Séance en hémicycle du 26 mars 2009 à 9h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

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La séance est ouverte à neuf heures cinquante-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation des deux sénateurs appelés à siéger au sein du Haut Conseil de la famille.

La commission des affaires sociales a fait connaître qu’elle propose les candidatures de Mme Claire-Lise Campion et M. André Lardeux pour siéger au sein de cet organisme extraparlementaire.

Ces candidatures ont été affichées et seront ratifiées, conformément à l’article 9 du règlement, s’il n’y a pas d’opposition à l’expiration du délai d’une heure.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Mes chers collègues, nous abordons notre première journée mensuelle réservée aux groupes de l’opposition et aux groupes minoritaires en application des nouvelles dispositions de l’article 48 de la Constitution entrées en vigueur le 1er mars.

Quatre groupes bénéficient de cette journée : les deux groupes qui se sont déclarés d’opposition, les groupes socialiste et CRC-SPG, et les deux groupes qui se sont déclarés minoritaires, les groupes Union centriste et RDSE.

La conférence des présidents a réparti entre ces groupes quatre sujets par séance jusqu’au 30 juin.

Pour cette première journée, nous aurons deux questions orales avec débat, proposées par le groupe socialiste, et deux propositions de loi inscrites respectivement à la demande du groupe CRC-SPG et du groupe RDSE.

Pour la discussion de ces propositions de loi, dans l’esprit des nouvelles dispositions constitutionnelles, les présidents de groupe et de commission se sont accordés au sein de la conférence des présidents pour ne pas adopter de « conclusions négatives » qui couperaient court à la discussion des articles.

Ils ont ainsi souhaité garantir au mieux la priorité constitutionnelle reconnue aux groupes bénéficiaires de cette journée réservée.

Pour autant, afin de respecter les droits de l’ensemble des groupes, il conviendra qu’aucun sujet ne dépasse significativement le module de deux heures sur lequel la conférence des présidents s’est arrêtée.

L’expérience nous dira si la formule retenue est bien de nature à faire vivre harmonieusement le pluralisme dans notre assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L’ordre du jour appelle la discussion de la question orale avec débat n° 28 rectifié de M. Jean-Pierre Sueur à Mme la ministre de l’industrie, de l’économie et de l’emploi sur l’avenir des sous-traitants et équipementiers du secteur automobile.

Cette question est ainsi libellée.

« M. Jean-Pierre Sueur interroge Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi sur l’avenir de la filière automobile. Depuis octobre 2008, une succession de mesures destinées à la filière automobile ont été annoncées, que ce soit sur le plan national ou sur le plan européen.

« Le Gouvernement vient de présenter un nouveau plan de relance dont un volet serait consacré à la mise en œuvre du “pacte automobile” annoncé le 9 février dernier. Celui-ci se traduit notamment par l’octroi de 6, 5 milliards d’euros aux constructeurs automobiles afin de leur permettre de financer leurs projets stratégiques et par une subvention de 240 millions d’euros à OSEO afin de garantir un milliard d’euros de prêts supplémentaires aux sous-traitants automobiles.

« On peut se féliciter de ce que le Gouvernement prenne enfin la mesure de la gravité de la crise du secteur et du risque qui pèse sur l’ensemble de cette filière industrielle essentielle au développement économique de nos territoires.

« Mais, force est de s’interroger sur les contreparties en termes notamment de maintien des sites et de préservation de l’emploi, de conditions de travail et de salaires ainsi qu’en termes de formation professionnelle qui seront exigées des constructeurs bénéficiaires du plan de relance. La crise de la filière automobile est en effet à la croisée de questions essentielles, celle de la préservation des emplois, celle d’une meilleure indemnisation du chômage, et celle non moins fondamentale de la formation continue.

« Dans le prolongement de ces questions, il convient également de s’interroger sur la stratégie industrielle qui sous-tend toutes ces mesures du plan de relance. Car cette crise qui concerne la préservation des bassins industriels des territoires questionne également sur les mutations profondes qu’il convient d’initier et d’accompagner dès aujourd’hui. Les constructeurs mais surtout les équipementiers et sous-traitants, acteurs essentiels de la filière automobile, souffrent énormément avec des risques de délocalisations qui deviennent chaque jour plus réels.

« Pour toutes ces raisons, il l’interroge sur les contreparties sociales que le Gouvernement pourrait exiger des constructeurs automobiles bénéficiaires des aides. Il lui semble également nécessaire d’effectuer un premier bilan de toutes les aides et de leur destination afin de pouvoir mesurer leur traçabilité et leur efficacité en termes de maintien de l’emploi et de préservation de l’ensemble de la filière automobile.

« Enfin, il souhaite également obtenir des précisions sur la stratégie industrielle pour l’ensemble de la filière automobile française et européenne qui sous-tend les plans de relance. Et, au-delà, comment le Gouvernement envisage l’avenir du secteur automobile sur le moyen et le long terme ?

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, auteur de la question.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Monsieur le secrétaire d'État, avant d’aborder la question de l’avenir des sous-traitants et équipementiers automobiles, vous me permettrez d’évoquer la situation de l’entreprise 3M Santé, à Pithiviers.

Je tiens à dire ici, à la tribune du Sénat, à quel point l’exaspération des salariés de 3M Santé doit être comprise.

En 2008, cette entreprise mondiale a eu un résultat net de 3, 46 milliards de dollars, pour un chiffre d’affaires de 25, 269 milliards de dollars. Le bénéfice de chaque action est de 4, 89 dollars.

Ce sont 110 licenciements et 44 transferts qui ont été décidés. Les salariés concernés ont vingt ans, vingt-cinq ans, voire trente ans d’ancienneté et sont très attachés à leur entreprise.

Les habitants de Pithiviers, tout comme les salariés, sont des gens calmes. Ces mouvements de désespoir et d’exaspération sont une réponse à l’incompréhension que suscitent ces licenciements dans une entreprise qui est prospère, dont les produits se vendent, qui a acquis encore très récemment d’autres structures en France et qui dégage un bénéfice considérable.

Monsieur le secrétaire d'État, je remercie M. Philippe Gustin, directeur adjoint de votre cabinet, de m’avoir reçu avec Mme le maire de Pithiviers et des représentants des salariés. Il nous a indiqué que Mme Lagarde avait écrit à la direction de cette entreprise aux États-Unis. J’espère que les efforts de Mme la ministre seront suivis d’effet. Je vous remercie de m’en tenir informé.

Il revient aux pouvoirs publics d’aider à trouver des solutions pour empêcher la fermeture de cette entreprise. Ces solutions existent. De plus, cette entreprise a les moyens financiers de revenir sur sa décision. Si cette dernière était malheureusement maintenue, il faudrait refuser les conditions indigentes aujourd’hui proposées pour le plan social : les salariés se sentent méprisés et la population est solidaire.

Cette entreprise ne constitue qu’un cas parmi beaucoup d’autres.

J’en viens maintenant à la question orale avec débat portant sur l’avenir des sous-traitants et équipementiers du secteur automobile.

Voici une liste d’une partie des équipementiers et sous-traitants du secteur automobile du Loiret, département que je connais bien pour en être l’élu : Deutsch à Saint-Jean-de-la-Ruelle, Federal Mogul dans la même commune, Faurecia à Nogent-sur-Vernisson, Hutchinson à Châlette-sur-Loing, Proma France à Gien, Sifa à Orléans, TRW à Orléans-La Source, Trouillet à Neuville-aux-Bois, Steco à Outarville, Fog à Briare, Ibiden à Courtenay, ThyssenKrupp à Amilly, etc.

Toutes ces entreprises, qui vivent de l’automobile, sont frappées par le chômage partiel ou éprouvent des inquiétudes pour leur avenir ou ont décidé de procéder à des licenciements ou même sont, pour deux d’entre elles, l’objet de décisions de fermeture.

Ce qui vaut pour le Loiret, département français moyen, vaut pour un grand nombre d’autres départements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Effectivement, monsieur le président.

Mes collègues Martial Bourquin et Jean-Pierre Bel le confirmeront d’ailleurs au cours de leurs interventions.

Faurecia a annoncé la suppression de 1 215 emplois sur le site d’Auchel, de 219 emplois pour Plastic Omnium, de 620 emplois pour Tyco Electronics, de 300 emplois pour Key Plastics, de 300 emplois pour Molex, de 300 emplois pour Timken.

Je rappelle que, à Clairoix, Continental prévoit de licencier 1 100 salariés, alors même que les ouvriers avaient accepté de revenir à une durée de travail hebdomadaire de 40 heures, pour sauver l’emploi.

Hutchinson annonce la suppression de postes à Vierzon et à Châteaudun.

Je pourrais évoquer la situation de Mefro à La-Chapelle-Saint-Luc, celle de Bridgestone à Béthune, où 1 200 salariés ont été mis au chômage technique. Des mises au chômage technique ont également été décidées dans les usines Michelin de Clermont-Ferrand, Tours et Roanne.

Je ne poursuis pas plus avant cette énumération.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Le sinistre qui affecte le secteur automobile est considérable. C'est la raison pour laquelle nous avons décidé de vous interroger, monsieur le secrétaire d'État : il faut des mesures à la hauteur de la situation.

Je poserai trois questions.

Premièrement, nous estimons que les fonds publics, comme ceux qui ne sont pas publics, affectés à la crise que traversent les sous-traitants et équipementiers du secteur automobile ne sont pas à la hauteur du problème.

M. Jean-Paul Emorine s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

La France compte 300 équipementiers ; 75 % des pièces qui composent une voiture sont fabriquées par des sous-traitants.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Si le prêt consenti à PSA et Renault s’élève à 6, 5 milliards d'euros, les sommes qui sont affectées à l’ensemble des équipementiers atteignent seulement 600 millions d'euros.

Dans de très nombreux départements français, les équipementiers automobiles constituent un facteur considérable de l’économie. Car il faut aussi mesurer les effets induits à l’échelon local ! Il n’est pas un sénateur qui ne puisse citer des exemples tirés du département qu’il représente.

Le montant accordé aux sous-traitants et équipementiers est trop faible par rapport à celui qui a été octroyé aux entreprises automobiles ; il ne permettra pas d’apporter les réponses aux questions qui se posent aujourd'hui.

Monsieur le secrétaire d'État, face à l’ampleur de la crise et aux nouvelles que nous apprenons chaque jour par le journal ou la radio, alors même que l’action publique doit se fixer des priorités et le Gouvernement procéder à des choix financiers, ne pensez-vous pas que la première des priorités consiste aujourd'hui à dégager plus de moyens pour les équipementiers du secteur automobile ?

Deuxièmement, quelles contreparties en termes d’emplois exige l’État en échange des aides qu’il attribue et qui, à notre sens, doivent être beaucoup élevées ? Nous avons posé cette question pour Renault et PSA, nous la posons aujourd'hui pour les équipementiers. Par ailleurs, une entreprise, c’est bien sûr un président et des dirigeants, mais c’est aussi et d’abord des salariés !

Il faut associer les représentants des salariés et les partenaires sociaux aux plans qui sont mis en œuvre. C’est pourquoi nous ne pouvons accepter un certain nombre de procédures et de méthodes, qui provoquent la colère et l’exaspération.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Troisièmement, dans quelles conditions sera mis en œuvre le pacte automobile pour les sous-traitants et les équipementiers ?

Je citerai plusieurs déclarations pour appuyer mes propos. Je commencerai par l’une de vos interventions à l'Assemblée nationale, monsieur le secrétaire d'État. Je trouve que vous avez bien parlé !

Sourires

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation

Merci !

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

« La sous-traitance est en quelque sorte victime d’une double peine : le ralentissement du marché et le déstockage des constructeurs » [...] « Là où le marché [des constructeurs] est à environ moins 10 %, les sous-traitants sont plutôt autour de 30 % à 40 %. »

Cette analyse est juste. Il faut en tirer les conclusions par rapport aux deux premiers points que j’ai mentionnés et par rapport à la question des procédures.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Monsieur le secrétaire d'État, je crains que les procédures que vous avez mises en place pour le plan équipementier et sous-traitant ne soient pas adaptées, en dépit des efforts qui sont déployés.

Pour ce qui est des crédits d’OSEO, « la garantie ne pourra être accordée – je cite les termes du pacte automobile – qu’aux entreprises fondamentalement saines et qui en tout état de cause n’étaient pas en difficulté financière avant l’été 2008 [...] Cette condition vise à garantir l’efficacité de la dépense publique et à ne pas retarder les éventuelles restructurations nécessaires pour consolider la filière. » N’est-ce pas trop restrictif ?

M. Gilles Michel, directeur général du fonds stratégique d’investissement, affirme que le fonds interviendra auprès des entreprises « qui ont le meilleur potentiel technique – malheur à celles qui n’ont pas le meilleur potentiel technique ! –, le meilleur potentiel de croissance, d’exportation, de savoir-faire pour émerger à la sortie de la crise comme des entreprises de référence dans leur segment ». « L’objectif est d’accompagner les entreprises de la filière automobile dans la restructuration, la réorganisation inévitable. Nous choisirons celles qui ont la meilleure chance d’être viables et rentables. Dans le choix de ses investissements, le fonds aura la préoccupation de leur activité industrielle en France et de leur gouvernance. »

En d’autres termes, la priorité sera accordée aux entreprises qui bénéficient d’une lisibilité à cinq ans quant à leur développement. Or, les dirigeants et les salariés d’un grand nombre de ces entreprises qu’on interroge dans mon département ou ailleurs s’avouent bien incapables de prévoir la situation de leur entreprise dans trois, quatre ou cinq ans, quelquefois même dans un an ou dans six mois !

Si les critères établis sont trop sophistiqués ou trop sélectifs, les entreprises qui aujourd'hui vont mal ne pourront pas aller mieux !

Le directeur adjoint du fonds de modernisation des équipementiers automobiles, que j’ai rencontré la semaine dernière à la préfecture du Loiret, m’a affirmé que trente dossiers avaient été recueillis et étaient actuellement en cours d’examen. Peut-être me confirmerez-vous ce chiffre, monsieur le secrétaire d'État. Toujours est-il que trente dossiers, cela représente 0, 3 dossier par département !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Or tous les départements sont touchés par ce problème : si on examine seulement 0, 3 dossier par département, on est loin du compte !

Sur le site Le Monde du jeudi 26 mars, à la rubrique Économie, un article intitulé « Un fonds pour aider les sous-traitants » apporte l’information suivante : « Dossiers sélectionnés. Un seul dossier a été instruit. [...] Deux autres dossiers d’équipementiers seront étudiés prochainement. »

Il est urgent, monsieur le secrétaire d'État, premièrement, d’augmenter le fonds, deuxièmement, d’associer l’ensemble des partenaires, troisièmement, de mettre en place des critères beaucoup moins sélectifs, afin de passer le très difficile cap actuel.

Pour ce faire, je vous incite à mettre en œuvre un circuit très court, qui permettrait d’aider les entreprises à présenter leurs dossiers dans les préfectures de nos départements et de nos régions. Il faut également que l’examen des dossiers par votre ministère ait lieu très rapidement. Ainsi, sera engagée l’indispensable mobilisation des pouvoirs publics face aux difficultés et aux drames si préoccupants pour ce secteur et pour notre pays.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, mes propos vont dans le prolongement de l’intervention de M. Sueur et, si je puis dire, dans un prolongement géographique.

Comme notre collègue l’a rappelé, les difficultés des équipementiers automobiles sont visibles sur le terrain, et l’annonce de la baisse des ventes par les constructeurs automobiles de 13 % au mois de février ne fait que renforcer notre crainte.

Par ailleurs, vous savez, mes chers collègues, que le grand salon automobile de Londres, qui devait se tenir en 2010, vient d’être annulé. La conjoncture est donc de plus en plus angoissante.

Monsieur le secrétaire d’État, le pacte automobile, présenté par le Président de la République le 9 février dernier, prévoit que le fonds stratégique d’investissement portera sa contribution au fonds de modernisation des équipementiers automobiles à 200 millions d’euros, au même titre que les deux constructeurs Renault et PSA. Comme l’a rappelé M. Sueur, le fonds s’élèvera ainsi à 600 millions d’euros.

Par ailleurs, PSA et Renault ont annoncé leur intention de sécuriser les approvisionnements et de soutenir leurs fournisseurs.

Par conséquent, des efforts sont réalisés, nous le savons. Cependant, lors de la manifestation du 19 mars dernier, j’ai été frappée, dans mon département, par le nombre de banderoles qui portaient le nom des entreprises des équipementiers automobiles. Loin de moi l’idée, mes chers collègues, de vous en donner toute la liste.

Monsieur le secrétaire d’État, nous nous étions rencontrés à Vendôme, en Loir-et-Cher, lorsque vous étiez venu chez ThyssenKrupp, alors que ce groupe avait pris la décision de se retirer de cette région. Par ailleurs, je lisais ce matin dans La Nouvelle République du Centre-Ouest que 80 licenciements chez Ranger, à Theillay, sont annoncés dans le bassin de Salbris-Romorantin, où se situaient auparavant le GIAT ainsi que Matra. Les catastrophes industrielles arrivent les unes après les autres.

À Blois se trouvent les entreprises Valéo, HPI et Delphi. Cette dernière, spécialisée dans l’injecteur automobile pour les moteurs diesel, vient de mettre au point, grâce au laboratoire de recherche et développement situé également à Blois, un nouvel injecteur, le piézo. M. Devedjian, ministre chargé de la mise en œuvre du plan de relance, a visité récemment le site de cette entreprise et a souligné l’importance du laboratoire susvisé et les espoirs fondés sur cet injecteur.

Monsieur le secrétaire d’État, nous avons des inquiétudes. La société Delphi a utilisé toutes les mesures mises à sa disposition ; elle a mis fin aux contrats provisoires et à l’emploi d’intérimaires, a eu recours au chômage partiel et elle a même demandé à certains salariés de prendre leurs vacances à une période donnée. Cependant, la mise en place des nouvelles lignes de production du nouvel injecteur se heurte à certaines difficultés. Selon certaines rumeurs, cette production pourrait être délocalisée, d’autant que certains équipementiers ont tendance à rejoindre des constructeurs installés depuis quelques années en Europe centrale ou orientale. Plus de 2 500 salariés sont concernés dans l’agglomération blésoise.

Le fonds stratégique d’investissement, mis en place par le Gouvernement, concernera-t-il cette entreprise ? Nous n’avons que peu d’informations sur ce point. Monsieur le secrétaire d’État, je vous saurais gré de me donner des précisions à ce sujet.

Je souhaite maintenant me faire le porte-parole de M. Yves Détraigne. Ne pouvant être présent ce matin, il m’a chargé de vous poser une question, qu’il avait déjà formulée au mois de mars en séance publique. À cette époque, il n’avait pas, semble-t-il, obtenu de réponse précise. Son interrogation concerne l’inadéquation des délais de livraison des véhicules français par rapport à la concurrence étrangère. En effet, lorsque vous commandez une voiture étrangère, vous pouvez en disposer trois ou quatre semaines après. En revanche, lorsque vous commandez un véhicule français, vous l’obtenez quatre ou cinq mois plus tard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Dans le même temps, des émissions de télévision montrent des parkings immenses sur lesquels sont stationnées de très nombreuses voitures. Cette situation est incompréhensible. De surcroît, les derniers chiffres publiés sur l’activité du secteur automobile en France montrent le tassement de l’effet « prime à la casse ». Pourquoi existe-t-il une telle inadéquation entre les délais de livraison et les achats ? Cette question est importante.

Le pacte automobile – plan ambitieux – sera inopérant si les délais de livraison des véhicules français restent aussi longs et supérieurs à ceux des marques étrangères.

Monsieur le secrétaire d’État, je vous saurais gré de bien vouloir m’indiquer comment le Gouvernement explique cette différence entre les faits et les discours et ce qu’il entend faire pour remédier à un comportement qui encourage les Français à acheter des véhicules de marque étrangère, au détriment des constructeurs nationaux.

Applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, 6 milliards d’euros attribués à Renault et à PSA, l’activation des fonds de garantie lancés par OSEO pour les prêts alloués aux équipementiers et aux sous-traitants, 600 millions d’euros affectés au fonds de modernisation des équipementiers : une fois de plus, les aides publiques sont accordées sans contrôle, sans exiger de contreparties et sans légiférer.

Il s’agit, selon le Gouvernement, de faire croire aux travailleurs et aux populations concernés qu’il faut faire confiance aux actionnaires et aux dirigeants des groupes qui, bien entendu, auront le souci de garantir la pérennité des sites industriels et s’abstiendront de percevoir leur bonus. L’appel à la moralité des entreprises devrait donc suffire pour sauver l’industrie automobile en France.

On sait ce qu’il en est puisque, dès le lendemain de l’annonce de ce plan de sauvetage par le Président de la République, PSA annonçait la suppression de 6 000 emplois en France.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

Renault, pour sa part, confirmait ses bons résultats financiers, 830 millions d’euros de profits, dont la moitié est reversée aux actionnaires.

En termes d’emplois industriels, l’hémorragie n’est pas stoppée. Il serait trop long d’énumérer les entreprises qui licencient ou qui recourent au chômage partiel.

Toutes les régions sont touchées et la filière automobile paie le prix fort, notamment en Seine-Maritime, dans le Nord-Pas-de-Calais, l’Oise, le Rhône.

Certes, nous ne manquons pas de communication sur ce plan rebaptisé « pacte automobile ». Mais les effets d’annonce ne résistent pas à l’examen de la réalité, surtout quand des centaines de milliers de salariés, qui ne peuvent compter que sur leur travail pour vivre, sont confrontés à cette crise du système capitaliste.

Pour traiter plus concrètement du pacte qui nous est présenté, je reviendrai sur quelques arguments que vous avez développés, monsieur le secrétaire d’État.

En premier lieu, la suppression de la taxe professionnelle garantirait une meilleure compétitivité de nos entreprises. Cette taxe serait de 250 euros par modèle. Soit ! Mais l’entreprise Toyota s’est implantée à Valenciennes voilà quelques années et la taxe professionnelle n’a pas pesé sur sa décision, sinon elle aurait pu franchir la frontière et s’installer en Belgique.

L’équipementier Faurecia, implanté dans tout l’Hexagone, a décidé de fermer son entreprise d’Auchel, dans le Pas-de-Calais ; 600 salariés sont concernés. Pourtant, cette entreprise a bénéficié, voilà quelques années, de fonds publics pour agrandir son site. De plus, elle ne verse que 930 000 euros de taxe professionnelle à la collectivité, trois fois moins que la prime d’encouragement à la casse industrielle perçue par l’ex-P-DG de Valéo. Le rapport d’un cabinet d’expert-comptable a d’ailleurs démontré que l’usine d’Auchel est viable.

En fait, bien avant la grande crise structurelle que nous vivons aujourd’hui, comme hier la sidérurgie, le textile et le charbon, le secteur automobile se trouvait déjà, en quelque sorte, au banc d’essai des politiques européennes fondées sur le traité de Lisbonne vantant la concurrence libre et non faussée. Cette politique s’accompagne d’un dumping social, qui frappe en premier lieu les équipementiers, notamment depuis l’ouverture de l’Europe à l’Est.

Selon un autre argument, en France, le secteur de la recherche et du développement privé connaîtrait un déficit. Renault a baissé ses investissements en matière de recherche et de développement.

J’évoquerai, en cet instant, l’exemple de l’entreprise Sintertech implantée en Isère. Cet équipementier est le seul en France à produire et à développer la technologie révolutionnaire du métal fritté, issue de recherches très poussées. La fermeture de son site entraînera la suppression de 120 emplois et aura aussi pour conséquence la disparition pure et simple de cette technologie de pointe dans le paysage industriel français.

Enfin, monsieur le secrétaire d'État, je mentionnerai votre souci d’aider les PME à améliorer leur gestion. Lors de votre récente venue dans ma région, à Douai, pour promouvoir votre plan, vous avez déclaré : « Le but du fonds de modernisation des équipementiers est d’abord d’atténuer la crise ». Puis vous avez ajouté : « Nous n’interviendrons en fonds propres que dans les cas que nous considérons comme stratégiques ». Mais qu’est-ce qu’un équipementier stratégique ?

