Séance en hémicycle du 26 mars 2009 à 15h30

Résumé de la séance

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La séance

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La séance, suspendue à quatorze heures cinq, est reprise à quinze heures trente, sous la présidence de M. Roger Romani.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi tendant à abroger le bouclier fiscal et à moraliser certaines pratiques des dirigeants de grandes entreprises en matière de revenus, présentée par M. Thierry Foucaud et les membres du groupe CRC-SPG (nos 29 et 295).

Dans la discussion générale, la parole est à M. Thierry Foucaud, auteur de la proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, mes premiers mots seront pour regretter que ce débat se déroule, eu égard au thème de notre discussion et à leurs récentes déclarations, en l’absence de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi ainsi que de M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique,

Sans vouloir vous faire un faux procès, monsieur le secrétaire d'État, nous déplorons que l’initiative parlementaire en matière fiscale ne se traduise pas par la présence, au banc du Gouvernement, des premiers intéressés, ce qui semble précisément montrer le peu de considération dans lequel on tient la représentation nationale, surtout s’agissant d’une question qui préoccupe, vous le savez, les Françaises et les Français.

Venons-en maintenant au cœur de notre sujet.

Quand nous avons déposé, le 15 octobre dernier, la proposition de loi tendant à abroger le bouclier fiscal et à moraliser certaines pratiques des dirigeants de grandes entreprises en matière de revenus, nous ne pensions pas que ces questions prendraient place dans le débat politique avec l’acuité toute particulière que l’on constate aujourd'hui. Voyons-y l’une des conséquences de l’approfondissement d’une crise économique qui apporte chaque jour son lot de plans sociaux, de chômeurs supplémentaires, de réduction d’activité et de fermetures d’entreprises, conduisant à une remise en cause de la vie quotidienne de centaines de milliers de salariés et de leurs familles, confrontés désormais à l’incertitude du lendemain.

Cette crise, globale et mondiale, trouve son origine dans les dérèglements dont les marchés financiers ont fait l’objet, à force de rendre toujours plus opaques les libres échanges qui s’y déroulaient et de faciliter la libre et rapide circulation des capitaux. Il serait toutefois malhonnête de limiter la crise que nous connaissons au seul dérèglement des marchés financiers, moyennant quoi il suffirait d’une bonne dose de régulation, et d’une subite prise de conscience des organismes financiers internationaux, comme d’ailleurs des banques centrales, pour remettre le tout d’aplomb.

La crise prend, dans chaque pays où elle se produit, des caractéristiques nationales, fruits notamment du degré de libéralisation du droit des affaires comme du travail, mais aussi des choix budgétaires et fiscaux opérés depuis de nombreuses années. En ce sens, le bouclier fiscal trouve toute sa place dans ce schéma, comme facteur et fauteur supplémentaire de crise, parce qu’il correspond au détournement de l’argent public au profit exclusif d’une infime poignée de privilégiés !

Concernant la rémunération des dirigeants, la question posée est également celle de l’égalité devant l’impôt. Au seul motif d’exercer des responsabilités à un haut niveau dans telle ou telle entreprise, une infime minorité de cadres salariés du privé – et leurs familles, parfois ! – bénéficient de conditions de rémunération privilégiées les dispensant de s’acquitter de l’impôt qui serait dû si ces revenus étaient assimilés à des salaires.

La question de l’attractivité de certains postes de direction d’entreprise se mesure-t-elle, comme tente de le faire croire depuis si longtemps, et sous les prétextes les plus fallacieux, M. le rapporteur général, à la consistance du parachute doré, au plan d’options d’achat d’actions, à la valeur des actions gratuites ou à la « retraite chapeau » dont bénéficient ou bénéficieraient les dirigeants concernés ? Si tel devait être le cas, permettez-nous de nous interroger sur la conscience professionnelle de tels dirigeants, devenus de véritables chasseurs de primes !

Aujourd'hui, il semble clairement établi, dans l’affaire de la Société Générale – « Jérôme Kerviel, reviens ! » – et des bonus qu’ont failli s’attribuer ses dirigeants, que le dispositif des stock options, comme toute autre rémunération de cette nature, ne vise qu’à permettre de gagner beaucoup d’argent, sans nécessairement mériter de le percevoir au regard du travail accompli, et de verser le moins possible d’impôts et de cotisations sociales !

Oui, monsieur le rapporteur général, les stock options ou les parachutes dorés ne sont qu’une magnifique niche fiscale et sociale réservée à quelques privilégiés, au mépris du travail des autres, et surtout en profitant du travail des autres ! Ce sont d’obscurs conseillers clientèle, rémunérés au pourcentage, qui « font » le produit net bancaire de nos grandes banques, mais ce produit est appelé à être largement capté par les dirigeants, dont le seul mérite est bien souvent de seulement « diriger » ! Ce sont, d’un côté, des ouvriers, des techniciens, des cadres, qui conçoivent, fabriquent et vendent les produits de nos grandes entreprises industrielles, de l’autre, quelques dirigeants, souvent investis de missions de représentation, qui sont appelés, via leurs stock options et leurs bonus divers et variés, à en tirer parti !

Pour les uns, modération salariale et intensification continue de la productivité ; pour les autres, vive la Bourse, les plus-values et les dividendes !

C’est cette situation qui est devenue parfaitement intolérable pour la grande majorité de la population de notre pays.

On ne peut plus dire aux salariés des entreprises confrontés au chômage technique - ceux de Renault à Sandouville ou à Cléon, de Continental à Clairoix, dont l’entreprise risque la fermeture, de Faurecia à Auchel, de Goodyear à Amiens, de Fulmen à Auxerre, de Molex à Villemur-sur-Tarn, et tant d’autres encore - que, pendant qu’ils accumulent journées de chômage technique et pertes de salaires, il reste encore en France quelques dirigeants de banque et d’entreprise qui peuvent impunément, et sereinement, jouer en Bourse !

D’ailleurs, on a encore appris ce matin que Renault a décidé de provisionner des stock options pour 2009 ! Honte à l’État actionnaire s’il accepte ce déni de justice sociale !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Au demeurant, permettez-moi un aparté.

Si nos banques et nos plus grandes entreprises étaient encore propriétés publiques, nous n’aurions sans doute pas à faire la danse du ventre pour les voir dirigées par quelques financiers et affairistes à la recherche des conditions salariales les plus avantageuses, et donc les plus dérogatoires au droit commun !

Évidemment, vous allez me dire, une fois encore, que, depuis 2007, la loi est intervenue à plusieurs reprises pour fixer le cadre de la rémunération des dirigeants et éviter toute dérive. Mais voilà, chers collègues, qu’il s’agisse des dispositions de la loi TEPA, la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, du code éthique du MEDEF ou de la loi en faveur des revenus du travail, tout a volé en éclats entre l’affaire Forgeard et celle de la Société Générale, entre l’affaire Cheuvreux-Crédit Agricole et toutes celles qui vont être rendues publiques dans les jours à venir, sans parler de ce que l’on entend dire sur Renault et Valeo !

Et ne nous dites pas que MM. Oudéa et Bouton n’ont rien compris. Ils ont, au contraire, très bien compris que le cadre législatif fixé par les textes que je viens d’évoquer ne créait pas d’obstacle insurmontable à la poursuite des pratiques antérieures !

Pour nous, sénateurs du groupe CRC-SPG, il n’est ni juste ni justifiable qu’un dirigeant d’entreprise puisse obtenir, au titre d’une rémunération « accessoire », plusieurs centaines de fois le salaire moyen des employés de son entreprise ! Oser concevoir des plans de stock options, comme cela se fait à la Société Générale ou au Crédit Agricole, alors même que l’argent public est venu ces derniers temps renflouer des caisses passablement asséchées par des comportements insensés enregistrés sur les produits financiers dérivés, c’est, pour nous, parfaitement inacceptable !

Il est donc temps de légiférer, et de légiférer vraiment sur la rémunération des dirigeants d’entreprise, d’autant que la pertinence des stock options, à en croire Mme Lagarde, commence à être mise en cause par ceux-là mêmes qui les défendaient encore récemment.

Rappelons que légiférer sur cette question revient à s’intéresser à la situation de moins de 20 000 redevables de l’impôt sur le revenu, ce qui représente environ un demi-millième des contribuables de cet impôt fondateur de l’égalité républicaine et de la justice fiscale. Le régime de faveur dont jouissent ces contribuables a un coût pour l’État, puisque le manque à gagner en termes de recettes fiscales est de l’ordre de 100 millions à 150 millions d’euros ! Ce sont d’ailleurs peut-être les mêmes qui sont concernés par le bouclier fiscal…

À l’occasion de ce débat, nous ne pouvons que vous présenter, mes chers collègues, avec plus de précision encore le bouclier fiscal.

Dès qu’il en a été question, nous avons été opposés à la création de ce dispositif de remboursement d’impôt, dont on avait prétendu, à l’origine, qu’il allait concerner, d’abord et avant tout, des ménages modestes. Mensonge !

Ainsi, M. Copé, alors ministre délégué au budget et à la réforme de l’État, avait affirmé en décembre 2005 : « En effet, sur les 93 000 personnes qui bénéficieront de ce plafonnement, près de 90 % sont dans le premier décile de revenu. Cela s’explique par le fait que les impôts locaux ont été intégrés au bouclier fiscal. C’est un point très important, auquel je tiens beaucoup. Cela signifie qu’il s’agit d’une mesure de justice. Ce dispositif concernera les artisans ayant connu une année difficile, les agriculteurs ayant subi une mauvaise récolte, des créateurs d’entreprise, bref, un certain nombre de nos compatriotes qui sont, aujourd’hui, dans une situation modeste. Je tiens d’ailleurs les simulations à votre disposition, mesdames, messieurs les sénateurs. »

Rires sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Voilà ce que disait M. Copé en décembre 2005.

Il est juste dommage de constater, au point où nous en sommes, que le nombre des bénéficiaires du bouclier fiscal n’a jamais atteint le niveau annoncé en 2005, ce qui pose évidemment la question même de la raison d’être du dispositif, question ô combien récurrente.

Alors qu’il a encore renforcé le bouclier en y intégrant – mais cela, vous ne le dites jamais, en tout cas jamais assez ! – la CSG, la CRDS, et en réduisant le plafond à 50 % des revenus, le Gouvernement Sarkozy/Fillon n’a que 14 000 « misérables » contribuables à se mettre sous la dent !

De surcroît, voilà que, si plus de 8 000 de ces contribuables ont reçu un chèque d’une valeur moyenne de 535 euros, sans doute lié à leurs seules impositions locales, un peu moins de 900 se sont vu accorder un remboursement d’une valeur moyenne de 368 000 euros, c’est-à-dire trente fois le SMIC annuel !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Et, pour obtenir un remboursement de 368 000 euros, j’insiste sur le fait qu’il faut quand même déclarer un patrimoine d’au moins 24 millions d’euros !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Un remboursement de 368 000 euros pour un patrimoine de 24 millions d’euros : les malheureux, en effet !

Des données encore plus précises indiquent qu’une petite vingtaine de contribuables auraient obtenu du Trésor public un remboursement supérieur à 2, 5 millions d’euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Résultat, comme nous l’avons dénoncé lors de la discussion des différents textes budgétaires, loi de finances initiale ou collectif, l’essentiel de la dépense fiscale liée au bouclier fiscal, c’est-à-dire l’essentiel des 458 millions d’euros de pertes de recettes qu’il représente, est accaparé par des contribuables particulièrement riches, très riches, et pour tout dire, assujettis à l’ISF !

Je vais vous livrer mon sentiment : c’est bel et bien parce que vous avez décidé de vous attaquer à l’ISF dans la loi TEPA, en prenant des mesures d’allégement sur la valeur de l’habitation principale ou le financement des PME, que, finalement, le bouclier fiscal ne rencontre désormais qu’un succès tout relatif.

Le bouclier fiscal agit, quelque part, comme une niche de plus, une niche de trop, comme une boursouflure du droit, pour des contribuables dont la situation est déjà largement prise en compte par ailleurs.

Combien déjà de patrimoine faut-il déclarer pour récupérer 368 000 euros d’ISF, mes chers collègues ? Je vous l’ai dit, mais il convient de rappeler ce chiffre quand on connaît cette France qui vit mal aujourd’hui : 24 millions d’euros de patrimoine. Cela représente douze à quinze fois le patrimoine moyen des contribuables soumis à l’ISF ! Et encore ne s’agit-il que du remboursement au titre du bouclier fiscal. On peut en effet penser que des impôts restent dus…

Vous allez nous expliquer, chers collègues, que l’on récompense la réussite ! En vérité, ce qui est récompensé, ce ne sont que des privilèges acquis par héritage. La plupart du temps, ils n’ont rien à voir avec la rémunération du travail, mais ils dépendent beaucoup de la position sociale d’origine !

Nous devons faire la loi non pour quelques affairistes à l’affût de coups de Bourse, mais pour servir l’intérêt général !

À la vérité, devant son peu de succès auprès des contribuables, le bouclier fiscal est devenu indéfendable : il a aujourd’hui tous les travers d’une énorme niche fiscale au profit d’une infime minorité de contribuables soumis à l’ISF !

Notre proposition de loi a le mérite de la simplicité.

La suppression du bouclier fiscal, dispositif inopérant, sans impact économique avéré, superfétatoire, est une nécessité objective en ces temps de crise où la grande majorité des Françaises et des Français doivent se « serrer la ceinture ».

Alors, chers collègues, tirez le bilan de la pratique et osez, pour une fois, revenir sur ce que vous avez voté et ce sur quoi certains concèdent aujourd’hui avoir été abusés ! Supprimons ensemble le bouclier fiscal. La mise en cause des stock options et autres rémunérations dérogatoires, dans un contexte de pression continue et renforcée sur les salaires, est du même ordre.

La faillite d’un système économique dans lequel la richesse créée par le travail a été, au fil du temps, de plus en plus captée par le capital et ses dérivés est patente et impose de repenser l’organisation économique comme notre système fiscal sur des bases nouvelles.

Cette proposition de loi que nous vous invitons à adopter en constitue une première étape, modeste, assez fortement symbolique, mais néanmoins nécessaire.

Il est temps de rendre à l’impôt toutes ses vertus républicaines et de faire contribuer justement chacune et chacun, en fonction de ses possibilités, à l’œuvre commune.

Mes chers collègues, le redressement économique du pays passe aussi par les mesures que nous vous proposons ici d’adopter.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Il est tellement en pointe pour défendre les salariés !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’examen de cette proposition de loi s’inscrit dans le cadre de la séance mensuelle réservée aux initiatives des groupes politiques d’opposition et des groupes minoritaires – nous sommes tous des minoritaires dans cette assemblée ! –, …

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Il y en a qui sont plus minoritaires que d’autres !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

… selon les nouvelles dispositions du cinquième alinéa de l’article 48 de la Constitution. Jusque-là, …

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

M. Philippe Marini, rapporteur. … rien à dire, en effet.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Le groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche met l’accent sur un sujet important et délicat.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Comme l’a fait à plusieurs reprises le Président de la République, à Toulon, le 25 septembre 2008, puis à Saint-Quentin, le 24 mars 2009, il convient de souligner que le fait d’occuper des responsabilités économiques éminentes crée des devoirs. Je crois indispensable de le répéter à mon tour, au début de ce rapport.

Lorsque l’on a le talent, …

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

… lorsque l’on a la chance de diriger des hommes et des femmes – haute mission que celle-là –, il convient d’être très attentif à l’environnement économique et social, et de faire preuve de bon sens.

Il est des périodes où, en effet, l’esprit public est, à juste titre, très sensible aux questions de rémunérations et d’avantages annexes.

Dans la vieille société, on pratiquait un principe bien connu de nos provinces : « Pour vivre heureux, vivons cachés ! ». On n’aimait pas étaler la richesse ; plus on était riche, moins on le montrait.

Dans la société d’aujourd’hui, dans ce monde globalisé, on estime parfois devoir…

Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

... apparaître ; la société est devenue une société d’apparence.

Parmi les apparences, parmi ces choses qui brillent, …

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

… figurent en particulier certains avantages annexes qui s’ajoutent aux rémunérations.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Mes chers collègues, c’est bien le contexte dans lequel nous traitons de la présente proposition de loi.

La commission des finances, qui m’a confié ce rapport, m’a incité à examiner avec une grande précision les sept articles de la proposition de loi. Et, comme on peut l’observer en se référant à mon rapport écrit, l’analyse a été approfondie.

Toutefois, la matière dont nous traitons n’est pas strictement nouvelle. Il faut en effet le rappeler, les sujets que nous allons aborder cet après-midi ont été développés avec insistance dans chacune des discussions budgétaires de ces derniers mois, et les arguments avancés ont déjà été échangés à de nombreuses reprises dans cet hémicycle.

Vous ne serez donc pas surpris, mes chers collègues, de m’entendre dire que, dans sa majorité, la commission appelle au rejet des différents articles de cette proposition de loi, …

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

… mais un rejet motivé, argumenté, et la séance de cet après-midi va nous permettre à nouveau de confronter nos différents arguments.

Telle est la règle normale dans un monde pluraliste et au sein d’une assemblée comme la nôtre.

La suppression pure et simple du bouclier fiscal remettrait en cause un dispositif dont l’objet est d’éviter le caractère confiscatoire de l’impôt.

Les chiffres de l’administration fiscale confirment l’utilité de ce dispositif, tel qu’il a été retouché par la loi de l’été 2007 : deux tiers des 14 000 foyers fiscaux bénéficiaires du bouclier sont des foyers à revenus très modestes

Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

, mais possédant leur résidence principale, et pour qui le poids de la taxe foncière peut être difficilement supportable.

Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Néanmoins, mes chers collègues, et la commission des finances l’a exposé à de nombreuses reprises ces derniers mois, le bouclier fiscal n’est pas sans reproche.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Mais, s’il n’est pas sans reproche, c’est parce qu’il est un dispositif dérivé d’un autre, …

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Je voudrais rappeler que, lors de la discussion de la loi de finances pour 2009, nous avons, Jean Arthuis, Jean-Pierre Fourcade et moi-même, soumis à la Haute Assemblée un amendement dont les mesures forment ce que j’appelle une trilogie…

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

… et qui comportait la suppression du bouclier fiscal, l’abrogation de l’impôt de solidarité sur la fortune et, en contrepartie et à due concurrence des montants ainsi abandonnés par le budget, la création d’une nouvelle tranche d’impôt sur le revenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Ces dispositions – ou, plus exactement, cette trilogie –, devront s’appliquer un jour ou l’autre !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Et, pendant ce temps-là, vous ne faites rien !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

M. Philippe Marini, rapporteur. Pour autant, tenir des débats de stratégie fiscale en pleine crise ne me paraît vraiment ni très opportun

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

... ni très réaliste, car, mes chers collègues, nous sommes dans une phase où, nécessairement, les jalousies sont exacerbées.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Les riches se disputent et les jalousies entre eux sont exacerbées !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Tout débat de politique fiscale risque soit d’apparaître comme provocateur, soit d’aboutir à un alourdissement de la fiscalité, qui serait un handicap supplémentaire au moment où la récession est ce qu’elle est.

À l’avenir, en sortie de crise, il est tout à fait clair que nous serons toujours, et peut-être même encore davantage, dans un monde ouvert, où les compétences devront circuler, où les entreprises devront faire appel aux talents et les rémunérer au prix du marché, qu’on le veuille ou non.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

C’est une réalité ! Personne, d’ailleurs, ne propose un modèle de repli derrière des frontières ; personne, à quelque endroit que l’on se situe, n’ose même décrire ce que pourrait être ce modèle.

Ne nourrissons donc aucune espèce d’illusion : l’attractivité du territoire en général, et l’attractivité fiscale en particulier, demeurera un objectif incontournable de la politique fiscale de sortie de crise, au moment où notre économie aura retrouvé le chemin de la croissance.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Venons-en à présent aux politiques de rémunération.

J’évoquais tout à l’heure des considérations morales, notamment sur les comportements à adopter, qui devraient s’imposer à l’esprit de tous, et plus particulièrement de celles et ceux qui détiennent les plus hautes responsabilités au sein du monde économique.

Pour autant, est-il raisonnable d’imaginer un plafonnement général de tout ou partie de la rémunération, la suppression de toute possibilité de mettre en place des mécanismes d’association au capital des dirigeants et des mandataires sociaux des entreprises ?

Aller aussi loin, comme le prévoit la présente proposition de loi, reviendrait à nous créer à nous-mêmes des handicaps particulièrement lourds pour demain et après-demain dans la compétition internationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Je voudrais rappeler que le législateur, que nous sommes, est loin d’être resté inactif ces dernières années. Au contraire, il est intervenu sur tous ces sujets à de nombreuses reprises, afin d’encadrer des pratiques, d’améliorer le contrôle des actionnaires, de garantir la transparence et d’aller dans le sens d’une certaine justice sociale.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

La transparence ! Tout se sait, mais rien ne change !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

La loi du 3 décembre 2008 en faveur des revenus du travail a subordonné l’attribution d’options de souscription ou d’achat d’actions aux mandataires sociaux à la distribution de ces mêmes options ou actions gratuites à l’ensemble des salariés de l’entreprise ou à la mise en œuvre d’un dispositif d’intéressement ou de participation volontaire ou dérogatoire.

C’est une disposition importante, qui consiste à partager l’intéressement à une éventuelle plus-value sur le capital au niveau de l’ensemble de l’entreprise, soit à l’échelle la plus large.

Je rappelle également que la loi de finances pour 2009 a modifié le régime fiscal des « parachutes dorés » en plafonnant le montant des indemnités de départ déductible du bénéfice imposable à six fois le plafond annuel de la sécurité sociale.

Je rappelle encore que la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite loi TEPA, si vilipendée par certains, malgré ses évidentes qualités, …

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

… a interdit les éléments de rémunération, indemnités et avantages dont le bénéfice n’est pas subordonné au respect de conditions liées aux performances du bénéficiaire, appréciées au regard de celles de la société.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

M. Philippe Marini, rapporteur. Ces performances peuvent et doivent être attestées par des éléments précis et chiffrés qu’il appartient aux assemblées générales et aux conseils d’administration de constater et de faire respecter.

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

C’est le cas en ce moment ! Regardez ce qui se passe chez Valeo !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Permettez-moi également, mes chers collègues (Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG, où l’on scande : « Valeo ! ».), de citer la loi du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l’actionnariat salarié et portant diverses dispositions d’ordre économique et social, qui a encadré les modalités de rémunération des dirigeants mandataires sociaux sur deux points.

D’une part, elle a prévu que le rapport de gestion des sociétés cotées doit présenter les principes et les règles arrêtées par le conseil d’administration ou le conseil de surveillance pour déterminer les rémunérations et avantages de toute nature accordés aux mandataires sociaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

D’autre part, la même loi impose aux sociétés de définir des obligations de conservation sur tout ou partie des titres attribués aux dirigeants, et ce jusqu’à la cessation de leurs fonctions.

