Intervention de Yvon Collin

Réunion du 26 mars 2009 à 15h30
Bouclier fiscal — Rejet d'une proposition de loi

Photo de Yvon CollinYvon Collin :

Le second de ces principes, celui de la progressivité de l’impôt, est contraire au concept même de bouclier fiscal. Celui-ci constitue ni plus ni moins une atteinte grave à la progressivité de l’impôt, principe qui a présidé à la naissance de l’impôt sur le revenu, instauré par la loi du 15 juillet 1914 sur l’initiative de notre ancêtre radical Joseph Caillaux.

Notre fiscalité doit réaffirmer le principe selon lequel plus on gagne, plus on paie d’impôts, et, par conséquent, plus on contribue à la vie de la nation.

En conjuguant ces deux principes, nous devons refonder une politique fiscale juste et comprise par tous. De la même façon, il faut éviter les mouvements d’évasion et de défiscalisation au profit d’autres pays membres de l’Union européenne ou de paradis fiscaux.

Mes chers collègues, l’équilibre qu’il nous faut retrouver repose sur la nécessité pour l’État, d’une part, de s’assurer de recettes fiscales suffisantes pour bénéficier de marges de manœuvre budgétaires et, d’autre part, de ne pas compromettre l’attractivité de notre territoire, tant pour attirer les investisseurs étrangers que pour enrayer le flot continu des « exilés fiscaux et économiques », lesquels se rendent ainsi coupables d’actes d’incivilité, si ce n’est de délinquance financière.

D’ailleurs, monsieur le secrétaire d'État, force est de constater que le bouclier fiscal, quoi qu’on en dise, n’a pas enrayé ce phénomène et que, par conséquent, les bienfaits annoncés pour le pays ne sont pas au rendez-vous.

Face à un tel constat d’inefficacité, et compte tenu de la crise qui frappe les Français, des voix pleines de bon sens s’élèvent, à l’intérieur même de la majorité, pour remettre en cause le bouclier fiscal. Par exemple, et pour ne citer que lui, le président de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a proposé la semaine dernière de soustraire du bouclier fiscal la CSG et la CRDS, ce qui permettrait à l’État de récupérer pour la seule année 2009 plusieurs dizaines de millions d’euros.

Mais, surtout, la conjoncture actuelle et les débats qui surgissent autour du bouclier fiscal expriment l’urgence qu’il y a dans notre pays à engager une grande et véritable réforme fiscale.

Cette réforme, qui n’aurait aucun sens sans une profonde réforme de l’État, notamment une redéfinition de ses devoirs régaliens et de ses relations avec les collectivités locales, concernerait la fiscalité tant nationale que locale. Elle s’orienterait vers un principe de « fiscalité juste », conformément à l’article XIII de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

À cet esprit de justice s’ajouterait le principe de « vertu fiscale », selon lequel toute contribution devrait être affectée à une dépense préalablement définie par le législateur.

Mes chers collègues, nous ne pourrons nous satisfaire encore longtemps de mesures de circonstance et de toilettages ponctuels. Il est donc grand temps d’en revenir aux fondamentaux de notre République : un État aux contours bien définis, mû par une fiscalité juste, équitable, efficace et comprise par tous.

En attendant cette grande réforme que nous appelons de nos vœux, l’abrogation du bouclier fiscal constituerait un signal fort dans ce sens. C’est pourquoi les sénateurs radicaux de gauche et la très grande majorité des membres du groupe du RDSE approuveront cette proposition de loi.

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