On comprend donc mieux les intentions du Président de la République qui ne souhaite pas légiférer, mais qui attend, en toute confiance les résultats de son plan automobile.

Cette attente est douloureuse, car on continue à supprimer des milliers d’emplois, au nom de cette nouvelle compétitivité que vous appelez de vos vœux et qui satisfait bien les projets du MEDEF.

Si vous êtes aussi sûr de votre plan de relance, pourquoi ne pas décider un moratoire suspensif des plans sociaux en cours ?

La majorité présidentielle a tenté de nous faire croire que cette crise était due à un capitalisme financier amoral auquel elle opposait un capitalisme industriel vertueux. Les milliards d’euros que vous distribuez aux grands groupes industriels pour améliorer leur compétitivité n’ont qu’un seul objet : restructurer l’appareil productif, afin de rechercher la rentabilité maximale et d’augmenter les profits de demain.

Voilà deux ans déjà, les parlementaires communistes ont proposé une charte de défense et de développement de l’industrie automobile ; ils ont donc anticipé cette crise. La reprise de quelques-unes de leurs propositions aurait permis de limiter fortement la casse industrielle et la destruction massive d’emplois que nous connaissons actuellement. Il n’est toutefois pas trop tard.

Nous réclamons – je réitère les demandes formulées ici même, naguère, par mon collègue Thierry Foucaud – que les plans de licenciement soient arrêtés et que les dividendes versés aux actionnaires soient gelés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

Nous demandons que la rémunération des salariés placés au chômage technique soit maintenue dans son intégralité, en mettant à contribution les actionnaires, que l’utilisation de l’argent public soit établie et contrôlée, afin de développer, par exemple, les technologies nouvelles et la formation professionnelle.

Nous voulons des mesures contraignantes pour les constructeurs, afin qu’ils respectent leurs sous-traitants.

Nous manifestons notre volonté de construire l’avenir de l’industrie automobile, grâce à la mise en place de gammes de véhicules correspondant aux attentes et aux besoins des consommateurs.

Nous exprimons le souhait que l’État entre dans le capital de l’industrie automobile pour assurer l’avenir du secteur. Auditionné hier, M. Pélata, directeur général délégué de Renault, admettait que la part détenue actuellement par l’État dans le capital de son groupe ne réglait pas tous les problèmes, mais confortait Renault en cette période de crise.

Nous revendiquons des droits nouveaux pour les travailleurs, afin que ceux-ci participent aux décisions stratégiques de leurs entreprises.

Nous pensons que le développement de l’industrie automobile doit aller de pair avec l’augmentation du pouvoir d’achat des travailleurs, c’est-à-dire de ceux sans lesquels il n’y a pas de création de richesse ni d’économie viable.

Enfin, la crise qui touche le secteur est sociale. Ses victimes sont, en priorité, les salariés qui travaillent et les utilisateurs d’automobiles que nous sommes, dans notre grande majorité.

Ce triste constat est la conséquence directe de la stratégie des constructeurs, qui ne visent pas à produire des voitures pour répondre aux besoins, mais à dégager la plus grande marge possible par véhicule afin de satisfaire l’appétit sans limite d’actionnaires dirigeants.

Faut-il rappeler qu’on n’a pas attendu la crise pour pratiquer dans ces entreprises les fermetures de site, les délocalisations, les remises en cause d’acquis sociaux, les dégradations des conditions de travail, les suicides et l’austérité salariale ?

Faut-il également rappeler que ce n’est pas non plus la présente crise économique qui a bloqué depuis des années les investissements des constructeurs français dans les nouvelles technologies et la mise en place de véhicules propres ?

Pour les entreprises de la filière, la crise offre l’occasion d’accélérer des stratégies qui étaient planifiées depuis des mois.

Dans cette perspective, la situation de l’industrie automobile américaine a servi d’alibi pour dramatiser la situation du secteur en France et en Europe. Aux États-Unis, les constructeurs affichent des pertes de plusieurs milliards de dollars ; en Europe, tout au contraire, ils réalisent des milliards d'euros de bénéfice ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, en tant que président du groupe d’études sur l’automobile et vice-président de la commission des affaires économiques, je ne puis que saluer la tenue du débat qui nous occupe aujourd’hui.

En effet, il me semble utile d’évoquer la situation des sous-traitants et des équipementiers du secteur automobile, qu’ils soient de premier ou de deuxième rang, dont nous constatons tous les difficultés ; je n’égrènerai pas celles qu’ils rencontrent dans le département dont je suis l’élu, car chacun d’entre vous, mes chers collègues, pourrait en faire autant !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

En réalité, le problème concerne l’ensemble de notre territoire, ce qui montre d'ailleurs que la filière automobile est essentielle pour notre économie.

De façon générale, le secteur automobile se trouve aujourd’hui à la croisée des chemins, me semble-t-il. Deux éléments, l’un conjoncturel, l’autre structurel, expliquent ses difficultés actuelles.

En ce qui concerne la conjoncture, la crise économique mondiale pèse sur le pouvoir d’achat de nos concitoyens et explique en partie la chute des ventes automobiles, qui pourrait atteindre près de 20 % en Europe en 2009.

Toutefois, je voudrais aussi insister sur l’aspect structurel de ces difficultés, à savoir l’évolution des mentalités dans nos sociétés occidentales, notamment quant à la place de l’automobile.

Je pense, bien entendu, à la prise de conscience des enjeux environnementaux, mais aussi, plus largement, au changement de comportement des consommateurs, par exemple sous l’effet des évolutions du prix du pétrole.

Plusieurs des personnalités auditionnées hier par la commission des affaires économiques et la commission des finances dans le cadre d’une table ronde sur le pacte automobile ont insisté sur ce changement de comportement, dont elles ont unanimement souligné le caractère durable. Une telle évolution des mentalités déstabilise aujourd’hui le secteur automobile et lui impose de s’adapter.

Ces deux éléments expliquent donc la « mauvaise passe » de la filière automobile, en France comme dans le reste du monde.

D'ailleurs, la France, je ne puis que le relever, grâce aux mesures votées par le Parlement sur l’initiative du Gouvernement, comme la prime à la casse et le bonus-malus, traverse plutôt mieux la crise que certains de nos voisins : si, en décembre 2008, les immatriculations ont chuté de 16 % en France, cette baisse a atteint 50 % en Espagne ou 21 % au Royaume-Uni.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, secrétaire d'État

Exactement !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

La situation des constructeurs est donc difficile et les annonces de suppressions de postes réalisées par les deux grands constructeurs français, Renault et PSA, qui concernent au total près de 20 000 emplois en 2009, sont là pour nous le rappeler.

Toutefois, nous sommes tous conscients, quelle que soit notre tendance politique, que la situation des équipementiers et des sous-traitants est encore plus précaire. Il ne se passe pas une semaine sans qu’une restructuration soit annoncée, comme celles qui ont frappé les usines de Continental dans l’Oise ou d’Heuliez dans les Deux-Sèvres au cours des deux dernières semaines.

Dans cette période difficile, la baisse des commandes des constructeurs, ainsi que la gestion de leur stock, a un impact direct sur les équipementiers et les sous-traitants.

La situation aurait été pire, je ne puis que le souligner, sans les dispositions de la loi de modernisation de l’économie relatives à la réduction des délais de paiement, comme les participants de la table ronde l’ont d'ailleurs souligné hier. Nous ne pouvons donc que nous féliciter, a posteriori, de l’adoption de ces dispositions.

Cette situation n’est toutefois pas nouvelle, et les difficultés rencontrées actuellement par les équipementiers sont plus profondes. Dans le rapport sur Les défis du secteur automobile que j’avais remis, en février 2007, au nom de la commission des affaires économiques, et que je vous encourage d'ailleurs à lire, mes chers collègues, …

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

… j’avais déjà noté les difficultés rencontrées par l’ensemble des fournisseurs de l’industrie. En effet, entre 2005 et 2007, les équipementiers français ont perdu près de 10 000 emplois.

Dans mon rapport, je prévoyais à l’époque la destruction de près de 15 000 emplois chez les équipementiers de premier rang et de 6 000 emplois chez leurs fournisseurs à l’horizon 2012. J’avais peur d’être trop pessimiste, mais peut-être étais-je encore trop optimiste ! En effet, ces prévisions semblent en deçà de la réalité actuelle : dans les derniers mois, près de 7 000 emplois ont disparu.

Face à la gravité de la situation, le pacte automobile présenté par le Président de la République le 9 février dernier constitue une réponse à la hauteur de l’enjeu, contrairement à ce qui vient d’être affirmé. Il comprend plusieurs mesures qui devraient permettre aux équipementiers de traverser cette période difficile.

Ainsi, la mise en place du fonds de garantie pour les prêts octroyés aux équipementiers et aux sous-traitants constitue une très bonne mesure : ce mécanisme doit permettre à OSEO de garantir aux PME et aux entreprises de taille intermédiaire jusqu’à 90 % de leur prêt, sur des montants couverts pouvant atteindre 15 millions d’euros par entreprise.

Par ailleurs, le fonds de modernisation des équipementiers automobiles, doté de 600 millions d’euros, dont 200 millions d’euros apportés par le fonds stratégique d’investissement, a déjà apporté la preuve de son utilité, avec son intervention dans Valeo et son soutien prochain à Heuliez.

Les 6 milliards d'euros prêtés à PSA et à Renault, et sur lesquels certains se sont interrogés, bénéficieront également aux équipementiers, comme l’ont rappelé hier les participants de la table ronde ! Si nous ne soutenons pas les constructeurs, les équipementiers souffriront plus encore.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, secrétaire d'État

Bien sûr !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Nous devons donc nous garder d’une approche comptable : tous les acteurs de la filière sont importants et des sommes considérables leur sont apportées.

Au-delà de ces mesures, l’esprit du pacte automobile, que je salue, repose sur l’idée que la filière ne se limite pas aux constructeurs et que ces derniers doivent prêter attention à la situation de leurs fournisseurs.

Dans le rapport que j’évoquais tout à l’heure, je notais déjà que « le défi des équipementiers concerne l’ensemble de la filière, y compris les constructeurs, dans la mesure où il ne saurait y avoir de constructeurs forts si leurs fournisseurs sont en difficulté ».

Aujourd’hui, les prêts participatifs accordés aux constructeurs dans le cadre du pacte automobile interviennent en contrepartie d’engagements en matière d’emploi, d’investissement et aussi d’amélioration des relations partenariales avec les fournisseurs.

Au-delà de ces mesures conjoncturelles destinées à préserver le plus grand nombre de nos entreprises stratégiques, il me semble que les réformes structurelles visant à adapter la filière automobile française aux défis de demain doivent constituer également une priorité.

C’est pourquoi je salue le soutien à la recherche et à l’innovation dans ce secteur, notamment par l’intermédiaire des prêts accordés pour un montant global maximum de 250 millions d’euros.

En conclusion, je souhaiterais indiquer, monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, que notre vision de la filière automobile ne doit pas être pessimiste, même si la situation est actuellement difficile. Nous pouvons être confiants quant à son avenir.

Marques de scepticisme sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Dans les deux dernières décennies, nos entreprises ont déjà su s’adapter et accomplir une véritable révolution en matière d’innovation, de qualité, de développement durable ou encore d’alliances internationales. Nous n’avons pas à rougir des constructeurs français, qui sont très performants et qui sont préparés à passer cette crise internationale de la meilleure façon possible.

Nous pouvons donc avoir confiance dans la pérennité de ce secteur et affirmer, comme le Président de la République, que « la France ne laissera pas tomber son industrie automobile ».

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.

Applaudissements sur les travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, avant tout, je souhaite remercier mon collègue et ami Jean-Pierre Sueur d’avoir posé cette question orale sans débat relative à l’avenir des sous-traitants et équipementiers du secteur automobile, car il s'agit aujourd'hui d’un problème essentiel, qui nous touche tous, plus ou moins directement.

Ainsi, le département dont je suis l’élue, c'est-à-dire l’Aveyron, bien qu’il soit largement rural, se trouve confronté à ce problème économique dans l’une de ses zones industrielles, la mecanic valley, jusque-là dynamique, mais largement fragilisée par la crise économique que le monde traverse.

Je sais, monsieur le secrétaire d'État, que vous avez récemment rencontré les acteurs majeurs de ce secteur pour examiner avec eux les voies du développement d’équipements novateurs en matière technologique.

Dans ce contexte, je me félicite, comme nous tous, mes chers collègues, de la mise en œuvre du pacte automobile annoncé le 9 février dernier.

Pour autant, ces mesures permettront-elles d’endiguer la triple crise du crédit, de l’industrie et de la demande ou, si l’on préfère, du marché ?

Nous pouvons l’espérer, dans l’intérêt général, qui est, d’une part, celui des consommateurs, et, d’autre part, celui de l’ensemble des acteurs de la filière des équipementiers automobiles.

Toutefois, le doute est permis dès lors que ce plan, à aucun moment, n’exige que les constructeurs travaillent exclusivement avec des fournisseurs français ni n’encourage la relocalisation de sites industriels en France.

Si nous ne pouvons que nous féliciter des six principales mesures constituant le pacte automobile, en particulier le code dit « de performance et de bonnes pratiques entre les équipementiers, les sous-traitants et les constructeurs pour favoriser une véritable relation partenariale dans l’ensemble de la filière », en revanche, je m’interroge sur les conditions concrètes de leur mise en œuvre.

Sur une échelle de performance économique, la filière des équipements automobiles était en 2007 à cent. Elle s’établira à coup sûr, en 2009, à soixante, pour se relever probablement très légèrement à soixante-cinq en 2010.

Il faut donc que des efforts sans précédent soient développés dans quatre directions principales. Les trois premières sont la rationalisation des process, la protection de l’emploi et la formation au bénéfice des salariés au chômage technique, en veillant à ce que les aides financières publiques soient homogènes dans l’ensemble des régions et calculées équitablement à raison des caractéristiques propres à chaque territoire.

Je voudrais, sur ce point, souligner que les équipementiers s’inquiètent de voir que, dans deux régions différentes où ils sont implantés, ils bénéficient d’aides et de soutien à la formation selon des modalités différentes.

Enfin, la quatrième direction consiste en la création d’un véritable guichet unique, pour donner efficacité et cohérence aux mesures de soutien à l’économie. Il s’agit de ce circuit court qu’évoquait tout à l’heure M. Jean-Pierre Sueur.

Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, des assurances que vous voudrez bien nous donner sur ces différents points, qui, si la frilosité ne prend pas le pas sur l’ambition, sont susceptibles de consolider la filière des équipementiers automobiles.

Applaudissements.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, secrétaire d'État

Bravo !

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je voudrais évoquer en quelques mots la filière automobile, le contrôle parlementaire des fonds publics, la voiture propre et, surtout, l’appel à un nouveau pacte entre équipementiers et constructeurs.

Je suis très heureux, ainsi que mes collègues, que Jean-Pierre Sueur nous invite à débattre – je dirais enfin ! – sur la question spécifique de la situation des équipementiers et sous-traitants de l’automobile.

Il est vrai que nous avons la chance d’avoir deux constructeurs qui comptent parmi les meilleurs du monde. Pour autant, on a trop tendance à réduire l’industrie automobile à leurs activités. C’est oublier bien vite que le tissu industriel comprend un grand nombre d’entreprises, dont certaines ont un destin international, tandis que d’autres sont des championnes de l’innovation, mais qu’il y a aussi beaucoup d’entreprises familiales qui irriguent l’ensemble de l’hexagone et qui sont très importantes pour la vie des territoires.

Il s’agit d’une vraie filière, au sens plein du terme. Nous avons de la chance de l’avoir et nous devons la garder !

En 2007, il faut le rappeler, les équipementiers et sous-traitants, que j’appellerai l’« armée de l’ombre » de la filière automobile, employaient 114 446 salariés. Ce n’est pas rien ! Aujourd’hui, d’après les fédérations professionnelles, dont les prévisions sont funestes, les effectifs passeraient très bientôt au-dessous des 110 000 salariés.

Nous devons éviter que les équipementiers et les sous-traitants ne deviennent – excusez la métaphore – la chair à canon de la crise du secteur automobile.

Or, les équipementiers et les sous-traitants ne disposent pas, nous le savons tous, des mêmes armes que les constructeurs pour faire face à la violence de la crise. Ils ne disposent pas de la même trésorerie pour attendre des jours meilleurs. Il serait même déconseillé aux banques d’aider le secteur automobile, parce qu’il s’agit de placements qui ne sont pas assurés.

Les sous-traitants et équipementiers n’ont évidemment pas la même capacité de négociation vis-à-vis des banques ! De la même manière, les salariés et les chefs d’entreprise ne bénéficient de protections sociales suffisantes pour affronter de longues périodes de chômage partiel.

Équipementiers et sous-traitants ont été, dans un passé assez récent, victimes de délais de paiement sans cesse allongés par leurs donneurs d’ordre. Ils n’ont pas eu d’autre choix que de se soumettre à des rentrées de trésorerie fluctuantes. Au fil des années, leurs marges se sont réduites face aux exigences de productivité des constructeurs.

Les équipementiers et les sous-traitants, et a fortiori leurs salariés, combinent malheureusement beaucoup de handicaps. Devons-nous pour autant laisser le marché, le bon-vouloir des banques et l’absence de législation sociale suffisante signer la condamnation à terme de beaucoup de ces entreprises ? Nous ne le pensons pas.

Laisser des équipementiers et des sous-traitants disparaître, je le réaffirme, c’est cautionner à terme la disparition progressive de la filière automobile. C’est fragiliser nos deux constructeurs, qui, faute de partenaires industriels, seront obligés de chercher ailleurs des structures de production que nous avons ici. C’est faire le nid des délocalisations futures et d’une politique d’achat dématérialisée. C’est abandonner des salariés, des cadres et des chefs d’entreprise qui disposent d’un savoir-faire extraordinaire – certes perfectible par la formation – et qui ne pourront que très diversement se reconvertir sur le marché du travail.

Il s’agit surtout d’un blanc-seing donné à une marche forcée vers la désindustrialisation de notre pays, ainsi qu’à l’abandon de certains bassins industriels qui, aujourd’hui, vivent de l’automobile.

Depuis les premiers signes annonciateurs d’une baisse très sensible et durable du marché de l’automobile, il y a maintenant cinq mois, je n’ai pas cessé de plaider pour la prise en compte de la totalité de la filière automobile.

J’ai réagi, dès les premières annonces qui concernaient notamment la création du fonds stratégique d’investissement, en novembre, et, bien sûr, à l’occasion des états généraux de l’automobile, le 20 janvier. Je vous ai remis à cette occasion, monsieur le secrétaire d’État, une contribution sur l’avenir de l’industrie automobile, rédigée avec mon collègue Pierre Moscovici.

Vous comprendrez bien, monsieur le secrétaire d’État, que, même si la prise de conscience du Gouvernement est réelle – encore que, à mon sens, trop lente –, j’ai accueilli plutôt favorablement, et avec un certain soulagement, l’annonce du pacte automobile le 9 février. J’y ai même placé quelques espoirs et beaucoup d’attentes !

Le pacte automobile prenait à mon sens la mesure de la gravité de la crise de l’ensemble de la filière, en prévoyant notamment un prêt de 6, 5 milliards d’euros aux deux principaux constructeurs, ainsi que le principe d’un prêt pouvant être abondé à hauteur de un milliard d’euros aux équipementiers, via OSEO.

J’avais également retenu le principe d’aides conditionnées, qui est fondateur pour le pacte automobile et, à ce titre, particulièrement important.

J’étais en accord avec vous lorsque vous écriviez : « L’État vient en aide à son industrie automobile en échange de contreparties fortes. La France ne laisse pas tomber son industrie automobile, mais l’industrie ne laisse pas tomber la France ! »

Le Président de la République m’avait plutôt convaincu lorsqu’il avait prévu, dans une intervention télévisée, d’adosser ces aides à des contreparties en termes d’emplois ou de maintien de sites dans l’hexagone et de défendre cette position auprès de la présidence de l’Union européenne.

J’y voyais les bases d’un véritable contrat industriel, social et environnemental. J’y voyais aussi les bases d’un possible changement du mode de gouvernance. Où en est-on après tout cela ? Comme on dit, il y a les effets d’annonces et il y a les actes.

Or, le plus grand flou règne sur la réalité de ces fonds, sur leur réel niveau d’abondement, sur les critères choisis pour aider telle ou telle entreprise. Il semble donc qu’il y ait une distorsion entre les déclarations et la réalité, et, parfois, le fossé est incompréhensible ; il sème le plus grand trouble.

Je sais, monsieur le secrétaire d’État, que vos services et vous-même, comme ceux de Mme Lagarde, êtes au fait des situations des entreprises. Vous négociez avec elles depuis des mois.

Dans ces conditions – et c’est ma première question –pouvez-vous nous expliquer pourquoi si peu de dossiers sont aujourd’hui entre vos mains, alors que l’on connaît l’ampleur, rappelée tout à l’heure par mes collègues, des difficultés des équipementiers ?

Les engagements financiers du pacte automobile évoquent un abondement à hauteur de un milliard d’euros. Que se passera-t-il si, à la fin de l’année, on constate une dramatique sous-consommation des crédits, si le fonds de modernisation des équipementiers est à peine entamé alors que, dans le même temps, des milliers d’emplois sont supprimés et des dizaines d’entreprises disparaissent ?

Telle est la crainte que nous avons. Nous nous demandons également si nous disposons, oui ou non, de la capacité de prêts à hauteur de un milliard d’euros. OSEO aura-t-il, oui ou non, les moyens humains et logistiques pour examiner tous les dossiers, mais également pour les susciter ? Disposez-vous d’objectifs chiffrés dont vous pourriez nous faire part aujourd’hui ?

Mes interrogations concernent non seulement le niveau d’abondement de ces fonds, mais également la réalité des contreparties adossées à l’octroi des prêts.

Vous connaissez la polémique qui grandit actuellement. Pouvez-vous donc nous garantir aussi, monsieur le secrétaire d’État, que le dossier de présentation du pacte automobile aux institutions européennes comportait bien des contreparties sociales et de maintien des sites ? Pouvez-vous nous communiquer ce document aujourd’hui ?

Je vous pose également, monsieur le secrétaire d’État, la question suivante, parce que l’exemple de Valeo fait froid dans le dos : comptez-vous assortir ces prêts de conditions liées à la gouvernance d’entreprise ? Il n’est pas pensable que des entreprises bénéficiant, et à juste titre, d’aides considérables de l’État continuent à agir comme si de rien n’était et à distribuer des indemnités colossales, des primes et des stock-options.

Ces temps-là sont révolus. Nous devons passer d’un modèle fondé sur l’argent facile à un modèle prévoyant une juste et convenable rémunération du travail, y compris pour les dirigeants d’entreprise. D’autres pays ayant une culture libérale en ont donné l’exemple, comme le Japon et les Pays-Bas, qui ont suivi ce cheminement. Nous devons en faire autant !

Il faut savoir qu’en ce moment, alors même qu’on annonce ces stock-options, des intérimaires sont licenciés par milliers ; des salariés de plus de cinquante ans se retrouvent aujourd’hui au chômage, décrétés licenciés volontaires ; des postes sont supprimés. Ces agissements sont intolérables et indignes. On voit les centres communaux d’action sociale, les CCAS, submergés par des demandes d’aides de plus en plus nombreuses. Il en est de même pour les départements.

Je suis ravi, monsieur le secrétaire d’État, que le Gouvernement soit finalement intervenu pour demander au conseil d’administration de Valeo de ne pas octroyer de telles indemnités. Pour autant, ne croyez-vous pas que, si scandale il y a eu, c’est parce que les conditions n’ont pas été clairement posées dans le contrat. Il ne doit pas y avoir d’aides si de tels agissements sont commis.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Je pense qu’il faudra légiférer sur cette question dans les plus brefs délais. Nous n’allons pas courir après l’information tous les jours ! Il vaut mieux, une fois pour toutes, mettre fin à ces primes scandaleuses.

Je calculais par exemple que le montant touché par le président-directeur général de Valeo représentait une prime de 1000 euros par emploi supprimé dans ce groupe !

Mouvement d’approbation sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Oui, c’est absolument scandaleux et nos concitoyens ne le tolèrent pas.