Enfin, la loi du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l’économie, dite loi Breton, …

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

… a notablement renforcé les obligations de transparence des sociétés cotées en soumettant au régime des conventions réglementées les éléments de rémunération versés à raison de ou postérieurement à la cessation des fonctions des dirigeants, soit les retraites dites « chapeau », les indemnités de départ et rémunérations différées communément dénommées « parachutes dorés ». L’application de ce régime implique une autorisation préalable du conseil d’administration ou de surveillance, l’information des commissaires aux comptes et la soumission de ces conventions à l’approbation de l’assemblée générale des actionnaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Je rappelle en tout dernier lieu que, en cas de perception de rémunérations excessives ou interdites, le dirigeant bénéficiaire expose non seulement sa responsabilité civile, mais également sa responsabilité pénale sur le chef d’abus de biens sociaux, si les éléments constitutifs de l’infraction sont réunis.

En guise de conclusion, il me semble important d’insister, mes chers collègues, sur la responsabilisation de l’ensemble des acteurs du gouvernement d’entreprise.

La moralisation des pratiques de rémunération des dirigeants et des mandataires sociaux relève avant tout, je persiste à le dire, de la responsabilisation et de l’autodiscipline des dirigeants et mandataires sociaux, qui doivent vivre non pas dans une bulle, mais dans la réalité sociale de leur pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Apparemment, c’est ce qu’ils font !

Rires sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Parallèlement au renforcement du cadre législatif, il existe, depuis plusieurs années, au sein des sociétés, la volonté d’élaborer et de faire prévaloir des règles de conduite en matière de gouvernement d’entreprise. En la matière, nous le savons, la demande des pouvoirs publics est forte pour parvenir à des normes encore plus précises, mieux élaborées et qui soient davantage opposables aux dirigeants et aux mandataires sociaux des entreprises.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

De nouvelles recommandations sur la rémunération des dirigeants mandataires sociaux dans les sociétés cotées ont par ailleurs été proposées au mois d’octobre 2008. Il convient certainement d’aller plus loin.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Il est important, selon moi, de bien identifier une situation particulière, qui est celle des entreprises aidées par l’État pour faire face à la crise.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Qu’il s’agisse du financement du secteur bancaire ou des filières automobiles, qu’il s’agisse des plans sociaux aidés financièrement par la collectivité, il semble tout à fait logique et normal que l’attribution de ces aides soit conditionnée. En réalité, on appliquerait là les règles qui prévalent sur le plan international. En effet, quand un État demande l’aide du Fonds monétaire international, celle-ci lui est allouée moyennant un certain nombre de conditions qui devront dicter le comportement dudit État. Pour une entreprise, c’est exactement la même chose !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Pour les responsables de la Société Générale, par exemple !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Si un groupe bancaire a besoin du concours de l’État pour opérer son refinancement ou renforcer ses fonds propres, si un groupe présent dans la filière automobile a besoin de concours temporaires de l’État, il est normal et logique que certaines conditions y soient associées. Celles-ci doivent conduire les dirigeants à souscrire à une discipline, à une plus grande transparence et à une modération de leurs comportements salariaux, et relatifs aux différents éléments annexes qui s’ajoutent aux rémunérations.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Nous allons prendre connaissance, dans les prochains jours, de dispositions de cette nature. Elles me semblent, à titre personnel, apporter une réponse plus raisonnable et plus équilibrée aux préoccupations actuelles que celle qui est proposée dans le texte de nos excellents collègues du groupe communiste, républicain et citoyen et des sénateurs du Parti de gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Dans ce contexte, mes chers collègues, vous comprendrez que la commission soit peu favorable – c’est une litote ! – à l’adoption des dispositions préconisées par les auteurs de la présente proposition de loi.

Les attitudes vertueuses doivent être encouragées, soutenues, voire initiées par les pouvoirs publics. Néanmoins, le texte qui nous est soumis ne constitue pas une réponse correctement dimensionnée. Son adoption engendrerait dans notre pays des dégâts économiques encore plus graves que ceux que nous pouvons observer à l’heure actuelle.

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Pour l’ensemble de ces raisons, la commission des finances vous demande, mes chers collègues, de rejeter les différents articles de cette proposition de loi.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État chargé de la fonction publique

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, cette proposition de loi du groupe communiste, républicain et citoyen et des sénateurs du Parti de gauche vise à abroger le bouclier fiscal et prétend moraliser certaines pratiques des dirigeants de grandes entreprises.

Disons-le tout de suite, cette proposition de loi ne répond pas de façon adéquate aux problèmes qui ont été soulevés à la suite d’un certain nombre d’abus récents, …

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

… que le Président de la République a d’ailleurs condamnés avant-hier à Saint-Quentin, ni, d’une manière générale, aux problèmes que connaît actuellement notre pays.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

M. André Santini, secrétaire d'État. Au moins est-ce dit clairement, madame le sénateur.

Sourires

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

L’article 1er de la proposition de loi vise à supprimer le bouclier fiscal. Sur ce sujet, le discours du Gouvernement n’a pas varié. Changer de cap en pleine crise n’arrangerait rien.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Vous continuerez à faire une politique pour les riches. Au moins, ça, c’est clair !

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

Je sais que l’opposition souhaite faire du bouclier fiscal un point de fixation du débat politique ; cette proposition de loi en est d’ailleurs le témoignage. La politique du Gouvernement ne se réduit cependant pas à ce seul élément. Vous ne pouvez pas tordre les chiffres pour les besoins d’une communication politique, mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition.

D’après les derniers chiffres dont nous disposons, qui datent du 12 février, le bouclier fiscal a représenté, en 2008, 458 millions d’euros sur les 7, 7 milliards d’euros de la loi TEPA.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Ces 458 millions d’euros, c’est la politique du logement de l’État !

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

Entendons-nous bien : le bouclier fiscal représente 6 % de la loi TEPA, pas plus !

Le paquet fiscal, ce sont d’abord des mesures pour le plus grand nombre. Je pense notamment aux heures supplémentaires et au crédit d’impôt pour les emprunts immobiliers.

Au risque de mettre les pieds dans le plat, mesdames, messieurs les sénateurs

Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

, j’ose affirmer qu’un plafonnement des impôts directs à 50 %, c’est tout d’abord une mesure juste.

Protestations sur les mêmes travées.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

M. André Santini, secrétaire d'État. C’est même une règle de valeur constitutionnelle chez plusieurs de nos voisins : il s’agit d’éviter que l’on ne travaille plus d’un jour sur deux pour l’État.

« C’est faux ! » sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

Il est tout à fait contre-productif de chercher à stigmatiser les contribuables qui exercent leur droit à restitution. Si ces personnes ont bénéficié d’un remboursement total de 458 millions d’euros, c’est qu’elles avaient préalablement payé plus de 1, 1 milliard d’euros d’impôts !

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

Et même les 834 contribuables qui concentrent 307 millions d’euros de remboursement, que l’opposition a choisi de singulariser au sein des données qui ont été transmises aux commissions des finances des assemblées par Éric Woerth, ont payé initialement 585 millions d’euros, soit à peu près le montant de leurs revenus.

Si on veut les faire partir

Exclamations ironiques sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

On constate d’ailleurs que le bouclier fiscal a eu un effet positif, de ce point de vue : en 2007, les départs – notez bien ce chiffre, vous ne le citez pas suffisamment, mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition – ont baissé de 15 % et les retours ont augmenté de 10 %.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

C’est la première fois depuis 2000 que l’on enregistre un tel coup de frein dans les départs. Et ce n’est pas un hasard si cela correspond à la première année de mise en œuvre du bouclier fiscal !

Je remarque d’ailleurs que les deux tiers des bénéficiaires du bouclier fiscal sont des personnes modestes, qui perçoivent un revenu inférieur à 1 000 euros par mois.

Vives protestations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Vous risquez de vous faire lyncher par vos électeurs !

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

M. André Santini, secrétaire d'État. Je comprends que mes propos vous déplaisent, mais ils sont conformes aux statistiques fiscales !

Nouvelles protestations sur les mêmes travées.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

Surtout, j’aimerais que l’on cesse un instant la politique politicienne et la démagogie pour convenir tous ensemble qu’il existait dans ce pays deux offenses à la justice fiscale, deux « péchés contre l’esprit ».

Le premier, c’était en effet que l’on puisse payer plus de 50 % de son revenu, parfois même 100 %, voire davantage, en impôts annuels. Cela n’existe pas ailleurs, l’imposition sur la fortune ayant été progressivement supprimée. En France, nous sommes les derniers à l’avoir conservée

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

Nous l’avons fait, nous avons eu raison ; le Gouvernement le revendique.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Pierre Signé

Contrairement à Jacques Chirac, vous n’avez pas osé supprimer l’ISF !

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

Le second péché contre l’esprit – j’ose espérer qu’un péché contre l’esprit ne vous laissera pas indifférents, mesdames, messieurs les sénateurs ! –, celui contre lequel personne n’avait trouvé de solution avant cette législature, c’est que la multiplication et le déplafonnement de certaines niches fiscales permettaient à des contribuables de s’exonérer complètement d’impôt sur le revenu. Fin 2008, nous avons enfin mis en œuvre un plafonnement effectif des niches fiscales.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

Nous l’avons fait, nous avons eu raison ; le Gouvernement le revendique.

Le vrai scandale, ce n’est pas qu’un citoyen dans ce pays ne paye que 50 % d’impôt ; le vrai scandale, c’était que, jusqu’ici, on pouvait en payer zéro !

Cette vérité aussi, j’aimerais que tout le monde s’attache à la rappeler !

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

Je ne nie pas qu’on puisse avoir une réflexion d’ensemble sur la fiscalité du patrimoine. Le Conseil des prélèvements obligatoires a d’ailleurs jugé dans son dernier rapport que cette dernière était plus lourde chez nous que chez nos voisins. Mais cette réflexion, il faudra la mener de façon complète, à froid, et pas en période de crise.

L’article 2 de la proposition de loi vise à confisquer aux dirigeants, par un impôt au taux de 100 %, les indemnités de départ excédant 250 000 euros nets. Au surplus, l’entreprise qui se risquerait à verser une indemnité pourtant ainsi confisquée serait soumise à une taxe supplémentaire dont les modalités ne sont pas précisées.

L’article 3 a pour objet de taxer à 100 % toute rémunération liée à l’évolution de cours boursiers, ce qui vise sans doute les stock-options et les actions gratuites.

Le Gouvernement n’est pas favorable à ces deux propositions, et je m’en explique.

En premier lieu, une réponse strictement fiscale ne me paraît pas aujourd’hui la mieux adaptée. Les indemnités versées aux dirigeants à l’occasion de la cessation de leurs fonctions sont en effet, par principe, imposables. Elles ne sont exonérées, par exception et sous plafond, que lorsque cette cessation revêt un caractère forcé.

Ces dispositions assurent un traitement équilibré des indemnités de départ des dirigeants, lesquelles ne sont exonérées que si elles sont versées dans des conditions les rapprochant de celles qui sont prévues pour l’exonération des indemnités de licenciement des salariés.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

Mais surtout, depuis deux ans, le Gouvernement a pris des mesures pour moraliser la rémunération des dirigeants.

Dès août 2007, l’article 17 de la loi TEPA a renforcé drastiquement l’encadrement des « parachutes dorés » des dirigeants des sociétés cotées.

Ce nouveau dispositif impose, à peine de nullité, la fixation de conditions de performances conditionnant le versement des indemnités de départ, le respect d’une procédure contraignante allant au-delà de la procédure classique d’approbation des conventions réglementées et, enfin, la publicité des décisions du conseil d’administration autorisant les engagements et constatant la réalisation des conditions de résultats.

Le régime juridique ainsi mis en place permet déjà de garantir que les indemnités de départ des dirigeants ne leur sont pas indûment versées, mais récompensent effectivement leurs performances.

Vives exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

Afin que les stock-options ne puissent plus être réservées à quelques-uns, l’article 22 de la loi du 3 décembre 2008 en faveur des revenus du travail prévoit qu’elles ne pourront plus être attribuées aux dirigeants si les autres salariés ne bénéficient pas d’un système de stock-options, d’actions gratuites, d’intéressement ou de participation dérogatoire.

Au surplus, je ne vous apprendrai pas que le Président de la République souhaite régler rapidement ce problème. Je sais également que les parlementaires sont attachés à trouver une solution, comme l’a montré le débat qui s’est déroulé la semaine dernière sur le collectif budgétaire à l’Assemblée nationale. Je sais aussi que M. le président de la commission des finances a l’intention d’ouvrir le débat la semaine prochaine lors de l’examen au Sénat de ce même collectif.

Enfin, hier soir, le Président de la République a abordé cette question lors d’une réunion avec des parlementaires et certains de ses ministres, dont Éric Woerth. Il a souhaité l’interdiction de l’attribution de bonus et de stock-options aux mandataires sociaux des sociétés qui reçoivent le soutien de l’État. Un décret va être pris qui fixera les conditions dans lesquelles sera interdite l’allocation de stock-options ou d’autres avantages exceptionnels aux dirigeants lorsque les entreprises bénéficieront du soutien de l’État.

Dans ce cadre, la création d’une taxe supplémentaire de 15 % ne me paraît pas être le bon outil.

Les articles 4 et 5 tendent à apporter des précisions techniques aux dispositions précédentes. Ils visent à indexer le plafonnement de l’indemnité de départ des dirigeants prévue à l’article 2 sur l’indice des prix à la consommation et à appliquer rétroactivement les articles 1er à 3 aux revenus de 2008. Le Gouvernement n’y est pas plus favorable qu’aux articles 1er à 3 qu’ils précisent.

L’article 6 vise à modifier le régime des conventions réglementées en conférant de nouvelles attributions à l’assemblée générale des actionnaires. Il prévoit de modifier les règles applicables aux conventions réglementées dans les sociétés anonymes en vue de confier l’autorisation requise à l’assemblée générale, et non plus au conseil d’administration. L’objectif serait que ce soit l’assemblée générale des actionnaires, et plus seulement le conseil d’administration, qui intervienne dans la définition des conditions de rémunération des dirigeants.

Cette disposition ne peut être adoptée dans le cadre de l’examen de cette proposition de loi, car elle modifie les règles applicables aux conventions réglementées, dont le périmètre s’étend bien au-delà de celui de la rémunération des dirigeants. De nombreuses conventions réglementées correspondent à des actes de gestion, notamment dans les groupes de sociétés dans lesquelles les conventions intra-groupe sont soumises à ce dispositif.

Par ailleurs, les actionnaires sont d’ores et déjà impliqués dans la procédure des conventions réglementées puisque les conventions concernées leur sont déjà soumises en vertu de l’article L. 225-40 du code de commerce.

Pour ce qui concerne les rémunérations, la législation assure une transparence sur l’ensemble des rémunérations versées aux dirigeants, ce qui permet aux actionnaires d’exercer pleinement leurs pouvoirs lors des assemblées générales.

Enfin, il n’entre pas dans les attributions du comité d’entreprise de se prononcer sur des actes de gestion et des décisions qui doivent demeurer de la compétence des seuls organes de direction de la société.

Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

L’article 7 prévoit d’étendre la négociation obligatoire aux rémunérations versées aux dirigeants salariés. Cette disposition ne permet pas d’atteindre l’objectif poursuivi, en particulier parce qu’elle n’aurait aucun effet pour les dirigeants qui ne sont pas salariés.

Par ailleurs, la loi du 3 décembre 2008 a conditionné l’attribution de stock-options aux dirigeants des sociétés cotées, ou l’attribution gratuite d’actions, à l’existence d’un dispositif en faveur de l’ensemble des salariés.

Cela n’atténue pas l’intérêt d’une réflexion sur une meilleure répartition de la valeur ajoutée, comme l’a demandé le Président de la République.

Vous le comprenez, le Gouvernement n’est pas favorable à l’adoption de la proposition de loi dont nous discutons aujourd’hui.

La priorité du Gouvernement, c’est de préserver l’emploi dans notre pays à travers un plan de relance responsable, cohérent et construit, pour faire face à la crise.

Rires ironiques sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

J’ignorais que l’emploi vous faisait rire…

Cela passe, bien sûr, par les mesures d’urgence prises en fin d’année dernière pour soutenir notre système financier et le crédit aux PME.

Cela passe par le soutien à l’activité, via les chantiers de la relance suivis par Patrick Devedjian.

Cela passe également par une accélération des remboursements de crédits de TVA et de trop-perçus d’impôts sur les sociétés, dispositions que vous avez votées en fin d’année dernière. Éric Woerth a également donné des consignes très précises pour que les services fiscaux et les URSSAF accordent des facilités de règlement.

Cela passe enfin par toutes les mesures du projet de loi de finances rectificative, qui viendra en discussion devant la Haute Assemblée la semaine prochaine. Ce sera notamment l’occasion de tirer les conséquences du sommet social du 18 février dernier ou encore du plan de soutien à la filière automobile conclu par Christine Lagarde et Luc Chatel le 9 février dernier.

Le Gouvernement encourage les entreprises à recourir à l’activité partielle plutôt qu’à licencier ; il allège l’impôt des contribuables modestes ; il améliore l’indemnisation du chômage partiel.

Nous avons – et nous allons encore – beaucoup parler de hauts revenus cet après-midi. Mais je souhaitais que nous ne perdions pas de vue l’attention que porte le Gouvernement à nos compatriotes qui se trouvent en situation de fragilité.

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade.

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la crise économique que nous traversons impose plus que jamais aux pouvoirs publics de prendre leurs responsabilités et de garder leur sang-froid.

Le Président de la République et le Gouvernement ont pris leurs responsabilités en agissant rapidement pour sauvegarder notre système financier, clef de voûte de notre économie, et en donnant la priorité à l’investissement.

C’est la condition d’une reprise économique solide, saine et durable, puis d’un redressement progressif, mais nécessaire, de nos finances publiques, en jouant sur les déficits et, évidemment, sur l’endettement.

Ce n’est pas dans des mesures précipitées, dispersées – certains diraient démagogiques – comme celles que nous examinons aujourd’hui

Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

M. Jean-Pierre Fourcade. …que l’on trouvera une issue à la crise !

M. Robert del Picchia applaudit

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

Notre responsabilité de parlementaires est de refuser la facilité qui consisterait à désigner des boucs émissaires et à poser de faux problèmes pour éluder les vraies questions, comme celles des réformes structurelles que doit impérativement mener notre pays pour maîtriser ses dépenses publiques, pour renforcer son attractivité et pour faire face aux défis de la mondialisation et du vieillissement de la population.

Le groupe UMP du Sénat, au nom duquel j’interviens, est favorable au principe d’une réforme fiscale, à condition qu’elle soit globale, équilibrée et opportune, comme l’a très bien souligné M. le rapporteur général de la commission des finances, notre excellent collègue Philippe Marini.

Notre groupe s’opposera donc fermement aux dispositions proposées dans le cadre de la proposition de loi soumise aujourd’hui à l’examen de la Haute Assemblée.

En premier lieu, dans le contexte économique que nous connaissons, nous sommes fermement opposés à la remise en cause du bouclier fiscal.

Il faut d’abord rappeler, comme l’a fait excellemment M. le secrétaire d’État chargé de la fonction publique, que le bouclier fiscal garantit que personne ne paiera plus de 50 % de ses revenus au titre des différents impôts qui le frappent. On parle tout le temps du bouclier, mais on oublie de dire que 50 %, c’est la moitié des revenus !

Après quelques années d’expérience, il faudra évidemment améliorer le fonctionnement du bouclier fiscal. Nous sommes d’accord sur le fait qu’il faudra résoudre la contradiction existant entre les niches fiscales et le fonctionnement du bouclier.

Le Gouvernement s’est engagé, comme l’a rappelé M. Santini, à plafonner les niches fiscales, avec notre aide. Il faudra poursuivre la démarche engagée, car le bouclier fiscal n’atteindra sa totale opportunité que lorsque les niches fiscales auront été ramenées à un niveau modeste et strictement nécessaire.

En supprimant le bouclier fiscal, comme le proposent les auteurs de la proposition de loi, on enverrait un très mauvais signal non seulement aux contribuables établis en France, mais aussi et surtout à ceux qui envisagent d’y revenir ou de s’y installer.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

M. Jean-Pierre Fourcade. Nous disposons aujourd’hui d’un excellent élément d’attractivité, le crédit d’impôt recherche. Il ne serait pas opportun de casser l’attractivité de ce mécanisme en supprimant le bouclier fiscal.

M. le secrétaire d’État et M. le rapporteur acquiescent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

J’ai rencontré voilà quelques jours des dirigeants d’une petite entreprise de haute technologie biomédicale installée à Londres. Ils envisagent de revenir en Île-de-France, mais craignent que la modification perpétuelle de nos règles fiscales ne contrarie leurs efforts. La suppression du bouclier fiscal ne les inciterait pas à revenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

Notre pays a engagé depuis plusieurs années des réformes importantes pour renforcer son attractivité et pour attirer ceux qui investissent, qui créent des richesses et de l’emploi, qu’il s’agisse d’entreprises ou de particuliers.

Nous ne devons pas réduire ces efforts à néant en revenant constamment sur les mesures que nous avons adoptées. Notre pays a besoin de stabilité juridique et fiscale pour inspirer la confiance

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

Si nous désignons les « riches » comme les responsables de tous nos maux et les taxons de manière excessive, ils partiront payer leurs impôts ailleurs, et la charge fiscale retombera alors sur les classes moyennes, ce dont se gardent bien de parler les partisans de la suppression du bouclier fiscal.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

Tous nos partenaires européens l’ont compris, et je me demande pourquoi nous ne suivrions pas l’exemple de la Suède, …

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Dans ce pays, le rapport salarial est de un à quatre !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

…de l’Espagne, de l’Allemagne ou du Danemark, qui ont tous fixé, par voie légale ou constitutionnelle, le plafond d’impôts à 50 %.

Par conséquent, la France a besoin que tous, chacun à sa manière, contribuent à la croissance et à notre modèle de société. Il nous faut éviter, compte tenu de la crise que nous traversons, de multiplier les facteurs de division.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

…autre volet de cette proposition de loi, la préservation de notre unité nationale et de notre pacte social impose le respect de la parole de l’État et des mesures qui ont été adoptées dans le cadre des différentes lois que M. le secrétaire d'État et M. le rapporteur général ont citées et sur lesquelles je ne reviendrai pas.

Mais elle impose aussi le respect de principes de justice, de solidarité, d’éthique et de liberté, qui ont été très bien rappelés par le Président de la République à Saint-Quentin. Comme lui, les sénateurs du groupe UMP jugent inacceptables les avantages obtenus par certains dirigeants d’entreprise, surtout lorsque celle-ci a bénéficié de fonds publics. Ces comportements individuels ne correspondent pas à nos valeurs, en particulier à la valeur « travail », que nous voulons promouvoir, alors que d’autres, par leur comportement, la détournent et la dénaturent.

Il est temps de mettre fin à certaines dérives et de moraliser certaines pratiques. Mais, là encore, nous ne devons légiférer ni dans la précipitation ni dans l’excès. À cet égard, les mesures présentées dans le cadre de cette proposition de loi sont inspirées par des considérations qui me paraissent dépasser l’objet de ce que nous devons faire aujourd’hui.

Ainsi, par exemple, taxer à 100 % les stock-options et les actions gratuites serait à la fois confiscatoire sur un plan juridique et inadapté sur un plan économique.

La rémunération des dirigeants n’est pas un mal en soi, mais nous devons veiller à ce qu’elle soit mieux encadrée, mieux conditionnée à l’efficacité économique, et, surtout, liée à d’autres paramètres que l’évolution des cours de la bourse.

Nous devons agir avec pertinence et mesure. Pour être entendu, notre message doit être fort et clair.

