Pourtant, tout laisse à penser que les leçons de l’accablante impéritie de l’État n’ont pas été prises en compte : il nous suffira pour nous en convaincre d’entendre notre collègue Alain Fauconnier tracer le tableau affligeant de la réorganisation irréfléchie des services publics en Aveyron. D’ailleurs, chacun ici pourrait ajouter un exemple pris dans son département d’attitudes aussi absurdes qu’inopportunes.
Et pourtant, nos ruralités, à la fois espaces de nature, espaces nourriciers, espaces de « plein air », espaces à vivre, en somme, méritent un autre sort, une autre forme de respect.
Je n’ignore pas que certaines démarches ont été entreprises, notamment depuis la loi de 2005, avec la création des zones de revitalisation rurale et celle des pôles d’excellence rurale. Ces mesures ont toutes eu pour objectif de « dénouer l’opposition de destins entre un urbain et un rural qui seraient étrangers l’un à l’autre, dans leurs raisons d’être, leurs systèmes de valeurs, leurs mondes de représentations, y compris le monde politique ».
Mais je m’interroge encore, et je vous interroge, monsieur le secrétaire d’État, sur cette coupable inertie de l’État qui tarde à mettre en place par lui-même, ou à susciter en ce sens l’initiative des collectivités locales et des partenaires publics et privés, des lieux où la population pourrait trouver réunis tous les services publics ; ces lieux existent en quelques endroits et ont pour nom générique « maisons des services publics », « relais services publics », « points publics » ; ils sont des formes de guichet unique, mutualisant les informations de plusieurs services ainsi que les moyens de fonctionnement.
Cette formule ou des formules voisines se sont répandues depuis longtemps dans tous les pays d’Europe, au rythme d’ailleurs de la pénétration des techniques de l’information et de la communication sur leurs territoires. Elles ont concrètement répondu au besoin récurrent d’intermédiation de la population pour que soient ouvertes les bonnes portes d’accès aux services publics.
En France, cette forme de guichet unique serait le moyen le plus sûr de compenser la raréfaction des services publics sur nos territoires ruraux. Plutôt que de contraindre la population à se déplacer de plus en plus loin pour rencontrer les personnels chargés des services, il revient à ces personnels d’aller au-devant de la population.
Monsieur le secrétaire d’État, sans vouloir accabler davantage le Gouvernement, permettez-moi de m’interroger et de vous interroger sur la volonté avérée, concrète, de l’État d’entrer dans une réelle politique de maintien, voire de développement ou, à tout le moins, de réorganisation, des services publics en milieu rural ; sur les conséquences de la RGPP à l’échelon départemental et infradépartemental, deux niveaux d’élection pour le principe de proximité que le Gouvernement dit vouloir appliquer ; sur les avancées – mais peut-être s’agit-il de reculs ? – de la labellisation des « relais services publics » engagée dans le cadre de la modernisation de l’État.
Vous l’aurez compris, je veux encore croire à un État garant des principes d’égalité et de fraternité, inscrits dans la Constitution, à un État à la vigilance sans faille pour promouvoir une société généreuse et solidaire.