C’est pour cela que nous devons avoir une véritable politique concernant la filière automobile. Ce secteur représente 10 % de nos emplois industriels.

Le pacte automobile a vocation à sauver des emplois et à faire évoluer les métiers du secteur. Vous avez vous-même, monsieur le secrétaire d’État, intégré cette donnée dans une de vos déclarations et Jean-Pierre Sueur est intervenu tout à l’heure sur la question des formations.

La seule façon de changer l’industrie automobile européenne, c’est de faire en sorte que nous construisions le plus rapidement possible la voiture propre de demain et que nous sachions évaluer les conséquences, dans le monde de demain, de la crise climatique qui se profile.

Les automobiles devront être recyclables à cent pour cent et elles ne devront plus émettre de carbone. Qu’avons-nous comme plan de formation pour préparer cette mutation en profondeur de l’industrie automobile ?

J’ai suivi avec beaucoup d’attention le dossier Heuliez. Lors de la conférence de presse du 24 mars, vous avez dit que l’État soutiendrait Heuliez « s’il a un vrai projet industriel viable ». Je citerai l’exemple de Key Plastics, une entreprise qui avait prévu de supprimer deux sites industriels, l’un à Rochefort et l’autre dans le Doubs.

Après une occupation de l’entreprise qui a duré trois semaines, après la mobilisation de toutes les forces vives du pays de Montbéliard, et, surtout et y compris, celle de PSA, qui a besoin des pièces fabriquées par Key Plastics, un des deux sites a pu être sauvé.

Bien sûr, il y aura des suppressions d’emploi, mais ce site, qui était condamné, pourra demain continuer d’exister. Ainsi, monsieur le secrétaire d’État, vous parlez de projets industriels viables, mais il faut être vigilant aux critères retenus en la matière.

Le plus important, pour une entreprise, est d’avoir un débouché. Or nos constructeurs ont besoin des pièces fabriquées par l’ensemble des équipementiers ; si l’un d’eux, faute de commandes suffisantes, n’est plus en mesure de payer les salaires de ses employés ou d’acheter des composants, les banques et Oseo doivent être là pour l’aider à passer cette mauvaise période, avant que ne s’engage la mutation de l’industrie automobile.

Je plaiderai maintenant en faveur du contrôle des aides publiques.

Il ne s’agit pas de ralentir ou de bureaucratiser l’action de l’État. Quand les sommes en jeu se chiffrent en milliards d’euros, la mise en place d’une commission parlementaire se justifie amplement. Les parlementaires doivent veiller, aux côtés du Gouvernement, à ce que les concours publics servent bien de levier pour aider l’industrie automobile à sortir de la crise, à se moderniser, à protéger ses salariés.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Sans un tel contrôle, des scandales défrayeront régulièrement la chronique.

La commission parlementaire dont nous souhaitons la création aurait pour mission non pas d’examiner a posteriori l’action du Gouvernement, mais de travailler avec lui pour aider l’industrie automobile à sortir de la crise.

Nous sommes à la croisée des chemins. Dans les mois qui viennent, l’industrie automobile traversera sans doute de graves difficultés ; des milliers d’emplois seront peut-être perdus. Cependant, si nous nous mobilisons pour mener une action massive et concertée, nous pourrons en sauver une grande partie et rassurer des salariés plongés aujourd’hui dans la plus profonde incertitude.

Dans cette perspective, nous devrons aussi anticiper la fin du système du bonus-malus, afin de définir un autre moyen de doper notre industrie automobile.

Enfin, nous devrons faire en sorte que la recherche sur la voiture propre et, plus généralement, sur l’automobile de demain fasse l’objet d’une attention accrue de la part du Gouvernement. Les constructeurs européens ont évalué à 40 milliards d’euros le coût de la recherche sur les moteurs « décarbonisés ». Nous devons aider l’industrie automobile à la fois à sortir de la crise avec le moins de dommages possibles et à se projeter dans l’avenir. Cela signifie que la recherche doit tendre à améliorer sa compétitivité : constructeurs, équipementiers et chercheurs doivent sceller un nouveau pacte pour préparer notre industrie automobile de demain, sauver des emplois et, surtout, faire en sorte que la France reste une grande nation industrielle.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC-SPG et de l ’ Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Jacqueline Gourault applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je remercie tout d’abord M. Jean-Pierre Sueur d’avoir pris l’initiative de poser cette question. Compte tenu de l’importance du sujet, je regrette que les rangs de la majorité sénatoriale soient si peu fournis, bien qu’elle soit excellemment représentée…

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Avec plus de 34 000 emplois directs, la Basse-Normandie est l’une des régions où la filière automobile est le plus présente.

De façon générale, les observateurs, même les plus critiques, ne doutent pas de la volonté du Gouvernement de protéger et de soutenir le secteur automobile français.

Cela étant, peut-on considérer qu’il existe réellement une filière automobile ? En fait, il existe une filière des constructeurs et une filière des équipementiers, les deux ayant parfois des difficultés à travailler ensemble. La crise sera-t-elle l’occasion de revoir en profondeur et en totalité l’organisation du secteur ? Pour l’heure, nous avons l’impression qu’il y a, d’un côté, les sous-traitants et les équipementiers, et, de l’autre, les constructeurs.

En Basse-Normandie, notre remarquable préfet de région, M. Christian Leyrit, a pris l’heureuse initiative de réunir, dès le 26 janvier, une table ronde rassemblant les représentants de la filière et les élus.

Il est apparu que la situation des quatre cercles de sous-traitants de la filière automobile peut être comparée à celle des victimes d’un grave accident de la route : on réconforte les plus valides, on soigne les blessés, on donne l’extrême-onction aux plus gravement atteints… De même, la politique menée par le Gouvernement renforcera les entreprises les moins touchées, mais laissera de côté les plus fragiles. Il conviendrait, à mon sens, de revoir cette stratégie !

La région Basse-Normandie a pris la mesure de la crise en accordant 44 millions d’euros à la recherche et à l’innovation, ainsi que 11 millions d’euros d’aides supplémentaires à la filière, dont 4 millions d’euros d’aides à la trésorerie.

Le département de l’Orne compte de nombreux sous-traitants importants : je citerai notamment Wagon Automotive, qui emploie 180 personnes à Sainte-Gauburge-Sainte-Colombe et a été placé en redressement judiciaire, Faurecia à Flers, Valéo à Athis-de-l’Orne, ThyssenKrupp au Theil-sur-Huisne, ou Key Plastics à Bellême, cette dernière société, où travaillent 168 salariés, étant soumise à une procédure collective… Je pourrais énumérer de nombreuses autres entreprises en difficulté, des centaines d’emplois étant menacés !

Le conseil général de l’Orne a mis en place un plan doté de 10 millions d’euros, pompeusement baptisé « plan de relance » : sur ce montant, 9 millions d’euros seront savamment saupoudrés pour financer des travaux routiers – le saupoudrage et le clientélisme du goudron s’inscrivent dans la grande tradition des départements ruraux ! –, mais pas un euro ne sera accordé aux sous-traitants ornais…

J’évoquerai, à cet instant, le site Faurecia de Flers.

La société Faurecia, qui fabrique des sièges, des échappements, des équipements acoustiques, des intérieurs de véhicule et des blocs avant, emploie 1 400 salariés et travaille avec cinquante sous-traitants, ce qui représente plus de 400 emplois induits. Alors que 1 215 suppressions d’emploi étaient annoncées par le groupe en France, 271 licenciements étaient prévus sur le site de Flers.

Les élus et les représentants du personnel se sont battus pour se faire entendre d’une direction parfois trop éloignée de l’exploitation – cela peut arriver dans d’autres cas –, et ils sont parvenus à sauver de très nombreux emplois menacés par des délocalisations. Ainsi, ils ont pu démontrer que l’activité comptabilité devait être maintenue sur le site de Flers, au lieu d’être délocalisée au Portugal.

D’ailleurs, au sujet des délocalisations, il y aurait beaucoup à dire.

Par exemple, l’activité de fabrication de glissières emploie environ 700 salariés. Si cette activité est transférée en Pologne alors que l’usine polonaise de Faurecia fabrique déjà des glissières, on parlera non pas de « délocalisation », mais de « relocalisation », ce qui permet d’échapper aux contraintes, aux promesses et aux incantations.

Faurecia est le deuxième fabricant de sièges automobiles au monde. N’y aurait-il pas un avenir, pour cette société, dans un rapprochement avec l’industrie aéronautique afin de fabriquer des sièges d’avion, même si, évidemment, les volumes et les chaînes de production ne sont pas les mêmes ? Il faut envisager des possibilités de diversification, au-delà de la seule voiture « verte ».

En ce qui concerne maintenant la solidarité des banques, thème qui a été abordé tout à l’heure, la société Faurecia a besoin de 150 000 euros pour financer les chèques-vacances de ses salariés. Or la banque, pour l’instant, lui refuse cette somme, alors que la situation de trésorerie de l’entreprise devrait permettre de satisfaire cette demande de concours. Pouvons-nous trouver des solutions pour résoudre ce type de problème ?

Par ailleurs, dans toutes ces entreprises, les salariés sont poussés à prendre des RTT et des jours de congés dès maintenant, mais qu’adviendra-t-il de leur vie familiale et de l’organisation du travail s’il ne leur reste que dix ou douze jours de congés à prendre pendant l’été ?

Comment, monsieur le secrétaire d’État, comptez-vous coordonner les multiples initiatives, rétablir la confiance du marché ?

Enfin, et surtout, quel suivi allez-vous proposer aux différents sites concernés ? J’approuve la suggestion de M. Martial Bourquin d’instaurer un suivi parlementaire : ce serait évidemment une très bonne solution.

La situation est anxiogène pour les salariés, le bassin d’emploi tout entier, ainsi que pour les élus.

Les Restos du cœur de Flers – la communauté d’agglomération compte environ 30 000 habitants – ont vu passer, depuis le début de leur campagne, de 160 à 370 le nombre de familles bénéficiaires de leur aide. Ils ont servi, depuis le mois de décembre, plus de 51 000 repas. Nous parlons ici non pas de chiffres, mais d’hommes, de femmes et d’enfants qui attendent de ce débat sinon des solutions, du moins quelques pistes susceptibles de leur redonner un peu d’espoir.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste, du RDSE, du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Gérard Longuet applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Chevènement

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je tiens moi aussi à saluer l’excellente initiative de M. Jean-Pierre Sueur. Elle me donne l’occasion d’évoquer la situation dans ma région, la Franche-Comté, où bat le cœur industriel de Peugeot.

Le marché des voitures particulières en France a marqué une baisse de 13 % en février, comme Mme Gourault l’a rappelé, mais les ventes de PSA chutent plus violemment encore, de 20 %. Les contrats à durée déterminée ne sont plus renouvelés, les intérimaires se retrouvent au chômage. L’usine de Sochaux a connu un chômage technique prolongé, elle a supprimé, pour l’essentiel, la troisième équipe. Les équipementiers tournent au ralenti. Certains sont en liquidation judiciaire, comme Rencast, filiale du groupe de fonderie italien Zen, à Delle, ou attendent un problématique repreneur, comme Sonas Automotive à Beaucourt, Wagon Automotive à Fontaine – ce fut aussi le cas de Key Plastics à Voujeaucourt, mais M. Bourquin vient d’en parler.

Il résulte de cette situation une immense inquiétude et des difficultés sociales grandissantes.

En général, les États ont réagi avec vigueur. Je n’évoquerai pas le plan américain de relance du secteur automobile. En France, le 9 février dernier, le Président de la République a annoncé l’octroi d’un prêt de 6 milliards d’euros à un taux de 6 % sur une durée de cinq ans aux deux constructeurs automobiles PSA et Renault, afin de leur permettre de financer des projets stratégiques en France et de soutenir, notamment à travers les pôles de compétitivité, des programmes de véhicules propres. L’offre de véhicules –chacun le comprend – doit anticiper sur la nécessité de produire des voitures plus économiques ou équipées de moteurs électriques.

En contrepartie de ces aides qui, pour l’essentiel, répondent à l’urgence, les constructeurs auraient dû prendre un engagement sur l’emploi et sur la pérennité des sites d’assemblage en France.

Ces aides considérables ne peuvent en effet être accordées sans contreparties précises, comme plusieurs intervenants l’ont déjà dit, notamment en ce qui concerne le maintien de l’emploi. Mme Anne-Marie Escoffier a posé des questions tout à fait pertinentes à cet égard ; je n’y reviens pas.

Un fonds d’aide aux équipementiers en difficulté a été mis en place : 600 millions d’euros ont été débloqués, dont 200 millions d’euros ont été fournis par l’État par le biais du fonds stratégique d’investissement. C’est une bonne initiative, mais elle est peut-être insuffisante.

En effet, il est absolument nécessaire d’assurer la reprise, au moins provisoire, de ces entreprises menacées et de leurs savoir-faire au travers d’une holding semi-publique où les constructeurs auront évidemment toute leur place. Des équipementiers aujourd’hui en déshérence comme Sonas Automotive, Wagon Automotive ou Rencast ne doivent pas disparaître. Il en va de même pour beaucoup d’autres sites évoqués par les précédents orateurs, par exemple Continental à Amiens ou Heuliez en Poitou-Charentes, qui devrait mettre sur le marché, en 2010, de nouveaux modèles pourvus de moteurs hybrides ou électriques.

Nous prenons aujourd’hui la mesure de l’immense erreur qu’a commise la France, voilà plus de dix ans, quand elle a accepté la perspective de la délocalisation de son industrie automobile dans le cadre d’une mondialisation n’imposant aucune règle à des pays où les coûts salariaux sont dix fois inférieurs aux nôtres ou au travers d’un élargissement non réellement négocié de l’Union européenne aux pays d’Europe centrale et orientale.

En délocalisant leur production et leurs sous-traitants, les constructeurs ont créé eux-mêmes les conditions du naufrage actuel. À Vesoul, le 15 janvier dernier, le Président de la République s’étonnait de ce que notre industrie automobile, qui représentait, il y a peu encore, le premier poste excédentaire dans notre balance commerciale, fût devenue déficitaire. Sa réaction, toute spontanée, témoignait en fait de la cécité collective de nos dirigeants politiques, du moins de la plupart d’entre eux, au cours des années quatre-vingt-dix.

Le 27 novembre dernier, j’ai posé à Mme Lagarde une question relative à la protection de notre industrie automobile. Elle m’a renvoyé au communiqué du G 20 rejetant tout « protectionnisme » ! La seule évocation de ce mot tabou est un moyen de clore par avance toute discussion. Mais n’est-il pas évident qu’entre des pays présentant des conditions salariales et sociales complètement hétérogènes, il n’y a pas de concurrence bénéfique possible, comme l’avait démontré il y a longtemps Maurice Allais ? La concurrence est alors destructrice !

À la suite de la déclaration du Président de la République, la commissaire européenne chargée de la concurrence, Mme Neelie Kroes, avait déjà mis en garde le Gouvernement français contre « un risque de retour au protectionnisme ». Force est de constater que ce dernier ne tient pas le même langage selon qu’il s’exprime à Paris ou à Bruxelles !

La véritable dictature de la pensée libérale qui s’est instaurée est devenue intolérable. Les institutions de Bruxelles ne peuvent pas défendre un libre-échangisme dévoyé alors que croulent des pans entiers de notre industrie. Ce faisant, elles s’exposent à la colère de notre peuple. Osons parler vrai : la logique industrielle libre-échangiste, en l’absence d’une raisonnable protection, conduit à la disparition potentielle de tous les sites de production français. L’ensemble de la production française peut en effet être réalisé dans des pays à très bas coûts salariaux, faute de protection de notre marché.

Il convient de distinguer, d’une part, les pays d’Europe centrale et orientale, les PECO, dont la plupart ont été admis, en 1999, au sein de l’Union européenne à compter de 2004, et, d’autre part, les pays extra-européens à très bas coûts salariaux.

Pour ces derniers, l’instauration d’une taxe anti-dumping social et d’une écotaxe pour égaliser les conditions de concurrence devrait figurer à l’ordre du jour des sommets européens et mondiaux. Face à l’hypocrisie générale, le courage devrait conduire la France à défendre au G 20 la thèse non pas d’un protectionnisme aveugle, bien évidemment, mais d’une protection raisonnable et négociée. Cela permettrait une concurrence équitable entre les différentes régions du monde, en tenant compte des différences de coûts salariaux, mais aussi, j’y insiste, de la nécessité du développement des pays émergents, à condition que leur croissance soit fondée non pas seulement sur les exportations, comme c’est trop souvent le cas, mais aussi sur le développement de leur marché intérieur. Je me réjouis d’ailleurs de constater que la Chine vient de mettre en œuvre un plan de relance de 450 milliards d’euros. En ces domaines, je le répète, tout se négocie.

Au sein de l’Union européenne, les grandes marques automobiles pourraient être associées à un contingentement de la production par pays en fonction des flux enregistrés depuis 1999. Le contingentement, je le rappelle, c’était l’essence de la Communauté européenne du charbon et de l’acier : revenons aux sources !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Chevènement

L’Europe ne saurait être l’autel sur lequel la France sacrifierait son industrie automobile. Un tel accord de contingentement ne peut, bien sûr, intervenir que dans le cadre d’un plan d’ensemble d’aide aux PECO, dont nous connaissons la situation économique et financière particulièrement difficile.

Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je veux redire à cette tribune que l’industrie automobile française ne doit pas disparaître ni devenir la variable d’ajustement au regard des difficultés des PECO. Il est temps de remettre en cause les postulats libre-échangistes et les dogmes d’une autre époque. N’immolons pas notre industrie automobile sur l’autel d’un libre-échangisme dévoyé !

Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – Mme Jacqueline Gourault applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, permettez-moi une remarque préalable sur le déroulement de cette séance d’initiative sénatoriale : je compatis avec notre collègue Gérard Cornu, président du groupe d’études sénatorial sur l’automobile, seul participant du groupe UMP à un débat portant sur un sujet essentiel, qui concerne la quasi-totalité de nos départements…

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Voilà tout l’intérêt que porte l’UMP à notre industrie automobile !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

M. Jean-Pierre Bel. Nous avons vraiment beaucoup d’efforts à faire si nous voulons que cette formule des séances d’initiative sénatoriale fonctionne réellement !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La question que nous abordons aujourd’hui est à l’évidence essentielle pour l’économie française et européenne.

L’Europe, il faut le rappeler, est le premier constructeur automobile mondial, avec plus d’un tiers du marché. C’est un secteur primordial pour l’emploi, puisque, en comptant les 7 000 sous-traitants qui produisent les composants automobiles, ce sont 12 millions d’emplois en Europe et 10 % des emplois en France qui en relèvent.

Cela a été dit, l’automobile est l’un des secteurs les plus touchés par la crise. Le nombre des nouvelles immatriculations s’est ainsi effondré de 20 % au dernier trimestre de 2008. Comme pour les autres secteurs industriels, il est impératif que le Gouvernement réagisse selon trois axes, en soutenant la demande, les entreprises fragilisées pour éviter les défaillances en chaîne et, bien sûr, les salariés concernés.

Le Gouvernement a présenté un certain nombre de mesures en faveur du secteur automobile, inscrites dans le collectif budgétaire que nous examinerons la semaine prochaine.

Dès à présent, on peut regretter une certaine lenteur à réagir.

À l’échelon européen, si la Commission a présenté un plan d’action dès le mois de novembre dernier, il ne s’agissait que d’une validation des plans nationaux. C’est seulement le 25 février dernier que la Commission européenne a publié une communication spécifique intitulée Réagir face à la crise de l’industrie automobile européenne, dans laquelle elle reconnaît notamment l’importance du problème de l’accès au financement pour les équipementiers : ceux-ci, situés souvent au bout de la chaîne d’approvisionnement, sont moins diversifiés et moins capitalisés que les constructeurs.

Attendre le mois de février dernier pour réagir témoigne, c’est le moins que l’on puisse dire, d’une impréparation devant la crise économique et sociale et d’une absence de vision stratégique réelle.

On nous a d’abord expliqué que la France échapperait à la crise, avant de nous affirmer qu’elle s’en sortirait mieux que les autres.

Ce flou dans la gestion prévisionnelle, cet aveuglement, volontaire ou involontaire, qui contraignent à réviser chaque mois à la baisse les prévisions de croissance, ont malheureusement des conséquences pour nos concitoyens : le Gouvernement n’a toujours pas pris la véritable mesure de ce qui se passe, ni lancé un plan de relance à la hauteur de la situation, c’est-à-dire un plan combinant encouragement à l’investissement et soutien à la consommation des ménages.

Tout le monde en est convaincu, il faut sortir d’un débat qui pourrait apparaître comme idéologique, pour trouver les chemins de l’efficacité et de l’intérêt général.

Cela ne nous empêche pas de nous interroger sur les contreparties des mesures d’aide. En théorie, les constructeurs devront respecter des engagements en matière d’emploi et d’investissement pendant une durée de cinq ans. Ils sont tenus de ne pas fermer de sites sur le territoire français pendant la durée du prêt qui leur a été accordé. De plus, ils ne pourront procéder à des licenciements en 2009, les éventuelles suppressions d’emplois étant liées à des départs volontaires. Enfin, ils s’engagent à ne pas délocaliser à l’étranger la production de voitures vendues en France.

Néanmoins, on a tout de même le droit d’être sceptique.

Le Gouvernement a beaucoup communiqué sur les délocalisations, annonçant notamment, vendredi dernier, la création de 400 emplois à Flins, grâce au « rapatriement » de Slovénie de l’assemblage de la Clio II. Toutefois, à y regarder de plus près, ce transfert ne durera que de juin à octobre et résulte plus d’un besoin industriel transitoire que d’une véritable relocalisation pérenne, avec maintien des emplois.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Renault souhaite en effet, tout simplement, soulager son site de production slovène. Il ne s’agit donc, hélas, que d’un simple transfert pour une durée très limitée.

Quant aux engagements en matière d’emploi, le scepticisme est tout autant de mise, puisque Renault a annoncé un plan de départs volontaires en juillet, qui concernera 6 000 personnes. Il s’agit d’une véritable saignée infligée aux effectifs.

Quant à PSA, le plan annoncé le 4 décembre dernier prévoit 850 départs volontaires et 900 « redéploiements » d’ouvriers de production vers d’autres sites du groupe, soit, en définitive, la suppression de 1 750 postes.

En regard, les contreparties sociales prévues soulèvent de grandes interrogations, notamment lorsque l’actualité vient démentir certains couplets enflammés sur l’éthique du capitalisme.

Monsieur le secrétaire d’État, je vous le dis à mon tour, et beaucoup, dans les rangs de la majorité, sont prêts à tenir les mêmes propos : arrêtons les discours et les vœux pieux, légiférons sur les stock-options et les somptueuses rémunérations que s’accordent les patrons !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Dans ce domaine, les Français veulent des actes. Mes collègues, notamment Martial Bourquin, l’ont rappelé à plusieurs reprises ce matin.

Par ailleurs, nous ne pouvons que vivement regretter le manque d’intérêt pour les équipementiers automobiles dont témoigne ce plan. Leur survie est pourtant indispensable au maintien de l’industrie automobile, filière vitale pour l’avenir économique de notre pays. Elle est aussi essentielle pour les très nombreuses régions où ces équipementiers, tels que Key Plastics, Heuliez, Goodyear, Continental, Lear, Faurecia ou Schaeffler, sont fortement présents.

Le Gouvernement a créé le fonds de modernisation des équipementiers automobiles, dont la dotation, financée à hauteur des deux tiers par Renault et PSA, atteindra 600 millions d’euros.

Au vu de l’ampleur de la crise, un tel montant est largement insuffisant : tous les intervenants et l'ensemble des observateurs l’ont souligné.

Il est indispensable que la création de ce fonds soit accompagnée d’autres mesures spécifiques d’accès au financement et d’un véritable plan d’aide. Aux États-Unis, l’État fédéral a annoncé, le 19 mars dernier, une aide de 5 milliards de dollars aux équipementiers américains pour traverser la crise. Où est le plan, français ou européen, qui pourrait soutenir la comparaison ?

Par ailleurs, monsieur le secrétaire d'État, je souhaite attirer votre attention sur la situation particulière de l’entreprise Michel Thierry, située dans mon département. Elle est le leader mondial dans le domaine du textile et du cuir destiné à l’industrie automobile et emploie directement plus de 500 salariés.