À cet égard, nous approuvons la méthode retenue par le Président de la République et le Gouvernement : les grandes entreprises cotées en bourse et bénéficiant de l’aide de l’État ont jusqu’à la fin du mois de mars pour mettre de l’ordre dans les rémunérations de leurs dirigeants. Si elles ne le font pas, les pouvoirs publics devront prendre leurs responsabilités, si possible par la voie réglementaire, pour plus de rapidité et d’efficacité. S’il faut légiférer, nous le ferons.

Il nous paraît cependant essentiel de faire preuve de méthode et de cohérence, de ne pas faire l’amalgame entre les rémunérations excessives de certains dirigeants et celles de l’ensemble des chefs d’entreprise, notamment les chefs de petites et moyennes entreprises et les artisans, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

…qui sont confrontés aux difficultés de l’heure. Il faut non pas adresser des signaux divergents, mais lutter ensemble contre les difficultés économiques actuelles.

C’est dans cet esprit et dans cette perspective que le groupe UMP s’opposera à la proposition de loi qui nous est soumise aujourd’hui.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la proposition de loi de nos collègues du groupe CRC-SPG s’inscrit pleinement dans l’actualité et témoigne d’un réel besoin de remettre en cause des situations fiscales devenues intenables, de plus en plus injustifiables, voire intolérables au regard de la situation de notre pays et des difficultés rencontrées par un nombre croissant de Français, pas seulement les plus modestes d’entre eux.

Dès son apparition, dans les semaines qui ont suivi l’élection du Président de la République, l’idée même du bouclier fiscal faisait débat au Parlement et n’allait pas sans poser de multiples problèmes, déjà dénoncés à cette même tribune : des problèmes éthiques, des problèmes d’équité fiscale, des problèmes de justice sociale, bien sûr, mais également des problèmes d’efficacité et de cohérence économiques.

Aujourd’hui, dans un contexte de crise grave et durable, la question et le principe d’un bouclier fiscal se posent avec la plus grande acuité. La crise financière et la récession économique sans précédent dans lesquelles notre pays s’enfonce chaque jour davantage nous amènent à nous interroger de nouveau sur l’opportunité d’un tel dispositif en faveur de quelques-uns.

Mes chers collègues, face à des perspectives de croissance négative pour l’année en cours, face à l’urgence budgétaire, aggravée par d’importantes pertes de recettes fiscales, est-il encore raisonnable de maintenir un système qui prévoit que les impôts directs payés par un contribuable ne peuvent excéder 50 % de ses revenus ? Comment justifier aujourd’hui le maintien du bouclier fiscal dans notre pays ?

À l’heure actuelle, ce système est très large puisqu’il vise tant les impositions fiscales que les charges sociales personnelles, comme la CSG et la CRDS.

Mécaniquement, il conduit à réduire fortement l’assiette d’imposition des plus gros revenus, alors que ceux-ci devraient au contraire contribuer le plus aux efforts de la nation.

Le constat de cet effet pervers est l’occasion pour le Sénat de revenir à certains fondamentaux, chers à mon groupe et à la famille politique du radicalisme, à savoir le principe de l’égalité devant l’impôt et le principe de la progressivité de l’impôt.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Il est bon de rappeler, mes chers collègues, que le premier de ces deux principes est inscrit dans notre Constitution puisque l’article XIII de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 dispose qu’une « contribution commune est indispensable » et qu’elle « doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ».

Autrement dit, pour les membres de mon groupe, tout citoyen doit contribuer, en fonction de ses moyens, au budget de la nation. L’impôt doit redevenir fondateur de la citoyenneté.

Mme Nicole Bricq applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Le second de ces principes, celui de la progressivité de l’impôt, est contraire au concept même de bouclier fiscal. Celui-ci constitue ni plus ni moins une atteinte grave à la progressivité de l’impôt, principe qui a présidé à la naissance de l’impôt sur le revenu, instauré par la loi du 15 juillet 1914 sur l’initiative de notre ancêtre radical Joseph Caillaux.

Notre fiscalité doit réaffirmer le principe selon lequel plus on gagne, plus on paie d’impôts, et, par conséquent, plus on contribue à la vie de la nation.

En conjuguant ces deux principes, nous devons refonder une politique fiscale juste et comprise par tous. De la même façon, il faut éviter les mouvements d’évasion et de défiscalisation au profit d’autres pays membres de l’Union européenne ou de paradis fiscaux.

Mes chers collègues, l’équilibre qu’il nous faut retrouver repose sur la nécessité pour l’État, d’une part, de s’assurer de recettes fiscales suffisantes pour bénéficier de marges de manœuvre budgétaires et, d’autre part, de ne pas compromettre l’attractivité de notre territoire, tant pour attirer les investisseurs étrangers que pour enrayer le flot continu des « exilés fiscaux et économiques », lesquels se rendent ainsi coupables d’actes d’incivilité, si ce n’est de délinquance financière.

D’ailleurs, monsieur le secrétaire d'État, force est de constater que le bouclier fiscal, quoi qu’on en dise, n’a pas enrayé ce phénomène et que, par conséquent, les bienfaits annoncés pour le pays ne sont pas au rendez-vous.

Face à un tel constat d’inefficacité, et compte tenu de la crise qui frappe les Français, des voix pleines de bon sens s’élèvent, à l’intérieur même de la majorité, pour remettre en cause le bouclier fiscal. Par exemple, et pour ne citer que lui, le président de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a proposé la semaine dernière de soustraire du bouclier fiscal la CSG et la CRDS, ce qui permettrait à l’État de récupérer pour la seule année 2009 plusieurs dizaines de millions d’euros.

Mais, surtout, la conjoncture actuelle et les débats qui surgissent autour du bouclier fiscal expriment l’urgence qu’il y a dans notre pays à engager une grande et véritable réforme fiscale.

Cette réforme, qui n’aurait aucun sens sans une profonde réforme de l’État, notamment une redéfinition de ses devoirs régaliens et de ses relations avec les collectivités locales, concernerait la fiscalité tant nationale que locale. Elle s’orienterait vers un principe de « fiscalité juste », conformément à l’article XIII de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

À cet esprit de justice s’ajouterait le principe de « vertu fiscale », selon lequel toute contribution devrait être affectée à une dépense préalablement définie par le législateur.

Mes chers collègues, nous ne pourrons nous satisfaire encore longtemps de mesures de circonstance et de toilettages ponctuels. Il est donc grand temps d’en revenir aux fondamentaux de notre République : un État aux contours bien définis, mû par une fiscalité juste, équitable, efficace et comprise par tous.

En attendant cette grande réforme que nous appelons de nos vœux, l’abrogation du bouclier fiscal constituerait un signal fort dans ce sens. C’est pourquoi les sénateurs radicaux de gauche et la très grande majorité des membres du groupe du RDSE approuveront cette proposition de loi.

Applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

« Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable. Elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés. »

« Tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée. »

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, vous aurez reconnu, respectivement, les articles XIII et XIV de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

Le groupe socialiste, en soutenant la proposition de loi du groupe CRC-SPG, ne cède aucunement à une quelconque facilité – celle du « bouc émissaire », par exemple – ou à une réaction émotive face aux événements que nous vivons. Au contraire, il s’agit pour lui de poursuivre le débat que nous avons engagé depuis plusieurs années avec la majorité sur les vertus de l’outil fiscal, la légitimité des politiques qui y recourent au service de la justice sociale et de l’efficacité économique, et ce a fortiori dans la période de crise profonde que nous traversons.

Lors du débat sur la fameuse loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi justifiait le passage de 60 % à 50 % du bouclier fiscal, instauré par le gouvernement précédent, en l’intégrant au contrat que passait « l’individu face à l’État ». Elle se situait ainsi dans la pure tradition libérale, celle de l’impôt-échange.

Nous nous revendiquons d’une autre philosophie politique, qui fait de l’impôt un « devoir nécessaire au lien social fondé sur l’idée de la solidarité ».

Telle est la source directe de notre attachement à la progressivité de l’impôt, laquelle garantit une redistribution, améliorant ainsi les conditions de vie des personnes les plus modestes qui ont par ailleurs – je le rappelle en ces temps de crise profonde et durable – une forte propension à consommer. Or, la consommation est un soutien essentiel à la croissance. Les derniers chiffres tant de la consommation que du chômage ne nous rassurent pas quant à l’étendue de la crise.

La dualité « impôt échange » ou « impôt de solidarité » est une tension dynamique qui domine le débat fiscal. Cette proposition de loi est donc bienvenue pour alimenter ce débat, d’autant que, avec la nouvelle procédure, nous débattrons de chaque article.

Force est de constater que, depuis 2002, les gouvernements et leur majorité ont agi dans trois directions : d’abord, délier le lien fiscal en vidant peu à peu de son contenu le principe de l’égalité contributive devant l’impôt ; ensuite, délier le lien économique, favorisant ainsi des plus-values rentières, sans aucune justification de performance et sans renforcer notre appareil productif ; enfin, délier le lien social, en justifiant des écarts de revenus exponentiels, tout en diminuant les responsabilités qui devaient y être attachées.

Le bouclier fiscal n’est que le dernier avatar, mais ô combien emblématique, d’une série de mesures d’affaiblissement de l’impôt. Sans la survenue de la crise, vous auriez continué dans le même sens pour arriver à une imposition des revenus qu’on qualifie de flat, qui tourne définitivement le dos à la progressivité.

Dans cette même période, les inégalités de revenus ont explosé. Il est démontré que l’aggravation des inégalités est due à la déformation accélérée de la masse salariale au niveau des très hauts salaires. Par conséquent, il est évident pour nous qu’il faut supprimer le bouclier fiscal. Aujourd'hui encore plus qu’hier, il n’a plus aucune justification, si tant est qu’il en ait eu une.

On ne peut pas dire que les quelques chiffres dont nous disposons confortent l’argumentaire du Gouvernement. M. le secrétaire d’État et M. le rapporteur général ont employé certains arguments à l’attention des parlementaires de la majorité, afin que, de retour dans leur département ou dans leur commune, ces derniers puissent répondre à l’apostrophe de leurs concitoyens. Ce problème, nous le savons, n’est en effet pas uniquement porté par l’électorat de la gauche.

Permettez-moi de revenir sur les arguments utilisés pour justifier le maintien du bouclier fiscal.

Tout d’abord, ce bouclier éviterait le départ des Français les plus fortunés. Je mettrai deux chiffres en parallèle : la perte au titre de l’ISF pour 2008 est de 17 millions d’euros et le coût du bouclier fiscal est évalué à 458 millions d’euros. Le compte n’y est pas.

Ensuite, le bouclier fiscal nous permettrait de préserver notre compétitivité et notre attractivité. Cet argument a-t-il encore un sens alors que le paradigme d’hier est devenu obsolète du fait de la crise ?

Peut-on justifier le bouclier fiscal alors que, dans le même temps, on adresse des avertissements moraux aux patrons, on les exhorte à faire preuve de retenue quant à leurs rémunérations ? Si l’on veut être logique, si l’on veut aller au bout de ces exhortations et de ces incantations, il faut en tirer la conséquence par rapport au bouclier fiscal.

Le plafonnement des niches fiscales, décidé en loi de finances pour 2009, répondrait au problème, nous avait-on dit. Il n’en est rien dès lors que le revenu pris en compte pour le calcul est net des déductions fiscales. La diminution ainsi réalisée du revenu réel provoque un remboursement plus important, comme les chiffres l’attestent : c’est la redistribution à l’envers ! C’est la « régressivité » en lieu et place de la progressivité.

Malheureusement, le Président de la République, le Gouvernement et la majorité ont érigé ce bouclier fiscal en totem. Y renoncer reviendrait, selon eux, à invalider les choix initiaux qui ont été faits voilà déjà quelques années.

Mais puisque la crise est là, profonde, durable et dure aux plus pauvres, libérez-vous de ce carcan plutôt que de chercher refuge dans une construction que vous avez labellisée trilogie « ISF-bouclier-nouvelle tranche d’imposition », construction paralysante qui aboutit à ne rien faire !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Ce n’est jamais le moment. C’est toujours ou trop tôt ou trop tard.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Si vous nous soutenez, cela peut changer les conditions !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Monsieur le rapporteur général, cette fuite en avant vous conduit à refuser le principe même d’une « surtaxation » de solidarité pour les revenus supérieurs, que nous défendrons dans un amendement de repli et à laquelle certains membres de la majorité présidentielle sont favorables.

L’argument de la concurrence étrangère tient de moins en moins au fur et à mesure que les gouvernements européens et nord-américain prennent des mesures visant à plafonner les rémunérations ou à limiter la part variable par une fiscalité dissuasive. Cette part variable a, on le sait, un lien direct avec la crise financière. Elle a fonctionné comme un pousse-au-crime, entraînant toutes les prises de risque, même les plus irresponsables.

Si nous ne prenons aucune mesure législative, lorsque la crise aura été surmontée – ce n’est malheureusement pas demain la veille –, toutes les vannes se rouvriront. Il faut prendre conscience que, dans le bouleversement actuel, ce modèle est obsolète.

Le second volet de la proposition de loi du groupe CRC-SPG traite des rémunérations des dirigeants d’entreprise. Il y a en effet un lien direct entre le bouclier fiscal et ces rémunérations.

Dès la loi de finances rectificative d’octobre 2008, les sénateurs du groupe socialiste ont dénoncé – ils n’étaient d’ailleurs pas les seuls – l’absence de contreparties réelles sur le volet « rémunérations » à l’octroi de la garantie de l’État ou de fonds propres. Nous avons inscrit notre proposition de loi à l’ordre du jour réservé de la séance du 4 novembre, mais, ce jour-là, la majorité sénatoriale a refusé d’aller au-delà de la discussion générale.

Toutefois, M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois, qui assumait alors les fonctions de rapporteur, a concédé un suivi de la mise en œuvre du code de bonne conduite auquel la majorité s’en était remise. Il s’agissait bien entendu du code de bonne conduite du MEDEF et de l’AFEP, l’association française des entreprises privées. M. Hyest a organisé une audition le 11 mars. Mme Parisot y a tenu son credo habituel : le code de bonne conduite suffit !

À ce jour, je ne crois pas qu’elle ait changé d’avis. Elle ne souhaite ni loi ni modification du code de bonne conduite.

Ce code de bonne conduite, je l’ai lu. Il prévoit que, « en cas de non-application d’une partie de ces recommandations, » – au demeurant fort vagues – « il revient au conseil d’administration et de surveillance d’en expliquer les raisons selon le principe appliquer ou s’expliquer ». Les explications ne valant évidemment pas sanction et encore moins restitution, les salariés comme les actionnaires seront toujours lésés par les écarts de conduite.

Faudra-t-il attendre que la jurisprudence se prononce pour combler le vide législatif ? Il y a des parties prenantes lésées, je viens de le rappeler. Aujourd’hui, deux actions sont en cours : une en appel concernant Rhodia et une au sujet des indemnités de M. Daniel Bernard, ancien président-directeur général de Carrefour. Pour l’heure, il y a un vide juridique, et la jurisprudence sera amenée à se prononcer sur l’action qui a été intentée par les actionnaires.

Au cours des dix dernières années, la rémunération des mandataires sociaux a progressé de manière linéaire de 15 % – sans rapport donc avec le moindre critère de performance –, alors que, dans le même temps, la rémunération des salariés n’augmentait que de 3 %.

On voit bien que ces modes de rémunération accentuent l’écart entre le haut et le bas de l’échelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Monsieur Fourcade, dans les pays d’Europe du Nord auxquels vous avez fait allusion tout à l’heure, les écarts de rémunération entre les hauts et les bas salaires n’ont rien à voir avec ceux qui existent en France.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Certes, mais le consensus social est très fort. En France, nous avons recours à la loi, car c’est notre tradition.

Dans son discours de Toulon, en septembre 2008, le Président de la République disait vouloir refonder le capitalisme. Il déclarait alors : « Je n’hésite pas d’ailleurs à dire que les modes de rémunération des dirigeants et des opérateurs doivent désormais être encadrés. Il y a eu trop d’abus, trop de scandales. Alors, ou bien les professionnels se mettent d’accord sur des pratiques acceptables, ou bien le gouvernement de la République réglera le problème par la loi avant la fin de l’année ». Nous étions, je le répète, en 2008.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Or, nous n’avons que le code de bonne conduite du MEDEF, et il semble devoir connaître le même sort que les précédents. Que l’on se souvienne des rapports Viénot 1, puis Viénot 2 ou encore du rapport Bouton.

Il n’est pas de jour où la presse ne se fasse l’écho de dérives. Le choc de confiance qui devait avoir lieu à l’été 2007 s’est transformé en grave crise de confiance.

Monsieur le rapporteur, il ne s’agit pas de manifestations de jalousies exacerbées ; il s’agit d’une lassitude profonde à l’égard des dirigeants politiques qui ne tiennent pas leurs engagements alors même que les défaillances d’entreprises se multiplient avec leurs cortèges de licenciements et de maigres indemnités.

Ce matin, lors de la discussion de la question orale sur l’avenir des sous-traitants et équipementiers du secteur automobile, notre collègue Martial Bourquin a rappelé le dernier scandale en date, celui de Valeo.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Le dirigeant part avec un peu plus de 3 millions d’euros d’indemnités ; parallèlement, mille salariés perdent leur emploi et perçoivent chacun 1 000 euros. Faites le compte !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Comment les Français pourraient-ils être imperméables à ce qu’ils ont sous les yeux tous les soirs au journal de 20 heures ?

Il faut agir ! C’est un appel que je lance à la majorité parlementaire. La question de savoir s’il faut ou non légiférer ne devrait même plus se poser.

Peut-être pourrait-on discuter de l’opportunité donnée à l’État de se substituer aux relations contractuelles dans l’entreprise. C’est un argument avancé par Mme Parisot. L’État le fait d’ailleurs déjà régulièrement, notamment lorsque les partenaires sociaux ne parviennent pas à trouver un accord sur une négociation.

Au moins pourriez-vous accepter – c’est pourquoi j’ai rappelé les articles XIII et XIV de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen – que l’État est fondé à intervenir par le biais de la fiscalité. C’est précisément le sens de la présente proposition de loi et des amendements que nous présentons.

En ces temps de crise, Keynes est redevenu à la mode. Il faut s’en inspirer pleinement et jusqu’au bout. Ne posait-il pas la question du « rapport entre les gains obtenus par l’activité et leur utilité pour la société », définissant par là un « seuil de tolérance » ?

Ce seuil est largement franchi. Nous voulons, par la loi, le codifier, et c’est tout le sens du présent débat.

On nous dit maintenant qu’un décret sera pris d’ici au 31 mars. En choisissant la voie réglementaire, le Gouvernement prive le Parlement de ses prérogatives.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

On ne connaît pas encore le contenu de ce décret. M. Jean Arthuis nous a confirmé tout à l’heure en commission des finances qu’un problème constitutionnel pourrait se poser.

Dans un communiqué, le secrétaire général de l’Élysée justifie le recours au décret en soutenant qu’il est plus rapide et plus facile de passer par cette voie plutôt que par la voie législative.

Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Tout est dit ! Cela signifie que les parlementaires sont finalement des empêcheurs de tourner en rond !

J’ajoute que recourir au décret revient à traiter de manière provisoire une infime partie du problème. On sait d’ailleurs bien que ce décret sera négocié en coulisse – à peine en coulisse – avec la présidente du MEDEF.

Dans une optique réformiste, et parce que la loi est la réponse adéquate aux enjeux, nous avons déposé un certain nombre d’amendements ; je les présente rapidement, et n’y reviendrai pas dans la discussion des articles : ils visent à favoriser un rééquilibrage entre le capital et le travail, à inciter les entreprises à la modération salariale des hauts revenus par la modulation du bénéfice imposable des sociétés, à limiter la part des éléments variables dans les modes de rémunération, et notamment à redonner aux stock-options leur légitimité originale.

Les seules stock-options qui se justifient sont celles qui sont distribuées dans les PME de croissance, que l’on appelle les « jeunes pousses » et qui n’ont pas de capital. Mais ce mécanisme fort utile a été complètement dévoyé depuis les années soixante-dix.

Enfin, nous voulons donner aux parties prenantes de l’entreprise que sont les salariés et les actionnaires un droit effectif de contrôle sur la rémunération des dirigeants, notamment par la prévention des effets d’aubaine ainsi que des possibilités de délit d’initié. Nous pouvons encore citer l’exemple récent de la Société générale. Les dirigeants doivent établir chaque année un calendrier des cessions des rémunérations en capital d’un exercice sur l’autre.

Le président de la commission des finances nous a annoncé hier en commission, à l’occasion de l’examen du rapport sur le projet de loi de finances rectificative que nous devons examiner en séance publique le mardi 31 mars prochain, son intention de déposer un amendement visant à supprimer la distribution de stock-options et d’actions gratuites aux dirigeants des sociétés qui font appel à l’aide de l’État pendant toute la durée de la convention.

Nous ne nous faisons pas trop d’illusions sur l’issue de nos amendements, aujourd’hui et lors de la discussion du collectif budgétaire. Si aucun d’entre eux n’était retenu, ce que nous déplorerions évidemment, nous soutiendrions par défaut l’amendement du président Jean Arthuis. Mais je ne suis pas sûre qu’il aille jusqu’au bout… Le décret annoncé par le secrétaire général de l’Élysée arrange finalement le Gouvernement, le Président de la République et la majorité parlementaire, qui veulent clore ce débat. Eh bien, je peux vous dire que cela ne le stoppera pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Mme Nicole Bricq. Il m’a semblé avoir expliqué notre philosophie en matière fiscale. Ce décret alimentera le débat mais ne le clora pas ! Nous allons nous retrouver très vite sur ce dossier, car la crise pourrait ouvrir les yeux de la majorité, du Gouvernement et du Président de la République sur le fait que ce modèle est complètement dépassé et qu’il nous faut en construire un autre. Nous continuerons sur notre voie historique. J’ai entendu les propos du président du groupe du RDSE ; nous partageons cette philosophie, qui est celle des Lumières.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’examen de la proposition de loi de mon groupe est l’occasion, pour la majorité, de confronter ses propos à ses actes, et c’est aussi l’occasion pour elle de faire face à la réalité.

Outre le fait qu’il soit cocasse que le rapporteur de notre proposition de loi soit issu de la majorité, il faut bien reconnaître que, à peine imprimé, le rapport est déjà dépassé par les faits ! L’encre n’est pas encore sèche que, déjà, les heures et les jours charrient leurs flots de scandales. Il ne se passe pas une demi-journée sans que nous apprenions, sur le plan tant national qu’international, qu’un dirigeant d’entreprise a bénéficié d’un parachute doré, du versement d’une prime en actions gratuites ou encore de l’attribution d’un bonus, sous forme monétaire ou sous forme de stock-options, alors que son entreprise a soit bénéficié d’aide publique, soit organisé des plans de licenciements.

Notre collègue Philippe Marini, voulant accréditer dans son rapport la thèse de l’inutilité de l’intervention de la loi, nous a détaillé l’ensemble des mesures législatives existantes, toutes censées encadrer la question de la rémunération des dirigeants d’entreprise.

