La rente mutualiste est une question que nous abordons tous les ans, avec la volonté répétée d’atteindre sans délai les 130 points d’indice. Chaque année, les mêmes arguments nous sont servis. C’est pourquoi nous proposons un amendement tendant à majorer de 5, 5 millions d’euros la ligne budgétaire permettant la progression de trois points du plafond majorable.
La situation financière des veuves d’anciens combattants constitue un autre point important. Elle mérite une très grande attention de la part du Parlement. Un grand nombre de ces veuves disposent de ressources insuffisantes pour vivre dignement. C’est pourquoi nous avons toujours soutenu la création de l’allocation différentielle de solidarité. Le Gouvernement propose de fixer à 800 euros le montant de cette allocation à compter du 1er janvier 2010. Les conditions de son attribution sont nombreuses et cumulatives, sans aucun doute très sélectives, afin de limiter le coût budgétaire pour l’État. Si vous me permettez cette expression, qui traduit parfaitement mon sentiment, je dirai que nous n’avons pas le droit de « mégoter ». Les veuves d’anciens combattants doivent être mieux considérées. Aucune aide à caractère social les concernant ne devrait être inférieure au seuil de pauvreté, fixé par l’Union européenne à 817 euros. Par dignité, et dans un effort de solidarité, nous proposons de retenir un montant de 850 euros. Parce qu’il s’agit d’une allocation différentielle, la charge réelle de cette mesure restera parfaitement supportable pour l’État.
Dans le même esprit, nous sommes très préoccupés par la situation des anciens combattants disposant de faibles revenus mensuels. Nous pensons qu’il est nécessaire d’enclencher, sans délai, la création d’une allocation différentielle dont les modalités d’attribution seront définies en partenariat avec le monde combattant. Un amendement a été déposé en ce sens.
Je ne voudrais pas oublier non plus de parler de la situation des veuves des plus grands invalides de guerre. Ces femmes ont renoncé à une activité professionnelle pour s’occuper de leur conjoint gravement blessé et se trouvent, au décès de celui-ci, dans une situation financière difficile. Les pensions des plus grands invalides sont parfois très élevées, pouvant dépasser les 8 000 points d’indice. La chute des revenus est alors brutale au lendemain du décès, la pension de veuve au taux normal et forfaitaire étant fixée à 515 points d’indice. Un amendement adopté par l’Assemblée nationale a permis d’augmenter ce taux de cinquante points. Croyez-vous que ce soit suffisant, monsieur le secrétaire d’État, au regard du dévouement dont ont fait preuve ces femmes pendant de nombreuses années ? Ne serait-il pas judicieux de créer une commission chargée d’étudier le problème ?
Les moyens d’action de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre, ainsi que la pérennité de ses services sont, pour le monde combattant, des sujets essentiels. Pourtant, en 2010, l’ONAC devra puiser dans ses ressources pour s’acquitter de ses missions. Ce constat ne constitue pas un signe encourageant. Nous regardons les réformes programmées avec une certaine méfiance. Les personnels diminuent, et les missions reçues de la Direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale, la DSPRS, ne s’accompagnent pas des moyens nécessaires. Nous assistons à un échenillage des structures administratives de proximité et de leur efficacité.
La création de la Fondation « Mémoire et solidarité pour le monde combattant », qui aura en charge la gestion des maisons de retraite et des établissements de reconversion professionnelle, devrait, selon vous, renforcer les missions de l’ONAC. Pour ma part, cette création me rappelle la proposition d’un de vos prédécesseurs qui, en 1996, avançait le projet d’une délégation aux anciens combattants, laquelle aurait, à terme, signé la disparition d’une autorité ministérielle en charge des intérêts du monde combattant.
C’est pourquoi nous serons très vigilants, au côté de nos anciens combattants, pour que l’ONAC vive et remplisse ses missions.
Avec mes collègues Jean-Pierre Masseret et Jean-Marc Todeschini, je suis signataire d’une proposition de loi tendant à instituer le 27 mai comme journée nationale de la Résistance, journée non fériée, non chômée, mais journée de réflexion et d’inspiration. Comme chacun sait, cette date fait référence à la première réunion du Conseil national de la résistance. Cette référence historique est importante au moment où s’engage un débat sur l’identité nationale. Le CNR a produit un programme d’actions qui a nourri le préambule de la Constitution de 1946, toujours respecté par le Conseil constitutionnel dans ses avis et ses décisions. L’esprit du CNR s’impose aujourd’hui pour que la France et l’Union européenne soient des acteurs respectés et respectables dans l’organisation du monde du XXIè siècle. Cet esprit conquérant doit irriguer nos politiques pour créer du collectif et réussir le « vivre-ensemble ».
Comme élue du département de la Moselle, je porte des sujets spécifiques relatifs à l’histoire de la Seconde Guerre mondiale, notamment ceux qui sont liés à l’annexion de fait, par les nazis, de l’Alsace-Moselle. Vous connaissez l’histoire des « Malgré-Nous », ces jeunes incorporés de force dans les régiments nazis et envoyés sur le front de l’Est. Certains ont été faits prisonniers par l’armée soviétique et détenus dans le fameux camp de Tambow. D’autres l’ont été dans des camps situés à l’ouest de la frontière germano-soviétique de 1941, matérialisée par le fleuve Bug et appelée « ligne Curzon ».
Ces camps étaient connus pour les conditions inhumaines qui y régnaient. Les prisonniers du camp de Tambov ont bénéficié d’un statut après la guerre, contrairement aux autres, qu’habite un sentiment de discrimination.
Quelle est votre position sur cette question, monsieur le secrétaire d'État ? Ne croyez-vous pas qu’il soit possible et nécessaire, soixante-cinq ans après les faits, d’établir un juste équilibre entre les mêmes souffrances endurées ?
Le devoir de mémoire est une nécessité républicaine, qui est entrée dans les faits depuis 1997. À ce titre, des initiatives sont régulièrement prises sur nos territoires. Je rappelais, voilà un instant, l’histoire tragique de l’Alsace-Moselle entre 1940 et 1944. Nous avons connu une annexion de fait avec l’installation de deux proconsuls allemands, l’un a Metz, l’autre à Strasbourg. Nos villes, nos rues, nos structures administratives ont été « nazifiées ». Nos jeunes garçons et nos jeunes filles ont été incorporés de force dans des organisations militaires ou paramilitaires.
Le mémorial de Schirmeck, dont la construction a été décidée en 2000, retrace l’histoire spécifique de l’Alsace-Moselle. Pour autant, cette histoire est très largement ignorée des autres régions françaises, car elle est quasi absente des livres scolaires. C’est pourquoi, monsieur le secrétaire d'État, je vous demande d’agir auprès de votre collègue de l’éducation nationale pour réparer cet oubli.
Enfin, je voudrais évoquer deux amendements déposés par mon groupe, l’un visant à financer l’extension de l’indemnisation des victimes d’actes de barbarie durant la Seconde Guerre mondiale, l’autre visant à abaisser à soixante–dix ans l’âge de jouissance de la demi-part fiscale réservée aux titulaires de la carte du combattant. Ces deux mesures nous paraissent nécessaires.
Cela étant, je suis au regret de vous annoncer, monsieur le secrétaire d'État, que nous ne voterons pas les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».