Depuis plusieurs mois, cette société subit elle aussi l’effondrement du marché automobile et connaît, en conséquence, de graves problèmes de trésorerie. Les CDD et les contrats d’intérim n’ont pas été reconduits, et un plan de 130 départs est prévu. C’est beaucoup pour une petite région comme la nôtre, qui compte 20 000 habitants. Voilà une quinzaine d’années, l’industrie textile comptait 5 500 emplois ; aujourd’hui, il en reste moins de 2 000, et le fleuron de ce secteur, l’entreprise Michel Thierry, est donc confronté à de lourdes difficultés.

Certes, cette entreprise sera éligible au fonds souverain industriel, mais elle devra patienter avant de percevoir des aides et, entre-temps, elle a besoin d’être soutenue par les banques au travers de l’octroi de prêts-relais. Or, aujourd’hui, nous sommes dans l’expectative, ne sachant pas si Michel Thierry, qui, chez nous, représente près de 1 000 emplois directs ou indirects, pourra survivre, tout simplement parce que les banques ne jouent pas le jeu.

Mme Lagarde a déclaré : « Société générale doit rimer avec intérêt général. »

M. Jean Desessard s’esclaffe.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Elle a raison. Je sais que vous avez déjà été alerté sur les difficultés de l’entreprise Michel Thierry, monsieur le secrétaire d’État. Je forme le vœu que, ensemble, nous réussissions à la sauver, car cela est absolument indispensable pour notre région.

Je regrette qu’aucune contrepartie aux sommes accordées aux constructeurs automobiles n’ait été demandée en ce qui concerne les rapports entre les sous-traitants et les donneurs d’ordre, rapports qui posent beaucoup de problèmes.

Les constructeurs automobiles poussent, au final, leurs sous-traitants à la délocalisation, en leur imposant, chaque jour un peu plus, de diminuer leurs coûts, jusqu’au seuil de l’impossible. Cela a inévitablement de lourdes conséquences, en termes d’emploi et de conditions de travail, dans des bassins d’emploi aujourd’hui sinistrés.

Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, même si nous devons profiter de la crise pour repenser l’économie automobile, en imaginant d’autres modes de production et d’autres modèles à construire, il n’en reste pas moins qu’il y a urgence.

Les mesures à prendre face à la crise doivent intégrer un principe salvateur, celui de l’immédiateté et de l’efficacité. De ce point de vue, il est clair que si nous n’agissons pas avec beaucoup plus de volontarisme, les inquiétudes ne feront que croître. J’espère au moins que notre débat de ce matin aura contribué à faire prendre conscience qu’il n’y a vraiment plus de temps à perdre !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Mme Jacqueline Gourault applaudit également.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, secrétaire d’État chargé de l’industrie et de la consommation, porte-parole du Gouvernement

M. Luc Chatel, secrétaire d’État chargé de l’industrie et de la consommation, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite tout d’abord remercier M. Sueur d’avoir posé cette question sur la crise actuellement traversée par l’industrie automobile, qui est un sujet de préoccupation sur toutes les travées de votre assemblée.

Murmures sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Pierre Signé

Ils ne s’y intéressent pas beaucoup à l’UMP, vu le nombre de présents !

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, secrétaire d’État

Je me réjouis que la réforme constitutionnelle ait instauré les semaines d’initiative parlementaire, permettant notamment le contrôle de l’activité du Gouvernement et la tenue de ce type de débat.

En préambule, je souhaite rappeler les raisons de l’engagement de l’État et de l’ensemble des partenaires dans le pacte automobile.

La gravité de la crise justifiait l’ampleur de la réaction du Gouvernement, d’autant que le secteur de l’automobile a été le premier à être touché de plein fouet.

Ce secteur a en effet besoin de liquidités abondantes et d’un large accès aux marchés financiers. Or, dès le début du mois de novembre, l’ensemble des constructeurs mondiaux se sont trouvés dans l’impossibilité de financer non seulement leurs investissements, mais aussi leur activité industrielle courante.

Le secteur de l’automobile a ensuite subi l’effondrement de la demande. Souvenez-vous : lors du Mondial de l’automobile, au début du mois d’octobre dernier, les chiffres marquaient encore une croissance de l’activité de l’industrie automobile pour le premier semestre de 2008. La crise financière a provoqué un effondrement de la demande : la répercussion a été immédiate, les industriels prenant les premières décisions d’arrêt de lignes de production dès le mois de décembre. En outre, les constructeurs ont commencé à déstocker, ce qui a entraîné un gel des commandes à leurs fournisseurs de premier et de deuxième rangs.

Une deuxième raison justifiant notre mobilisation tient naturellement au poids de l’industrie automobile dans notre pays.

Le secteur automobile occupe en effet près de 10 % de la population active, depuis la sous-traitance jusqu’à la distribution, en tenant compte de l’ensemble des emplois directs ou indirects. En tant qu’élu d’un département à la fois rural et industriel, je sais l’importance, pour nos territoires, de tout ce tissu de PME de la forge, de la fonderie, de la plasturgie, du décolletage, qui travaille en sous-traitance pour l’industrie automobile.

Par ailleurs, l’automobile représente 1 % du produit intérieur brut français, mais 15 % de l’effort de recherche et développement. Elle constitue donc un facteur d’innovation essentiel pour notre économie. Cela explique aussi notre mobilisation.

Troisième facteur motivant notre engagement, la crise est toujours plus longue dans l’automobile que dans d’autres secteurs.

Ainsi, après les trois précédentes crises économiques mondiales que nous avons connues – les deux chocs pétroliers et la récession de 1993 –, il avait fallu de trois à cinq ans pour que le secteur de l’automobile retrouve le volume de ventes qu’il réalisait antérieurement.

Il était d’autant plus nécessaire d’apporter une réponse forte à la crise actuelle que cette dernière ne saurait masquer, comme l’a fort justement rappelé M. Cornu, les difficultés structurelles de la filière automobile. Au-delà de la crise financière et de la récession mondiale, l’automobile est victime d’une crise de son modèle économique, marquée par une évolution de la demande des consommateurs. Les constructeurs expliquent qu’ils avaient bien perçu un changement des attentes de leurs clients, qui souhaitent désormais des véhicules plus propres, moins tape-à-l’œil.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

M. Daniel Raoul. Moins « bling-bling » !

Sourires sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, secrétaire d’État

Le « tout-bagnole » est peut-être derrière nous.

Toujours sur le plan structurel, il faut souligner que, en 2008, notre pays, qui a contribué à l’invention de l’automobile voilà plus de cent ans, a été pour la première fois importateur net de véhicules automobiles. Cela veut bien dire qu’une dérive s’est opérée depuis quelques années. En cinq ans, la production automobile française a baissé de près de 1 million d’unités, passant de 3 millions de véhicules à un peu plus de 2 millions aujourd’hui.

Il fallait enrayer cette tendance. La crise nous impose certes de répondre à l’urgence, mais, sur un plan plus structurel, nous devons également faire en sorte que la filière automobile redevienne un secteur industriel d’avenir pour notre pays, d’où la démarche inédite que nous avons engagée. Je crois, monsieur Sueur, que les mesures prises sont à la hauteur des difficultés.

Au mois de décembre, nous avons mis en place un comité stratégique pour l’avenir de l’automobile. Songez, mesdames, messieurs les sénateurs, que jamais auparavant les acteurs de la filière – constructeurs, équipementiers, sous-traitants de premier, deuxième et troisième rangs, mais aussi représentants des salariés, élus, responsables des pôles de compétitivité, etc. – ne s’étaient trouvés ainsi réunis pour parler de leur avenir et travailler ensemble ! Ils se voient quotidiennement pour discuter des produits, des prix et négocier, mais c’est la première fois qu’ils disposent d’un tel lieu de concertation, d’échange et de débat. Ce comité stratégique permet à toute la filière automobile de prendre le temps d’une réflexion commune sur la construction de son avenir.

Les états généraux de l’automobile du 20 janvier dernier, auxquels vous avez été un certain nombre à participer, mesdames, messieurs les sénateurs, s’inscrivaient dans la même démarche. Ils ont permis de mettre en place le pacte automobile.

Ce pacte est un plan massif, permettant d’agir en même temps sur cinq leviers. Cette dénomination de « pacte » suppose des engagements mutuels et des contreparties aux aides apportées. J’y reviendrai dans un instant.

La priorité était de répondre aux difficultés rencontrées par les constructeurs, qui sont à l’origine de la crise du secteur. S’il n’y a plus de constructeurs, monsieur Sueur, il n’y a plus de filière ! Il nous fallait donc d’abord éviter la faillite des constructeurs automobiles, faire en sorte qu’ils puissent trouver des liquidités. Songez que les deux constructeurs automobiles français ne parviennent pas, aujourd’hui encore, à se financer sur le marché obligataire !

Nous avons décidé de soutenir l’activité des constructeurs en accordant des prêts participatifs à Renault, à PSA et au fabricant de camions Renault Trucks. Il ne s’agit pas de « cadeaux ». Cette mesure était une façon de répondre à l’urgence. Elle aura une incidence sur toute la filière, car la meilleure aide aux équipementiers, qui sont au cœur de notre discussion, c’est un redémarrage des commandes passées par les donneurs d’ordre, c’est-à-dire les constructeurs.

Pour relancer l’activité des constructeurs, il convenait également d’apporter une aide à leurs clients. Je rappelle que, en France, deux véhicules neufs sur trois sont achetés à crédit. Or une crise totale du crédit s’était installée, qui frappait notamment les filiales bancaires des constructeurs. D’une manière quelque peu paradoxale, celles-ci avaient resserré leurs conditions de prêt. C’est pourquoi le Gouvernement a décidé de consacrer 1 milliard d’euros à une relance du crédit à la consommation.

La prime à la casse est également une mesure destinée à encourager la consommation. Trois mois après le début de sa mise en œuvre, que constatons-nous ? Le marché européen de l’automobile, à la fin du mois de février, avait reculé de 22 %, le marché britannique de 28 %, le marché espagnol de 45 %, le marché français de 10 %... Certes, il existe des tensions pour certains modèles, les consommateurs se tournant vers les véhicules économiques, comme les Clio ou les 207, dont les ventes ont progressé de 52 %, tandis que celles de Laguna ou de 407 ont baissé de 22 %. Cette inadéquation ponctuelle ne concerne pas uniquement les constructeurs français. Lorsque le marché aura repris, ce phénomène sera lissé.

Naturellement, monsieur Bourquin, nous réfléchissons à l’après-prime à la casse, l’échéance du dispositif étant fixée au 1er janvier 2010. Nous ne voulons pas que la fin de la prime à la casse ait une répercussion négative immédiate sur l’activité du secteur automobile, et nous nous montrerons très vigilants à cet égard. Le système du bonus-malus, pour sa part, s’appliquera jusqu’en 2012.

Le deuxième axe de notre action est le soutien aux équipementiers.

Monsieur Bel, je ne peux vous laisser dire que le Gouvernement se désintéresserait du sort des équipementiers et des sous-traitants. Cette question est au cœur de notre action.

La mise en place du fonds de modernisation des équipementiers automobiles a donné lieu à une discussion difficile. Mon idée était d’amener les donneurs d’ordre à soutenir leurs sous-traitants, comme cela a été fait dans le secteur de l’aéronautique avec les fonds Aerofund I et II. Nous avons fini par obtenir gain de cause, et des engagements sur ce point ont été inscrits, à titre de contreparties, dans les contrats des prêts accordés aux constructeurs automobiles. Un tour de table a permis de doter le fonds de modernisation des équipementiers automobiles de 600 millions d’euros, 200 millions d’euros étant apportés par chacun des deux constructeurs et 200 millions d’euros par l’État.

Des prises de participation chez des équipementiers ont déjà été annoncées. On peut certes trouver que les choses ne vont pas assez vite, monsieur Sueur, mais nous n’en sommes qu’au début du processus : le pacte automobile a été lancé le 9 février dernier, et l’accord de la Commission européenne pour la mise en place du fonds de modernisation des équipementiers automobiles a été donné le 28 février, il y a moins d’un mois.

Une trentaine de dossiers sont en cours, et leur nombre croît chaque jour. Ce fonds n’a d’ailleurs pas vocation à concerner l’ensemble des PME de France ; il s’agit de prendre des participations dans le capital d’entreprises moyennes qui ont besoin d’un renforcement de leurs fonds propres, souvent moins importants que ceux d’entreprises allemandes comparables, afin de mieux traverser la crise. C’est sur ces entreprises que nous pourrons construire une filière automobile d’avenir, consolidée, moderne et compétitive.

Nous voulons également éviter d’enfreindre la réglementation européenne en la matière : dans le secteur agricole, on rembourse aujourd’hui des aides octroyées par l’État en contradiction avec la réglementation européenne !

La création du fonds de modernisation des équipementiers automobiles n’est que l’une des mesures destinées à soutenir la filière.

Pour répondre à une demande très forte des sous-traitants, nous avons décidé de porter à 90 % la garantie d’Oseo. Plutôt que d’inventer une usine à gaz, nous avons jugé plus efficace de renforcer un dispositif éprouvé, souple, bien connu des chefs d’entreprise, relayé par les régions et adapté aux besoins des petites et moyennes entreprises.

M. Cornu a très bien rappelé que la loi de modernisation de l’économie comporte une mesure très favorable aux équipementiers et aux sous-traitants : la réduction des délais de paiement leur est particulièrement destinée. Cela permet de transférer 1 milliard d’euros des constructeurs aux équipementiers et aux sous-traitants, qui ont bien besoin d’une telle somme en cette période de crise !

J’invite donc les détracteurs de l’action du Gouvernement à additionner l’ensemble de ces mesures substantielles prises en faveur des équipementiers et de la sous-traitance, sachant que je n’ai pas encore évoqué les dispositions fiscales en faveur de la compétitivité !

En outre, dans un climat tendu, nous avons eu des discussions dures, parfois violentes, avec les donneurs d’ordre pour leur imposer un changement de leurs pratiques à l’égard des sous-traitants. Ils doivent cesser d’obliger ceux-ci à délocaliser une partie de leur production dans des pays De telles clauses figuraient bel et bien dans des contrats d’approvisionnement de constructeurs automobiles français, mais nous avons obtenu leur suppression ! Hier encore, j’ai demandé aux dirigeants de Renault de sensibiliser leur direction des achats sur ce point. M. Cornu peut témoigner qu’un sous-traitant a apporté la preuve, au cours d’un comité stratégique, des pratiques déloyales d’un donneur d’ordre. La situation a été immédiatement corrigée par le constructeur en question.

Le code de bonnes pratiques prévoit dorénavant un partage plus équitable du risque et des investissements entre sous-traitants et constructeurs, les premiers ne devant pas tout supporter pour le compte des seconds. Cela vaut, par exemple, pour la prise en charge du coût des modèles dans le secteur de la plasturgie. Il s’agit là aussi d’une réelle avancée.

Enfin, les sous-traitants ont besoin d’améliorer leur compétitivité, afin que leurs produits se vendent mieux.

Dans cette optique, nous avons mis en place deux mesures pour aider les sous-traitants, petits ou gros, à améliorer la gestion de leur production.

Voilà quelques jours, j’ai lancé, à l’École catholique des arts et métiers de Lyon, le projet d’usine modèle, qui consiste à former chaque année 200 ingénieurs aux techniques de Celles-ci pourront ainsi être diffusées dans l’ensemble de la filière.

Par ailleurs, dans le cadre du pacte automobile, j’ai annoncé la mise à disposition des directions régionales de l’industrie, de la recherche et de l’environnement, les DRIRE, d’une somme de 15 millions d’euros destinée à aider les PME à améliorer la gestion de leur production, donc leur compétitivité et, finalement, leurs ventes.

Le troisième volet du pacte automobile a pour objet de soutenir l’emploi et le développement des compétences.

Naturellement, notre objectif partagé est de maintenir l’outil de production et de sauvegarder des compétences humaines reconnues pendant cette crise, afin de préserver les capacités de l’industrie automobile française dans l’attente de la reprise.

Dans cette optique, la principale mesure prise concerne le chômage partiel. Eu égard au ralentissement d’activité sans précédent que nous constatons, le quota d’heures a été porté à 1 000 par an pour permettre au secteur automobile de traverser la crise. Surtout, la charge des entreprises est allégée par un relèvement de la part de l’indemnisation des salariés assumée par l’État. Cette indemnisation est portée à hauteur de 95 % du SMIC, soit quasiment l’équivalent du salaire net.

Je souligne, monsieur Sueur, que nous avons assorti ces mesures relatives au chômage partiel de deux contreparties fortes : l’interdiction de licencier les salariés concernés durant une période au moins équivalente au double du temps de chômage partiel qui a été accordé ; l’obligation de proposer une formation d’au moins dix jours aux salariés pendant leur temps de chômage partiel. Cette seconde contrepartie avait d’ailleurs été recommandée par les organisations syndicales.

C’est aussi pour soutenir l’emploi que la charte automobile a été signée l’été dernier entre Christine Lagarde, les représentants des syndicats et les constructeurs automobiles.

L’idée est de mieux anticiper les évolutions des besoins des entreprises dans le domaine automobile. Par exemple, une convergence est intervenue entre les métiers de la production et ceux de la distribution automobile, alors que ces filières étaient auparavant totalement distinctes. L’avènement de l’électronique les a fortement rapprochées. Sous réserve d’une formation et d’une adaptation des compétences préalables, cela permettra d’ouvrir à des salariés qui perdraient leur emploi dans la production 10 000 emplois aujourd’hui disponibles dans le secteur de la distribution.

Nous menons ces actions en concertation avec les organisations syndicales, monsieur Sueur. Au cours des deux derniers mois, j’ai reçu à quatre reprises les représentants des branches spécialisées des organisations syndicales pour échanger avec eux et entendre leurs propositions, dont nous avons repris un certain nombre dans le pacte automobile. Ils participent tous les mois au comité stratégique pour l’avenir de l’automobile, dont la prochaine réunion se tiendra le 1er avril. Vous le voyez, nous associons donc très étroitement à notre action les représentants des syndicats.

Bien sûr, ces mesures en faveur de l’emploi et du développement des compétences prennent un relief tout à fait particulier avec les fermetures d’usines et les restructurations que nous connaissons aujourd’hui. Comme le Président de la République l’a annoncé, le Gouvernement a décidé de renforcer sa politique concernant les restructurations.

Monsieur Danglot, ce n’est pas, à mon sens, en interdisant les licenciements que l’on règlera la situation ! Interdire les licenciements aujourd’hui, c’est interdire les embauches demain ! Je ne crois donc pas que ce soit la solution…

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, secrétaire d'État

Le vrai remède, monsieur Danglot, c’est que tout salarié victime du ralentissement d’activité économique se voie proposer soit un autre emploi, soit une formation, soit le maintien d’un niveau de revenu qui lui permette de traverser la crise. Dans cette perspective, nous avons retenu une proposition de la CFDT de créer un fonds social qui sera affecté à l’accompagnement des mutations économiques par l’aide à la reconversion des salariés victimes de la crise.

Suivant la même démarche, nous avons décidé de nommer des commissaires à la réindustrialisation dans les bassins de vie les plus durement frappés par la crise. J’aurai ainsi l’occasion, dans les prochains jours, d’installer à ce poste M. Claude Trink dans le département de l’Oise, emblématique des difficultés actuelles.

Un certain nombre d’entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, ont appelé mon attention sur quelques cas précis qui font l’actualité.

Madame Goulet, je puis vous indiquer que l’État a aidé l’actionnaire principal de Faurecia. Hier, devant la commission à laquelle vous appartenez, le président de PSA a annoncé qu’il prendrait ses responsabilités en recapitalisant sa filiale Faurecia.

En outre, l’État a joué un rôle important de médiation, notamment sur le site d’Auchel. La production a pu reprendre, ce qui est un point important car les usines de plusieurs constructeurs automobiles se trouvaient bloquées. Naturellement, l’État sera particulièrement attentif à la mise en œuvre du plan de sauvegarde de l’emploi et à l’indemnisation des salariés concernés.

Madame Gourault, le cas du groupe Delphi constitue un nouvel exemple d’intervention de l’État, débouchant en l’occurrence sur un remboursement anticipé du crédit d’impôt recherche. Je reviendrai sur cette mesure essentielle.

Monsieur Bel, le dossier de la société Michel Thierry est entre les mains du Comité interministériel de restructuration industrielle, le CIRI. Il est particulièrement difficile, les besoins de trésorerie de cette entreprise étant évalués, pour l’année 2009, à une vingtaine de millions d’euros. Nous mobilisons néanmoins nos équipes pour essayer de parvenir coûte que coûte à une solution.

Le quatrième volet du pacte automobile est consacré à la compétitivité.

Préserver l’avenir de notre industrie automobile suppose d’entretenir, chez les industriels, l’envie d’investir et de fabriquer des voitures en France. Sinon, dans cinq ans, la production sera tombée de 2 millions à 1 million de véhicules !

Une étude minutieuse de la situation a fait apparaître que le prix de revient moyen d’un véhicule est de quelque 11 000 euros en France, contre 10 000 euros dans les pays low cost, soit 1 000 euros d’écart. Ce différentiel de 10 % est certes non négligeable, mais il est possible de l’effacer en grande partie si nous agissons simultanément dans plusieurs directions.

Dans le domaine de la fiscalité, la taxe professionnelle est une spécificité française. C’est elle qui pénalise au premier chef notre industrie, plus particulièrement l’industrie automobile.

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, secrétaire d'État

La taxe professionnelle sera supprimée, dès cette année, pour tous les nouveaux investissements. La suppression portera, l’année prochaine, sur un tiers du montant de la taxe, soit 8 milliards d’euros. Mesdames, messieurs les sénateurs, c’est une bonne nouvelle pour l’industrie française et la compétitivité de notre secteur automobile !

Debut de section - PermalienPhoto de René-Pierre Signé

Vous oubliez de dire que cette taxe est transférée aux contribuables !

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, secrétaire d'État

Accessoirement, monsieur Sueur, vous pourrez constater, vous qui êtes amateur d’additions, qu’au total ce sont 600 millions d’euros que le Gouvernement affecte directement à l’industrie automobile !

Autre mesure en faveur de la compétitivité, nous avons décidé d’anticiper le remboursement du crédit d’impôt recherche. Le taux actuel de remboursement, qui est de 30 %, est le plus fort des pays de l’OCDE. Le secteur automobile est le premier bénéficiaire de ce dispositif.

Toujours en matière de soutien à la compétitivité, les PME de la sous-traitance vont bénéficier de mesures visant à promouvoir le lean management. Il s’agit d’améliorer la gestion de la production, comme les Japonais l’ont fait avant nous, afin d’abaisser les prix de revient et de rendre nos entreprises plus compétitives.

Le dernier volet du pacte automobile a trait à l’innovation.

Monsieur Bourquin, nous croyons aux véhicules propres, nous croyons aux véhicules électriques. Afin d’encourager leur développement, nous mobilisons des moyens importants au travers du fonds démonstrateur de recherche de l’Agence de l’environnement de la recherche et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, et des prêts bonifiés instaurés dans le cadre du Grenelle de l’environnement.

Le pacte automobile prévoit de coordonner des actions et des initiatives aujourd’hui dispersées. Nous allons les fédérer par le biais d’un consortium, afin de favoriser la mise au point d’une solution française en matière de véhicules électriques. Il serait inconcevable que notre pays, qui compte deux des huit premiers constructeurs automobiles mondiaux et de grands énergéticiens, ne dispose pas d’une telle filière dans les années à venir !

Dans le même esprit, nous nous penchons sur la question des infrastructures. Avec Chantal Jouanno, nous avons installé un groupe de travail ad hoc. Comment équiper l’ensemble du territoire en bornes de rechargement ? En effet, il est très bien de mettre au point des véhicules électriques, mais cela ne servira pas à grand-chose si l’on ne peut les recharger facilement.