Et pourtant, monsieur le rapporteur, malgré les mesures auxquelles votre majorité tente de se raccrocher, les affaires se succèdent. Involontairement, vous avez fait la démonstration du caractère de pâles cache-misère des dispositions que vous nous présentiez en leur temps comme de réelles garanties. Pourtant, lorsque le Gouvernement a débloqué des milliards d’euros en direction des banques, nous vous avions alertés sur l’absence de contrepartie et de garde-fous. Mais, déjà, vous nous répondiez : responsabilité des dirigeants !

On voit bien ce qu’il en est de la responsabilité des dirigeants, avec le scandale de la Société générale. L’aide de l’État était pour le moins importante : 1, 7 milliard d’euros. Ce recours aux aides publiques n’a visiblement pas réduit l’appât du gain des dirigeants de cette entreprise bancaire, puisque le conseil d’administration de la Société générale a décidé d’accorder 270 000 stock-options aux trois principaux dirigeants de l’entreprise. Si l’on ajoute les directeurs généraux, ce sont 320 000 stock-options qui ont été distribuées, pour une valeur estimée à ce jour à 7, 7 millions d’euros.

C’est au prix d’une mobilisation, pour ne pas dire d’une pression médiatique et politique de soixante-douze heures, que les dirigeants de la Société générale ont annoncé vouloir renoncer à cette attribution et en informer le conseil d’administration.

Il n’en demeure pas moins que leurs premières réponses sur le sujet étaient consternantes. Là où l’immense majorité de nos concitoyens voient dans cette affaire un scandale, les premiers intéressés considèrent, eux – c’est révélateur –, qu’il s’agit d’un problème de communication.

Voici, par l’exemple, la démonstration de l’inefficacité de ce que vous nous proposez, monsieur Marini, à savoir laisser les patrons et les dirigeants s’organiser eux-mêmes !

Cet épisode, qui succède à l’affaire Total, entreprise qui engrange des milliards d’euros de bénéfices et n’hésite pas à casser l’emploi dans une région, avec 555 suppressions de poste, est la preuve d’une crise réelle. Et cette crise révèle au grand jour le décalage existant entre la rémunération des salariés, véritables créateurs de richesses et de savoirs, et celle des dirigeants d’entreprise, assise non plus sur la prise de risques ou les capitaux mais bien sur la spéculation !

Les rémunérations faramineuses deviennent de plus en plus insoutenables et posent, de surcroît, le problème primordial de la reconnaissance du travail face au capital. L’urgence est non pas au laisser-faire, monsieur le secrétaire d’État, mais à la garantie de l’emploi et de salaires permettant de vivre dignement.

Aujourd’hui, malgré l’affaire de la Société générale et l’affaire Valeo, où le patron responsable d’un large plan social se voit attribuer un parachute doré de 3, 26 millions d’euros correspondant, nous dit-on, à deux ans de son salaire ou à 250 ans du salaire d’un salarié rémunéré au SMIC – les salariés de Valeo ont d’ailleurs bloqué aujourd’hui l’entrée du site pour demander la suppression de ce parachute doré –, le Gouvernement voudrait nous faire croire qu’une intervention législative n’est pas nécessaire, et il continue d’en appeler à la bonne volonté des dirigeants, alors même que ceux qui promettaient hier d’être exemplaires se comportent aujourd’hui comme si notre pays ne traversait pas une crise économique et sociale des plus importantes, comme si l’État n’avait pas participé financièrement au sauvetage des banques et de certaines entreprises.

Toutefois, on apprend aujourd’hui même qu’un décret devrait rapidement voir le jour. Pourquoi un décret et non une loi, monsieur le secrétaire d’État ?

D’ailleurs, pour se convaincre de la pertinence de notre proposition de loi – et, monsieur le secrétaire d’État, nous la mettons à votre disposition, si vous voulez agir dans l’urgence et dans l’intérêt des salariés –, il suffit, outre de lire les déclarations du 24 mars de Xavier Bertrand, secrétaire général de l’UMP – « Quand les comportements ne changent pas, il faut en passer par la loi » – et les propos tenus sur Europe 1 par Christine Lagarde, qui en appelle elle-même à la loi, il suffit, disais-je, de regarder de très près ce qui s’est passé à la Société générale.

En effet, les heureux bénéficiaires de stock-options profitent de ce « droit » par une décision du conseil d’administration dans lequel ne siège aucun salarié, contrairement à Jean-Marie Folz, membre à part entière de ce conseil d’administration et par ailleurs membre du « comité spécial » créé pour faire face à la crise. Ce même M. Folz, qui a autorisé le versement de ces stock-options, est aussi le président de l’Association française des entreprises privées, qui a coélaboré le code éthique avec le MEDEF de Mme Parisot, la patronne des patrons, laquelle précisait voilà peu qu’elle n’avait ni la compétence ni l’envie d’intervenir sur la rémunération des mandataires sociaux. Elle a même dit que ces bonus et autres primes font partie des rémunérations.

Le code éthique, qui était présenté hier par le Gouvernement comme la réponse adéquate, s’avère aujourd’hui dépassé, contrarié par celui-là même qui l’a rédigé.

C’est pourquoi il faut une loi. Certes, les dirigeants de la Société générale ont renoncé à leurs stock-options. Certes, l’État, détenteur du capital de Valeo, va s’opposer à l’attribution du parachute doré de son président. Mais l’État n’est pas présent dans tous les conseils d’administration. Il n’est pas actionnaire dans toutes les entreprises, et ce qu’il a pu faire pour Fortis, pour les mêmes raisons que Valeo, il doit pouvoir le faire dans toutes les entreprises bénéficiant d’aides publiques. Il doit pouvoir garantir qu’aucun fond public n’ira à la spéculation ou à l’enrichissement individuel, et il ne doit pas le faire seulement par décret. Il lui faut tout simplement légiférer. Si ce qui se passe à Valeo choque à juste raison le Gouvernement, ce dernier doit alors demander aux parlementaires qui le soutiennent de voter en faveur de notre proposition de loi.

Nous voulons sortir de cette logique du coup par coup, sortir de la réaction, pour être dans le droit. Nous voulons que ce qui apparaît aujourd’hui comme de la commisération soit en fait un principe légal, reposant non plus sur la bonne volonté des personnes concernées, mais sur notre droit positif. En effet, nous venons de le voir – et les exemples de cette semaine l’attestent –, il y va de la morale des dirigeants comme de leurs actions : elle est indexée sur le cours de la bourse !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles de la proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 15, présenté par MM. Collin et Charasse, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, de Montesquiou, Tropeano, Vall et Alfonsi, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

Le projet de loi de finances pour 2010 comporte les mesures nécessaires pour assurer, en 2010 et les années suivantes, une répartition effective et égale de la contribution fiscale, comme visée à l'article 13 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen du 26 août 1789, en raison des facultés des citoyens.

La parole est à M. Yvon Collin.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

La rédaction de cet amendement tendant à insérer un article additionnel avant l’article 1er a pour fondement l'article XIII de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, qui dispose ceci : « Pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés. »

Au nom de ce principe, devraient donc être exclues, à revenus égaux, les mesures de seuil, de plafonnement, d'exonération, d'exception, etc. qui aboutissent, par exemple, au bouclier fiscal, à l'exonération d'un Français sur deux d'impôt sur le revenu et à la multiplication des niches fiscales.

Cet amendement tend donc, dans un souci d'équité, à revenir aux fondamentaux des textes fondateurs de la République.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

M. Yvon Collin nous ramène, comme il l’a dit dans son intervention lors de la discussion générale, aux fondamentaux, c’est-à-dire à l’origine de notre droit fiscal républicain, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, dont l’article XIII dispose : « Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés. »

Devraient donc être exclues, à revenus égaux, les mesures de seuil, de plafonnement, d’exonération, d’exception. D’ailleurs, les termes « en raison de leurs facultés » pourraient aussi être considérés comme justifiant la mise en œuvre du principe des 50 %. C’est en vertu de raisonnements voisins que la Cour constitutionnelle de Karlsruhe s’était prononcée pour un régime limitant les prélèvements, afin d’éviter que ces derniers ne deviennent spoliateurs.

Si l’on appliquait au sens strict cet article XIII, comme on devrait le faire, il est vraisemblable que beaucoup de niches fiscales devraient être remises en cause.

Il me semble utile de rappeler que l’article XIII relève du bloc de constitutionnalité, comme l’ensemble de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, et que c’est sur ce bloc de constitutionnalité que le Conseil constitutionnel s’appuie pour rendre ses décisions relatives aux lois de finances.

Ainsi serais-je tenté de répondre à M. Collin que son amendement est satisfait par la pratique constitutionnelle et par la jurisprudence du Conseil constitutionnel, du moins dès lors que celui-ci est effectivement saisi d’un texte de loi de finances.

Au demeurant, je me permettrai de rappeler à nos collègues de l’opposition que, lorsque j’étais moi-même dans l’opposition, je préconisais toujours de saisir le Conseil constitutionnel : cela me paraissait être une utile discipline, pour le droit comme pour le Conseil constitutionnel, que cela incite à travailler davantage.

Si le Conseil constitutionnel est amené à se prononcer systématiquement sur les lois de finances, il doit, me semble-t-il, respecter le principe qui nous est rappelé par le groupe du RDSE et son président Yvon Collin. Dans ces conditions, l’amendement étant satisfait, il devrait en bonne logique pouvoir être retiré.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d’État

Le Gouvernement partage l’avis de M. le rapporteur général : effectivement, l’amendement est satisfait par l’article XIII de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Bernard Vera, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

Cet amendement appelle de notre part plusieurs observations.

Notre proposition de loi n’a pas vocation à résoudre l’ensemble des problèmes que soulève notre système fiscal, notamment celui qu’évoque l’exposé des motifs de l’amendement : la multiplication des dispositifs dérogatoires au droit commun dont notre droit fiscal est truffé.

Je dirai quelques mots sur cet amendement, afin que le débat soit au moins ouvert.

L’amendement n° 15 a un caractère d’orientation, voire de déclaration d’intention, que nous approuvons par principe. Pour autant, certains points méritent d’être relevés.

La législation fiscale de notre pays est devenue, au fil du temps, parfaitement incompréhensible. Pour tout dire, il semblerait qu’elle soit la plus complexe et la plus sophistiquée des législations fiscales de tous les pays développés, et les dernières lois de finances, initiales comme rectificatives, ont apporté leur dose de complexité supplémentaire à un édifice déjà fort tortueux.

Au-delà de la forme pour le moins abrupte de ces dispositions se profile la question essentielle : tout cela, tous ces efforts, pour quel résultat ?

La vérité commande de reconnaître que l’effort a surtout porté sur les revenus autres que les revenus d’activité quand il s’agissait de l’impôt sur le revenu, sur l’impôt de solidarité sur la fortune, ou encore sur la taxe professionnelle et l’impôt sur les sociétés. Son objet principal a donc été de réduire les impôts des ménages les plus aisés et d’alléger la contribution des entreprises au financement de la charge commune ; sans doute est-ce pour que ces mêmes entreprises soient en situation de mettre au chômage 80 000 personnes en un mois et de verser à leurs cadres dirigeants plus de 1, 5 milliard d’euros sous forme de stock-options et, à ceux qui partent à la retraite, plus de 1, 5 milliard d’euros de « retraites chapeau » !

Nous avons aujourd’hui un système fiscal dont la seule évidence réside dans ce paradoxe : plus votre revenu est élevé, plus vous avez de moyens et d’outils pour ne pas payer d’impôt ! La même remarque vaut d’ailleurs pour les entreprises : plus l’entreprise est importante, plus sa surface financière est étendue, et plus nombreux sont les outils disponibles pour alléger l’impôt.

Oui, nous devons nous attacher, dans le cadre de nos futures discussions budgétaires, à remettre en question l’ensemble de la dépense fiscale, la totalité des mesures dérogatoires, tout ce qui concourt à rompre le lien entre capacité contributive et contribution effective. Il faut procéder à une véritable révision générale de la dépense fiscale, exercice nécessaire qui nous permettra d’ailleurs d’appréhender le sens des politiques publiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

L’impôt est un élément fondateur, essentiel, du pacte républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

Tout ce qui le pervertit, qui le dénature – le bouclier fiscal en est une illustration éclatante –, doit être combattu. Tout ce qui le réhabilite, le rend utile et le motive, pour le bien de la collectivité, doit être aujourd’hui promu.

Le bouclier fiscal, comme bien d’autres dispositifs, telles les stock-options, participe de cette rupture entre faculté contributive et contribution effective. Il est parfaitement injuste parce que, précisément, il ne respecte pas les principes républicains qui sont les nôtres.

Très bien ! sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Yvon Collin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Mes chers collègues, vous l’aurez compris, cet amendement, comme l’a souligné M. le rapporteur général, avait pour objet d’en revenir aux fondamentaux. Notre pays n’échappera pas, dans les mois et les années qui viennent, à une réforme fiscale en profondeur, et la discussion de l’amendement nous l’a rappelé.

Je retire bien sûr cet amendement d’appel, mais je suis persuadé, je le répète, que nous aurons prochainement à repenser notre fiscalité.

M. Jean-Pierre Fourcade applaudit.

Les articles 1er du code général des impôts et 1649 O-A sont abrogés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Thierry Foucaud, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Puisque plusieurs de mes collègues interviendront également sur l’article 1er, je limiterai mon propos à un sujet qui lui est intimement lié et qui a déjà été abordé durant la discussion générale.

J’ai entendu de la part de M. le rapporteur, de M. le secrétaire d’État et de M. Fourcade, qui s’exprimait pour le groupe UMP, des propos parfois fallacieux, mensongers, et qui mériteraient d’être qualifiés de très politiciens, en particulier lorsqu’a été évoquée l’idée qu’il n’était pas possible de prélever plus de 50 % des revenus du travail.

Le bouclier fiscal, il faut inlassablement le rappeler, recouvre l’impôt sur le revenu, les impôts locaux acquittés au titre de la seule habitation principale – taxe d’habitation et taxe foncière sur les propriétés bâties –, la CSG, la CRDS, mais aussi, et surtout, l’impôt de solidarité sur la fortune.

Vous m’excuserez d’être à mon tour un peu technique pour répondre aux arguments eux-mêmes techniques par lesquels on a essayé tout à l’heure de démontrer le « non-bien-fondé », si je puis dire, de notre proposition de loi visant à abroger le bouclier fiscal.

Le bouclier fiscal mélange habilement, comme Mme Nicole Bricq le rappelait, des impositions frappant le revenu et des impositions concernant à la fois le capital et le patrimoine. Or en France, mes chers collègues, les inégalités proviennent du profond déséquilibre entre les patrimoines des ménages, déséquilibre dont le bouclier fiscal favorise la perpétuation en allégeant des impôts perçus sur le capital et le patrimoine.

A également été évoquée l’expatriation fiscale. Monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, monsieur Fourcade, même dans vos rangs on ne croit pas aux propos qui ont été tenus à ce sujet ! L’instauration du bouclier fiscal n’a pas véritablement eu de répercussions sur les mouvements de départ – non plus d’ailleurs que sur les mouvements de retour. Rien n’est prouvé en la matière ! Est-ce bien d’ailleurs la fiscalité qui pousse tel ou tel habitant de notre pays à le quitter pour une durée plus ou moins longue ? Ne serait-ce pas tout simplement la vie, notamment la vie professionnelle, qui, avant toute autre considération, et que l’on soit fortuné ou non, constitue le premier motif d’expatriation ? Ne serait-ce pas, parfois, l’absence de débouchés, l’absence de travail, l’absence de bons salaires qui conduisent les étudiants français à Barcelone, en Grande-Bretagne ou ailleurs ?

Le nombre de redevables de l’ISF ne cesse de croître, cependant que la valeur de leur patrimoine progresse également ; je ne reviendrai pas sur les chiffres, chiffres officiels qui ont déjà été cités et que vous connaissez.

On estime que 720 assujettis à l’ISF se sont expatriés en 2008, sans que l’on soit sûr que leur départ ait eu pour but de leur permettre d’échapper à cet impôt ; dans le même temps, le nombre de redevables de l’ISF est passé de 528 000 à 568 000. L’expatriation touche donc 0, 15 % des contribuables concernés ! À ce train-là, monsieur Fourcade, huit cents années s’écouleront avant qu’ils n’aient tous quitté le sol français…

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

D’aucuns ont affirmé que ce n’était pas une si mauvaise chose que des personnes fortunées résident en France.

Il faut mettre un terme à l’idée selon laquelle l’ISF serait un impôt confiscatoire, et j’ai donné deux exemples chiffrés.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je sais bien que cette proposition de loi vous dérange, mes chers collègues !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Mais tout à l’heure, nous demanderons que la Haute Assemblée se prononce par scrutin public : vous pourrez ensuite aller vous expliquer devant les Françaises et les Français qui en ont assez de votre politique, assez des stock options, …

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

En français, stock option se dit « option de souscription » !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

…assez d’un bouclier fiscal qui leur coûte 458 millions d’euros !

Alors, pour une fois que nous avons l’occasion, à travers la discussion de cette proposition de loi, d’exprimer ce que souhaite le peuple, …

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Vous n’êtes pas le peuple, cela se saurait, sinon ! Avec quelque 5 % aux dernières élections…

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

M. Thierry Foucaud. … laissez-nous la parole au moins quelques instants !

Brouhaha sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Les manifestations grossissent dans les rues, vous êtes en train de radicaliser la situation et, dans quelque temps, on viendra chez vous, dans vos permanences, vous demander des explications ! Faites attention à vous !

Vives protestations sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

M. Thierry Foucaud. De toute façon, j’interviendrai pour expliquer mon vote !

Exclamations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Tout à fait, mon cher collègue, mais vous aviez dépassé votre temps de parole sur l’article avant même que la polémique ne commence !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

M. Thierry Foucaud. Mais c’est un sujet idéologique qui divise la droite et la gauche…

Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je vous demande de respecter la loi et le règlement !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Oui, je sais que cela vous dérange !

Quand on parle du niveau réel de l’impôt supposé être confiscatoire et qu’on donne des chiffres, cela vous fait sauter sur vos fauteuils !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Défendez le bouclier fiscal et les privilèges, mes chers collègues, que cela se voie, que tout le monde le sache !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

M. Thierry Foucaud. Je citerai un dernier exemple. Avec un patrimoine imposable de 10 millions d’euros, mes chers collègues, vous devez payer 114 850 euros ; mais il suffit de verser 70 000 euros en numéraire pour le financement, par exemple, de petites ou de moyennes entreprises pour que cette somme soit réduite de quelque 50 000 euros !

Exclamations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Dans les faits, l’impôt moyen acquitté par les redevables de l’ISF est de 8 370 euros, pour un patrimoine de près de 2 millions d’euros.

Je mets ici un point final à mon intervention sur l’article 1er, mais je citerai d’autres exemples tout à l’heure, mes chers collègues !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Aymeri de Montesquiou, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le bouclier fiscal, qui consiste à ce que les impôts directs payés par les contribuables ne soient pas supérieurs à 50 % de leurs revenus, relève d’une évidence économique. Il nous aligne sur nos partenaires européens, l’Allemagne en particulier, pour éviter l’exode des créateurs et des investisseurs.

Entre-temps, une crise dévastatrice s’est abattue sur l’économie mondiale. Le Président de la République a su, par sa détermination et sa réactivité, mobiliser les autres dirigeants.

La France a mis en œuvre une politique de bon sens et d’équité. Préparer l’avenir en favorisant l’investissement, aider les plus fragiles par des mesures ciblées, telles que la prime exceptionnelle de solidarité active de 200 euros en anticipation du revenu de solidarité active, le RSA, la revalorisation de 25 % de l’allocation de solidarité aux personnes âgées versée aux personnes seules et de l’allocation aux adultes handicapés, l’allocation de chômage après une période de travail plus courte, la revalorisation des petites retraites agricoles.

Cependant, il faut se replacer dans le contexte actuel, monsieur le secrétaire d’État.

Imaginez l’état d’esprit d’un salarié qui craint de perdre son emploi, qui est au chômage technique ou au chômage : son salaire est pour lui absolument vital.

Pas plus qu’il n’accepte les parachutes dorés ou les stock-options d’une entreprise qui licencie, il ne peut accepter que l’État rembourse 370 000 euros à 834 contribuables qui, certes, ont payé des impôts très importants, mais pour lesquels la somme remboursée n’est destinée qu’à l’épargne ou au superflu. Ne pensez-vous pas que ce remboursement générera un profond sentiment d’injustice et mettra à mal la confiance ?

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Nous sommes tous convaincus, ici, qu’une entreprise fonctionne bien si l’atmosphère y est paisible et que chacun estime son salaire juste. Il en est de même pour un État. Vous ne pouvez pas laisser se développer ce sentiment d’injustice auquel le Président de la République fait souvent référence. Vous devez réconcilier dans l’esprit des Français efficacité fiscale ou économique et équité sociale.

Certes, notre fiscalité a déjà atteint les plus hauts niveaux. N’oublions pas néanmoins que, depuis le bouclier fiscal, notre pays est remonté au deuxième rang pour les investissements étrangers. Il ne s’agit pas d’augmenter les impôts, mais il faut adapter ce bouclier à un contexte dramatique.

Plusieurs pistes de réformes s’offrent à nous. Premièrement, la suspension du bouclier fiscal jusqu’à la sortie de la crise. Deuxièmement, un triptyque ordonné autour de la suppression du bouclier fiscal, de l’abrogation de l’ISF et de la création d’une tranche supplémentaire de l’impôt sur le revenu afin de compenser le manque à gagner pour l’État : ce système présente le mérite d’une meilleure lisibilité, mais les circonstances ne me paraissent toutefois pas réunies pour permettre un tel passage à court terme. Troisièmement, la prise en compte, dans le calcul du bouclier, de toutes les niches fiscales estimées à 60 milliards d’euros, niches qui mitent pour ainsi dire notre paysage fiscal en soustrayant à l’impôt nombre des plus gros revenus.

En opérant une telle réforme, nous gagnerions incontestablement en équité, vous resteriez fidèles à un principe juste et vous éviteriez de laisser accroire que certains cumulent tous les avantages, et les autres tous les aléas.

Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je demande aux différents orateurs inscrits sur cet article de veiller au respect du temps de parole. C’est la première journée mensuelle réservée aux groupes d’opposition et aux groupes minoritaires, et cette séance doit être exemplaire. Or, compte tenu de notre rythme actuel, nous allons devoir examiner la proposition de loi de M. Collin en séance de nuit !

La parole est à M. Bernard Vera, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

Monsieur le président, je vais m’efforcer de suivre vos recommandations.

Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je souhaite commencer cette intervention par une citation, certes un peu longue mais très instructive, reprenant les propos d’un de nos collègues tenus très récemment dans cet hémicycle.

« On a donc inventé le bouclier fiscal, qui a connu deux versions successives : fixé d’abord à 60 % en 2006, il fut ensuite abaissé à 50 % l’année suivante.

« Or, mes chers collègues, à l’évidence, le bouclier fiscal, tel qu’il est appliqué, n’est pas conforme à l’idée que nous nous faisions de ses vertus supposées lorsque nous l’avons voté.

« En effet, le revenu de référence pris en compte n’est pas le revenu “normal”, puisque en sont déduites toute une série de dépenses liées à des opérations de défiscalisation et à d’autres niches fiscales.

