Intervention de Michel Mercier

Réunion du 7 juillet 2005 à 9h30
Mesures d'urgence pour l'emploi — Discussion d'un projet de loi d'habilitation déclaré d'urgence

Photo de Michel MercierMichel Mercier :

Il faut éviter de vouloir trop démontrer dans ce domaine.

Dans notre système institutionnel où le Parlement est hyper contraint et enfermé dans des limites très strictes, il paraît peu compatible avec les exigences de la démocratie que le pouvoir législatif se dessaisisse au profit du pouvoir exécutif.

Toutefois, selon moi, il y a deux cas dans lesquels le recours à la procédure des ordonnances peut paraître légitime, même s'il est toujours légal.

Il peut en être ainsi, tout d'abord, pour l'examen d'un texte très technique qui ne soulève pas de question politique importante ; en matière de réforme du droit des sûretés, par exemple, on peut comprendre que la technicité du texte puisse justifier un recours à une ordonnance, mais à condition qu'une procédure de ratification permette ensuite au Parlement d'ajuster éventuellement les choses.

Il peut en être également ainsi quand, lors d'une campagne électorale présidentielle ou parlementaire, les Français ont été avertis d'un recours aux ordonnances pour mettre en oeuvre des engagements électoraux qu'ils ont clairement validés par leur vote.

Nous ne sommes ici ni dans le premier ni dans le second cas. Les réformes que vous nous proposez sont importantes : elles visent en effet, de votre propre aveu, au maintien de notre modèle social. Elles sont donc d'envergure et touchent aux modalités mêmes de notre « vivre ensemble ». Elles exigent un consensus national et une appropriation par chacun d'entre nous. C'est le rôle fondamental du Parlement que de participer à l'élaboration de ce consensus national par le dialogue entre la majorité et l'opposition et par le débat créé autour de ce dialogue. S'en priver, c'est, dans une certaine mesure, renoncer à l'efficacité des mesures proposées.

Voilà pourquoi, monsieur le Premier ministre, nous sommes opposés à ce que le Parlement abandonne au pouvoir exécutif sa compétence législative sur les propositions que vous nous soumettez.

Néanmoins, nous savons bien que l'Assemblée nationale vous suivra sur ce dessaisissement du Parlement, et nous avons choisi d'aborder au fond les questions posées par la loi d'habilitation et d'essayer - avec le concours de tous les membres de la Haute Assemblée, j'espère - d'encadrer au maximum la latitude qui sera certainement accordée au pouvoir exécutif d'intervenir par ordonnances dans la compétence législative.

A plusieurs reprises, monsieur le Premier ministre, vous avez déclaré que votre ambition était de maintenir, tout en le rénovant, notre modèle social. Nous adhérons pleinement à cette ambition ; mais ce n'est pas notre modèle social qui n'est plus d'actualité ; ce sont ses modalités de mise en oeuvre. Il faut replacer les curseurs économiques et sociaux pour que notre « vivre ensemble », fondé sur une adhésion solidaire à un progrès poursuivi en commun, reste une réalité vivante.

Le temps nous paraît venu de revoir à la fois le rôle des vecteurs de notre société et le mode de financement ; votre projet nous invite à apporter nos réponses à ces questions.

Le rôle de l'entreprise et celui de la puissance publique doivent être redéfinis pour faire face à la fois aux défis de la mondialisation et à l'objectif de maintien de notre pacte social.

A l'entreprise le soin de créer des richesses, de l'emploi, en s'appuyant sur la recherche et l'innovation ; à la nation le soin d'assurer les solidarités nécessaires.

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