Par ailleurs, j’ai eu l’occasion de dire hier aux salariés d’Heuliez que l’État ne laisserait pas tomber ce groupe. Il n’est cependant pas question de le nationaliser, aussi devons-nous trouver un partenaire économique et industriel. J’ai entendu le conseil régional exprimer sa volonté politique d’intervenir ; j’attends qu’il traduise en actes les engagements annoncés, pour un montant de 5 millions d’euros. Pour l’instant, seuls 3 millions d’euros ont été votés par la commission permanente du conseil régional. Cela dit, il faut surtout mettre en place un tour de table réunissant des partenaires industriels. Mon équipe et moi-même agirons en ce sens au cours des prochains jours.

Enfin, de nombreux orateurs m’ont interrogé sur les contreparties aux aides de l’État. À cet égard, j’ai parlé de pacte « donnant-donnant ».

En premier lieu, nous avons exigé la non-fermeture de sites industriels en France. En effet, comment imaginer que les usines continuent de fermer alors que le contribuable est sollicité et que l’ensemble des acteurs se mobilisent en faveur de la filière automobile ?

Cela ne signifie pas, pour autant, que nous tombions dans le protectionnisme. J’indique d’ailleurs à Mme Escoffier que nous n’avons pas voulu prendre de mesures tendant à imposer aux constructeurs de ne travailler qu’avec des sous-traitants français. Cela aurait été, à mon sens, une erreur très grave, car notre pays compte sur son territoire de très nombreuses entreprises industrielles à capitaux étrangers qui fournissent des emplois et contribuent à notre dynamisme économique, toutes choses dont nous avons besoin.

Le comité stratégique pour l’avenir de l’automobile comprend d’ailleurs des représentants des groupes Bosch, Iveco et Renault Trucks, dont l’actionnaire principal est aujourd’hui Volvo. La France a besoin de capitaux étrangers. Par conséquent, prendre des mesures protectionnistes nous exposerait à un désastreux retour de bâton. De surcroît, de telles mesures seraient en contradiction avec les règles européennes.

En deuxième lieu, nous avons exigé que des engagements soient pris en matière de gouvernance, excluant le versement de bonus, les éventuels bénéfices devant être affectés en priorité à l’investissement et au renforcement des fonds propres.

En troisième lieu, nous avons fait expressément figurer dans les conventions signées le 9 février dernier, à l’Élysée, en présence du Président de la République, un engagement des constructeurs automobiles en faveur de la filière. Nous les avons sollicités pour boucler le fonds de modernisation des équipementiers automobiles.

Le contrôle du respect de ces engagements sera assuré, monsieur Bourquin, par le comité stratégique pour l’avenir de l’automobile. Le Parlement y est associé, puisque les présidents des groupes d’études sur l’automobile de l’Assemblée nationale et du Sénat participent aux travaux de ce comité, ce qui me paraît important.

En outre, nous avons des échanges permanents avec la Commission européenne depuis le mois de juin 2008. Le Président de la République a demandé la mise en œuvre d’un plan européen en faveur de l’automobile. À défaut d’un tel plan, la France a été le premier État membre de l’Union européenne à prendre des initiatives. L’ensemble des pays dotés d’une industrie automobile forte ont d’ailleurs suivi son exemple et institué des plans comparables.

Pour conclure, je ne crois pas, monsieur Sueur, que ce plan ne soit pas adapté aux besoins des équipementiers et à la gravité de la situation. Je ne pense pas non plus, monsieur Bel, qu’il manque de vision. Sa mise au point a fait l’objet d’une large concertation, en amont, avec l’ensemble des acteurs de la filière, lors des états généraux de l’automobile.

Cette démarche est bien accueillie. Sur le terrain, je présente le pacte automobile dans les grandes régions de production. Je me suis ainsi rendu, notamment, à Douai, en région Rhône-Alpes et en Lorraine.

Dans le Nord-Pas-de-Calais, le président du conseil régional, qui n’est pas précisément un membre de la majorité gouvernementale, a pris publiquement la parole pour exprimer son soutien au pacte automobile, estimant que ces mesures allaient dans le bon sens pour répondre à la crise que traverse actuellement le secteur de l’automobile.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, secrétaire d'État

Ce plan a d’ailleurs été repris, j’y insiste, par les principaux pays producteurs d’automobiles en Europe.

Comme l’a très bien dit M. Cornu, nous devons aussi délivrer un message d’avenir. Je crois en l’avenir de l’automobile en France, pour peu que ce secteur tienne compte de l’évolution des attentes des consommateurs. L’émergence d’un certain nombre de pays représentant d’importants réservoirs de croissance suscitera des besoins considérables à l’échelle mondiale. Il convient de reconnaître la mutation des technologies et du modèle de l’automobile, et de s’y préparer. Notre industrie automobile est bien armée pour cela, elle avait simplement besoin d’être soutenue au travers d’un plan massif. Tel est précisément l’objet du pacte automobile.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, auteur de la question.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Monsieur le secrétaire d’État, comme vous l’aurez constaté, tous les intervenants ont fait preuve d’un grand souci de réalisme. Sans démagogie aucune, chacun a expliqué ce qu’il percevait et connaissait de la réalité, à l’échelle tant départementale que nationale.

Lorsque M. le président de la région Nord-Pas-de-Calais exprime son souhait de coopérer avec le Gouvernement pour trouver les meilleures solutions, lorsque Mme la présidente de la région Poitou-Charentes propose d’apporter son concours, en concertation avec le Gouvernement, cela témoigne simplement du fait que nous voulons avant tout répondre concrètement aux difficultés que rencontrent les entreprises du secteur automobile, des constructeurs aux sous-traitants et aux équipementiers. Personne ne comprendrait que les considérations politiciennes prennent le pas sur cette préoccupation.

Monsieur le secrétaire d’État, je vous livrerai très franchement le sentiment que m’inspire la réponse que vous avez bien voulu nous donner et que j’ai écoutée avec beaucoup d’attention.

Votre analyse de la situation me paraît tout à fait pertinente, notamment lorsque vous évoquez le déstockage, la longueur particulière des crises dans le secteur automobile, les évolutions des attentes de la clientèle, etc. Nos diagnostics ne divergent donc guère.

Par ailleurs, vous avez détaillé avec beaucoup de clarté les mesures annoncées par le Gouvernement et les décisions qu’il a prises.

Cependant, vos réponses aux questions précises que nous vous avons posées nous ont laissés sur notre faim. Je reviendrai donc succinctement sur trois d’entre elles, en espérant que mes observations pourront nourrir votre réflexion et inspirer votre action.

S’agissant tout d’abord du fonds de modernisation des équipementiers automobiles, le FMEA, vous nous avez dit qu’il s’agissait de soutenir des entreprises viables, ayant des perspectives et un avenir : soit ! Cependant, comme je l’ai indiqué tout à l’heure, le directeur général du fonds stratégique d’investissement a déclaré qu’il aiderait les entreprises présentant « le meilleur potentiel technique, le meilleur potentiel de croissance, le meilleur potentiel d’exportation et de savoir-faire ». Voilà de mirifiques entreprises !

Dans le même ordre d’idées, s’agissant d’Oseo, il a été dit que « la garantie ne sera accordée qu’aux entreprises fondamentalement saines et qui n’étaient pas en difficulté financière avant l’été 2008 ».

Or nous connaissons la réalité des entreprises. Même s’il est tout à fait pertinent de vouloir aider les entreprises dont les perspectives sont prometteuses et les références excellentes, nous avons néanmoins l’impression qu’existe un décalage entre cet idéal et la situation concrète de dizaines d’entreprises qui se trouvent aujourd’hui dans le brouillard. Celles-ci ne demandent actuellement qu’à passer le cap, à ne pas être contraintes de licencier ou de fermer leurs portes, à conserver des capacités de production.

Nous persistons donc à penser que les moyens des fonds précités doivent être accrus et que les critères ouvrant le bénéfice des aides doivent être assouplis et rendus moins sélectifs, sans pour autant prétendre que chaque situation ne doit pas être analysée. Il s’agit d’être très réalistes, dans une période de grave crise imposant que des mesures exceptionnelles soient prises.

Par ailleurs, en matière de contreparties, nous pensons que l’on peut aller plus loin. Quand le Gouvernement et, surtout, le Président de la République le veulent, bien des choses deviennent possibles !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

À cet égard, vous avez évoqué la suppression de la taxe professionnelle, sujet qui n’est pas de nature à nous rassurer. En effet, le Président de la République l’a annoncée, mais il n’a toujours pas indiqué par quoi elle serait remplacée. Qui paiera ? Les entreprises ou les citoyens ? Tant que nous n’aurons pas obtenu de réponse à cette question, nous demeurerons dans l’incertitude et l’inquiétude.

Pour en revenir aux contreparties, notre collègue Martial Bourquin a évoqué ce patron touchant 1 000 euros par licenciement : 1 000 licenciements étant prévus – nous espérons bien sûr qu’ils n’auront pas lieu –, la somme totale dont il bénéficiera est tout de même rondelette ! Aux yeux des salariés que nous connaissons et côtoyons, cette situation est inadmissible !

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Gérard Cornu applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Il serait possible d’agir vite pour corriger de telles anomalies : lorsque le Président de la République émet l’idée de supprimer les pôles de l’instruction, un amendement visant à la mettre en œuvre est déposé dès le mardi matin suivant, et voté par certains d’entre nous dès le mercredi soir. Voilà qui est très rapide ! Je crois donc que des décisions pourraient être prises bien plus rapidement sur la question des contreparties.

Ma dernière observation portera sur l’urgence de la situation. Mon collègue le président du groupe socialiste, Jean-Pierre Bel, m’a demandé, à juste titre, d’insister à nouveau sur ce point.

Nous demandons que toutes les entreprises concernées par le dispositif soient reçues dans les préfectures, pour y être aidées et incitées à déposer rapidement des dossiers bien construits. Nous demandons qu’une cellule de crise permanente soit constituée au sein du ministère pour examiner au plus vite ces dossiers.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

M. Jean-Pierre Sueur. Vous nous avez indiqué que trente dossiers avaient déjà été déposés et que ce nombre croissait chaque jour, mais le journal Le Monde affirme, pour sa part, qu’un seul dossier a pour l’heure été examiné et que deux autres sont supposés l’être bientôt. Voilà qui n’est pas à la mesure du problème ! Il est absolument nécessaire d’aller très vite.

M. Raymond Vall applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Pour conclure, j’évoquerai les récents propos tenus par M. le Président de la République, selon lesquels il jouit d’une excellente forme physique, mentale et intellectuelle. Il a d’ailleurs utilisé une métaphore fruitière pour indiquer à quel point il se porte bien ! Cela contraste singulièrement avec ce que nous disent tous les jours de leur état de forme nos concitoyens, notamment les salariés de la sous-traitance automobile…

Nous attachons quelque prix au réalisme et à la modestie. Nous souhaitons des réponses concrètes, des circuits de décision courts, un rythme de traitement des dossiers adapté à l’urgence des problèmes, des fonds suffisants et la prise en compte de la situation effective des entreprises. En nous exprimant comme nous l’avons fait ce matin, nous sommes vraiment au diapason de nos concitoyens, et nous espérons, monsieur le secrétaire d’État, que vous nous aurez entendus !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Pierre Signé

Le Président de la République a la même attitude que Louis XVI le 14 juillet 1789 !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

En application de l’article 83 du règlement, je constate que le débat est clos.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Je rappelle que la commission des affaires sociales a proposé deux candidatures pour un organisme extraparlementaire.

La présidence n’a reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 9 du règlement.

En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame Mme Claire-Lise Campion et M. André Lardeux membres du Haut conseil de la famille.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L’ordre du jour appelle la discussion de la question orale avec débat n° 29 de M. Simon Sutour à M. le ministre d’État, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire sur l’avenir des services publics dans les zones rurales.

Je demande à chaque intervenant de bien vouloir faire un effort pour ne pas dépasser le temps de parole qui lui est imparti. En effet, nous avons commencé la séance avec cinquante minutes de retard sur l’horaire prévu et la discussion de la précédente question orale a excédé de plus d’un quart d’heure la durée qui lui était dévolue.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Monsieur le président, je souhaite vous interroger sur l’organisation de nos travaux, qui portent aujourd’hui sur des questions d’une importance majeure. Comment envisagez-vous la suite de nos débats ? La fin de la discussion de la question orale de M. Sutour sera-t-elle reportée à cet après-midi ? Nous souhaiterions obtenir une réponse claire, étant donné les retards d’ores et déjà enregistrés.

Il me semble d’ailleurs qu’il conviendra de tirer les enseignements du déroulement de cette séance en évitant, à l’avenir, de surcharger l’ordre du jour, quel que soit l’intérêt des thèmes abordés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Monsieur Fischer, la difficulté tient au fait que la précédente séance a été levée plus tard que prévu cette nuit, ce qui a décalé d’autant l’ouverture de notre séance d’aujourd’hui. Voilà pourquoi j’ai appelé les orateurs à faire un effort pour respecter leur temps de parole.

Monsieur le secrétaire d’État, il me paraît difficilement envisageable d’achever la discussion de cette question orale dans la matinée. Quel est votre sentiment à cet égard ?

Debut de section - Permalien
Hubert Falco, secrétaire d'État chargé de l'aménagement du territoire

Monsieur le président, je suis évidemment à la disposition du Sénat, mais je suis également tenu par certaines obligations cet après-midi : je souhaite donc que nous allions au terme de cette discussion dans la matinée, dût-elle se prolonger jusqu’à 13 heures 45 !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Il est donc d’autant plus nécessaire de ne pas aggraver encore notre retard !

La parole est à M. Simon Sutour, auteur de la question.

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je suis heureux que, dans le cadre de cette journée mensuelle réservée aux groupes de l’opposition et aux groupes minoritaires, les territoires ruraux bénéficient d’une attention particulière, tant leur situation actuelle est difficile. Mettre l’accent sur les zones rurales n’est pas vraiment dans l’air du temps, les métropoles mobilisant souvent toute l’attention…

Les territoires ruraux sont donc oubliés, alors qu’ils sont durement frappés, eux aussi, par la crise économique, et doivent en outre faire face à un désengagement massif de l’État, d’une ampleur sans précédent.

Mon intervention ne sera pas polémique ; au contraire, elle se veut constructive, parce que l’avenir des territoires nous concerne tous, que nous représentions les villes ou les campagnes. C’est pourquoi, monsieur le secrétaire d’État, je ne doute pas que vous accordiez la plus grande attention à ce débat. Je souhaite que le Gouvernement apporte des réponses concrètes aux problèmes posés.

Je vais tenter de me faire le porte-parole de nombreux élus des zones rurales de notre pays qui ne sont plus aujourd’hui en mesure de répondre aux besoins élémentaires de leurs administrés en termes de services publics, alors même que le contexte actuel de crise économique et sociale aiguë appelle une intervention publique accrue en faveur de nos concitoyens les plus fragiles.

Or, cette situation est doublement injuste pour ces élus !

Tout d’abord, parce que la grande majorité d’entre eux sont dévoués au service de la population et s’évertuent, malgré le fort désengagement de l’État, à aménager le territoire de leur collectivité pour que les zones rurales ne deviennent pas le désert français du xxie siècle.

Ensuite, parce que les services publics en zone rurale se délitent à un rythme soutenu. Cela fait craindre, à court terme, une totale disparition de ceux-ci dans les zones éloignées des grandes agglomérations. Or, les services publics doivent être efficaces et accessibles à tous les citoyens, quel que soit leur lieu de résidence. L’application de ce principe communément admis dans notre République semble de moins en moins s’inscrire dans la réalité.

Les bonnes intentions affichées par le Gouvernement dans ce domaine se heurtent malheureusement à la réalité des faits. La concertation sur ces sujets sensibles, maintes fois promise, est presque inexistante ou n’est pas pratiquée, comme l’illustre le non-respect de la charte sur les services publics en milieu rural.

Se croyant protégés par cette charte, les élus locaux pensaient être des partenaires à part entière des réformes en cours : vous le savez, monsieur le secrétaire d’État, les élus, qu’ils appartiennent à la majorité ou à l’opposition, doivent être associés à toute réforme des services publics, en particulier dans les territoires ruraux. Bien souvent, ils sont d’ailleurs de formidables interlocuteurs, parce qu’ils ont eux-mêmes su moderniser leurs services pour atteindre des degrés de qualité et de coût optimaux.

Or, force est de constater que la concertation promise n’a pas lieu. Les élus locaux apprennent le plus souvent par voie de presse la suppression de telle brigade de gendarmerie, de telle trésorerie, de tel tribunal, sans qu’ils aient été consultés à aucun moment et sans que les conséquences de ces fermetures soient évaluées en termes de coûts sociaux et économiques.

Il ne s’agit pas de défendre ici l’immobilisme, au contraire. Nous avons tous conscience de la nécessité de faire évoluer les services publics dans les zones rurales : cette évolution n’est pas un tabou, et nul ne la conteste. Seulement, il faut l’admettre, la logique purement comptable du gouvernement actuel conduit à des réformes uniquement fondées sur la suppression de services, et non sur une adaptation qui permettrait de conjuguer qualité, efficacité et coûts raisonnables.

Parmi les réformes adoptées ou à venir, nous voyons se profiler des atteintes directes au service public, comme les fermetures d’agences postales, de trésoreries, de gendarmeries ou d’hôpitaux de proximité. D’autres atteintes sont plus indirectes, car moins visibles, mais ont finalement des effets tout aussi dévastateurs, comme la disparition de l’ingénierie publique, engagée elle aussi dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, la RGPP.

Qu’il s’agisse de l’école, de la poste, des structures d’accueil pour la petite enfance ou pour les personnes âgées, des transports ou des services assurant des missions d’intérêt général, notamment en matière de santé, de sécurité ou de justice, nous constatons depuis quelques années que la qualité et, surtout, la disponibilité des services publics dans les zones les moins densément peuplées se détériorent, au mépris des principes de solidarité et de cohésion territoriales.

Le temps qui m’est imparti et les circonstances de notre débat ne me permettront pas, malheureusement, d’aborder dans le détail toutes les atteintes au service public dans son ensemble, et aux services publics de proximité en milieu rural en particulier.

À cet instant, je ne peux m’empêcher de constater que la partie droite de cet hémicycle est désertée : le groupe UMP ne compte qu’un seul représentant ! Je n’en conclurai pas que nos collègues ne se sentent pas concernés par les questions que j’évoque, mais je tenais néanmoins à souligner cette situation qui, si elle se renouvelait à l’avenir, pourrait porter préjudice au crédit et à l’image des travaux de notre assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

Je voudrais insister plus particulièrement aujourd’hui sur le maintien du service public postal et des gendarmeries dans les zones rurales, emblématique de ce que nous souhaitons en matière d’aménagement du territoire.

La Poste, encore entreprise publique, se désengage de ses missions en milieu rural, et il ne se passe pas de jour sans que nous soyons interpellés, par des élus ou des particuliers, sur les fermetures de bureaux de poste, pas uniquement dans les zones les moins peuplées, j’y insiste.

La transformation du statut de La Poste, qui pourrait – hélas ! – conduire à une privatisation, ne laisse rien présager de positif pour l’avenir. En effet, cette évolution accentuerait le mouvement déjà bien amorcé de fermeture des agences les moins rentables et de transfert de celles-ci aux collectivités territoriales. Est-il nécessaire de rappeler dans cette assemblée, qui est le « Grand Conseil des communes de France », que les collectivités territoriales ne peuvent plus assumer de nouveaux transferts de charges ? Elles n’en ont malheureusement plus les moyens : pour parler un peu crûment, monsieur le secrétaire d’État, la barque est pleine !

Or, les habitants des zones rurales doivent pouvoir prétendre à la même qualité de service que les habitants des villes, car il n’existe pas, dans notre pays, de citoyens de première ou de seconde zone – du moins il ne doit pas en exister ! La péréquation nationale devrait jouer pour garantir, à l’avenir, un prix unique du timbre, une distribution à domicile du courrier six jours sur sept et la possibilité d’effectuer ses opérations postales ou bancaires à une distance raisonnable de son domicile.

La fracture numérique représente un autre échec pour le Gouvernement. Malgré l’effort substantiel des collectivités locales, en particulier des régions, cette fracture demeure et, à défaut d’un accès au haut débit, les élus ruraux nous interpellent de plus en plus souvent pour que leurs administrés puissent, au moins, bénéficier d’un service téléphonique de qualité, tant les coupures de téléphonie filaire sont désormais monnaie courante.

J’insiste sur ce point particulier, car ce phénomène ne se produisait pas auparavant. Lorsque je parcours mon département, j’entends de plus en plus souvent dire que le téléphone est coupé depuis plusieurs jours !

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

Le service universel de base n’est donc même plus assuré…

Concernant la téléphonie mobile, les zones blanches subsistent, ce qui pose des problèmes en termes de santé publique : avec des réseaux filaires peu fiables et un accès à la téléphonie mobile limité, les habitants de certains cantons de mon département peuvent se trouver totalement isolés et incapables de prévenir les secours en cas de problème de santé ou de sécurité. Une telle situation n’est pas admissible au xxie siècle !

S’agissant précisément de la sécurité, lors de l’examen par le Sénat, le 17 décembre dernier, du projet de loi relatif à la gendarmerie, qui doit encore être discuté à l’Assemblée nationale, Mme la ministre de l’intérieur nous avait assuré qu’aucun plan de fermeture de brigades de gendarmerie n’était envisagé. Or, d’ores et déjà, certains départements connaissent des fermetures administratives de brigades – quatre, notamment, en Meurthe-et-Moselle – et des études sont en cours dans mon département, qui pourraient aboutir, à court terme, à la suppression des brigades de gendarmerie de Sauve et de Génolhac. Mme la ministre de l’intérieur tente de trouver des justifications à cette réorganisation et prétend qu’en supprimant des brigades de gendarmerie, la sécurité sera améliorée in fine dans les cantons ruraux !...

En ce qui concerne la brigade de gendarmerie de Sauve, sa suppression serait justifiée par le fait que l’on trouve trois brigades de gendarmerie sur un trajet de quinze kilomètres. Aux yeux de Mme la ministre de l’intérieur, ce serait excessif pour assurer la sécurité sur cette portion de route : selon elle, deux brigades y suffiraient largement ! Je ne peux accepter cet argument, car les gendarmes n’ont pas pour unique mission, dans nos cantons, d’assurer la sécurité routière ; ils doivent aussi, et surtout, assurer la sécurité des biens et des personnes dans l’ensemble des communes, pas seulement sur les grands axes de circulation. Mais peut-être pourrez-vous m’annoncer une bonne nouvelle à ce sujet, monsieur le secrétaire d’État ?

Nous ne pouvons pas laisser des pans entiers du territoire démunis de forces de sécurité, d’autant que les statistiques relatives à la délinquance montrent clairement un déplacement de celle-ci des villes vers les zones périurbaines et, de plus en plus, vers les territoires ruraux, où l’insécurité s’accroît de manière inquiétante.

La révision générale des politiques publiques lancée par l’actuel gouvernement en 2007 est avant tout un vaste plan, à peine déguisé, de réduction des moyens et des effectifs dans la fonction publique. Je doute que les réformes des cartes judiciaire, hospitalière ou militaire aient fait l’objet d’une quelconque étude d’impact ; elles sont, à mon sens, mises en œuvre de façon complètement désordonnée.

Pour illustrer cette pagaille, je citerai un nouvel exemple choisi dans mon département du Gard et concernant, cette fois-ci, les sous-préfectures, dont une quinzaine en France seraient menacées de suppression.

La sous-préfecture du Vigan devait être supprimée purement et simplement. Son maintien a finalement été annoncé, mais sans sous-préfet, afin de réaliser quelques économies ! Par la suite, l’absence de sous-préfet présentant manifestement des inconvénients, on a nommé un sous-préfet « Canada dry », sous l’appellation de « conseiller d’administration ». Pour conférer quelque lustre à ce fonctionnaire dépourvu du titre de sous-préfet, il a été décidé de le doter d’un uniforme !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

Franchement, il aurait été plus simple de maintenir la situation antérieure ! J’attends cependant le prochain épisode de ce feuilleton lié à la révision générale des politiques publiques, dont, pour ma part, je n’ai toujours pas compris en quoi elle consistait, si ce n’est qu’elle permet de faire des économies !