« Prenons l’exemple d’un contribuable disposant d’un revenu de 100 et qui a conclu quelques opérations ultramarines, investi dans des locations meublées professionnelles, conduit des travaux dans des monuments historiques ou classés à l’inventaire, souscrit un PERCO ou un PERP, adhéré à la PREFON. Ce sont autant de dépenses qu’il pourra éventuellement déduire, en plus de la CSG déductible, de son revenu imposable.

« Dans ces conditions, contrairement à ce que nous pouvions penser, le coefficient de 50 % s’appliquera non pas sur un revenu de 100, mais, après toutes ces déductions faites, sur un revenu résiduel de 50, de 30, voire de 20.

« J’insiste sur ce point, mes chers collègues, l’application de cette mesure n’est pas conforme à l’idée que nous nous en faisions au moment où nous l’avons votée. »

Cette véritable mise en cause du bouclier fiscal a été prononcée lors de la discussion du projet de loi de finances initiale pour 2009 non par l’un des sénateurs de notre groupe, mais par le président de la commission des finances lui-même, notre collègue Jean Arthuis !

Même si je sais parfaitement qu’il n’en tire pas tout à fait les mêmes conclusions que nous quant à l’avenir notre système fiscal, cette diatribe ne fait que souligner pleinement pourquoi il convient aujourd’hui de mettre en question le bouclier fiscal et de décider de sa pure et simple abrogation.

Oui, mes chers collègues, le bouclier fiscal n’a pas d’effets avérés sur la situation économique.

Oui, il n’a pas d’impact sur le comportement des contribuables et leur domiciliation ! En effet, comme nous l’avons souligné dans la discussion générale, le nombre des expatriés fiscaux est sans commune mesure avec la réalité.

Que pèsent, en effet, quelques centaines de redevables potentiels de l’ISF au regard des 568 000 contribuables assujettis à cet impôt, nombre qui ne fait que croître et embellir au fil des ans ?

Le bouclier fiscal n’a pas rencontré le succès attendu par ses créateurs. Ce résultat plus que mitigé devrait nous conduire, plutôt que d’enferrer la représentation parlementaire dans une posture de plus en plus réprouvée par l’opinion publique, à procéder en toute sagesse à la suppression pure et simple de ce bouclier fiscal.

La presse s’est fait l’écho, ces derniers jours, des données du problème. Le bouclier fiscal attire peu, puisque les demandes, qui s’élevaient à 20 000 en 2007, ont été moins nombreuses en 2008, alors même que le dispositif était plus alléchant encore puisque le plafond a été abaissé à 50 %...

Ce sont aujourd’hui 458 millions d’euros qui sont remboursés aux quelques milliers de demandeurs : 458 millions d’euros, c’est plus, par exemple, que le financement que l’État accorde à la politique de la ville cette année.

Comme le nombre des bénéficiaires du bouclier fiscal s’est contracté, la moyenne du remboursement s’est sensiblement élevée, atteignant aujourd’hui 33 000 euros !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

Rappelons que le rapport général de la loi de finances pour 2006, qui a créé le bouclier fiscal, précisait que nous devions constater rapidement le dépôt d’une demande de restitution par 77 000 contribuables non assujettis à l’ISF ! L’affaire devait coûter, pour cette centaine de milliers de contribuables, environ 400 millions d’euros à l’État !

Manque de chance, si l’État rembourse bel et bien plus de 400 millions d’euros, il ne le fait que pour moins de 15 000 contribuables !

Dans les faits, le bouclier fiscal n’est finalement qu’une niche fiscale de plus pour les assujettis à l’impôt de solidarité sur la fortune.

Pour le reste, c’est-à-dire les impositions locales notamment, il est possible, dans le cadre des recours gracieux, de prendre en compte la situation d’infortune des contribuables redevables de taxes d’habitation ou de taxes foncières trop élevées pour leurs ressources !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

Mes chers collègues, supprimer le bouclier fiscal est d’autant plus une nécessité que le dispositif est quasiment inutile au regard du droit préexistant et n’a donc aucun sens pour la grande majorité des contribuables modestes de notre pays.

Devons-nous laisser perdurer dans notre législation un instrument qui ne concerne, au mieux, que moins d’un millier des 36 millions de contributeurs de l’impôt sur le revenu ?

C’est bel et bien pour rétablir cette égalité républicaine que nous ne pouvons que vous inviter à adopter cet article de suppression pure et simple du bouclier fiscal.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Le rapport de la commission des finances sur le texte que nous avons proposé est pour le moins succinct. J’en citerai quelques extraits.

« Les chiffres de l’administration fiscale rendant compte des remboursements intervenus au 12 février 2009 ont montré l’utilité du bouclier fiscal pour deux catégories de contribuables […] :

« d’une part, des foyers aux revenus très modestes mais possédant leur résidence principale et pour qui le poids de la taxe foncière peut être difficilement supportable […] ;

« d’autre part, des contribuables assujettis à l’ISF subissant le “plafonnement du plafonnement” de cet impôt et qui devaient consacrer une très grande fraction de leurs revenus pour l’acquitter.

« Le bouclier fiscal a donc été créé par le législateur afin de répondre à des questions relevant du respect des droits fondamentaux de certains contribuables, aux profils divers […]. »

Quelques lignes plus loin, le rapport expédie la proposition inscrite dans l’article 1er en indiquant ceci : « Néanmoins, pour les raisons exposées supra, votre rapporteur général estime que l’éventuel réexamen du bouclier fiscal ne devrait intervenir que dans le cadre d’une réforme plus ambitieuse de notre fiscalité […].

« La mesure proposée par le présent article est donc à la fois incomplète et prématurée. C’est pourquoi votre rapporteur général ne préconise pas son adoption. »

Notre proposition de loi ne vise pas à résoudre, d’un coup de baguette magique, l’ensemble des problématiques de la fiscalité dans notre pays. Elle n’a pas vocation à être complète ; elle ne s’attache, dans cet article 1er, qu’à mettre en œuvre une mesure simple, immédiatement compréhensible par les citoyens de notre pays : la suppression du bouclier fiscal, dont il est avéré qu’il ne correspond ni aux attentes de la population ni même à celles de ses auteurs.

Votre rapport manque cruellement de précision.

La presse nous a informés de la réalité des faits : le volume des remboursements accordés à quelques-uns, à savoir moins d’un millier de personnes. Ces éléments simples ne figurent pas dans le rapport. Ce dernier aurait-il été rédigé dans la précipitation ?

En réalité, il est acquis que les principaux bénéficiaires du bouclier fiscal sont des contribuables de l’impôt de solidarité sur la fortune.

L’ISF est de surcroît une affaire très parisienne, qui obéit de longue date à la règle des quatre quarts : un quart perçu dans Paris intra muros, un quart dans l’un des sept autres départements de la région d’Île-de-France – plutôt dans les Yvelines et les Hauts-de-Seine que dans la Seine-Saint-Denis – et les deux autres quarts dans l’un des quatre-vingt-douze autres départements de métropole et d’outre-mer.

Pour le bouclier fiscal, il en est de même, voire plus

Une question simple se pose : la France qui travaille, qui crée des richesses, qui réussit, qui entreprend, qui prend des risques, habite-t-elle de manière quasi exclusive dans les beaux quartiers parisiens, à Neuilly-sur-Seine ou au Vésinet ?

Les chiffres du ministère sont pourtant extrêmement précis : un peu plus du quart des bénéficiaires du bouclier fiscal capitalisent 89 % des remboursements effectués !

C’est normal, direz-vous, ils ont en général un revenu imposable d’au moins 42 507 euros, qui devrait être taxé à un taux très éloigné des 50 %, mais surtout un patrimoine de 7, 3 millions d’euros. On comprend mieux l’utilité du bouclier !

Où habitent les plus heureux d’entre eux, c’est-à-dire les 834 bénéficiaires d’un remboursement de 368 221 euros en moyenne, soit onze fois la moyenne des remboursements, et, parmi eux, la petite vingtaine de contribuables dont le chèque dépasse 2, 5 millions d’euros ?

Selon des éléments en notre possession, le ministère des finances a renoncé à procéder à la production de statistiques « départementales » d’attribution des restitutions.

Sur le fond, je ne vois décidément pas pourquoi, pour maintenir en l’état les rentes de situation de quelques ménages parisiens fortunés, rentes n’ayant souvent qu’un très lointain rapport avec le travail personnel et beaucoup avec celui des autres, il faudrait que tous les autres contribuables de notre pays paient 458 millions d’euros d’impôt en trop !

C’est donc sous le bénéfice de ces observations que nous vous invitons à adopter cet article 1er.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Terrade

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme le montre la discussion, cet article 1er porte sur une question profondément politique.

En effet, au-delà de la controverse entre les forces de progrès et de justice et celles du conservatisme et souvent de la réaction, se pose une question de fond : celle de la citoyenneté, qui recouvre la relation entre chacun des habitants de ce pays et l’impôt.

Le ciment du pacte républicain, qu’on le veuille ou non, c’est que chacun paie l’impôt – un impôt le plus juste possible – pour que chacun puisse tirer parti de ce que la collectivité met à sa disposition.

Cette relation est brisée, pervertie par le bouclier fiscal qui, sous des motifs fallacieux, dispense certains de contribuer justement au bien-être général, ce qui ne les empêche évidemment pas de bénéficier des services publics comme des multiples avantages offerts par le financement collectif.

Nous l’avons dit et nous le répétons – la pédagogie est parfois l’art de la répétition –, nous ne trouvons pas légitime que les salariés modestes et moyens acquittent des impôts pour qu’une infime minorité de contribuables – moins de 1 000 en réalité – fassent des gorges chaudes des restitutions du bouclier fiscal.

Cela dit, l’une des questions posées par la « pratique » du bouclier fiscal est celle de son peu de succès auprès des contribuables.

Par quel miracle, si l’on peut dire, à peine plus de 20 000 personnes en 2007 et moins de 15 000 en 2008 ont-elles sollicité l’application du bouclier fiscal, alors que l’on s’attendait à une bonne centaine de milliers de demandes, déposées en très grande majorité par des contribuables modestes ?

Sans doute faut-il trouver une cause de la difficulté à « s’emparer » du bouclier fiscal pour obtenir des services des impôts la restitution du trop-perçu des impositions directes dans sa procédure de mise en œuvre elle-même.

Je sais que M. le rapporteur général, après avoir quelque peu insisté et remis plusieurs fois l’ouvrage sur le métier, avait obtenu que soit mis en pratique l’ahurissant principe de l’auto-liquidation du bouclier fiscal, mais là n’est pas la question

Que l’on se rassure, comme les sénateurs du groupe CRC-SPG sont fermement, et depuis le premier jour, opposés au bouclier fiscal, ils sont évidemment révulsés par son « auto-liquidation », véritable prime au délit d’initié !

Si nombre de contribuables ne sollicitent pas l’application du bouclier fiscal, c’est tout simplement parce que l’affaire n’est pas gagnante à tous les coups. Selon certaines informations, dont il serait d’ailleurs légitime que nous ayons communication, au moins sur le plan statistique, il s’avère que certains contribuables, en lieu et place d’une restitution, se trouvent confrontés à un redressement !

À vrai dire, dès la création même du bouclier fiscal, et malgré les efforts et la publicité déployés par le ministère, nombreux étaient les conseillers financiers, les experts-comptables, les conseils en gestion, les fiscalistes et autres spécialistes – c’est fou ce que les questions d’argent suscitent comme spécialités et comme professions ! – qui se dispensaient de recommander à leurs « clients » de faire jouer le dispositif de plafonnement ! Pour reprendre une formule utilisée à l’époque, il fallait en effet, pour bénéficier du bouclier fiscal, être « blanc-bleu », c’est-à-dire parfaitement en règle au regard des impôts, de tous les impôts visés par le dispositif !

Quand on demande le bénéfice du bouclier fiscal, il faut jouer cartes sur table et ne pas laisser apparaître la moindre des indélicatesses dans l’application du droit fiscal !

Or, entre les conventions fiscales internationales, appliquées de manière flageolante, l’estimation très approximative du patrimoine assujetti à l’impôt de solidarité sur la fortune, la dissimulation, parfois, de revenus fonciers et immobiliers, les étourderies et oublis divers que l’on mesure souvent en milliers d’euros de patrimoine ou de revenus soustraits à toute déclaration, nombreuses sont les sources d’évasion fiscale, plus ou moins avérées, que l’on ne souhaite pas toujours révéler en déposant une demande de bouclier fiscal.

Aucune statistique – mais peut-être M. le secrétaire d'État nous a-t-il amené des chiffres… – n’a d’ailleurs été publiée sur le nombre de demandes s’étant achevées par des redressements. Cependant, selon les éléments que nous ont transmis les organisations syndicales de la direction générale des finances publiques, de 15 % à 20 % des demandes de bouclier fiscal se concluraient ainsi !

On pourrait se féliciter d’une telle situation, le bouclier fiscal générant donc la perception de recettes inattendues, mais elle ne change rien : le bouclier fiscal, parce qu’il est peu pratiqué, n’a précisément pas mis un terme à l’optimisation fiscale, voire à la dissimulation de revenus et de patrimoines qui permet à quelques petits futés de se dispenser de contribuer justement à la charge commune !

Il est donc tout aussi inefficace de ce point de vue, et sa suppression en est d’autant plus justifiée.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Jean-Claude Frécon, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Frécon

Beaucoup de choses sont dites à propos du bouclier fiscal, mais je souhaiterais un peu plus de transparence et de vérité, notamment sur deux points.

En premier lieu, je rappellerai – et je voudrais que M. le secrétaire d'État et M. le président de la commission des finances se souviennent de ce qui se disait lors de l’institution du bouclier fiscal – que nous avons d’abord été informés de la soudaine apparition de cette mesure en juillet 2004, dans le cadre du comité des finances locales, par le ministre délégué au budget de l’époque, puis que l’information nous a ensuite été communiquée plus officiellement en septembre, au moment de la présentation du projet de loi de finances.

Étonnés, nous avons demandé des chiffres, et des chiffres nous ont été donnés. Je rappelle l’un d’eux, dont M. Fourcade se souvient certainement : selon les estimations faites pendant l’été 2005, 91 000 foyers fiscaux allaient bénéficier du bouclier fiscal.

Depuis, les conditions d’application du bouclier fiscal s’étant allégées, le nombre de foyers fiscaux concernés auraient dû augmenter largement. Or, selon le rapport du rapporteur général, pour cette année, le nombre de bénéficiaires est de… 14 000 !

Des chiffres de l’administration fiscale de 2005 ou de cette année, lesquels ne sont pas véridiques ? En tout cas, la différence est si considérable qu’on ne peut qu’avoir un grand doute, doute que je souhaiterais voir levé.

En second lieu, on lit dans ce même rapport que, selon les chiffres de l’administration fiscale, près des deux tiers des bénéficiaires du bouclier fiscal ont des revenus très modestes. Là aussi, j’ai des doutes…

Que l’on m’explique comment un foyer suffisamment modeste pour être exonéré de l’impôt sur le revenu peut bénéficier du bouclier fiscal ! Pour les foyers les plus modestes, cela suppose que le revenu annuel déclaré, après abattements, est inférieur à 11 000 euros et, si le bouclier fiscal peut jouer, on doit donc conclure que leurs taxes foncières sont au moins égales à 5 500 euros. Est-ce envisageable ?

Certains foyers sont effectivement très modestes, et leur déclaration de revenus sincère ; mais ne doit-on pas admettre qu’il y a aussi parmi les bénéficiaires du bouclier fiscal « modestes » des personnes dont les revenus n’ont en réalité rien de modeste, et qui parviennent à ne déclarer que 11 000 euros, et donc à ne pas payer l’impôt sur le revenu, que grâce à diverses niches fiscales et déductions ?

Je souhaiterais que ces deux points au moins soient tirés au clair.

Ce débat reviendra, et je m’adresse à vous, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission des finances, pour qu’à l’avenir la commission des finances et nous-mêmes puissions non pas seulement avoir connaissance du nombre des foyers fiscaux bénéficiaires du bouclier fiscal et de leurs revenus déclarés mais aussi procéder à des contrôles sur pièces et sur place pour découvrir la réalité de ces revenus.

Voilà l’engagement que j’attends de votre part aujourd'hui, car on ne peut pas en rester à ce qu’il faut bien appeler une absence de transparence.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Avant le vote de l’article, je veux rappeler que nous mettons aujourd'hui en pratique un nouveau mode d’organisation de nos travaux…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

…en application duquel, chaque mois, les groupes de l’opposition et les groupes minoritaires disposent d’un temps pour discuter de propositions de loi émanant de leurs rangs.

La majorité, pour que la présente proposition de loi puisse venir en discussion, a résisté à la tentation d’une pratique telle que le dépôt d’une motion tendant à poser la question préalable…

Je voudrais simplement dire à nos collègues du groupe CRC-SPG…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

…qu’ils devraient peut-être se demander si c’est la meilleure des manières que d’inscrire, après la discussion générale, quatre intervenants sur le premier article.

Cela est très chronophage, mes chers collègues, et la question est de savoir s’il s’agit d’un véritable enrichissement pour le débat, de nature à faire évoluer les prises de position des uns et des autres.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Ayant dit cela, je tiens à déclarer devant le Sénat que j’ai hâte qu’il nous soit possible d’abroger le bouclier fiscal. C’est de ma part un acte de contrition puisque j’en ai voté le principe lorsqu’il a été créé.

Deux raisons m’amènent à souhaiter aujourd'hui son abrogation.

Tout d’abord, dans cette fiscalité si complexe que dénonçait Bernard Vera tout à l’heure, les conditions d’application du bouclier fiscal sont telles que ce dernier s’applique non pas aux revenus de référence, mais aux revenus après diverses déductions liées à la défiscalisation, à toutes les niches fiscales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Pour corriger cet inconvénient majeur, on a légiféré à nouveau, avec pour résultat d’introduire de nouvelles complexités, sans pour autant être en mesure d’aller jusqu’au bout puisque, par exemple, les monuments historiques sont restés hors champ.

J’estime que, techniquement, nous n’y arriverons pas, et c’est une première raison pour abroger le bouclier fiscal.

Seconde raison, le bouclier fiscal est un très bel instrument lorsque l’on a l’assurance que l’orientation générale est à la baisse des impôts.

En revanche, si un seul impôt doit être augmenté – et on l’a bien vu lorsque la question du financement de la généralisation du revenu de solidarité active s’est posée –, le bouclier fiscal nous revient dans la figure comme un boomerang.

Voilà les deux raisons qui m’amènent à souhaiter l’abrogation du bouclier fiscal.

Mais, mes chers collègues, il faut aller jusqu’au bout. Comme Philippe Marini l’a rappelé dans son propos introductif, justice et simplicité vont de pair. Lorsque la fiscalité est trop complexe, c’est un champ offert aux spécialistes de l’optimisation fiscale, et on perd l’essentiel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Or l’impôt, c’est vrai, est au cœur du pacte républicain.

Si on a imaginé le bouclier fiscal, c’est parce que l’impôt de solidarité sur la fortune est un tabou politique que l’on n’ose remettre en cause, alors même qu’on a multiplié les dérogations et les possibilités de déduction de tels ou tels éléments d’actif.

Mes chers collègues, il faudra donc aller jusqu’au bout et abroger l’ISF.

Mais il faudra aussi le remplacer ! Il rapporte en effet de 3 milliards à 4 milliards d’euros, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

…et rapportera sans doute moins dans les périodes à venir compte tenu de la dépréciation de certains actifs faisant partie des patrimoines assujettis.

Il faudra donc avoir le courage d’instituer une tranche supplémentaire – autour de 48 % ou de 50 % – d’impôt progressif appliqué à des revenus dont il conviendra de fixer le niveau.

Je ne voterai pas autre chose que ce triptyque – et je ne voterai donc pas la seule disparition du bouclier fiscal –, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

…étant entendu qu’un tel dispositif n’a pas sa place dans un collectif budgétaire en cours d’année, puisqu’il ne peut s’appliquer à l’année précédente, sauf à revenir sur des principes constitutionnels.

Le rendez-vous, c’est donc le projet de loi de finances initiale pour 2010.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Telles sont en tout cas, mes chers collègues, les raisons pour lesquelles je ne voterai par l’article 1er.

Applaudissementssur certaines travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Monsieur Frécon, je vais vous faire parvenir le commentaire que j’avais rédigé sur l’article 5 de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat ; j’y faisais figurer des exemples chiffrés d’application du bouclier fiscal à des foyers fiscaux modestes : familles monoparentales, revenus faibles, impôts locaux élevés ; retraités, revenus faibles, patrimoines non productifs de revenus ; salariés, commerçants ayant des revenus moyens…

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Vous verrez que, compte tenu, en particulier, de revenus de substitution non pris en compte pour la détermination du bouclier fiscal, c'est-à-dire les prestations sociales, on peut constater des situations aberrantes que le jeu du bouclier fiscal contribue à corriger.

Je tiens par ailleurs à vous rassurer, mon cher collègue : il fait bien partie des missions de la commission des finances de s’assurer – sans accès à des dossiers individuels – de la bonne application de la loi fiscale.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

J’ai indiqué dans la discussion générale que nous voterons la suppression du bouclier fiscal, contre lequel nous ne cessons de nous élever depuis la loi de finances pour 2006.

À cette occasion et pour la énième fois, je rappelle au Gouvernement que, lors de l’examen de la loi TEPA, au mois de juillet 2007, la Haute Assemblée a adopté un amendement de mon groupe permettant au Parlement d’être informé de façon précise sur les mouvements entre le « départ » de ceux qui choisissent de s’exiler fiscalement et leur « retour », qui serait lié à l’existence du bouclier fiscal. J’avais à l’époque accepté que cette mesure prenne effet à partir du mois de septembre 2008, puisque les déclarations d’ISF ont lieu au mois de juin. À ce jour, la commission des finances n’a jamais reçu ce rapport.

Fort opportunément, au moment où le débat sur le bouclier fiscal est descendu dans la rue, si je puis dire, un article de presse a fait allusion à certaines statistiques, non revendiquées par Bercy, qui ne sont pas significatives et ne démontrent rien, puisqu’elles s’appuient sur un échantillon trop faible.

Monsieur le président de la commission des finances, il serait bon que le Gouvernement accède à la demande que la Haute Assemblée a exprimée. Comme l’a souligné Jean-Claude Frécon, il s’agit d’un élément de transparence qui devra être à la disposition du Parlement d’ici à l’examen du projet de loi de finances pour 2010.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, la nécessité de conditionner les aides versées par l’État à d’autres pratiques des entreprises est une idée qui émerge, comme vous l’avez reconnu explicitement.

Vous avez fait allusion aux aides publiques accordées aux banques et aux entreprises du secteur automobile. Il faut absolument que la fixation des rémunérations obéisse à un principe éthique. Sur le fond, cela revient à demander la suppression du bouclier fiscal. Notre groupe est prêt à débattre de cette question, et, monsieur le président de la commission des finances, vous nous avez donné rendez-vous à l’examen du projet de loi de finances pour 2010.

Mais il nous faut également nous interroger s’agissant des aides apportées aux entreprises. En 2009, les aides apportées dans le cadre des exonérations de cotisations sociales ont fait un bond considérable, passant de 32 milliards d'euros à 42 milliards d'euros. En outre, de multiples entreprises en bénéficient, notamment les plus importantes d’entre elles.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

J’ai entendu votre demande, monsieur le président de la commission des finances. Nous sommes des parlementaires responsables. Nous avons souhaité insister sur l'article 1er, car il est pour nous fondamental et symbolique. L’examen des autres articles sera beaucoup plus rapide.

