforme, tout ce qui faisait sens est aujourd’hui absent. Toutes les propositions que nous avons présentées ont été balayées d’un revers de main, comme si l’opposition devait se contenter d’observer la majorité négocier entre ses membres les points qui méritaient de survivre.
Comble de cette méthode, votre majorité se réunit avant la deuxième lecture, afin que l’Assemblée nationale et le Sénat se mettent d’accord sur un texte commun. Vous inventez une sorte de « CMP de la majorité parlementaire », débarrassée de l’opposition, vidant ainsi le débat de toute son utilité. Mes chers collègues, il me semblait que la notion de démocratie parlementaire signifiait que la loi était débattue et votée dans l’hémicycle du Parlement et non pas dans les bureaux de I’UMP ou de Matignon.