À cet instant, sans vouloir polémiquer, je ne peux m’empêcher de m’interroger sur les milliards d’euros accordés aux bénéficiaires du bouclier fiscal, …

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

… qu’il faut bien récupérer quelque part ! J’ai l’impression que nos zones rurales, qui ne sont plus dans l’air du temps, dont on parle de moins en moins, puisqu’il n’est question que des métropoles, sont un peu les victimes de la mise en place de ce fameux bouclier fiscal.

Je m’interroge donc sur les économies budgétaires réalisées, et plus encore sur les promesses d’un service public rendu plus efficace. Je sais qu’un grand nombre de mes collègues pensent comme moi, même s’ils ne peuvent pas toujours exprimer les choses aussi clairement…

Je constate la disparition de trésoreries, d’hôpitaux de proximité, de bases militaires, de tribunaux, de gendarmeries, etc., ayant pour corollaire – ai-je besoin de le préciser ? – une baisse de la qualité des services rendus à la population.

Peut-être, monsieur le secrétaire d'État, serez-vous aujourd’hui en mesure de répondre à mes interrogations sur la révision générale des politiques publiques et de nous démontrer ses bienfaits, en termes de réduction des coûts, bien sûr, mais aussi d’efficacité.

Derrière toutes ces réorganisations, ces fusions, ces fermetures, ces délocalisations, il y a des hommes et des femmes, fonctionnaires ou non, qui non seulement apportaient un service utile aux populations rurales, mais contribuaient également, du fait de leurs revenus, au développement harmonieux de notre territoire.

Ce développement est une force pour notre pays. Les zones rurales ne sont pas un boulet ; elles sont au contraire une chance. Leur attractivité économique, mais aussi résidentielle et touristique, amenant l’amélioration du cadre de vie et l’installation de nouvelles populations, dépendent du maintien et du développement des services publics.

Les collectivités locales, dont les finances sont malmenées par l’État, ne peuvent plus suppléer le désengagement de ce dernier : vous ne pouvez plus, à cet égard, vous abriter sous le parapluie des transferts de charges et de compétences ; les Français le savent et ils sont très inquiets.

Par conséquent, je vous demande, monsieur le secrétaire d'État, quelles sont les intentions et les perspectives d’action du Gouvernement pour lutter contre le développement de cette situation et éviter que la fracture territoriale ne s’aggrave de manière irrémédiable jusqu’à risquer, demain, de se transformer en un gouffre.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

M. Jacques Blanc. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je remercie mon collègue Gérard Le Cam de m’avoir permis de parler avant lui. Les territoires ruraux étant parfois difficiles d’accès

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Monsieur le secrétaire d'État, l’expérience que vous avez vécue en tant que maire d’une petite commune rurale avant de devenir maire de Toulon vous permettra sans doute de comprendre nos interrogations sur le nécessaire maintien, au sein de l’espace rural, d’un service au public, plutôt que d’un service public.

Il nous appartient, me semble-t-il, d’inventer des réponses qui soient adaptées aux exigences d’une gestion plus économe et d’une bonne qualité de service, ainsi qu’à une situation nouvelle.

En effet, si l’État assume certes une responsabilité directe en matière de sécurité et de justice, par exemple, il a aussi à jouer un rôle nouveau de garant des engagements pris, à l’égard des territoires ruraux, par de grandes entreprises, telles que La Poste, désormais chargées de certains services publics.

L’État voit donc sa mission évoluer en fonction des choix effectués.

En ce qui concerne la gendarmerie, nous souhaitons, monsieur le secrétaire d’État, que les programmes de réorganisation n’aient pas pour conséquence de vider l’espace rural et que la mise en place de communautés de brigades, par exemple, permette de répondre à l’exigence de maintien d’une présence dans un département comme la Lozère.

Nous savons que les services des finances vont se regrouper. La création de pôles financiers doit déboucher sur une amélioration du service rendu, et non par une disparition de ces services dans l’espace rural.

La loi de 2005 relative au développement des territoires ruraux a créé un cadre nouveau. Son titre III traitait spécifiquement des services au public. La tenue d’une conférence de la ruralité était prévue, ainsi que l’élaboration d’une charte. Cela devait permettre d’engager une réflexion sur l’évolution de l’ensemble de ces services. Où en est-on, monsieur le secrétaire d’État, de cette démarche ?

Des dispositions législatives sont venues compléter ce cadre dans des domaines comme celui de la distribution d’énergie électrique, où la réorganisation intervenue a créé des situations nouvelles, ce qui a suscité certaines difficultés, en matière par exemple de raccordement au réseau de distribution. Électricité Réseau Distribution France, ERDF, qui travaille avec les structures intercommunales, n’est pas forcément en cause, mais un changement profond s’est produit dans le secteur de l’énergie électrique du fait de l’ouverture à la concurrence et de la séparation entre la production et la distribution. La conférence de la ruralité devrait nous permettre d’analyser objectivement les conséquences de telles évolutions.

Monsieur le secrétaire d’État, ces évolutions peuvent comporter des éléments très positifs, au-delà des conflits que nous vivons parfois, en tant qu’élus ruraux, lorsqu’il s’agit, par exemple, de demander à La Poste de prendre en compte la situation particulière de tel ou tel territoire. Les accords conclus entre La Poste et certaines communes peuvent ainsi permettre de maintenir une agence postale tout en y organisant l’apport d’autres services à la population.

Nous ne redoutons donc pas de poser clairement la question des services rendus au public.

Cela étant, nous voulons surtout vous alerter sur la nécessité de placer les évolutions technologiques au service de l’espace rural. La fracture numérique existe, or l’utilisation des nouvelles technologies représente sans doute une véritable chance pour les territoires ruraux.

Vous l’avez vous-même montré, monsieur le secrétaire d’État, en soutenant, par exemple, un projet d’installation de la fibre optique piloté par le syndicat mixte de l’A 75, qui, en offrant une capacité nouvelle en matière de haut débit, devrait inciter France Télécom à reconsidérer ses tarifs de location et d’utilisation de ses réseaux. De tels projets permettent de couvrir des collectivités autres que les grandes agglomérations ou les chefs-lieux.

Voilà tout un champ de réponses nouvelles qui s’ouvre à vous, monsieur le secrétaire d’État. Je m’étais réjoui de votre nomination dans vos fonctions actuelles, car il est capital pour nous d’avoir un interlocuteur au Gouvernement pour mener la réflexion, loin d’être aboutie, sur le maintien de l’attractivité de nos territoires ruraux et de la qualité de vie de nos populations.

Un autre domaine essentiel est aujourd’hui celui de la santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

La santé, ce n’est pas seulement l’hôpital, c’est aussi l’installation de médecins dans l’espace rural, l’organisation de maisons médicales. Les jeunes médecins doivent être incités à venir s’installer dans les territoires ruraux, notamment par l’octroi de bourses. La sous-médicalisation est sans doute l’un des problèmes majeurs de l’organisation des services publics dans l’espace rural.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Nous devons l’aborder avec une vision nouvelle. Notre pays n’a pas formé suffisamment de médecins dans le passé : tous les gouvernements qui se sont succédé ont une part de responsabilité dans cette aberration !

Nous devons donc réfléchir ensemble aux moyens de favoriser, dans le respect de la liberté d’installation, la venue de médecins dans les territoires ruraux.

J’aurais également voulu évoquer le traitement des eaux usées, l’un des premiers services publics qu’assurent les collectivités territoriales, mais je dois écourter mon propos afin de respecter le temps de parole qui m’est imparti.

En conclusion, nous, élus ruraux, sommes prêts, au rebours de toute vision passéiste, à prendre en compte les évolutions nécessaires devant permettre aux services au public de répondre aux attentes justifiées des ruraux et d’apaiser ainsi leurs inquiétudes.

Nous comptons sur vous pour nous aider, monsieur le secrétaire d’État. Il serait souhaitable d’organiser un grand débat sur les évolutions que la loi permet déjà. Peut-être faudra-t-il aller plus loin, et trouver des réponses nouvelles, afin qu’il fasse bon vivre dans nos territoires ruraux, en particulier dans nos montagnes !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je n’ai pas encore entendu un élu, de droite ou de gauche, critiquer les services publics en milieu rural. Bien au contraire, chacun y va de son couplet sur leur caractère indispensable, leur nécessaire développement, ainsi que sur la nécessité d’assurer une égalité territoriale en la matière.

En revanche, j’ai vu nombre d’élus proposer ou accepter des mesures, des lois, des directives qui portaient en elles les fondements de la déstructuration des services publics à la française et qui traduisaient la ferme volonté d’opposer ces derniers à une concurrence sauvage, « libre et non faussée ».

Faut-il le rappeler ? la conception française de l’intérêt général et du service public est ignorée par l’Union européenne, qui considère les missions d’intérêt général comme un élément subsidiaire de la concurrence.

Le traité de Maastricht de 1992 a introduit de manière coercitive l’objectif de réduction de la dépense publique. Le traité de Lisbonne a érigé en règle intangible la concurrence libre et non faussée, la LOLF et la RGPP étant chargées de parachever le « sale boulot ».

« Depuis plus de trente ans, l’État abandonne les campagnes françaises. » Ainsi s’insurgeaient, en novembre 2008, les députés ruraux du PCF et du MoDem, André Chassaigne et Jean Lassalle. Ils poursuivaient ainsi : « L’État ne porte plus une véritable politique d’aménagement du territoire et des espaces ruraux. Les agriculteurs, ruinés par des prix agricoles qui n’ont jamais été aussi bas, partent en faillite sans repreneurs, suivis par les commerçants et artisans qui ne trouvent personne à qui transmettre leur fonds de commerce ou leur savoir-faire. Les entrepreneurs désertent faute de soutien bancaire et d’infrastructures de transport dignes de ce nom. Les élus assistent impuissants à l’empilement de normes et de lois qui les paralysent et souvent au surendettement de leur commune qui bloque toute vision d’avenir. »

En septembre dernier, au cours de la campagne pour les sénatoriales dans les Côtes-d’Armor, nous avons été impressionnés par le sentiment d’abandon qui régnait chez les élus de toutes sensibilités, tout particulièrement ceux du Centre-Bretagne, qui attendent depuis plus de quarante ans la modernisation, par transformation en 2 x 2 voies, de l’axe routier central, la fameuse RN 164.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

L’Association départementale des maires des Côtes-d’Armor réalise en ce moment une enquête sur le schéma départemental des services de proximité. Il est particulièrement intéressant de constater que, lorsque l’on parle de services à la population, les ménages citent le plus souvent les médecins, les mairies, l’enseignement primaire, La Poste, les commerces de proximité, les pharmaciens, les pompiers, l’hôpital, les services de maintien à domicile et les services infirmiers.

Pour eux, les éléments à améliorer sont la rapidité des réponses aux demandes, le temps d’attente et les horaires d’ouverture.

Les cinq services les plus cités que doit prioritairement proposer une commune rurale sont, dans l’ordre : l’enseignement primaire, la mairie, les médecins, les commerces de proximité et La Poste.

Enfin, les priorités d’action vont vers les services liés, d’abord, à la santé et aux personnes âgées, ensuite à l’éducation, l’enfance, la jeunesse et, enfin, à la sécurité.

Cette étude « grandeur locale » vaut pour la majorité des territoires ruraux, même si ceux-ci ne sont pas uniformes.

Les défaillances souvent constatées dans les secteurs clés, notamment la santé, l’école, le commerce ou La Poste, sont ressenties comme des abandons, voire comme du mépris à l’égard de la ruralité et de ses habitants.

Chaque recul des services publics augmente les distances à parcourir, les coûts induits, la dépendance des plus âgés, des plus fragiles, et entrave l’accessibilité aux services.

Dans leur rapport intitulé Le nouvel espace rural français, nos collègues Jean François-Poncet et Claude Belot insistaient sur le fait que « la condition sine qua non du développement démographique de l’espace rural est son accessibilité ». Dans un monde captif où la voiture reste souvent le seul moyen de déplacement, la flambée des cours des carburants a été très durement ressentie. Les grandes infrastructures routières et ferroviaires tardent à se concrétiser dans les contrats de projets État-régions, au nom desquels, d’ailleurs, il est demandé toujours plus aux collectivités locales.

La santé est également un secteur très sensible en zone rurale : celle ou celui qui connaît un problème grave de santé pendant un week-end ou un jour férié y encourt un risque bien plus élevé qu’en milieu urbain.

Monsieur le secrétaire d’État, depuis le mois de décembre 2003, la permanence des soins a été mise à mal par la majorité ; elle est désormais amplifiée par la démographie médicale, qui accentue les déserts sanitaires ruraux. Ma commune, située en bordure d’une route à quatre voies, compte près de 2 500 habitants et jouit de la quasi-totalité des services publics. Or il ne reste que deux médecins ; il en faudrait entre trois et quatre pour 5 000 patients potentiels. Aussi sommes-nous contraints de faire appel à un cabinet de recherche de médecins à l’étranger.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Le coût de l’opération s’élève à plus de 14 000 euros, sans que nous ayons la garantie de combler convenablement le déficit et d’assurer la pérennité de toute la communauté sanitaire locale, qui craint l’effet domino.

Je pourrais citer de nombreux exemples, mais je ne veux pas manquer de citer « la phrase qui tue », entendue hier dans ma mairie par un représentant de La Poste : « Le fonds de péréquation de l’État est de 140 millions d’euros, il en faudrait 260 pour rester en milieu rural ». J’ai bien dit « pour rester » en milieu rural : mes chers collègues, nous devons méditer sur cette réflexion !

Comment ne pas rapprocher la situation des services publics en zone rurale du projet de réforme territoriale du Gouvernement ? Les communes prétendument trop petites et trop nombreuses coûteraient excessivement cher à L’État. Il faudrait alors les supprimer ! Autant casser le thermomètre pour ne plus avoir de fièvre… Mais plusieurs pauvres rassemblés n’ont jamais fait un riche !

Pourtant, nos communes et nos intercommunalités contribuent à atténuer les désengagements successifs de l’État. Elles jouent un rôle irremplaçable d’amortisseur social, malgré des moyens financiers beaucoup trop contraints.

Je prendrai quelques exemples : qui paye les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles ? Qui cofinance les coûts des repas, des garderies et des transports scolaires ? Qui fait fonctionner les centres communaux d’action sociale, les associations, les bibliothèques ? Qui assure des budgets énormes de voirie communale ? Tout cela avec une DGF qui n’évolue pas au rythme de l’inflation, une taxe professionnelle gelée au profit de la taxe professionnelle unique, et des impôts sur les ménages très difficiles à augmenter au regard des revenus modestes des administrés !

Le projet de réforme territoriale tend à regrouper tout cela dans les communautés ou les communes nouvelles ou dans les métropoles, à supprimer des emplois, à regrouper les écoles par « paquets de quinze » dans des établissements publics d’enseignement primaire, à réaliser des investissements sous forme de partenariats public-privé.

Ainsi, tout ce qui est rentable dans la sphère publique doit être privatisé et tout ce qui ne l’est pas doit être financé par les collectivités !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Comment ne pas évoquer la crise financière, que personne n’a souhaitée, mais qui illustre bien jusqu’où peut mener la frénésie du gain maximal, le « tout pour moi et rien pour les autres » ? Seule la régulation par des services publics puissants aurait pu contenir une telle boulimie d’argent.

Nous avons une conception générale des services publics, valable aussi en zone rurale, qui est radicalement différente de celle qui est mise en place depuis plus de trente ans par les fossoyeurs du service public. Pour parvenir à l’appliquer, il faut exiger de l’Europe, au titre de la subsidiarité, l’exception française en matière de services publics. Il faut également combattre les orientations de l’Organisation mondiale du commerce et l’Accord général sur le commerce des services.

Plus près de nous, en France, il est déjà possible de changer beaucoup de choses. Il faut abandonner immédiatement la règle du non-renouvellement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite et l’application de la RGPP, qui est un véritable « Recul Général Pour les Populations ».

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Les moyens financiers des communes, tout particulièrement la dotation globale fonctionnement, DGF, doivent être revus à la hausse en taxant les actifs financiers et la spéculation. Un moratoire sur les suppressions de services publics en milieu rural est nécessaire.

La taxe d’aide au commerce et à l’artisanat, la TACA, doit être réaffectée intégralement, et non pas seulement, comme c’est le cas aujourd’hui, pour 10 % de son montant, au commerce et à l’artisanat de proximité. Un plan pluriannuel de réappropriation des grands services publics est indispensable pour les secteurs vitaux que sont l’eau, l’énergie, la santé, les transports, l’éducation et les communications.

Oui, mes chers collègues, we can do it ! Oui, nous pouvons faire de la ruralité une grande cause nationale !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Vall

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je voudrais remercier mon collègue Simon Sutour d’avoir posé cette question orale et de nous permettre ainsi d’évoquer un sujet ô combien important. J’aurais aimé parler devant une assistance plus fournie, mais je suppose que le découragement explique l’absence de mes collègues !

Je ne vais pas revenir longuement sur le constat, il a déjà été dressé par les intervenants précédents. Il n’est pas nécessaire d’en dire plus ! La situation est grave : à la liste des services publics qui ont déjà disparu, il faut ajouter les menaces qui pèsent sur les tribunaux des affaires de sécurité sociale, les trésoreries, les chambres de commerce et les sous-préfectures.

Par ailleurs, nous assistons à une recentralisation excessive au niveau régional du pouvoir de décision – c’est notamment le cas pour ERDF, Électricité réseau distribution France, la SNCF, Réseau ferré de France, Météo-France, les organismes bancaires –, avec le transfert aux préfectures de région des pouvoirs de décision en matière de planification des aides publiques et des fonds européens, et la perspective de la fermeture des sous-préfectures, qui constituent la dernière présence de l’État sur ces territoires.

Dans ces conditions, il n’est pas contestable que la désertification de nos campagnes est en marche : la disparition des médecins et l’impossibilité pour certaines entreprises d’attirer les compétences et les talents nécessaires à leur survie sont les premiers marqueurs d’une régression qu’il convient de stopper au plus vite.

Pour certains territoires, je pense au Sud-Ouest, la tempête Klaus a non seulement provoqué la désolation et le chaos, mais a surtout apporté la preuve concrète de la nécessité vitale de garder des services publics de proximité et un maillage fort au plus près des populations rurales, isolées, souvent très fragiles.

Cette ruralité aujourd’hui sacrifiée doit pourtant trouver encore des ressources pour soulager les finances de l’État dans certains domaines dont il a pourtant gardé la compétence, tels que l’entretien ou l’aménagement des routes nationales, qui ne représentent plus pour l’État que 11 000 kilomètres.

De même, rien qu’en Midi-Pyrénées, la remise en état des voies ferrées va coûter 500 millions d’euros d’investissement à la région si elle veut que son matériel roulant - les TER -, qu’elle a totalement renouvelé, puisse circuler. De ce fait, la région devra supprimer certaines aides pour les infrastructures routières.

Enfin, plus de un milliard d’euros est demandé aux collectivités rurales pour engager la réalisation et les études de la ligne à grande vitesse Tours-Bordeaux-Toulouse.

Monsieur le secrétaire d’État, quel espoir pouvons-nous garder dans ces territoires ruraux quand nous savons que tous les moyens et leviers de décision seront encore plus concentrés dans les futures métropoles régionales telles qu’elles sont décrites dans le projet de la commission Balladur ?

Sans vouloir remettre en cause l’idée forte de donner une dimension européenne à ces ensembles, je rappelle que certaines métropoles disposent déjà de plusieurs pôles de compétitivité, trois par exemple pour Toulouse, devenus de véritables aspirateurs d’économie et de population active, ce qui n’empêche pas cette population de vouloir vivre à la campagne ! Et il nous revient de l’accueillir sans aucune contrepartie.

C’est d’ailleurs le constat fait en 2006 par Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’intérieur, qui a pris l’initiative de déclencher l’appel à projets pour les pôles d’excellence rurale, les PER, afin de lutter contre cette dérive et de maintenir un développement économique équilibré. Je rappelle que 380 PER ont été labellisés.

Monsieur le secrétaire d’État, je sais que vous êtes favorable à une évaluation des PER. Je remercie le président de la commission des affaires économiques, Jean-Paul Emorine, d’avoir créé un groupe de travail sur ces pôles, car un grand nombre d’entre eux ont fait renaître l’espoir. Les coopérations intercommunales qui les portent, et qui sont devenues de véritables aménageurs de territoire, constituent des bassins de vie d’environ 15 000 à 25 000 habitants pour lesquels il est indispensable, et surtout juste, de maintenir un niveau de services publics suffisant, niveau qui est aujourd'hui menacé.

C’est à cet échelon qu’il me paraît pertinent de travailler en vue de l’élaboration d’une nouvelle politique d’aménagement du territoire, une action à l’échelle nationale impliquant la nécessité pour l’État de s’engager à pérenniser les services publics de proximité.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Vall

Toute réforme doit permettre, d’une part, d’imaginer une nouvelle fiscalité locale garantissant l’autonomie financière de ces collectivités et préservant le lien entre l’activité économique et le territoire, d’autre part, d’intégrer la notion de péréquation financière des ressources fiscales entre le territoire de création de la richesse et celui du lieu de vie.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Vous avez dépassé votre temps de parole, mon cher collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Vall

M. Raymond Vall. Dans la situation actuelle, il est important de se souvenir des propos de Pierre Mendès France : « Il ne faut jamais sacrifier l’avenir au présent. »

Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Monsieur Vall, en dépassant ainsi votre temps de parole, vous avez amputé d’autant celui de votre collègue du groupe RDSE.

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues résistants

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Transports ferroviaires : des arrêts sont supprimés dans le Lot et la Creuse. Des élus bloquent des trains. Ils seront convoqués à la gendarmerie, déférés au parquet, assignés à comparaître devant le tribunal correctionnel pour entrave à la circulation, et ce à la suite du dépôt de plainte de la SNCF. Quelques-uns de ces « malfaiteurs » feront même l’objet d’une demande de placement sous contrôle judiciaire de la part du procureur de la République. L’affaire est en cours…

La Poste : le processus se poursuit de réduction des quarts d’heure d’ouverture des guichets, de transformation des bureaux de plein exercice en agences communales ou en « points poste » et de concentration des boîtes aux lettres des particuliers pour raccourcir les tournées.

Il y a un mois, une trentaine de maires ruraux de l’Hérault, département comme chacun le sait bientôt frappé de désertification

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Écoles : fermetures de classes dans le Loir-et-Cher et dans la Haute-Vienne. Depuis, les communes rurales auront hérité du SMA, le service minimum d’accueil. À ce jour, toutes les propositions d’aménagement pour tenir compte des moyens dont ces communes disposent réellement ont été refusées par le Gouvernement et sa majorité. On en aura encore une démonstration cet après-midi.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

À la fin de l’année dernière, les communes récalcitrantes sont déférées devant le tribunal administratif. Dans certains départements, comme le Var, que nous connaissons bien, monsieur le secrétaire d’État, le tout nouveau tribunal administratif se distingue même particulièrement. Les affaires sont toujours pendantes en appel.

Santé : au nom des grands principes et des petites économies, la fermeture des maternités et des hôpitaux de proximité se poursuit. Là, c’est la Nièvre et le Finistère qui sont en première ligne. En revanche, on ne voit toujours pas de mesures autres qu’incitatives dans le projet de loi portant réforme de l’hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires, en cours de discussion, pour enrayer la raréfaction des services médicaux en zone rurale. Et tout le monde connaît l’efficacité des mesures purement incitatives !

TNT : actuellement, grâce aux investissements des collectivités locales, 98% de la population reçoit la télévision analogique terrestre. La loi n’impose qu’une couverture à 95 % pour la télévision numérique terrestre qui la remplacera à la fin du mois de novembre 2011.

Si l’on en reste à la liste des réémetteurs devant être transformés par les opérateurs, selon la liste publiée par le CSA en décembre dernier, 40 % des départements ne seront même pas couverts à 91 %, malgré l’engagement du Gouvernement. Confirmerez-vous cet engagement, monsieur le secrétaire d’État ?

En tout cas, je suis assez bien placé pour le savoir, tous les amendements visant à réduire cette injustice qui ont été présentés ici même lors de l’examen du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision ont été rejetés par le Gouvernement et sa majorité.