Mais sans doute faudra-il à l’avenir prévoir plus de temps pour l’examen des textes dans le cadre de la journée mensuelle réservée aux groupes de l’opposition et aux groupes minoritaires, afin que la discussion puisse avoir lieu dans de bonnes conditions. Aujourd'hui, c’est une première !

Toutefois, nous sommes là pour nous exprimer, et je suis inquiet de voir la majorité sénatoriale applaudir, quand on nous demande de nous taire : je rappelle que cette proposition de loi s’inscrit dans le cadre de la semaine d’initiative sénatoriale !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Monsieur Foucaud, vous avez saisi la difficulté de ce débat.

La conférence des présidents a prévu que la journée mensuelle réservée aux groupes de l’opposition et aux groupes minoritaires durerait huit heures.

Ce matin, les débats se sont prolongés au-delà du temps initialement imparti et, cet après-midi, la configuration des débats est telle, monsieur Collin, que votre proposition de loi ne pourra probablement être examinée que dans la soirée. J’ai cru comprendre que, compte tenu de l’intérêt que vous portiez à ce texte, vous ne teniez pas à ce qu’il soit examiné à une heure tardive. Vous me ferez donc part de votre décision.

Pour ma part, je suis tenu de respecter les décisions de la conférence des présidents. Si les paroles de sagesse de M. Foucaud sont entendues, nous pourrons achever l’examen de cette proposition de loi vers dix-neuf heures trente. Dans le cas contraire, je lèverai la séance à dix-neuf heures trente, ainsi que la conférence des présidents l’a décidé.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Monsieur le président, je vous remercie d’avoir exposé la situation avec clarté.

En respectant les délais impartis, sans doute pourrions-nous examiner la proposition de loi de mon groupe dans la foulée, en prolongeant la séance de l’après-midi. Mes collègues du groupe CRC-SPG, notamment Thierry Foucaud, ont-ils une idée du temps qui leur est nécessaire ? Cette information nous permettrait de faire le point et de prendre une décision en toute connaissance de cause.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Il convient de prendre l’opinion du groupe socialiste, qui a déposé un certain nombre d’amendements sur ce texte. En ce qui me concerne, je pense que ce débat pourrait s’achever vers dix-neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Mme Nicole Bricq. Il ne faut tout de même pas renverser la charge de la preuve à notre détriment !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

J’ai indiqué lors de la discussion générale que mon intervention valait défense des amendements du groupe socialiste. Dans ces conditions, je n’ai pas l’intention de les défendre de nouveau !

Très bien ! sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

J’ai bien compris que la majorité ne souhaitait pas se prononcer sur le fond et réservait pour plus tard ses arguments. Le débat n’a d’intérêt que si nous sommes plusieurs à débattre : si je suis toute seule, cela n’a pas grand sens !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Monsieur Foucaud, selon vous, à quelle heure l’examen de ce texte pourrait-il être achevé ?

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Nous ferons une explication de vote globale sur les amendements du groupe socialiste, ainsi que nous l’avions d’ailleurs prévu. Selon nous, l’examen de ce texte peut être achevé vers dix-neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

À dix-neuf heures trente, il sera trop tard pour commencer la discussion de la proposition de loi de M. Collin, pour laquelle une heure de discussion générale est prévue !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Ce n’est pas moi qui préside, monsieur le président !

Nous voulons bien sûr satisfaire la Haute Assemblée, mais il nous faut bien exposer notre position !

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Si l’examen de ce texte est terminé à dix-neuf heures trente, sera-t-il possible de débattre de la proposition de loi de mon groupe, tout en évitant une séance de nuit ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L’examen de votre proposition de loi nécessite au moins deux heures de débat, monsieur Collin.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Si ce texte n’est pas examiné ce soir, il ne le sera pas avant la fin du mois d’avril. Dans ces conditions, je souhaite qu’une séance de nuit soit organisée.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

C’est impossible ! La conférence des présidents, à laquelle vous avez participé, a prévu huit heures de débat pour la séance d’aujourd'hui. Ce temps sera écoulé à dix-neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

M. Thierry Foucaud s’est prononcé et Mme Bricq a confirmé que ses amendements étaient déjà défendus.

Nous pourrions donc terminer vers dix-huit heures trente, si chacun s’en tient à ce qu’il vient de dire.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je vais faire une proposition : si la discussion de ce texte est achevée à dix-neuf heures, nous pourrons alors débattre à la suite de la proposition de loi de M. Collin, et lever la séance vers vingt heures trente, vingt heures quarante-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Nous ferons le maximum pour condenser nos propos et pour que l’examen de ce texte soit terminé avant dix-neuf heures, monsieur le président.

Je rappelle néanmoins que la séance de ce matin, que Roland du Luart et moi-même avons présidée, a été suspendue à quatorze heures passées. Elle aurait donc dû reprendre au plus tôt à seize heures. Or, en accord avec M. le président du Sénat, M. le secrétaire général du Sénat et le service de la séance, nous avons accepté qu’elle reprenne à quinze heures trente !

Il nous faudra réfléchir sur le nombre de textes qu’il est possible d’examiner au cours de la journée mensuelle réservée aux groupes de l’opposition et aux groupes minoritaires. Sans doute y avait-il aujourd'hui un texte de trop !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Telle était justement la conclusion que je voulais transmettre à la conférence des présidents ! Je me réjouis donc que nos points de vue se rejoignent, monsieur Fischer !

Je mets aux voix l'article 1er.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 131 :

Le Sénat n'a pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 1, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 1 du I de l'article 197 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le dernier alinéa est complété par les mots : « et inférieure ou égale à 380 000 euros ; »

2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« - 50 % pour la fraction supérieure à 380 000 euros. »

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Cet amendement, que j’ai déjà défendu, tend à créer une nouvelle tranche d’impôt sur le revenu au-delà de 380 000 euros, somme correspondant aux 500 000 dollars visés par le Président des États-Unis.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Le sous-amendement n° 17, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :

Compléter l'amendement n° 1 par un alinéa ainsi rédigé :

3° Au 2 de l'article 200 A du code général des impôts, la mention : « 18 % » est remplacée par la mention : « 24 % ».

La parole est à M. Thierry Foucaud.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Ce sous-amendement va un peu plus loin que l’amendement n° 1 déposé par les membres du groupe socialiste, dont nous partageons le point de vue.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

J’ai déjà indiqué que la position de la commission consistait à allier trois éléments. Il en manque manifestement un dans l’amendement n° 1. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement et, par voie de conséquence, sur le sous-amendement.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

Même avis que la commission, monsieur le président.

Le sous-amendement n’est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 2, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 80 duodecies du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 3. Les sociétés dont le salaire des dirigeants est supérieur à vingt fois le salaire de base versé aux salariés de l'entreprise sont soumises à une taxe supplémentaire de 15 % sur leur bénéfice imposable. »

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Cet amendement vise à plafonner les salaires versés aux dirigeants des entreprises. Lorsque ces rémunérations sont supérieures à vingt fois le salaire de base versé aux salariés, il convient de soumettre les sociétés considérées à une taxe supplémentaire de 15 %.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

La commission considère qu’il y a matière à encadrer. Un texte réglementaire sera sans doute proposé sur ce sujet. Il n’est pas exclu cependant qu’il soit nécessaire de légiférer. Si tel est le cas, nous aviserons la semaine prochaine, lors de l’examen du collectif budgétaire.

Madame Bricq, la commission vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, faute de quoi elle émettra un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

Même position, monsieur le président.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 3, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Compléter le 5 bis de l'article 39 du code général des impôts par un alinéa ainsi rédigé :

« Ces rémunérations ne peuvent être supérieures à une année de salaires de base. »

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Il s’agit de plafonner les primes de départ des dirigeants d’entreprise.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

Même avis, monsieur le président.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 5, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 80 duodecies du code général des impôts est ainsi modifié :

1° La seconde phrase du 2 est ainsi rédigée : « Il en est de même pour leurs indemnités de départ de l'entreprise, lorsqu'elles sont composées de primes et/ou d'actions gratuites. » ;

2° Le 2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les rémunérations variables et les indemnités de départ sont taxées à hauteur de 100 % pour les dirigeants dont la société a bénéficié de l'aide de l'État telle que prévue par la loi n° 2008-1061 du 16 octobre 2008 de finances rectificative pour le financement de l'économie » ;

3° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 3. Les sociétés qui envisagent d'augmenter le salaire de leurs dirigeants dans un délai inférieur à six mois avant leur départ de l'entreprise seront soumises à une taxe supplémentaire de 15 % sur leur bénéfice imposable. »

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Par cet amendement, nous proposons que les sociétés qui envisagent d’augmenter le salaire de leurs dirigeants dans un délai inférieur à six mois avant leur départ de l’entreprise soient soumises à une taxe supplémentaire de 15 % sur leur bénéfice imposable.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Le sous-amendement n° 18, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le 2° de l'amendement n° 5 :

2° Le 2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les rémunérations variables et les indemnités de départ sont taxées à hauteur de 100 % pour les dirigeants dont la société a bénéficié de l'aide de l'État au sens de la loi du 16 octobre 2008 de finances rectificative pour le financement de l'économie, ou du fonds stratégique d'investissement, créé par application de l'article 5 de la loi n° 2009-12 du 4 février 2009 de finances rectificative pour 2009 ».

La parole est à M. Thierry Foucaud.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

Il en est de même, monsieur le président.

Le sous-amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

Par dérogation aux dispositions fiscales en vigueur, pour les dirigeants d'entreprises qui ont une rémunération annuelle excédant 250 000 euros après prélèvement des cotisations sociales, le montant des indemnités de départ qui excède ce montant est imposé à un taux de 100 %.

Par dérogation aux dispositions fiscales en vigueur, la société qui octroie une rémunération de départ supérieure, calculée conformément au premier alinéa, en vertu d'un contrat de travail, d'un contrat d'entreprise ou d'un mandat est soumise à une taxe supplémentaire de 15 % sur son bénéfice imposable.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

S’il fallait trouver une bonne raison pour justifier l’adoption de cet article, ce serait sans doute dans l’examen de la situation, pour le moins étonnante, qui découle de ce qu’il faut bien appeler « l’affaire Valéo ». Le sujet étant d’importance, je m’y attarderai quelques instants.

Sur ce point, comme nous avons eu l’occasion de le rappeler, le rapport de M. Marini semble avoir été écrit un peu trop rapidement, pour tout dire trop schématiquement, dans la plus parfaite ignorance de l’actualité et de la réalité des pratiques.

En effet, avec l’affaire du départ en retraite du P-DG de Valéo, M. Thierry Morin, sont précisément atteintes les limites que la loi a prétendu fixer aux pratiques, décriées dans l’opinion publique, ayant cours en matière de rémunération des dirigeants des entreprises.

Comme cela fait plusieurs fois que la loi déploie ses effets dans le domaine des rémunérations patronales, je me permettrai de souligner uniquement le cas spécifique soulevé par l’affaire Valéo.

Aux termes du rapport de la commission, « hors plan social, est exonérée d’impôt sur le revenu et de cotisations de sécurité sociale la fraction des indemnités de licenciement qui n’excède pas le plus élevé des trois montants suivants :

« - le montant prévu par la convention collective de branche, par l’accord professionnel et interprofessionnel ou, à défaut, par la loi ;

« - ou la moitié du montant des indemnités de licenciement ;

« - ou deux fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l’année civile précédant la rupture de son contrat de travail. »

Pour que chacun comprenne, je vais me livrer à un exercice de traduction : M. Thierry Morin, en compensation du préjudice qu’il va subir en raison de la perte de ses activités de P-DG de Valéo, va pouvoir éviter de payer des cotisations sociales sur les 3, 2 millions d’euros qu’il percevra et, grâce au dispositif adopté dans la loi de financement de la sécurité sociale, n’acquittera pas plus d’impôt sur le revenu.

Cette somme de 3, 2 millions d’euros équivaut, pour lui, à deux ans de salaire, attendu que les actionnaires de Valéo ont jugé bienvenu de lui attribuer une rémunération annuelle égale à 130 années de SMIC !

Petit calcul rapide : le bonus fiscal de M. Morin est de 352 000 euros au titre de la CSG et de la CRDS ; il peut raisonnablement atteindre 1 083 596 euros pour ce qui est de l’impôt sur le revenu... Et nous ne parlons pas des autres éléments de prélèvement social, au-delà de la CSG et de la CRDS...

M. Morin a au moins gagné une chose : il n’a pas besoin de solliciter le bouclier fiscal ! Quand on ne paie pas, au titre des cotisations sociales et de l’impôt sur le revenu, l’équivalent de 120 années de SMIC, pourquoi se compliquer la vie à solliciter un bouclier fiscal, dont l’instruction demande d’ailleurs de jouer cartes sur table ?

D’où vient ce remarquable montage figurant aujourd’hui dans le code général des impôts ? De deux articles votés l’un en 2005 et l’autre en 2006 lors de l’adoption des lois de financement de 2006 et 2007.

Dans les deux cas, le dispositif était inscrit dans le texte original du projet de loi de financement ; l’objectif était clairement de créer une incroyable zone franche fiscale et sociale autour des indemnités de rupture du contrat de travail des grands patrons.

Mes chers collègues, telles sont les précisions que je voulais apporter. Pour que les positions de chacun soient bien claires, les membres du groupe CRC-SPG demandent un vote par scrutin public sur l’article 2.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Monsieur le président, je souhaite faire connaître au Sénat la position de la commission des finances sur l’article 2.

Mes chers collègues, ne transformons pas le Parlement en tribunal traitant des cas individuels ! La question soulevée suscite, à n’en point douter, une réelle émotion dans l’opinion publique. Comme je vous l’ai dit tout à l’heure – cela a été rappelé à plusieurs reprises et M. le secrétaire d’État y a fait référence –, le Gouvernement entend prendre les dispositions appropriées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Bien que faisant confiance au Gouvernement, nous n’excluons pas de proposer au Sénat des dispositions d’ordre législatif, de telle sorte qu’un encadrement soit fixé.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

C’est tout de suite qu’il faut le faire !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Quoi qu’il en soit, j’espère que celles et ceux qui dirigent les entreprises sont imprégnés de considérations déontologiques suffisantes…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

… pour se tenir à l’écart d’excès qui suscitent l’indignation et, quelquefois, scandalisent nombre de nos concitoyens.

Cela dit, la commission des finances demande au Sénat de rejeter l’article 2.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je mets aux voix l'article 2.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 132 :

Le Sénat n'a pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 6, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 3312-3 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Aucune option ouvrant droit à la souscription d'actions au profit des mandataires sociaux ne peut être mise en place dans une entreprise lorsque cette entreprise aura été créée depuis plus de cinq ans. »

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Cet amendement vise à revenir à l’esprit originel des stock-options, c'est-à-dire à les réserver aux seules entreprises de croissance, celles qui ont été créées il y a moins de cinq ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Naturellement, l’idée qui sous-tend cet amendement est intéressante et justifierait un débat.

Toutefois, nous vivons dans une économie globale, ou à tout le moins européenne : toute disposition restrictive prise en France peut avoir des conséquences préjudiciables à notre économie et donc à l’emploi.

C'est pourquoi la commission émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

Le Gouvernement a la même position que la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je comprends l’esprit de cet amendement. Cela dit, mes collègues du groupe CRC-SPG et moi-même ne le voterons pas, parce que nous estimons qu’il tend, même si tel n’est pas, j’en suis sûr, l’objectif visé par le groupe socialiste, à accepter le principe de l’existence des stock-options.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 7, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après la première phrase de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 225-185 du code de commerce, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Il ne peut être consenti au président du conseil d'administration et au directeur général des options donnant droit à la souscription ou à l'achat d'actions représentant, au jour de leur attribution, un montant supérieur à la rémunération fixe du président du conseil d'administration et du directeur général. »

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je vous en prie, ma chère collègue.

J’appelle donc en discussion ces amendements.

L'amendement n° 8, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 225-177 du code de commerce est ainsi modifié :

1° La seconde phrase du deuxième alinéa est ainsi rédigée :

« Les actions acquises au titre de la levée de l'option, ainsi que les actions gratuites, ne pourront être cédées par les dirigeants de sociétés cotées que sur une période de douze mois, soit un douzième chaque mois ou 50 % par semestre. » ;

2° Après la première phrase du quatrième alinéa, sont insérées trois phrases ainsi rédigées :

« Le prix minimum et le prix maximum auxquels peut être effectuée la levée d'options, ou ceux des actions gratuites, sont fixés à chaque début d'exercice. À chaque exercice, le conseil d'administration prend connaissance du nombre d'actions déclarées par les dirigeants, et de leur choix quant au calendrier de leur réalisation pour l'exercice suivant. Le nombre d'options et d'actions détenues, ainsi que le calendrier de leur réalisation ou de leur vente, sont portés à la connaissance des actionnaires et des salariés de l'entreprise. » ;

3° Après le deuxième alinéa est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le conseil d'administration détermine les droits des mandataires sociaux attachés aux options et actions gratuites, en proportion du temps passé au sein de la société par lesdits mandataires, ainsi que les conditions de perte de ces droits dans le cas de départ de l'entreprise. En tout état de cause, la durée pendant laquelle peut être exercé le droit de levée d'options, ou de réalisation d'actions, ne peut dépasser quatre ans. Chaque levée d'option, ou cession d'actions, doit être préalablement annoncée au conseil d'administration lors de l'exercice précédent. »

L'amendement n° 9, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 137-14 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« Art. L. 137 -14. - Il est institué, au profit des régimes obligatoires d'assurance maladie dont relèvent les bénéficiaires, une contribution salariale de 11 % assise sur le montant des avantages définis aux 6 et 6 bis de l'article 200 A du code général des impôts.

« Ces dispositions ne sont pas applicables aux entreprises éligibles au statut de petites et moyennes entreprises de croissance, telles que définies par l'article 220 decies du code général des impôts.

« Cette contribution est établie, recouvrée et contrôlée dans les conditions et selon les modalités prévues au III de l'article L. 136-6. »

L'amendement n° 10, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 137-13 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« Art. L. 137 -13. I. - Il est institué, au profit des régimes obligatoires d'assurance maladie dont relèvent les bénéficiaires, une contribution due par les employeurs :

« - sur les options consenties dans les conditions prévues aux articles L. 225-177 à L. 225-186 du code de commerce ;

« - sur les actions attribuées dans les conditions prévues aux articles L. 225-197-1 à L. 225-197-5 du même code.

« En cas d'options de souscription ou d'achat d'actions, cette contribution s'applique, au choix de l'employeur, sur une assiette égale soit à la juste valeur des options telle qu'elle est estimée pour l'établissement des comptes consolidés pour les sociétés appliquant les normes comptables internationales adoptées par le règlement (CE) n° 1606/2002 du Parlement européen et du Conseil du 19 juillet 2002 sur l'application des normes comptables internationales, soit à 50 % de la valeur des actions sur lesquelles portent ces options, à la date de décision d'attribution. Ce choix est exercé par l'employeur pour la durée de l'exercice, pour l'ensemble des options de souscription ou d'achat d'actions qu'il attribue ; il est irrévocable durant cette période.

« En cas d'attribution gratuite d'actions, cette contribution s'applique, au choix de l'employeur, sur une assiette égale soit à la juste valeur des actions telle qu'elle est estimée pour l'établissement des comptes consolidés pour les sociétés appliquant les normes comptables internationales adoptées par le règlement (CE) n° 1606/2002 du Parlement européen et du Conseil du 19 juillet 2002 précité, soit à la valeur des actions à la date de la décision d'attribution par le conseil d'administration ou par le directoire. Ce choix est exercé par l'employeur, pour la durée de l'exercice, pour l'ensemble des attributions gratuites d'actions ; il est irrévocable durant cette période.

« II. - Le taux de cette contribution est fixé à 28, 2 % de 50 % de la valeur des actions sur lesquelles portent ces options à la décision d'attribution. Elle est exigible le mois suivant la date de la décision d'attribution des options ou des actions visées au I. Cette contribution de 28, 2 % n'est pas applicable lorsque les options de souscription ou d'achat d'actions, une fois levées, et les actions gratuites sont affectées à un plan d'épargne entreprise. Les modalités de cette affectation seront définies par décret.

« III. - Ces dispositions sont également applicables lorsque l'option est consentie ou l'attribution est effectuée, dans les mêmes conditions, par une société dont le siège est situé à l'étranger et qui est mère ou filiale de l'entreprise dans laquelle le bénéficiaire exerce son activité.

« IV. - Ces dispositions ne sont pas applicables aux entreprises éligibles au statut de petites et moyennes entreprises de croissance, telles que définies par l'article 220 decies du code général des impôts.

« V. - Les articles L. 137-3 et L. 137-4 s'appliquent à la présente contribution. »

L'amendement n° 11, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 200 A du code général des impôts est ainsi modifié :

1° À la première phrase du premier alinéa du 6, le montant : « 152 500 euros » est remplacé par le montant « 50 000 euros » ;

2° Le premier alinéa du 6 bis est complété par les mots : « lorsque son montant n'excède pas 50 000 euros et au taux de 40 % lorsque son montant excède 50 000 euros ».

Vous avez la parole, madame Bricq.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

À travers l’amendement n° 7, nous proposons que, dans la rémunération d’un dirigeant de société, la part variable ne soit en aucun cas supérieure à la part fixe.

L’amendement n° 8 vise à obliger les dirigeants de sociétés à établir un calendrier régulier de cession ou de réalisation de leur rémunération en capital, afin de prévenir non seulement les délits d’initiés, qui consistent à prendre des options au cours le plus bas et à les exercer au prix le plus haut, mais aussi, tout simplement, les effets d’aubaine.

Si l’amendement n° 9 était adopté, les rémunérations annexes en capital des dirigeants de sociétés seraient soumises à une contribution salariale de 11 %, contre 2, 5 % aujourd'hui.

Dans un souci de parallélisme des formes, l’amendement n° 10 vise à augmenter la cotisation patronale sur les attributions en capital.

Enfin, l’amendement n° 11 a pour objet d’abaisser à 50 000 euros le seuil en dessous duquel la plus-value d’acquisition est taxée à 30 % et d’appliquer un taux de 40 % à la taxe sur les attributions d’actions gratuites dès lors que le montant de la cession des valeurs mobilières excède 50 000 euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Naturellement, les stock-options méritent une réflexion toute particulière. Il s'agit d’un instrument merveilleux mais qui peut, dans certains cas, contribuer à la tyrannie du court terme.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

C’est précisément ce que je propose d’éviter !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Il arrive un moment où l’on ne se préoccupe que du niveau des cotations, parce qu’il conditionne une plus-value.

Les entreprises, elles, trouvent les stock-options tout à fait intéressantes, puisque la rémunération ne figure pas dans leurs charges et, par conséquent, n’altère pas leur résultat. Mais il faut certainement promouvoir une déontologie en la matière, ce qui rend nécessaire un dispositif global, qui ne saurait être que national, car, je le répète, les pratiques des entreprises sont désormais largement mondialisées.

Ce sujet important, qui ne sera certainement pas abordé par le prochain G20, concerne la gouvernance globale et l’ensemble des entreprises.

