Cet article 9 est important, car c’est de sa rédaction que dépend le positionnement du Sénat face à cette révision constitutionnelle.
En première lecture, la majorité sénatoriale a multiplié les gestes de mauvaise humeur à l’égard du Gouvernement en adoptant – on peut même dire en acceptant ! – quatre-vingt-dix amendements. Un point était déterminant : le mode de scrutin sénatorial.
Dans ce contexte, la décision prise par la majorité de la commission des lois d’accepter une adoption conforme du projet de loi constitutionnelle pourrait paraître surprenante si l’on ne connaissait pas l’objectif supérieur : conserver à droite le Sénat, écarter tout risque de basculement à gauche, même si des régions, des départements et nombre de communes sont majoritairement, voire très majoritairement, acquis à l’opposition.
Est-il acceptable qu’une chambre du Parlement disposant de pouvoirs étendus, quasiment égaux à ceux que détient la chambre élue au suffrage universel direct, et même complètement égaux en matière constitutionnelle ou organique, soit désignée par un collège de moins de 150 000 grands électeurs ?
La désignation de sénateurs à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin par respectivement dix et dix-neuf grands électeurs souligne de manière caricaturale ce scandale démocratique. Puisque tout se justifie au Sénat, vous avez été capables d’expliquer qu’un parlementaire pouvait être élu par dix ou dix-neuf grands électeurs !
Le Gouvernement, dans son projet initial, s’était déjà éloigné de la proposition du comité Balladur en inscrivant que le Sénat assure la représentation des collectivités territoriales « en tenant compte de leur population », et non plus « en fonction de la population ».
Cette première manœuvre de recul a abouti à la capitulation finale face à une majorité sénatoriale qui ne veut pas renoncer à son privilège exorbitant du droit commun démocratique.
Autrement dit, cet article 9 est la clé du succès ou de l’insuccès de la révision, ou tout du moins du vote conforme.
Cela doit être su, cela doit être dit : M. Sarkozy renforce les droits du Parlement en maintenant le Sénat dans un autre temps, seule chambre d’Europe à être élue par aussi peu de monde tout en disposant d’autant de pouvoirs.