Premier argument avancé par Mme la ministre de la culture, « […] l’obligation de couvrir 91 % de la population serait excessive, car, actuellement, la couverture en analogique, pour l’ensemble des départements, n’atteint pas 80 % ». C’est totalement faux !

Son second argument était qu’il fallait éviter des surcoûts supplémentaires aux chaînes qui seraient, d’après la ministre, dans une situation économique difficile. Sortez vos mouchoirs !

Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Je pourrais continuer en évoquant l’ingénierie publique, euthanasiée par la RGPP, les problèmes d’ERDF ou de France Télécom, l’impact de la réforme de la formation des enseignants sur les antennes locales des IUFM, les transports sanitaires d’urgence, les problèmes de la gendarmerie, …

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

… mais cela n’ajouterait rien au tableau.

Hier, aujourd’hui et demain le constat fut, est et sera le même : le service public en milieu rural poursuit son lent naufrage. La résistance opiniâtre de la population et de ses élus ne permet que de le ralentir, alors même que le secteur rural accueille de plus en plus de monde, une population d’origine urbaine qui a très logiquement les besoins d’une population urbaine. Le tout sur fond de dénégation des gouvernements successifs, qui, comme on le sait, adorent le service public rural, particulièrement en période électorale !

Déclarations d’intention, promesses, chartes des services publics en milieu rural - Simon Sutour en a rappelé le caractère purement décoratif -, se succèdent, et les pratiques restent inchangées. Quand organiserez-vous un « Grenelle » du service public durable en milieu rural ? Ce serait tout à fait tendance, pensez-y !

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Mme Nathalie Goulet. On pourrait dire vintage !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Pourquoi en est-on là et comment pourrait-on en sortir ?

On en est là et on n’en sort pas, parce qu’aucun des gouvernements qui se sont succédé depuis vingt ans n’a voulu tirer les conséquences de la prétendue modernisation du service public relevant des grandes entreprises publiques qui a été imposée au pays.

Dans sa forme antérieure aux années quatre-vingt-dix, le service public, c’est l’ensemble des services que la République doit à ses citoyens, non pour leur confort, mais pour leur permettre d’exercer réellement leur citoyenneté. Une République « indivisible » et « sociale », selon les termes de l’article 1er de la Constitution, leur doit un service équivalent. Assurer le service public sur l’ensemble du territoire, fût-ce selon des modalités différentes, est donc une obligation politique de la puissance publique, financée directement par les budgets de l’État, des collectivités locales et des organismes sociaux, et indirectement par les ressources que les grandes entreprises publiques tirent de leur monopole.

Avec l’Europe du marché unique et de la « concurrence libre et non faussée », le paysage change totalement. C’est au marché qu’il appartient désormais de produire et de distribuer les services. Le service public « ancienne manière » ne subsiste qu’à titre de concession – temporaire – à l’histoire et à l’archaïsme – exception culturelle, obligations d’un État unitaire, et j’en passe. Ces services peuvent continuer à être financés sur fonds publics, mais avec des budgets d’État qui sont de plus en plus réduits.

Autre concession à l’archaïsme : les « services d’intérêt général » ou les « services universels », selon la terminologie. Avec eux, le déploiement volontariste de services dans le secteur concurrentiel, mais délaissés par le marché, devient licite.

Au prix de quelques acrobaties sémantiques, d’un peu de créativité budgétaire et d’ingénierie financière, il est possible de financer les services indispensables dans les secteurs où le seul jeu du marché ne suffit pas. La solution passe par des fonds de compensation alimentés par l’ensemble des acteurs du marché concernés, pour les « services d’intérêt général » ou les « services universels », et des fonds de péréquation publics, pour les services du même nom, assurés par des agents dont l’essentiel de l’activité se déploie dans le secteur concurrentiel.

Par rapport au passé, cette modernisation est une usine à gaz, d’où le peu d’entrain à la construire et plus encore à la financer. Mais, et c’est là la question centrale, comment faire autrement, pour vraiment sortir de l’impasse et de la guérilla actuelle, sinon en créant ces fonds et en les alimentant ?

Ce que l’on attend du Gouvernement, c’est une réponse claire à cette question : veut-il mettre en place un système de financement pérenne des services publics en milieu rural ? Si oui, il doit, pour ceux qui relèvent de sa seule responsabilité, en tirer les conséquences budgétaires. Je pense à l’éducation nationale, par exemple.

Pour les services assurés par les acteurs du marché concurrentiel, il lui faut chiffrer le « surcoût » du service public mis à leur charge et en prévoir le financement. Nous en sommes loin, même là où ce serait le plus simple, comme avec La Poste, qui me servira d’exemple.

Les estimations du « surcoût » du service public de la seule présence postale territoriale oscillent, tenez-vous bien, entre 70 et 700 millions d’euros !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Si le chiffre de 350 à 400 millions d’euros est le plus fréquemment retenu, c’est parce que c’est le plus souvent cité.

Le fonds de péréquation territoriale créé par la loi relative à la régulation des activités postales, quant à lui, est alimenté à hauteur de 130 millions d’euros, mais de manière virtuelle, puisqu’il représente la compensation par La Poste des exonérations de fiscalité locale dont elle bénéficie. C’est donc de l’argent qui était dû aux collectivités locales !

Ce fonds, créé pour éviter à La Poste d’être accusée par les banquiers de bénéficier d’avantages concurrentiels indus, est donc aussi précaire que les exonérations. Rien à voir donc avec les ruraux et leur service public, ce qui explique que le fonds de péréquation territoriale, qui existe avec la complicité active de l’État, est actuellement détourné de son objet : il s’agit pour La Poste non plus de financer le réseau nécessaire à la couverture de l’ensemble du territoire, sans considération pour le statut juridique des fameux « points poste », mais, d’une certaine manière, de se désengager. Grâce à cet argent, La Poste se défausse sur les agences postales communales et sur les « points poste » assurés par les commerces.

La guérilla que j’ai évoquée est le signe de la perversion d’un dispositif prometteur au moment de sa création. C’est pour cela que nous l’avions tous soutenu ici, mais il est actuellement détourné de son objet. Aujourd’hui, personne n’est plus dupe !

Monsieur le secrétaire d’État, les ruraux ont besoin précisément de l’abandon de ce double langage. Tout n’est pas possible, mais certaines choses sont envisageables et, si l’on décide de les réaliser, il faut le faire continûment !

Les ruraux n’ont pas besoin de déclarations de principe, de chartes de bonne conduite et autres nuages de fumée supplémentaires, ils ont besoin d’actes.

La problématique est claire : il faut financer le service public. Les outils pour y parvenir sont identifiés et, même si c’est compliqué, ils sont compatibles avec nos engagements européens. Reste à le vouloir. Le voulez-vous ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je ne veux pas parler ici de ruralité, mais bien plutôt de ruralités. Ce pluriel est chargé de sens, du sens vrai de la réalité de nos territoires, si différents les uns des autres et si riches de ces différences.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

Dès lors, toutes les positions doctrinales de ceux qui croient pouvoir apporter le même remède à des maux multiples, souvent bien mal diagnostiqués, sont source de vacuité et d’inefficacité. Je n’en veux pour preuve que les mesures intempestives et maladroites prises en matière de service public dans les zones rurales, dans un mépris condamnable des besoins de ces ruralités et sans tenir le moins du monde compte de l’évolution de l’espace rural.

J’avais cru que jamais ne se reproduirait la situation dramatique vécue par la Creuse, qui, rappelez-vous, monsieur le secrétaire d’État, en 2004, avait manifesté, maires en tête de cortège, sa colère face à la désertification de son territoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

Pourtant, tout laisse à penser que les leçons de l’accablante impéritie de l’État n’ont pas été prises en compte : il nous suffira pour nous en convaincre d’entendre notre collègue Alain Fauconnier tracer le tableau affligeant de la réorganisation irréfléchie des services publics en Aveyron. D’ailleurs, chacun ici pourrait ajouter un exemple pris dans son département d’attitudes aussi absurdes qu’inopportunes.

Et pourtant, nos ruralités, à la fois espaces de nature, espaces nourriciers, espaces de « plein air », espaces à vivre, en somme, méritent un autre sort, une autre forme de respect.

Je n’ignore pas que certaines démarches ont été entreprises, notamment depuis la loi de 2005, avec la création des zones de revitalisation rurale et celle des pôles d’excellence rurale. Ces mesures ont toutes eu pour objectif de « dénouer l’opposition de destins entre un urbain et un rural qui seraient étrangers l’un à l’autre, dans leurs raisons d’être, leurs systèmes de valeurs, leurs mondes de représentations, y compris le monde politique ».

Mais je m’interroge encore, et je vous interroge, monsieur le secrétaire d’État, sur cette coupable inertie de l’État qui tarde à mettre en place par lui-même, ou à susciter en ce sens l’initiative des collectivités locales et des partenaires publics et privés, des lieux où la population pourrait trouver réunis tous les services publics ; ces lieux existent en quelques endroits et ont pour nom générique « maisons des services publics », « relais services publics », « points publics » ; ils sont des formes de guichet unique, mutualisant les informations de plusieurs services ainsi que les moyens de fonctionnement.

Cette formule ou des formules voisines se sont répandues depuis longtemps dans tous les pays d’Europe, au rythme d’ailleurs de la pénétration des techniques de l’information et de la communication sur leurs territoires. Elles ont concrètement répondu au besoin récurrent d’intermédiation de la population pour que soient ouvertes les bonnes portes d’accès aux services publics.

En France, cette forme de guichet unique serait le moyen le plus sûr de compenser la raréfaction des services publics sur nos territoires ruraux. Plutôt que de contraindre la population à se déplacer de plus en plus loin pour rencontrer les personnels chargés des services, il revient à ces personnels d’aller au-devant de la population.

Monsieur le secrétaire d’État, sans vouloir accabler davantage le Gouvernement, permettez-moi de m’interroger et de vous interroger sur la volonté avérée, concrète, de l’État d’entrer dans une réelle politique de maintien, voire de développement ou, à tout le moins, de réorganisation, des services publics en milieu rural ; sur les conséquences de la RGPP à l’échelon départemental et infradépartemental, deux niveaux d’élection pour le principe de proximité que le Gouvernement dit vouloir appliquer ; sur les avancées – mais peut-être s’agit-il de reculs ? – de la labellisation des « relais services publics » engagée dans le cadre de la modernisation de l’État.

Vous l’aurez compris, je veux encore croire à un État garant des principes d’égalité et de fraternité, inscrits dans la Constitution, à un État à la vigilance sans faille pour promouvoir une société généreuse et solidaire.

Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.

M. Guy Fischer remplace M. Roland du Luart au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fauconnier

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, notre collègue Simon Sutour a été bien inspiré de poser cette question sur l’avenir des services publics dans les zones rurales. Sa question, en effet, traduit le malaise que connaissent les élus face à ce qui, au nom d’une prétendue modernisation, constitue un véritable démantèlement du ciment de la nation.

Depuis quelques années, il ne se passe pas un jour sans que les élus – en tout premier lieu les maires – apprennent la fermeture de tel ou tel service, au nom de ce qui est désormais le dogme du Gouvernement : la révision générale des politiques publiques, c'est-à-dire le « faux nez » de l’inavouable rentabilité financière.

À aucun moment les conséquences humaines, sociales et économiques qui en découlent n’ont été envisagées. D’évidence, il y en aura, et de plus onéreuses qu’on ne le croit !

Qu’on le veuille ou non, et je vous renvoie ici, mes chers collègues, aux volumes du célèbre Les Lieux de mémoire, paru sous la direction de Pierre Nora, ou à la non moins remarquable Histoire des passions françaises, de Theodore Zeldin, ce sont bien les services publics qui ont construit, au fil des décennies, le tissu dans lequel la France républicaine a forgé son identité et ses valeurs. Je veux parler des écoles, des lycées, des bureaux de poste, des tribunaux, des perceptions, des trésoreries, des hôpitaux, des unités de gendarmerie… Je ne saurais les citer tous, au risque de lasser.

Je constate, avec les historiens, que, de Lille à Montpellier, de Brest à Strasbourg, de Bayonne à Sarreguemines, du plus petit village de la Lozère au fin fond du Finistère, les services publics ont largement participé à la construction de l’identité nationale.

C’est un fait, depuis l’école du Grand Meaulnes jusqu’à la classe du philosophe Alain…

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fauconnier

… à l’École normale supérieure, la France était une pyramide de compétences et de savoirs dans laquelle chacun avait un rôle à jouer ; un rôle qui faisait de chacun le maillon d’une chaîne cohérente et complémentaire qui, au-delà des différences, faisait office de ciment de la communauté nationale.

Comme Voltaire qualifiait autrefois la messe d’« opéra du pauvre », n’a-t-on pas coutume de dire que les services publics sont le patrimoine des pauvres ? Les services publics sont un repère, un bien que tous les Français avaient jusque-là en commun, sans aucune distinction de classe.

Bien sûr, nous ne sommes pas figés. Je sais que tout évolue, c’est le sens de l’histoire. Pour autant, je ne suis pas persuadé que le fait de substituer systématiquement la seule logique comptable à l’esprit même d’une nation soit un bon calcul, pour le présent comme pour l’avenir.

C’est le sens du message que j’entends délivrer en tant que maire et en tant que sénateur. Je mesure toute l’importance d’une sous-préfecture, d’un commissariat de police, d’un tribunal d’instance ou d’un petit hôpital, pour ne prendre que ces quatre exemples parmi bien d’autres.

C’est dire notre inquiétude face à la généralisation progressive du délitement, voire de la destruction des services : EDF a fermé tous ses points d’accueil ; la SNCF interrompt certaines de ses lignes et la fracture numérique accentue les disparités ; l’accueil de la petite enfance se voit remis en cause par des coupes franches pouvant aller jusqu’à 40 % dans certains territoires ; La Poste est fragilisée par l’ouverture à la concurrence. Ce sont autant d’atteintes à la notion même de service public !

Quelle est la situation dans le rural profond ?

Tous ces services « physiques » sont remplacés par les centres d’appels téléphoniques, censés représenter la modernité.

Vous composez le numéro et vous entendez une voix synthétique vous expliquer que vous devez taper le 1, le 2, le 3 ou le 4 et terminer par dièse, puis vous attendez les instructions. Si vous vous trompez, vous êtes contraint d’écouter de nouveau le même message. Au troisième essai, vous avez épuisé votre interlocuteur virtuel et il n’y a plus personne pour vous répondre !

Imaginez un instant le désarroi d’une personne âgée confrontée à un problème de retraite, de MSA ou de coupure d’électricité !

Au rythme où vont les choses, il faudra bientôt que cette grand-mère possède un téléphone portable – si elle n’est pas en zone blanche – puisque, de plus en plus, les fils téléphoniques restent des mois au sol dans nos villages reculés.

Ce n’est pas de l’abandon, c’est du mépris, et une telle société va inéluctablement dans le mur !

Tous ces problèmes, y compris ceux dont je n’ai pas parlé, vous les connaissez bien, monsieur le secrétaire d’État, puisque vous êtes un élu et que vous avez longtemps siégé dans cet hémicycle. Vos amis aussi sont confrontés à ces problèmes, ils les vivent quotidiennement sur le terrain, autant que nous, même s’ils n’osent pas se plaindre à haute voix, comme en témoigne notre hémicycle clairsemé.

Je voudrais évoquer brièvement trois domaines : la justice, la sécurité et la santé.

La réforme de la carte judiciaire, initiée voilà près de deux ans, a porté un sérieux coup à la cohérence du système. Je ne dis pas qu’il ne fallait pas mettre en œuvre de réforme, et celle-là était probablement nécessaire, mais je conteste la manière dont elle a été conduite, en particulier l’absence quasi totale de concertation avec les élus et les responsables professionnels.

Dans mon département, la décision de fermer le tribunal de grande instance de Millau et le tribunal d’instance de Saint-Affrique, dans ma propre commune, a été prise sans que je sois à aucun moment consulté. De même, leur fermeture, initialement prévue le 1er janvier 2011, a été subitement avancée au 1er octobre 2009, par le fait du prince, sans que les maires concernés en soient informés.

Croit-on que la délinquance et la criminalité vont baisser avec la disparition de la justice de proximité qu’illustre désormais l’obligation faite aux plaignants de parcourir en moyenne 70 kilomètres pour se faire entendre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fauconnier

La sécurité sera-t-elle mieux assurée lorsque les quelques gendarmes restants passeront la moitié de leur temps sur la route pour l’extraction des prisonniers…

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fauconnier

… ou que la justice sera mieux rendue parce que les juges et les avocats passeront désormais, eux aussi, leur temps en voiture ?

Je m’interroge sur cette méthode qui, à l’instar d’une fuite en avant, consiste à détruire, et ce de plus en plus vite !

La réforme de la gendarmerie n’a pas été plus heureuse.

À l’évidence, personne, ou presque, ne la désirait. La loi, née dans la douleur, n’offre pas les garanties nécessaires quant à la pérennité de la présence territoriale de la gendarmerie et au maintien des brigades. La sécurité des populations en zone rurale en pâtira.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fauconnier

Comme pour la carte judiciaire, les sénateurs socialistes ont à juste titre souligné que l’avenir du service de proximité que rend la gendarmerie dans nos départements risquait d’être compromis par cette réforme.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fauconnier

Nous n’avons pas été écoutés, mais il est fort probable que l’on se repentira bientôt – une fois de plus – des mesures contenues dans cette loi. Dans la région Midi-Pyrénées, l’objectif était simple : rendre trois cents postes de gendarme au titre de la RGPP, dont vingt pour l’Aveyron !

Le dernier volet de mon intervention est, à bien des égards, le plus alarmant, car c’est la santé de nos compatriotes qui est en jeu avec la future loi « hôpital, patients, santé, territoires ».

Ce projet de loi, qui sera bientôt soumis au Sénat, ne va en rien régler la fracture ville-campagne, il devrait même l’aggraver. Nous aurons certes largement le temps d’en débattre, mais d’ores et déjà, au vu du texte voté par l’Assemblée nationale, nous pouvons être légitimement inquiets quant à l’avenir du service public de santé de proximité.

Jusqu’à aujourd’hui, l’hôpital incarnait dans notre pays, plus particulièrement dans les petites villes et les villes moyennes, pour ne pas dire à la campagne, la certitude d’être soigné.

Or les grands traits de cette réforme ne peuvent que nous laisser dubitatifs. Vouloir gérer les hôpitaux comme les entreprises, à l’aune de la seule rentabilité financière, paraît en contradiction même avec la notion de service public de santé, de qualité des soins, de tradition humaniste et même d’éthique médicale.

L’hôpital public, pour nous, c’est le lieu de la rencontre d’une confiance et d’une conscience. Vous voulez en faire un gigantesque espace de vente où se rencontreront des clients et des marchands de soins.

Pour nous, l’hôpital public assure une triple mission, plus particulièrement en milieu rural : une mission de soins de qualité, avec une réponse graduée en fonction des différentes pathologies ; une mission de cohésion sociale, dès lors que le SDF, le chômeur, l’exclu sont aussi bien soignés que le cadre supérieur ; une mission d’aménagement du territoire, enfin, puisqu’une petite ville qui perd les services actifs de son hôpital abandonne toute ambition de jouer un rôle de centralité sur son territoire.

Je ne nie pas l’intérêt d’instaurer des communautés hospitalières de territoire, ou CHT, conçues comme un instrument de la gradation des soins, avec, schématiquement, l’hôpital de référence et les hôpitaux de proximité, mais à la condition qu’elles respectent l’identité et la complémentarité des établissements hospitaliers et qu’elles ne se réduisent pas à une restructuration purement économique qui asphyxie les hôpitaux de proximité existants.

L’Association des petites villes de France ne s’y est pas trompée, qui n’a approuvé la création des CHT qu’à la condition de « crédibiliser les petites structures hospitalières et leurs services et non de les démanteler ».

Pour conclure, j’évoquerai la question de la permanence des soins, qui est assurée pour quelque temps encore parce qu’il reste de médecins généralistes libéraux dans nos cantons.

Monsieur le secrétaire d’État, je sais que votre territoire, le Var, est plutôt bien loti sur ce plan – encore faudrait-il s’en assurer dans l’arrière-pays – mais je n’imagine pas que vous ne soyez pas soucieux de ce qui se passe ailleurs, sur de larges portions du territoire.

D’ici trois à cinq ans, monsieur le secrétaire d’État, des pans entiers de notre territoire manqueront de médecins généralistes et le seul recours restera le petit hôpital de proximité. La Générale de santé n’assurera jamais une mission de service public dans le Massif central ou sur l’ensemble des petits territoires ruraux ! Il ne restera donc que l’hôpital public et, sans l’hôpital public de proximité, aucun médecin généraliste ne s’installera, loin d’un service d’urgence efficace.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fauconnier

Se généralisera alors la situation que nous commençons à connaître avec les centres d’appels des médecins libéraux : après dix-neuf heures et le week-end, vous ne pouvez plus avoir accès à un médecin généraliste. Vous téléphonez du fin fond de l’Aveyron à votre médecin pour l’angine de votre petite fille et vous tombez sur un centre d’appel à Toulouse. Un médecin, au bout du fil, fait une consultation et vous délivre une ordonnance par téléphone, qui est ensuite faxée à la pharmacie de garde ! On croit rêver, mais nous en sommes arrivés là !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fauconnier

Imaginez un instant la surprise des personnes âgées ou d’un citoyen en grande difficulté ! Il restera, bien entendu, le recours aux urgences du petit hôpital de proximité – s’il existe encore – ou l’appel au « 115 » pour une simple angine, avec les coûts que cela peut représenter.

Voilà, monsieur le secrétaire d’État, la vraie vie de nos territoires, dans leur diversité !

La vraie vie, c’est aussi la difficulté de placer une personne âgée en difficulté respiratoire lorsque le petit hôpital a fermé ses portes. Que demande-t-on, chaque jour, au médecin de médecine générale d’un hôpital local qui cherche un lit pour un patient ? « Quel âge a-t-il ? » Si le malade a plus de soixante-dix ans, ou quelquefois moins, on ne le prend pas, en prévision de l’accueil en urgence d’une personne plus jeune.

Voilà où nous en sommes !

Combien de collègues ruraux, dans cette assemblée, savent qu’il est plus facile de faire venir dans les quinze minutes un vétérinaire pour assurer un vêlage difficile – M. le président du Sénat ne saurait l’ignorer – qu’un médecin pour soigner la détresse d’un petit bébé ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fauconnier

Oui, monsieur le secrétaire d’État, nous en sommes là !

Je vous engage, monsieur le secrétaire d’État, et avec vous l’ensemble du Gouvernement, à mesurer la gravité de cet état des lieux pour changer de politique.

Je souhaite que l’on n’oublie pas que l’égalité constitue le deuxième des trois concepts définissant la République, celui auquel se réfère le principe même de service public.

Après un siècle de démocratisation, d’aménagement du territoire et de répartition des richesses nationales, doit-on revenir deux cents ans en arrière ? Nous en appelons au sursaut des élus ruraux de cette assemblée et à la solidarité de nos collègues urbains. Il y va de l’harmonie de notre vieux et ambitieux pays !

Bravo ! et applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur certaines travées du RDSE

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Biwer

M. Claude Biwer. Monsieur le président, tout en ayant le souci d’être aussi bref que possible, j’irai sans doute au-delà des cinq minutes qui me sont accordées parce que j’interviens aussi au nom de M. Boyer, que les horaires du service public de la SNCF ont contraint à partir.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Biwer

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la population rurale aspire légitimement à la parité avec l’ensemble de la population française. Or l’évolution de notre société accentue les différences entre les territoires urbains et ruraux.

Comme nous le constatons, l’écart qui se creuse ainsi entre les deux types de populations affecte particulièrement la qualité du service public.

Pour finir de s’en convaincre, il suffit d’écouter les doléances et les inquiétudes que nos collègues maires expriment depuis plusieurs années lors de chaque congrès de l’Association des maires de France, l’AMF.

D’après une étude réalisée par cette dernière, en 2003, 79 % des élus interrogés considéraient le maintien des bureaux de poste dans les communes rurales comme une impérieuse nécessité. Je sais que cette question a été beaucoup évoquée aujourd'hui.