Pour éviter des inconvénients que nous ne pourrions maîtriser, la commission émet donc un avis défavorable sur les amendements n° 7, 8, 9, 10 et11.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

Le Gouvernement a la même position que la commission.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

Par dérogation aux dispositions fiscales en vigueur, toute rémunération ou partie de rémunération qui est liée à l'évolution de cours boursiers, octroyée ou calculée sous quelle que forme que ce soit, est soumise à une taxe de 100 %.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

M. Thierry Foucaud. Mes chers collègues, je souhaite tout d'abord vous livrer une information contenue dans une dépêche AFP de cet après-midi : le P-DG de GDF-Suez, Gérard Mestrallet, et son vice-président, Jean-François Cirelli, ont décidé de renoncer à leurs stock-options, « dans un souci de responsabilité » a affirmé à l’AFP le porte-parole du groupe.

Marques d’ironie sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Il faut préciser que les salariés de l’entreprise étaient en grève contre l’attribution de ces stock-options, ce qui explique peut-être une telle décision !

Si nous devons nous interroger sur les problèmes que pose la pratique des stock-options en termes de justice fiscale et sociale, il nous faut aussi, à l'occasion de l’examen de cet article, nous tourner, l’espace d’un instant, vers le rapport rédigé par M. le rapporteur général.

M. Marini affirme que l’article 3 de la présente proposition de loi constitue à ses yeux « le summum de l’horreur économique », puisqu’il vise à supprimer les stock-options comme mode de rémunération des dirigeants, ou d'ailleurs des autres salariés, dès lors que leur serait appliqué un taux de taxation de 100 %.

Mes chers collègues, nous pourrions relever les nombreux termes du rapport dont nous pouvons craindre qu’ils ne revêtent un caractère purement idéologique et ne soient déconnectés des réalités !

Cela dit, je ne citerai pas le rapport, car je crois que tout le monde l’a lu, et soulignerai simplement que l’objection constitutionnelle opposée à cet article nous semble pour le moins sujette à caution.

En effet, la taxation des stock-options au taux de 100 % présenterait surtout le caractère d’une arme de dissuasion, qui conduirait, dans le parfait respect des normes d’égalité devant l’impôt, les organes dirigeants de nos grandes entreprises à choisir des formules de rémunération de leurs dirigeants salariés autres que l’attribution d’actions gratuites ou privilégiées !

Il existe un moyen normal de rémunérer des dirigeants salariés : leur accorder un salaire qui corresponde à leur compétence et à ce que l’on attend d’eux, au lieu de chercher des biais juridiques divers dont la seule raison d’être, comme nous l’avons vu, est de leur permettre d’échapper à l’impôt et aux cotisations sociales, et accessoirement de réaliser de juteuses plus-values, car telle est bien la finalité des stock-options, sans compter l’effet du versement des dividendes éventuels et des autres crédits d’impôt qui y sont attachés, ou encore l’imputation des dettes personnelles d’acquisition des titres, j’en passe et des meilleures !

Je relèverai un autre point du rapport, que je citerai cette fois, car il me paraît important :

« En effet, selon la théorie économique dite “théorie de l’agence”, ce type de rémunération est nécessaire afin que les dirigeants ou les mandataires sociaux adoptent des politiques conformes aux intérêts des actionnaires qui les ont mandatés. »

Dans l’esprit de M. le rapporteur général, qui est, comme chacun sait, un spécialiste reconnu du droit des affaires et de tout ce qui s’y rattache, les dirigeants et mandataires doivent adopter des politiques conformes aux intérêts des actionnaires.

Or c’est précisément là que le bât blesse : qu’est-ce donc qu’une politique conforme aux intérêts des actionnaires ? Une gestion d’entreprise qui capitalise les gains de productivité fondés sur l’amélioration des performances de chaque unité de production, transformés en dividendes sonnants et trébuchants. Bref, c’est un de ces modes de gestion qui font que la réduction des dividendes des entreprises du CAC 40 est bien moins rapide que celle des résultats cumulés des entreprises figurant dans cet indice.

C’est cette gestion, d’ailleurs remarquable, qui fait que Total a réalisé 14 milliards d’euros de bénéfices et consacre entre 750 millions et 1 milliard d’euros à des offres publiques de retrait de titres, ce qui valorise d’ailleurs les titres restants. Or la société s’apprête malgré tout, comme vous le savez, à supprimer 550 emplois dans ses implantations en France !

Il est donc grand temps – et je disais cela à l’intention de M. le rapporteur général – qu’il comprenne, ainsi que la majorité sénatoriale, une bonne fois pour toutes que les entreprises, dans notre pays, ont aussi devant l’opinion, mais, bien sûr, au premier chef, devant leurs salariés, une responsabilité sociale en termes d’emploi, d’investissement utile à la production, de développement durable et de respect de l’environnement.

Tels sont les arguments que nous voulions présenter à l’appui de l’article 3, dont nous demandons le vote par scrutin public.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

La commission des finances demande le rejet de cet article, qui est totalement confiscatoire puisqu’il vise à établir la taxation à 100 %, ce qui est à la limite de la capacité contributive et contraire aux principes constitutionnels !

Vous vous êtes fait l’écho d’une dépêche laissant à penser que certains dirigeants, qui étaient éligibles à des stock-options, y auraient renoncé ce matin. Je crois qu’il faut saluer le souci déontologique dont ont fait preuve ces dirigeants.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

C’est parce que ça commence à chauffer un peu !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

La crise économique et financière est en partie la conséquence de manquements graves à l’éthique. Cette démarche prouve que les esprits évoluent et que l’on va dans la bonne direction !

Il n’est donc peut-être pas nécessaire de faire systématiquement des lois ; encore faut-il que les dirigeants soient pénétrés des règles d’éthique, ce qui doit être le cas chaque fois qu’il s’agit d’hommes et de femmes qui ont servi l’État et qui ont le sens de l’intérêt général.

La commission des finances demande donc le rejet de l’article 3.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je mets aux voix l'article 3.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 133 :

Le Sénat n'a pas adopté.

Les montants exprimés en euros dans la présente loi sont adaptés annuellement à l'indice des prix à la consommation en France.

L'article 4 n’est pas adopté.

La présente loi s'applique aux revenus de l'année 2008 et des années suivantes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 16, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit cet article :

Les dispositions de l'article premier sont applicables à compter de l'imposition des revenus de 2009.

Lorsqu'ils sont soumis à prélèvement libératoire, les revenus visés aux articles 2 et 3 sont imposables dès la promulgation de la présente loi.

La parole est à M. Thierry Foucaud.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Cet amendement vise simplement à remplacer la date de 2008 par celle de 2009. Il faut dire que nous avions déposé la présente proposition de loi le 15 octobre 2008.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

La commission est défavorable à l’article 5 et l’amendement n’est pas de nature à modifier cet avis ! La commission est donc défavorable à l’amendement n° 16 et demande le rejet de l’article 5.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

Même avis que la commission !

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 5 n’est pas adopté.

I - À la fin du premier alinéa de l'article L. 225-38 du code du commerce, les mots : « du conseil d'administration » sont remplacés par les mots : « de l'assemblée générale ».

II - Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé : « Cette convention est soumise à l'accord du comité d'entreprise. »

III - À la fin de la première phrase du second alinéa de l'article L. 225-39 du même code, les mots : « au président du conseil d'administration » sont remplacés par les mots : « à l'assemblée générale des actionnaires ».

IV - Dans le premier alinéa de l'article L. 225-42 du même code, les mots : « du conseil d'administration », sont remplacés par les mots : « de l'assemblée générale des actionnaires ».

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

L’article 6, sur lequel la commission a émis un avis défavorable, comporte des dispositions qui sont pourtant attendues par des millions de salariés.

Nous proposons que les conventions réglementées ne soient plus soumises à la seule approbation du conseil d’administration, mais à l’accord conjoint de l’assemblée générale des actionnaires et du comité d’entreprise.

Nous entendons répondre à une exigence de transparence sur la rémunération des dirigeants, qui est composée d’une part fixe et d’éléments variables. Cette proposition repose donc sur le double contrôle préalable de ces conventions par les actionnaires et par les salariés, à travers leurs représentants au comité d’entreprise.

L’avis du rapporteur sur notre proposition me surprend. Pour lui, le droit actuel, qui confie l’immense majorité des outils de contrôle et de surveillance au conseil d’administration – au détriment de l’assemblée générale des actionnaires ou des salariés – est un principe équilibré.

Mais, en cas de non-respect par un dirigeant d’entreprise des règles de consultation du conseil d’administration, la convention est nulle et le conseil d’administration a toute latitude pour exiger qu’elle soit déclarée comme telle. À l’inverse, en cas de non-respect des règles relatives à la consultation de l’assemblée générale des actionnaires ou du comité d’entreprise, la convention reste valable. Est-ce là ce que l’on appelle un principe équilibré ?

La majorité, qui se fait chaque jour le défenseur de l’actionnariat, qui dit vouloir en finir avec un actionnariat spéculatif pour retourner à un système régulé, plus humain, refuse une disposition qui aurait pour conséquence de reconnaître chaque actionnaire, en lui confiant un droit de surveillance plus approfondi en fonction d’une règle que vous devriez soutenir : une personne, une voix.

Notre proposition de conditionner la validité des conventions à l’approbation du comité d’entreprise est traitée avec mépris. Alors qu’hier encore éclatait au grand jour un nouveau scandale concernant une filiale du Crédit agricole qui aurait distribué plus de 50 millions de bonus, tout en élaborant un plan de licenciement de plus de soixante-dix salariés, il serait bon qu’un contrôle des salariés sur la gestion économique et les choix stratégiques de l’entreprise vienne bouleverser de telles habitudes !

Le plaidoyer en faveur de l’autodiscipline n’est plus crédible. Face à la multiplicité des abus, les salariés, y compris ceux de Continental à Clairoix – que M. le rapporteur connaît bien – doivent pouvoir disposer de réels contre-pouvoirs face aux actionnaires majoritaires.

Ces salariés sont licenciés, sous prétexte que l’entreprise n’est pas assez rentable, alors même que les actionnaires accumulent les profits et que les mandataires sociaux ont des rémunérations parfois vingt fois supérieures aux salaires médians !

Vous dites vouloir instaurer de la morale ; vous dites vouloir faire en sorte que les dirigeants prennent leurs responsabilités. On le voit depuis une semaine, les appels du Gouvernement, du Président de la République, et même ceux – contraints, il est vrai – du MEDEF n’y changent pas grand-chose. Il faut faire sortir la question de la rémunération des dirigeants du cercle fermé des conseils d’administration, dans lesquels ces dirigeants se croisent, se cooptent, s’organisent en réseau pour bénéficier les uns et les autres de très avantageux jetons de présence. Dans ce système, l’un est président du conseil d’administration quand l’autre est membre du conseil de surveillance, et vice versa dans une autre entreprise.

Il faut de la transparence et de la démocratie sociale. C’est l’objet de cet article 6, sur lequel le groupe CRC-SPG demande un scrutin public.

Exclamations sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Je voudrais à nouveau lancer un appel à nos collègues du groupe CRC-SPG, qui prennent des engagements et ne les tiennent pas ! Il est tout de même fâcheux qu’ils continuent de demander des scrutins publics à répétition alors que le vote est identique chaque fois ! À quoi cela sert-il ? C’est un dévoiement du débat parlementaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Qui manifeste le plus de mépris, dans cet hémicycle ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

En ce qui concerne l’article 6, je rappellerai que les administrateurs qui approuvent des conventions réglementées sont dans l’obligation de soumettre ces conventions à l’assemblée générale des actionnaires et engagent personnellement leur responsabilité.

Du point de vue de la commission des finances, il n’y a pas lieu de modifier cette législation. C’est la raison pour laquelle elle demande au Sénat de rejeter l’article 6.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je mets aux voix l'article 6.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 134 :

Le Sénat n'a pas adopté.

La parole est à M. Claude Domeizel.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Monsieur le président, je suis chargé d’exprimer la position du groupe socialiste sur la proposition de loi qui doit – normalement – être examinée après le présent texte. Or, vous avez tout à l’heure indiqué qu’à dix-neuf heures, selon la façon dont les choses se passaient, soit vous appelleriez en discussion ladite proposition de loi, de façon qu’elle soit examinée dans son entier, soit vous lèveriez la séance dès la fin de l’examen du présent texte.

Je ne vous cache pas que nous souhaiterions savoir ce que vous allez décider, puisqu’il est dix-neuf heures quatre.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

En effet, mon cher collègue, il a été décidé que, si l’examen du présent texte était terminé à dix-neuf heures, nous étudierions le suivant dans la foulée.

Or, nous n’en aurons pas terminé avec la présente discussion avant dix minutes ou quinze minutes ? Dans ces conditions, monsieur Collin, acceptez-vous que l’examen de votre proposition de loi soit reporté à une date ultérieure ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Notre position reste inchangée : nous souhaitons que notre texte soit examiné aujourd’hui, sinon, sa discussion sera reportée au mois d’avril et perdra tout son sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 12, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 225-38 du code de commerce est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« La rémunération du président du conseil d'administration et du directeur général est soumise à autorisation du conseil d'administration.

« La rémunération et l'augmentation de la rémunération du président du conseil d'administration et du directeur général doit faire l'objet, au préalable, d'un avis conforme du comité d'entreprise et de l'assemblée générale des actionnaires. »

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

Même position !

L'amendement n'est pas adopté.

Le premier alinéa de l'article L. 2242-1 du code du travail est complété par la phrase suivante :

« Cette négociation porte également sur les éléments de rémunérations versées aux dirigeants salariés de l'entreprise, sous quelque forme que ce soit, notamment dans le cadre des dispositions visées aux articles L. 225-177 à L. 225-186 du code de commerce.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Monsieur le président, vous alliez encore oublier de me donner la parole pour explication de vote, peut-être parce que les arguments que j’entendais développer, en ce qui concerne l’Allemagne et les Pays-Bas, ne vous convenaient pas : ils allaient à l’encontre de ce qui avait été dit initialement.

Avec cet article 7, nous entendons modifier l’article L. 2242-1 du code du travail, qui tend à organiser dans les entreprises une ou plusieurs sections syndicales afin d’encadrer les négociations annuelles obligatoires.

Notre proposition est donc – M. le rapporteur l’avait d’ailleurs bien résumée – d’intégrer dans le champ de ces négociations annuelles obligatoires la question de la rémunération des dirigeants d’entreprise, particulièrement pour ce qui est des éléments variables de rémunération, qu’il s’agisse de stock-options, d’attributions gratuites d’actions ou de parachutes dorés.

Pour nous – chacun, ici, l’aura compris –, il s’agit de permettre aux salariés d’entreprises de connaître clairement la rémunération totale des mandataires sociaux qui les dirigent : il ne serait pas illégitime que les salariés, qui continuent à produire de la richesse, soient informés des conséquences financières de leur travail sur les rémunérations de leurs propres dirigeants.

Si nous proposons de l’intégrer aux négociations annuelles obligatoires, c’est précisément parce que nous considérons que les salariés doivent pouvoir participer à la fixation de cette rémunération, et ce précisément parce que trop souvent celle-ci est sans commune mesure avec celle qui est pratiquée dans l’entreprise.

Je citerai un exemple : en 1930, l’industriel américain Henry Ford préconisait que, pour être admissible, l’écart de salaires entre les salariés et les dirigeants devait être de 1 à 40. Il est aujourd'hui de 1 à 400. C’est dire ! Cette hausse considérable entre le salaire moyen et la rémunération de certains dirigeants d’entreprises n’est pas la cause de la bulle spéculative, elle en est la manifestation. Elle atteste à quel point la recherche de l’argent pour l’argent, la spéculation financière, conduit à tous les abus.

Cet emballement spéculatif, qui profite aux actionnaires et à certains dirigeants, joue bien sûr contre les salariés, à qui l’on impose au choix des périodes forcées d’inactivité, des gels ou des réductions de salaires, le retour en arrière sur les acquis sociaux – je pense au retour aux 40 heures, avec les conséquences que l’on connaît, notamment à Continental – ou bien à qui l’on impose délocalisations et licenciements.

C’est donc précisément parce que les salariés sont victimes de cette politique spéculative que nous entendons leur donner le droit d’intervenir en ce domaine.

Certains d’entre vous, mes chers collègues, s’étonnent de ce que nous demandons des scrutins publics sur chaque article : c’est parce que nous voulons que la France entière sache, demain, qui, dans cette enceinte, de Dupont ou de Durand a voté contre le bouclier fiscal, pour les stock-options ou pour des rémunérations monstrueuses !

Protestations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

C’est important ! On le fera savoir dans les départements !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Cela ne vous plaît pas, parce que vous serez gêné un jour de vos prises de position actuelles. Nous le savons ! Votre fébrilité le prouve !

L'article 7 n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 13, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 7, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 225-40 du code de commerce, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L. ... - Un rapport sur les rémunérations des dirigeants de l'entreprise est rédigé chaque année en début d'exercice, qui présente la politique de rémunération de l'entreprise, les objectifs et les modes de rémunérations qu'elle met en œuvre, ainsi que les critères de la relation entre les rémunérations et les performances individuelles des dirigeants. Ce rapport est élaboré par le comité des rémunérations, composé d'administrateurs indépendants, qui délibèrent en l'absence des dirigeants. Les institutions représentatives du personnel ont la possibilité d'interroger les dirigeants sur le contenu dudit rapport. Les réponses apportées sont intégrées dans le rapport. Le rapport est validé par l'assemblée générale des actionnaires. »

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Cet amendement est défendu, de même que l’amendement n° 14.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

La commission demande le rejet de cet amendement, de même que celui de l’amendement n° 14.

Debut de section - Permalien
André Santini, secrétaire d'État

Il a la même position que la commission.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 14, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 7, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

L'avant-dernier alinéa de l'article L. 225-40 du code de commerce est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Dans ce rapport, figure une annexe spécialement consacrée à toutes les rémunérations allouées au président du conseil d'administration et au directeur général. Cette annexe met en évidence, en les séparant, la partie fixe et la partie variable des rémunérations octroyées. »

Cet amendement a déjà été défendu.

La commission et le Gouvernement se sont déjà exprimés.

Je mets aux voix l'amendement n° 14.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Mes chers collègues, l’ensemble des articles ayant été repoussés, la proposition de loi est rejetée.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à exclure les communes de moins de 2 000 habitants du dispositif de service d’accueil des élèves d’écoles maternelles et élémentaires, présentée par M. Yvon Collin et plusieurs de ses collègues (nos 219, 289).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme Anne-Marie Escoffier, co-auteur de la proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que nous avons l’honneur de vous présenter aujourd’hui est un texte dicté par le bon sens et l’expérience, élaboré de surcroît au terme de nombreux échanges tenus avec les maires de nos départements respectifs, un texte que nul ne saurait qualifier de malvenu dans cette enceinte, où la majorité d’entre nous sait pertinemment ce qu’est une petite commune, connaît ses problèmes et mesure les difficultés que rencontrent tous les jours ses élus.

J’ai déjà eu à me prononcer sur le dispositif du service minimum d’accueil, créé par la loi du 20 août 2008 instituant un droit – et non un devoir – d’accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires les jours de grève, une loi très difficile à appliquer si, bien entendu, les maires veulent le faire correctement et non dans une improvisation qui, à l’usage, peut se révéler désastreuse.

Si je peux naturellement concevoir que l’instauration d’un droit d’accueil n’était pas a priori une mauvaise idée, force est de constater que sa mise en place a constitué une sorte de « supercherie », faisant miroiter auprès des familles une aide qu’il était pratiquement impossible de mettre en œuvre.

Au reste, monsieur le ministre, cette loi n’a-t-elle pas suscité, dès sa publication, l’opposition des syndicats, qui voient en elle la violation même du droit de grève, et celle des parents d’élèves, inquiets de voir l’école enseignante transformée en vulgaire garderie ?

De nombreux élus, pour leur part, surtout ceux des zones rurales, les plus directement concernés, se sont émus d’un système faisant reposer sur leurs épaules toute l’application d’un texte qu’ils n’ont ni souhaité ni demandé.

Je ne parle pas de la justice, qui, dans de nombreux cas, a donné raison aux maires réfractaires à l’application de cette loi ; je pense, en particulier, à cet arrêt du tribunal administratif de Bobigny, en Seine-Saint-Denis, qui fera probablement jurisprudence et qui explicite le principe suivant : « Nul ne saurait être contraint de faire ce qu’il ne peut objectivement pas mettre en œuvre ». Cet arrêt est au demeurant parfaitement conforme à la jurisprudence du Conseil d’État sur la recevabilité des recours en référé.

Monsieur le ministre, pensez-vous sérieusement que le maire d’une commune de moins de deux mille habitants – la majorité des communes du terroir dont je suis l’élue sont de cette taille, et nous sommes nombreux, ici, à en être les élus, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons – peut, tout à la fois, préparer un dispositif d’accueil dans un délai très court, à savoir moins de quarante-huit heures, trouver les collaborations nécessaires pour appliquer une réglementation qui exige, par ailleurs, un encadrement d’un adulte pour garder vingt enfants, recenser les compétences professionnelles, ou tout au moins la formation, des bénévoles requis, mettre en place un service de restauration, veiller à l’organisation modifiée des transports scolaires – que sais-je encore ? – sans tomber dans le piège d’une mauvaise garderie, parfois non dénuée de risques et de dangers ?

Tous, sans exception, nous avons mesuré, dans nos départements, nos cantons, nos villages, l’extrême difficulté d’appliquer ce qui, il faut bien le reconnaître, est une loi précipitée, produit d’une absence totale de concertation.

Cette constatation, encore une fois de bon sens, mes collègues du groupe RDSE et moi-même ne sommes pas les seuls à l’avoir formulée, puisque le Président de la République lui-même, le 27 novembre dernier, à l’occasion du 91e congrès des maires de France, a fait, en public, la déclaration suivante : « C’est vrai qu’on ne peut pas demander la même obligation de service à un maire d’une commune rurale qui n’a même pas dans ses collaborateurs un employé titulaire ayant le BAFA et [à un maire] d’une grande ville d’un ou deux millions d’habitants. Je le comprends parfaitement et l’on doit pouvoir trouver un accord. » C’est précisément pour trouver cet accord – du moins, je l’espère ! – que nous sommes réunis aujourd’hui. Et c’est la raison même de cette proposition de loi, dont l’objet est justement d’exclure du dispositif d’accueil les petites communes de moins de 2 000 habitants, seuil qui nous paraît raisonnable.

Le Sénat devrait, en toute logique, approuver ce texte à une large majorité, puisqu’il s’inscrit dans le droit-fil des propos présidentiels.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

Je dis « devrait », car, à mon grand étonnement, j’ai constaté, monsieur le rapporteur, que, dans vos conclusions, vous préconisiez le contraire. Ne pourrait-on pas s’étonner que la gauche de notre assemblée suive les conclusions préconisées par M. Sarkozy, tandis que la droite les récuserait d’un revers de la main, avec des arguments qui, pour le moins, me semblent fallacieux ?

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

Ces arguments, du reste, quels sont-ils ?

En tout premier lieu, monsieur le rapporteur, vous-même avez indiqué en réunion de commission que les difficultés rencontrées « ne justifiaient pas de modifier en profondeur la répartition des compétences prévues par la loi ». Voilà une appréciation quelque peu arbitraire, qui me paraît au demeurant contraire à ce que m’ont confié les maires de mon département et de ceux des signataires de la présente proposition de loi, dont je ne saurais croire qu’ils sont différents des autres.