Certes, nous pouvons comprendre que La Poste soit soumise à des impératifs. D’ailleurs, on a cherché à imposer une forme un peu différente d’organisation entre les communes et les structures intercommunales en contrepartie du maintien des services postaux. Il faut reconnaître que des pressions de cette nature ont bel et bien existé.

Pour autant, le service rendu ne peut pas être le même entre un professionnel qui travaille dans un bureau de poste et un secrétaire de mairie, même très compétent, qui complète sa mission en effectuant au mieux les tâches qui incombaient auparavant aux employés de La Poste, mais sans le même intérêt.

Au demeurant, le Parlement avait étendu l’éventail des missions de La Poste en matière financière en contrepartie du maintien de ses activités de service public au niveau local. Malheureusement, cela a parfois été quelque peu oublié.

Cela nous avait donc conduits, moi et mes collègues du groupe de l’Union centriste, à déposer, voilà quelques années, une proposition de loi visant à instaurer un moratoire des fermetures de services publics en milieu rural. Le gouvernement de l’époque avait pris des engagements en ce sens, mais la situation a tout de même continué à se dégrader.

Certes, nous savons les difficultés que cela représente. D’ailleurs, nous sommes conscients que le service public ne peut pas non plus s’exonérer des impératifs et nécessités économiques et qu’il doit optimiser ses coûts.

Mais, et cela a été rappelé voilà encore un instant, il n’y a pas que les bureaux de poste qui disparaissent. C’est également le cas d’un ensemble d’autres services.

Permettez-moi de vous en fournir une illustration un peu plus « locale ».

Voilà quelques jours, j’ai été avisé que le service de la police de l’air aux frontières serait supprimé dans mon département, la Meuse. J’en ai donc logiquement conclu que notre pays avait annexé la Belgique et le Luxembourg, qu’il n’y avait plus de frontières et que les Pays-Bas s’étaient un peu éloignés !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Biwer

Nous sommes donc quelquefois navrés de constater que de telles décisions sont prises sans concertation. Nous sommes pourtant prêts à réfléchir ensemble à des opérations concrètes.

Je n’insisterai pas sur les services de santé, qui ont déjà été évoqués. Nous aurons d’ailleurs l’occasion de revenir sur ce thème lorsque le Sénat examinera le projet de loi portant réforme de l’hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires. Je souhaite juste vous faire part d’une réflexion : sur ce sujet aussi, j’ai de plus en plus l’impression que nous cumulons les handicaps.

En matière de transports, nous assistons également à nombre de suppressions. Je me suis d’ailleurs récemment exprimé sur le sujet. Dans mon département, j’ai la chance d’avoir un TGV qui passe ; je dis bien « qui passe », parce que, sur les trois cents trains qui circulent chaque jour, il y en a seulement deux qui s’arrêtent !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

C’est déjà pas mal ! Cela fait un dans chaque sens !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Biwer

Cela pose tout de même quelques problèmes.

Pour ma part, j’aimerais bien éviter de me retrouver dans la même situation que mon ami Jean Boyer aujourd'hui et d’être obligé de partir avant seize heures, parce que c’est l’heure du dernier train ! En l’occurrence, j’ai décidé de reporter mon départ à demain matin, ce qui me permettra de profiter d’une soirée de détente supplémentaire à Paris.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Mme Nathalie Goulet. Non ! Vous serez en séance ce soir !

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Biwer

M. Claude Biwer. Effectivement, ma chère collègue. Il est vrai que le groupe CRC-SPG a décidé de nous gâter cet après-midi !

Mêmes mouvements.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Biwer

Au cumul de handicaps que j’ai évoqué s’ajoute, et on l’oublie trop souvent, la réduction de la part des agriculteurs au sein de la population active. Si les surfaces sont exploitées, et bien exploitées, il y a de moins en moins de monde pour le faire. Cela contribue évidemment encore à dépeupler les territoires ruraux.

Je voudrais également mentionner les difficultés soulevées par l’évolution de la carte militaire. Je suis un élu du nord-est de la France. En raison de son histoire, cette région a connu une forte présence militaire qui a elle-même empêché l’industrialisation. Aujourd'hui, les militaires s’en vont et l’industrialisation est difficile. Toutes ces opérations nous gênent. Imaginez les conséquences sur le fonctionnement futur de l’ensemble des institutions locales lorsqu’une commune de 5 000 habitants voit partir 1 000 militaires, comme c’est le cas dans mon département !

C’est pourquoi, monsieur le secrétaire d’État, nous protestons, mais aussi, et avant tout, nous nous inquiétons. Et nous recherchons, avec l’ensemble du Gouvernement, des solutions pour apporter un peu d’oxygène à nos territoires.

C’est ainsi qu’ont été créées, et nous y avons contribué, les zones de revitalisation rurale, les ZRR. À une certaine époque, elles ont apporté un complément non négligeable de bienfaits. Je mentionne également les pôles d’excellence rurale, qui nous ont également donné un petit peu d’oxygène dans l’exercice quotidien de notre mission. Il faut le reconnaître et le souligner, tout cela est positif. Mais le soutien global de l’opération devrait concerner plus largement le territoire.

Considérons, par exemple, la dotation globale de fonctionnement. Dans certains territoires ruraux, nous sommes à peine à plus de 60 euros par habitant, contre plus de 600 euros par habitant à Paris. Nous ne jouons donc pas dans la même cour. Dans de telles conditions, ce sera évidemment très difficile de s’en sortir.

Il y a cependant des outils qui peuvent nous aider à avancer. Je pense ainsi à la dotation de solidarité rurale, qui pourrait d’ailleurs progresser par rapport à la dotation de solidarité urbaine, la seconde évoluant beaucoup plus vite que la première.

Il en va de même s’agissant de la dotation globale d’équipement.

Quant à la péréquation, elle doit absolument figurer dans toute réflexion si nous voulons corriger un tant soit peu le décalage. En tout cas, c’est un souhait que j’exprime.

Par ailleurs, comme j’ai déjà eu l’occasion de le suggérer, pourquoi ne pas envisager des zones franches en milieu rural ? La dernière fois que j’étais intervenu sur ce point, la réponse de M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales, était porteuse d’espoir. Mais je n’ai pas beaucoup vu la situation évoluer depuis, et je pense que nous devrions mener une réflexion sur le sujet. J’ai d’ailleurs déposé une proposition de loi en ce sens. J’ose espérer que nous obtiendrons un jour une réponse favorable. Je compte sur vous, monsieur le secrétaire d’État.

Au nom de mon collègue Jean Boyer et en mon nom personnel, je vous remercie de nous avoir écoutés et, je l’espère, entendus.

Très bien ! et applaudissements.

Debut de section - Permalien
Hubert Falco, secrétaire d'État chargé de l'aménagement du territoire

Mesdames, messieurs les sénateurs, après la question fort opportune du sénateur Simon Sutour, les interventions de Jacques Blanc, Gérard Le Cam, Raymond Vall, Pierre-Yves Collombat, Anne-Marie Escoffier, Alain Fauconnier et Claude Biwer attestent, me semble-t-il, une même réalité qui m’interdit de vous dissocier les uns des autres : vous vivez vos territoires, au sens plein du terme, et je sais, en toute objectivité, que vous en mesurez chaque jour la dimension prioritaire.

Or, pour pouvoir répondre à la question posée, l’avenir des services publics en milieu rural, il faut effectivement vivre ces territoires, et je les vis avec vous.

Il faut également regarder la réalité, …

Debut de section - Permalien
Hubert Falco, secrétaire d'État

… celle de notre monde rural. Je dis bien « notre » monde rural, car, avant d’être le maire d’une grande ville, je suis moi aussi un enfant de la ruralité.

La réalité, c’est qu’il y a aujourd'hui, en fait, non plus un monde rural, mais des territoires ruraux, et très différents les uns des autres.

Je ne prendrai qu’un exemple, que MM. Simon Sutour et Alain Fauconnier connaissent bien. Entre les Causses et les Cévennes, il y a souvent deux ou trois habitants par kilomètre carré. À l’inverse, le pays Portes de Gascogne, cher à Raymond Vall, voit sa population croître, notamment avec le développement toulousain. Vous le voyez bien, notre ruralité est diverse, et c’est sans doute ce qui en fait la richesse.

Du même coup, reconnaissons aussi que les enjeux et les besoins de ces territoires sont eux aussi divers. D’un côté, cela a été fort justement souligné, certains territoires isolés continuent à perdre en vitalité démographique et économique et se sentent abandonnés.

Debut de section - Permalien
Hubert Falco, secrétaire d'État

Dans ce cas, le maintien des services publics est un élément essentiel à la vie des populations et relève d’une exigence de solidarité.

De l’autre côté, certains territoires ruraux, aujourd'hui majoritaires dans notre pays, connaissent un développement démographique et une véritable économie résidentielle. Pour ces territoires-là, l’enjeu est de ne pas reproduire ce que nous avons déjà fait, et j’en prends ma part de responsabilité dans mon département, c'est-à-dire ce que l’on a appelé les « villes à la campagne ». Au contraire, je crois qu’il faut aujourd'hui penser à un développement durable respectueux de l’identité de chacun de ces territoires.

Sourires sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - Permalien
Hubert Falco, secrétaire d'État

Il faut donc songer aux services liés aux nouveaux besoins des populations.

La réalité, c’est également que les services attendus sont désormais les services « au public », beaucoup plus larges et individualisés que les seuls « services publics ». Et, la réalité n’étant pas toujours comptable, davantage de services publics et de services au public ne signifient pas forcément davantage d’emplois publics. De même, un peu moins d’emplois publics, ce n’est pas forcément synonyme de moins de services au public.

Mesdames, messieurs les sénateurs, deux valeurs doivent guider l’action : la vérité et le volontarisme.

La vérité oblige à dire ce qui ne va pas bien, mais également à reconnaître que le service public ne peut plus être le même qu’il y a trente ans, …

Debut de section - Permalien
Hubert Falco, secrétaire d'État

… et qu’il doit évoluer.

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

Il ne doit peut-être plus être le même, mais il doit continuer d’exister !

Debut de section - Permalien
Hubert Falco, secrétaire d'État

Le volontarisme impose de tout faire pour corriger les dysfonctionnements, mais aussi de savoir faire de la réforme un outil nécessaire pour trouver, avec créativité, les voies d’un meilleur service, au meilleur coût et au plus près des besoins des gens.

Debut de section - Permalien
Hubert Falco, secrétaire d'État

Mesdames, messieurs les sénateurs, en matière de services, je fais en sorte que les engagements soient respectés.

C’est notamment le cas s’agissant du service postal. À cet égard, j’ai écouté avec attention l’intervention de Pierre-Yves Collombat. Je connais son engagement sur ce sujet ô combien important, et même essentiel.

Pour ma part, dès mon arrivée au secrétariat d’État, je me suis attaché à faire respecter la norme d’accessibilité inscrite dans la loi postale de 2005.

Je l’ai fait en partenariat étroit avec l’Observatoire national de la présence postale, présidé par votre collègue Pierre Hérisson, où siègent de nombreux élus de la majorité et de l’opposition, et dont je me suis inspiré des travaux.

Ainsi, à ma demande, La Poste s’est engagée à examiner et à résoudre avec les élus locaux la situation des neuf départements, dont ceux de MM. Biwer et Vall, où la norme des cinq kilomètres, ou des vingt minutes, n’était pas respectée.

Je suis évidemment vigilant quant à la complète prise en compte des objectifs de présence territoriale dans la future loi postale et des moyens financiers de la garantir.

Debut de section - Permalien
Hubert Falco, secrétaire d'État

Aujourd’hui, avec 17 000 points de contact, nous rendons le service public attendu par nos populations, reconnaissons-le.

De même, j’ai découvert à mon arrivée que le plan de couverture en téléphonie mobile, lancé en 2003, avait laissé de côté 364 communes pourtant situées en « zones blanches ». Cette situation, qui a été évoquée par de nombreux intervenants, était tout à fait contraire à l’esprit du plan.

J’ai obtenu des opérateurs et de l’ensemble des partenaires que ces communes soient intégralement couvertes.

Le déploiement a commencé et, compte tenu des délais techniques, 80 % de ces communes seront desservies à la fin de 2010, et 100% en 2011.

Madame Escoffier, vous avez eu raison d’évoquer les zones de revitalisation rurale, mais je note, à l’intention de M. Biwer, que ce sont de véritables zones franches, puisqu’elles bénéficient d’une exonération de la taxe professionnelle compensée par l’État, d’une exonération de l’impôt sur le revenu et d’une exonération de l’impôt sur les sociétés pendant cinq ans.

Avec ce système de défiscalisation, qui est sans comparaison en Europe, on a doté les 14 000 communes concernées d’un outil d’attractivité essentiel pour développer des services, en particulier autour des professions libérales ou des professions de santé.

Debut de section - Permalien
Hubert Falco, secrétaire d'État

Cependant, j’ai dû faire le constat d’un dispositif insuffisamment connu et, surtout, trop peu valorisé.

Debut de section - Permalien
Hubert Falco, secrétaire d'État

Là encore, j’ai tenu à ce que les engagements de l’État soient respectés. Aussi ai-je donné instruction aux préfets, dès le 27 mai 2008, d’être vigilants et actifs quant à la promotion et la mise en œuvre du dispositif.

L’évaluation complète des ZRR est menée, cette année, par l’État. Elle permettra de mettre en évidence les points à revoir, notamment pour améliorer l’efficacité du dispositif. Je le ferai dans le souci du partage du diagnostic avec l’ensemble des parlementaires.

Mme Nathalie Goulet s’exclame.

Debut de section - Permalien
Hubert Falco, secrétaire d'État

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous êtes nombreux…

Debut de section - Permalien
Hubert Falco, secrétaire d'État

… à m’avoir interrogé sur les pôles d’excellence rurale.

Cette politique avait été lancée en 2006 ; j’ai essayé de faire en sorte qu’elle atteigne ses objectifs et que l’État tienne ses engagements.

Je considère que c’est une réussite. À ce jour, 379 pôles sont labellisés ; 355 pôles auront conduit leur projet à terme. Pour leur très grande majorité, ces pôles seront achevés au 31 décembre 2009.

On ne le dit pas assez, les pôles d’excellence rurale constituent aujourd’hui un élément fort de la relance dans les territoires ruraux. Nous allons injecter, dans l’année 2009, 160 millions d’euros de crédits de paiement pour honorer la partie des projets relative à l’année 2009, l’engagement total de l’État dans ce domaine s’élevant, je le rappelle, à 235 millions d’euros.

Je précise que 32 millions d’euros d’aide auront été fléchés en faveur des 52 pôles d’excellence rurale consacrés au service et à l’accueil des populations. Des initiatives innovantes en matière d’accueil de la petite enfance et de prise en charge des personnes dépendantes – personnes âgées et personnes handicapées – ont émergé, qui n’auraient pu voir le jour sans ces ZRR.

J’ai dit à plusieurs reprises que j’étais favorable à une deuxième vague de pôles d’excellence rurale – lorsque la première aura été achevée, au 31 décembre 2009 – recentrée sur les services publics et les services au public.

Debut de section - Permalien
Hubert Falco, secrétaire d'État

Je soumettrai une proposition en ce sens à M. le Premier ministre.

Je souhaite pouvoir discuter de cette orientation avec les parlementaires et avec les élus des territoires, sur la base d’une évaluation que la Délégation interministérielle à l’aménagement et à la compétitivité des territoires, la DIACT, vient de me transmettre et que je mettrai naturellement à la disposition du groupe d’études que le Sénat a constitué sur ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Mme Nathalie Goulet. Non ! Seulement aux parlementaires présents aujourd'hui !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Où est ce groupe ? Pas dans l’hémicycle, en tout cas !

Debut de section - Permalien
Hubert Falco, secrétaire d'État

Je suis sensible également aux questions d’accessibilité des territoires que vous avez soulevées, monsieur Sutour, et qui ont été évoquées notamment par MM. Biwer et Fauconnier.

Je suis intervenu, avec l’accord de Jean-Louis Borloo, sur plusieurs sujets relevant de l’urgence territoriale, sans préjudice du travail de fond engagé en particulier avec la SNCF, dans le cadre du bilan de la charte des services publics.

Debut de section - Permalien
Hubert Falco, secrétaire d'État

Mesdames, messieurs les sénateurs, notre volonté d’agir s’exprime aussi à travers la réforme.

Le Premier ministre m’a chargé de reprendre la charte des services publics en milieu rural signée en 2006 par l’État, l’Association des maires de France et seize opérateurs, charte dont Jacques Blanc a souligné l’importance. D’ans un mois, je serai en mesure d’en présenter une évaluation élaborée avec Jacques Pélissard et avec vous.

Debut de section - Permalien
Hubert Falco, secrétaire d'État

Nous n’oublions pas les maires ruraux, qui seront bien sûr associés à ce travail. Je vous signale d’ailleurs que le président de l’association des maires ruraux siège au sein de l’Observatoire national de la présence postale.

Debut de section - Permalien
Hubert Falco, secrétaire d'État

Vous le voyez, je suis très ouvert aux maires ruraux !

D’ores et déjà, les échanges avec l’ensemble des opérateurs indiquent clairement les pistes pour aller au-delà des obligations d’information et de concertation locale. Je veux que toutes les parties s’engagent dans de véritables démarches pour fixer des normes de qualité à atteindre et privilégier une organisation s’appuyant sur la mutualisation et le partenariat.

À ce titre, les initiatives exemplaires, telles que les relais de services publics – à ce jour, 127 relais ont été labellisés – ou les maisons de santé pluridisciplinaires, sont à soutenir.

Madame Escoffier, la mairie, tout autant que La Poste, une agence de pôle emploi, ou une sous-préfecture peuvent être des lieux où sont offerts à nos concitoyens de véritables bouquets de services.

Debut de section - Permalien
Hubert Falco, secrétaire d'État

En matière d’accès à Internet, l’enjeu pour les territoires est double.

D’abord, grâce au plan France Numérique 2012, les opérateurs sont en train de développer un accès de tous nos concitoyens à l’internet à haut débit pour un prix raisonnable.

Ensuite, il faut assurer à nos territoires ruraux l’attractivité numérique pour les entreprises. Cela passe par le raccordement en très haut débit des principales zones d’activité de chaque territoire. Mon objectif est que 75 % des zones d’activité d’intérêt communautaire de chaque département soient irriguées en très haut débit et que la fibre optique arrive à toutes les communes de plus de 1 000 habitants en cinq ans.

Debut de section - Permalien
Hubert Falco, secrétaire d'État

Je souhaite encourager l’action des collectivités qui s’impliquent dans cet enjeu. Nous accompagnerons ainsi la réalisation de schémas directeurs du numérique sur les territoires qui se porteront volontaires.

Monsieur Fauconnier, je me dois, enfin, en réponse à vos interrogations, d’évoquer l’action du Gouvernement en matière de démographie médicale. Je sais que le Sénat va débattre de ce sujet à l’occasion de l’examen du projet de loi de ma collègue Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports. Cette question est sans doute la plus prégnante dans nos territoires ruraux.

Vous savez le rôle d’impulsion qu’a pu avoir mon secrétariat d’État dans le développement de la télémédecine ou des maisons de santé afin d’assurer une meilleure offre médicale dans les territoires.

Mais les démarches locales, si pertinentes soient-elles, ne peuvent suffire à elles seules.

Le projet de loi « hôpital, patients, santé, territoires » apporte beaucoup d’éléments structurants en matière d’aménagement du territoire. J’ai défendu d’ailleurs ce texte, crucial pour nos territoires ruraux, aux côtés de Roselyne Bachelot-Narquin, à l’Assemblée nationale. Je ne doute pas que l’examen par le Sénat permettra de l’améliorer davantage encore.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la demande et le niveau d’exigence de services évoluent, parce que la population de nos territoires évolue ; tel est le constat que nous faisons chacun. La manière de rendre le service évolue également, parce que les technologies elles-mêmes évoluent. L’organisation du service évolue, parce que les responsabilités entre l’État et les collectivités, entre secteur public et secteur privé évoluent.

Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Hubert Falco, secrétaire d'État

Dans ces mutations, il nous faut une ligne de conduite, une méthode de travail claire.

Aujourd’hui, c’est vers des projets territoriaux de services, construits à l’échelle de bassins de vie, s’appuyant sur des objectifs d’accessibilité et de qualité de services concrets et partagés, soucieux d’une efficacité des moyens par la recherche de la mutualisation des ressources, que nous devons tous tendre.

Telles sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les réponses que je souhaitais apporter à vos interrogations.

Vos interventions, riches d’une expérience de la vie dans nos territoires, appelleraient encore bien d’autres réponses. Pardonnez-moi de ne pas pouvoir vous les apporter dans l’immédiat, faute de temps.

Mais je ne saurais terminer sans vous remercier, monsieur Sutour, d’avoir posé cette question ô combien pertinente et essentielle pour l’ensemble de nos territoires et, plus particulièrement, pour nos territoires ruraux.

Applaudissements

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous éprouvons de la satisfaction à l’issue de ce débat : la problématique des services publics dans les territoires ruraux a été évoquée ici, au Sénat, Grand Conseil des communes de France.

Si j’ai posé cette question, et si elle a un écho auprès d’un certain nombre de mes collègues, c’est que les sénateurs que nous sommes, qui parcourent leur territoire, sont quotidiennement confrontés aux difficultés que nous avons soulignées et que nous constatons dans différents secteurs. On a ainsi évoqué La Poste, les écoles, la fracture numérique, la téléphonie. Je m’arrêterai sur la téléphonie filaire – je ne parle pas du portable et des « zones blanches » –, car de nouveaux problèmes se posent.

Dans le passé, nous ne rencontrions pas les difficultés auxquelles nous avons à faire face aujourd'hui en matière de téléphonie filaire. Certaines communes nous signalent que leurs lignes téléphoniques ne fonctionnent pas et que, pendant trois jours, quatre jours, voire une semaine, personne ne vient les réparer. Nous assistons à une importante dégradation du service.

Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie globalement de votre intervention et de l’état d’esprit dans lequel vous considérez ces problématiques.

Je sais que vous n’ignorez pas nos difficultés, puisque vous avez été élu rural et sénateur d’un département rural avant d’être l’élu d’une grande ville. Néanmoins, j’aurais aimé que vous abordiez le problème des gendarmeries.

Debut de section - Permalien
Hubert Falco, secrétaire d'État

Cela ne relève pas de mon secteur !

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

Certes, mais je me permets de relever une petite bizarrerie : à l’heure où l’on souhaite revaloriser le rôle du Parlement, on procède au transfert au ministère de l’intérieur de la compétence des gendarmeries que l’on retire au ministère de la défense, alors que la loi n’est pas même votée !

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

Il n’en reste pas moins que la loi n’est pas votée et que l’Assemblée nationale doit encore se prononcer ; elle le fera bientôt.

Je signale cet état de fait à titre anecdotique, mais il ne peut être passé sous silence.

Dans une question orale consacrée à la restructuration de la gendarmerie nationale, en décembre dernier, j’avais pris l’exemple de la gendarmerie de Sauve, commune de mon département. Je souhaiterais obtenir des réponses concrètes à cet égard, étant entendu, monsieur le secrétaire d’État, que nous nous battrons : nous ne sommes pas découragés, même si tout un pan de cet hémicycle est vide aujourd'hui. Loin de moi l’idée de stigmatiser les absents, au vu de l’heure tardive, d’autant que, force est de le constater, il est parfois difficile de défendre certaines positions quand les faits sont aussi accablants !

Nous ne demandons rien d’extraordinaire. Nous souhaitons simplement, au-delà des bonnes idées et des perspectives que vous avez évoquées, monsieur le secrétaire d'État, que les financements suivent, que la péréquation soit effective et, surtout, que soit appliqué un des trois principes fondamentaux de la République : l’égalité. Tous les citoyens étant égaux, il ne doit pas y avoir des citoyens de première ou de seconde zone, suivant le territoire où ils habitent. Tous ont droit à des services publics de qualité.

Applaudissements

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

En application de l’article 83 du règlement, je constate que le débat est clos.

Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons, non pas à seize heures, mais exceptionnellement à quinze heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à quatorze heures cinq, est reprise à quinze heures trente, sous la présidence de M. Roger Romani.