Permettez-moi, cher collègue rapporteur, de m’étonner de certaines affirmations de votre rapport qui, sur ce point, me paraissent trahir une véritable méconnaissance…

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

… d’un système scolaire que je crois connaître de l’intérieur.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

En deuxième lieu, vous avez ajouté que « le service d’accueil ne peut être bien organisé qu’à l’échelle locale » ; tout dépend, bien sûr, de ce que l’on met derrière les mots « échelle locale ». Pour bien connaître les petites communes ne disposant d’aucun moyen humain ni de structures adaptées, je sais les difficultés, voire les impossibilités, auxquelles celles-ci se heurtent pour mettre en place une telle organisation. À ce sujet, monsieur le rapporteur, vous avez reconnu vous-même que « l’organisation du service d’accueil est une lourde charge pour les communes, et notamment pour les plus petites d’entre elles », avant de vous étendre longuement sur le cas « des communes ayant essayé de bonne foi d’appliquer le texte sans y parvenir [et dont les maires] ont assez mal vécu, et cela se comprend, d’être assignés devant les tribunaux administratifs, l’État semblant ainsi les stigmatiser au lieu de les aider à surmonter leurs difficultés ».

N’est-ce pas, en substance, dire : « Je suis tout à fait d’accord avec la proposition de loi du RDSE, mais je ne puis le dire » ?

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

En troisième lieu, le ministère de l'éducation nationale, à la suite d’une prétendue concertation avec les maires, a apporté une première série de réponses aux petites communes. Or celles-ci relèvent davantage, selon moi, du catalogue de bonnes intentions que de la réalité des faits.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

À la suite de quoi, monsieur le rapporteur, vous avez déclaré, toujours au cours de cette réunion de commission, que le « service d’accueil n’a donc rien d’impossible par principe ». N’est-ce pas juste le contraire de ce que vous aviez dit auparavant ?

Je voudrais ajouter, en quatrième lieu, mais vous vous en souvenez sûrement, monsieur le ministre, que je m’étais rebellée…

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

… contre l’affirmation, exprimée ici même, selon laquelle les préfets et les inspecteurs d’académie auraient mal relayé l’information sur ce nouveau système d’accueil : c’est une affirmation insupportable pour moi et pour bien des collègues qui savent la confiance dont jouissent, légitimement, ces hauts fonctionnaires.

Nous ne saurions accepter des réponses trop simples, ou trop vagues, à la très sérieuse interrogation que nous nous posons et que se posent, avec nous, l’immensité des petites communes de France, confrontées à la quasi-impossibilité d’organiser, les jours de grève, un service d’accueil dans les écoles maternelles et élémentaires.

Monsieur le ministre, j’ai lu avec attention, comme tous les maires, les circulaires que vous avez adressées à ces derniers aux mois de janvier et février derniers, pour leur suggérer quelques « bonnes recettes » afin que soit adopté le nouveau système. Vous soulignez notamment l’absolue nécessité de procéder, au plus tôt, au paiement des communes ayant organisé le droit d’accueil. L’argument n’est pas négligeable.

Plus contestable est l’argument relatif à l’énumération des personnels susceptibles d’être mobilisés pour assurer l’accueil des enfants, parmi lesquels figurent, au premier chef, les jeunes retraités de l’éducation nationale.

Monsieur le ministre, pouvez-vous, en conscience, imaginer que de jeunes retraités, qui, quelques mois plus tôt, auraient été au nombre des grévistes, se feraient aujourd’hui personnels de substitution de leurs anciens collègues ? Trahison, cela s’appellerait trahison à un code d’honneur !

Marques d’approbation sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

Comme vous pouvez le constater, monsieur le ministre, je veux délibérément me placer sur un plan concret, pragmatique : c’est à ce niveau que j’ai eu à gérer de telles situations, ce qui donne, me semble-t-il, quelque crédibilité à mes propos. Vous le comprenez aussi, nous sommes tous, ou presque tous, ici, à être concernés par cette question, qui dépasse largement les clivages traditionnels, d’autant que le Chef de l’État, lui-même, s’est exprimé dans le même sens que les signataires du présent texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

Cette proposition de loi nous donne à tous aussi l’occasion de redire la vigilance extrême avec laquelle la Haute Assemblée doit légiférer, en évitant l’écueil gravissime de la précipitation et de la stricte opportunité ponctuelle. En l’espèce, n’avons-nous pas oublié de mesurer les conséquences qu’il y a, pour l’État, à exiger tout et n’importe quoi des collectivités locales et de se défausser plus ou moins systématiquement sur elles sans se demander comment elles pourront appliquer des mesures qu’elles n’ont, le plus souvent, pas réclamées ? À mieux prévoir, chacun y gagnerait, à commencer par cette démocratie apaisée que nous souhaitons, qui serait aux antipodes de cette culture du conflit que certains préconisent et que nous estimons, pour notre part, néfaste à la nation, dans ce domaine comme dans d’autres.

Je veux être persuadée, monsieur le ministre, que vous saurez être sensible à ces arguments, différents certes de ceux de notre excellent rapporteur, mais qui n’ont pour objet, comme les siens – quoique, me semble-t-il, mieux que les siens –, que d’apporter une réponse équitable aux parents de nos jeunes élèves, à la famille « éducation nationale », en un mot, à notre société tout entière.

Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a huit mois, nous avons consacré un nouveau droit pour tous les élèves des écoles primaires, celui d’être accueillis en cas de grève. Mais à vrai dire – et j’ai bien compris, madame Escoffier, que vous n’étiez pas tout à fait d’accord avec ce principe –, si les élèves sont bien les titulaires de ce droit, les bénéficiaires directs n’en sont pas moins les familles. C’est à elles, en effet, que s’adresse le service d’accueil que nous avons créé, car c’est elles qui, lorsqu’elles ne pouvaient s’appuyer sur la solidarité familiale ou utiliser un mode de garde payant, subissaient les conséquences des grèves dans l’éducation nationale.

À l’époque, certains d’entre nous, moi y compris, s’interrogeaient sur la compatibilité d’un tel service avec l’exercice effectif du droit de grève. Huit mois après, le constat s’impose, me semble-t-il, à tous : la création du service d’accueil n’a en rien limité ou bridé le droit de grève dans l’éducation nationale et les mouvements sociaux qui s’y déroulent sont loin d’avoir perdu tout écho.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

On peut tout de même s’interroger sur les conditions d’accueil des élèves !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Depuis la promulgation de la loi, en août dernier, quatre grèves d’importance ont eu lieu, soit autant d’occasions d’évaluer l’application de la loi. Chacun le reconnaît, les communes ont parfois connu des difficultés lorsqu’il leur a fallu proposer le service d’accueil, et j’y reviendrai. Mais il faut également le préciser d’emblée, chacune de ces journées de grève a été l’occasion de constater que les familles utilisaient bel et bien ce service.

Bien sûr, madame Escoffier, toutes les familles, loin de là, n’ont pas eu besoin d’y recourir. Mais, le 29 janvier dernier, ce sont tout de même près de 450 000 enfants qui ont été accueillis dans 18 000 communes et, le 19 mars, ce sont 80 % des grandes villes qui ont mis ce service en place. Il devient donc difficile de le nier, le service d’accueil répond bien à un besoin social et offre, en cas de grève dans l’éducation nationale, une sécurité aux familles : elles savent qu’elles pourront alors toujours compter sur ce service sans avoir à se « débrouiller » tant bien que mal et dans l’urgence.

Il reste, je viens de le souligner, que l’organisation du service n’est pas une tâche aisée et que, dans certaines communes, elle a pu sembler une gageure. C’est ce constat qui conduit aujourd’hui la majorité de nos collègues du groupe RDSE, par la voix de son président, Yvon Collin, à nous inviter à réexaminer son fonctionnement à la lumière des premiers tests « grandeur nature » du service d’accueil qui se sont déroulés depuis l’adoption de la loi.

Nos collègues nous proposent en particulier de remettre sur le métier une question délicate, qui était déjà au cœur de nos réflexions au cours de l’examen du projet de loi, celle de la répartition des compétences entre l’État et les communes.

Cette question mérite d’être examinée avec soin. En effet, si nous avons choisi de créer un dispositif unique en son genre, en partageant la compétence d’accueil entre les communes et l’État, c’est que nous étions convaincus que ce dernier n’était pas capable, lorsque la grève était massive, d’organiser le service lui-même. Dans l’intérêt des familles, qui s’avère particulièrement aigu dans cette hypothèse, il revenait aux communes de prendre en charge son organisation.

Cela étant, si les communes ne parviennent pas à organiser le service elles-mêmes, alors la logique du dispositif prévu par la loi ne tient plus : il faudrait donc prendre acte de l’impossibilité d’offrir le service dans une partie des communes, voire dans toutes. De fait, le service d’accueil disparaîtrait, car les raisons qui nous ont conduits à estimer l’État incapable d’organiser le service d’accueil en cas de grève massive sont toujours valables.

Ainsi, le fait de consacrer, comme le souhaitent les auteurs de la proposition de loi, la compétence de l’État pour l’organisation du service d’accueil dans les communes de moins de 2 000 habitants, c'est-à-dire dans 75 % des communes françaises, reviendrait donc, en réalité, à ne plus proposer le service dans ces communes.

De plus, chacun le sait, cela fragiliserait définitivement le service d’accueil, en ouvrant la voie à sa suppression pour toutes les catégories de communes, qui, à des degrés divers, ont toutes dû surmonter des obstacles pour le mettre en œuvre.

Oui, madame Escoffier, c’est indiscutable, l’organisation du service est une lourde charge pour les communes, notamment pour les plus petites d’entre elles. Nous en avons eu conscience dès l’examen du projet de loi, et c’est pourquoi le Sénat l’a largement amendé, bien souvent, d’ailleurs, sur l’initiative de la commission des affaires culturelles, afin de donner aux communes les moyens d’exercer cette compétence dans les meilleures conditions. Je n’y reviendrai pas, car la question qui nous est désormais posée est de savoir si, malgré ces améliorations, le texte s’est révélé impossible à appliquer dans les plus petites communes.

Vous venez de nous affirmer voilà quelques instants, en reprenant un extrait de son discours, que le Président de la République avait lui-même clairement donné sens et poids à la proposition de loi que vous nous présentez. Permettez-moi d’élargir cet extrait, afin de retranscrire plus fidèlement la réalité des propos présidentiels. Certes, le Président de la République a commencé par déclarer : « C’est vrai qu’on ne peut pas demander la même obligation de service à un maire d’une commune rurale qui n’a même pas dans ses collaborateurs un employé ayant le BAFA et [à un maire] d’une grande ville d’un ou deux millions d’habitants. Je le comprends parfaitement et l’on doit pouvoir trouver un accord ». Mais il a aussitôt poursuivi en estimant qu’un tel accord était susceptible d’être trouvé « y compris sur […] les référés qui ont été faits pour sanctionner tel ou tel maire ».

Aux yeux du Président de la République, il n’est pas normal que les maires des petites communes n’ayant pas réussi à mettre en place le service d’accueil aient été traduits en justice. Tel était donc principalement l’objet de son intervention.

Monsieur le ministre, nous le savons, vous avez engagé une concertation approfondie avec l'ensemble des représentants des maires. Celle-ci a permis d’identifier les principales difficultés des communes, notamment des plus petites d’entre elles, et doit permettre d’y apporter, cette fois-ci, une première série de réponses.

Ce sont ces mêmes difficultés que visent nos collègues du groupe RDSE ; elles méritent donc que l’on s’y arrête.

Le premier de ces obstacles tient au délai-limite fixé par la loi pour la transmission des déclarations de grève : en effet, ce n’est qu’à quarante-huit heures du conflit que le maire sait s’il doit mettre en œuvre le service et dans quelles proportions.

À ce sujet, il faut tout d’abord rappeler, mes chers collègues, que les grèves sont rarement inopinées : la date de la mobilisation est souvent connue longtemps à l’avance et nous avons eu quelques exemples récents de mouvements annoncés plus d’un mois à l’avance. Autrement dit, rares sont les cas où les maires ne savent pas, plusieurs semaines en amont, qu’une grève d’importance aura lieu dans l’éducation nationale.

Il n’en reste pas moins, il est vrai, que savoir par avance qu’il y aura un conflit ne permet pas de connaître son ampleur exacte et donc d’évaluer en amont le nombre d’enfants concernés.

C’est la raison pour laquelle le ministère de l’éducation nationale s’est désormais engagé auprès des associations de maires à demander aux inspecteurs d’académie de transmettre en temps réel l’évolution du nombre de grévistes déclarés. Ainsi, avant le délai fatidique des quarante-huit heures, les maires pourront commencer à mesurer l’ampleur de la mobilisation. Il s’est également engagé à demander aux directeurs d’école de questionner les familles, quelques jours avant le mouvement, afin de savoir si elles entendent ou non bénéficier du service. Ces mesures permettront donc aux maires de disposer en amont des premières informations nécessaires pour s’organiser : ils pourront dès lors surmonter plus aisément l’obstacle des délais.

Plus épineuse est la question des personnels nécessaires pour la mise en œuvre du service car, si les grandes villes disposent par la force des choses d’un bassin de population, et donc d’un vivier de compétences, il peut être plus difficile pour les communes rurales de trouver le personnel nécessaire.

Dès l’examen du projet de loi, ce sujet a été au centre de nos débats. Là encore, à l’initiative de votre commission, il a été prévu que chaque commune devrait recenser ceux qui, parmi ses habitants ou parmi ceux des communes voisines, pourraient assurer le service. En effet, à nos yeux, la difficulté principale n’était pas de trouver les personnes compétentes, mais de s’y prendre suffisamment en amont pour avoir le temps de les trouver.

Le principe de la constitution d’un « vivier » a été inscrit dans la loi et l’expérience montre que partout où il a pu être constitué, le service fonctionne bien. Il reste, et ce point ne fait pas débat, qu’il est plus ou moins facile, selon le contexte local, de constituer ce « vivier ».

C’est pourquoi le ministère de l’éducation nationale s’est récemment engagé à aider les communes à trouver ces personnels.

Cela devrait permettre de lever l’essentiel des difficultés. Un point doit néanmoins encore être souligné : la loi ne fixe aucune norme de qualification pour les personnels et ne détermine aucun taux d’encadrement minimal. Il ne s’agit pas là d’un oubli ou d’une malfaçon, mais d’un choix volontaire, qui recevait au moment de l’examen du texte l’assentiment de la plupart des associations de maires.

Celles-ci craignaient en effet – à raison, me semble-t-il ! – que la fixation de normes contraignantes ne soit un obstacle pour les communes, et notamment pour les plus petites d’entre elles. Or de telles contraintes ne se justifient pas lorsqu’il s’agit d’un service mis en œuvre trois à quatre fois par an, et qui propose un accueil et non des enseignements.

Au demeurant, la pratique ne nous a pas démentis : à ma connaissance, il est arrivé qu’il y ait trop d’adultes, mais il me semble que très rares ont été les cas, si jamais il y en eut, où les adultes ont été trop peu nombreux pour accueillir dans de bonnes conditions les enfants.

Là encore, les difficultés me paraissent donc en voie d’atténuation, sinon de résolution. Mais elles disparaîtront d’autant plus vite que les services de l’État joueront totalement le jeu et se mobiliseront pour accompagner les communes dans la préparation du service.

Bien souvent, les maires ont ainsi manqué d’interlocuteurs capables de répondre à leurs questions, que ce soit sur le statut ou le nombre des personnels mobilisés, sur leur paiement ou sur les éventuelles conditions de qualification qu’il leur faudrait respecter. Je ne fais là que relayer ce que des maires bien informés m’ont rapporté.

Des mesures ont donc été prises ; deux instructions successives ont été envoyées aux inspecteurs d’académie, et les préfets et sous-préfets ont été également été alertés par les ministères de l’éducation nationale et de l’intérieur. Il est désormais clair pour tous que les services déconcentrés de l’État doivent prendre les devants et accompagner les maires.

Les résultats s’en font sentir : jour de grève après jour de grève, la bonne application de la loi progresse. Nous en sommes désormais arrivés à plus de 80 % de communes proposant le service. Dans l’académie de Strasbourg, le taux d’application de la loi lors de la grève de jeudi dernier était même de 95 %.

Au-delà des apparences qu’ont entretenues, parfois sciemment, quelques communes particulièrement visibles, la mise en œuvre du service d’accueil semble donc bien s’être améliorée depuis les premières grèves de l’automne dernier. Certes, des difficultés demeurent. Nous ne le nions pas, mais elles sont désormais bien repérées, et la réunion à votre invitation, monsieur le ministre, du comité de suivi de l’application de la loi a permis d’y apporter une première série de réponses.

De fait, le nombre de communes n’organisant pas le service d’accueil ne cesse de diminuer : le 29 janvier, elles étaient près de 1 900 à ne pas proposer le service ; le 19 mars, elles n’étaient plus que 1 400.

Plutôt que d’abroger partiellement une loi qui s’applique de mieux en mieux et d’ouvrir ainsi la voie à la suppression progressive du service, mieux vaut donc, me semble-t-il, continuer à faire preuve de pragmatisme, en aidant les communes à la mettre en œuvre et en répondant point par point à chacune des difficultés qu’elles rencontrent.

Il ne s’agit pas, mes chers collègues, de faire état, les uns et les autres, de notre connaissance du milieu enseignant. J’ai moi-même été enseignant pendant de très longues années et j’ai exercé des responsabilités dans des établissements scolaires. Cela ne m’a pas empêché de rester pragmatique et d’apporter des solutions pouvant trouver, sur le terrain, l’écho le plus favorable possible.

Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, la commission des affaires culturelles souhaite que vous poursuiviez la concertation qui est désormais bien engagée, afin de permettre aux communes de mettre en œuvre dans de bonnes conditions ce service tant apprécié par les familles.

C’est également pourquoi, mes chers collègues, la commission ne peut pas être favorable à l’adoption de cette proposition, bien qu’elle soit sensible à la voix que ce texte fait entendre, celle des maires des petites communes qui ont besoin d’être accompagnés par l’État pour exercer cette nouvelle compétence.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - Permalien
Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, il y a quelques mois, j’ai eu l’honneur de présenter à votre assemblée le projet de loi instituant un droit à l’accueil pour les élèves scolarisés dans les écoles primaires, qui permet aux enfants d’être reçus y compris les jours de grève. Ce texte avait fait, à l’époque, l’objet de nombreux amendements pour tenir compte des demandes exprimées par les collectivités locales.

Je me suis attaché, depuis lors, à mettre en œuvre tous les moyens pour venir en aide aux communes qui éprouvaient des difficultés à répondre à l’obligation créée par la loi. Ces efforts ont permis à 90 % des communes de s’acquitter de cette mission nouvelle à l’occasion de la dernière grève. C’est une avancée majeure pour le droit des familles. C’est aussi un progrès incontestable et un signe de maturité de notre dialogue social, qui peut à présent se dérouler dans des conditions plus sereines.

C’est dans ce contexte, et alors qu’une très large majorité de Français plébiscite le nouveau droit qui leur est reconnu, que le groupe RDSE souhaite réviser les modalités d’application de la loi pour les communes de moins de 2 000 habitants, en confiant à l’État la charge d’accueillir les enfants les jours de grève.

Je ne suis pas favorable à cette proposition, non seulement parce que je la crois davantage dictée par des considérations politiques que par le souci de venir en aide aux familles §

Debut de section - Permalien
Xavier Darcos, ministre

... mais aussi parce que j’estime qu’elle remettrait en cause l’équilibre juridique, politique et tout simplement pratique auquel nous sommes parvenus en dialoguant avec les représentants des différentes collectivités locales.

Je sais parfaitement que l’organisation du service ne saurait être définie de façon trop stricte, ce qui est tout à fait normal, compte tenu de l’ampleur du réseau des écoles primaires : il y en a près de 55 000 réparties dans 22 000 communes. Mais c’est précisément la raison pour laquelle j’ai voulu que ce soit chaque commune qui définisse les modalités selon lesquelles elle souhaitait mettre en place ce dispositif, et non l’État, qui ne saurait avoir la même connaissance que le maire des besoins des familles et de la qualité des personnes susceptibles d’assurer l’accueil sur le territoire de sa commune !

L’État et les communes doivent s’entendre dans l’intérêt des familles, et c’est bien ce que nous avons cherché à faire au cours des derniers mois en menant un dialogue approfondi avec tous les acteurs concernés. Ces derniers mois, en effet, j’ai rencontré les principales associations des maires, à plusieurs reprises, ainsi que le président de l’Association des maires de France, Jacques Pélissard, pour voir avec eux les points à améliorer.

J’ai apporté un certain nombre de réponses à leurs demandes, que Philippe Richert détaille précisément dans son rapport. Je vais les reprendre rapidement.

J’ai d’abord envoyé, le 22 décembre, une instruction aux préfets – qui ont l’habitude d’obéir, madame Escoffier, à ce que leur demande le Gouvernement ! – et aux recteurs, instruction rédigée en commun avec Mme la ministre de l’intérieur, qui précisait la façon dont les recours devaient être engagés contre les communes n’ayant pas appliqué le SMA. Il s’agissait de distinguer les communes de bonne foi, qui n’avaient pas pu mettre ce service en place, de celles qui avaient délibérément refusé de mettre en œuvre ce service pour des raisons politiques ou idéologiques, bafouant ainsi la volonté du législateur. Peu nombreuses sont aujourd’hui les villes, grandes ou petites, qui s’y risquent. Même Paris ne s’y risque pas !

J’ai envoyé aux inspecteurs d’académie, le 14 janvier, une instruction portant sur un ensemble de points listés avec le président de l’Association des maires de France : liste vivier, prévision du nombre d’enseignants grévistes, évaluation du nombre d’enfants à accueillir, collaboration plus étroite entre l’État et les communes.

J’ai rappelé ces dispositions dans une autre instruction aux inspecteurs d’académie, le 25 février.

Enfin, j’ai souhaité que les inspecteurs d’académie soient aux côtés des maires pour les aider et leur donner toutes les informations nécessaires à la mise en œuvre du droit d’accueil. Les petites communes avaient besoin de ce soutien ; nous le leur avons apporté et je continuerai à demander à mes services de le faire.

Ces efforts se sont traduits concrètement dans les chiffres lors des grèves du 29 janvier et du 19 mars dernier puisque 90 % des communes ont mis en place le SMA, et cela, je tiens à le préciser, sans distinction entre les grandes et les petites communes.

Comme l’a dit votre rapporteur, on constate une montée en puissance de ce service d’accueil, puisque l’on est passé de plus de 50 000 enfants accueillis en octobre 2008 à près de 450 000 enfants le 29 janvier dernier. Qui peut penser sérieusement que l’on puisse aujourd’hui priver les familles de ces avancées ? Qui osera dire à 450 000 enfants : « Non, nous ne vous accueillerons plus » ?

Enfin, c’est pour rester à l’écoute des maires, de tous les maires, que j’ai mis en place, avec les principales associations des maires, un comité de suivi de l’application de la loi, le 3 mars dernier, en présence de Philippe Richert. Cette réunion anticipait la remise du rapport d’évaluation prévue pour le mois de septembre et nous a permis de faire de nouveau un point sur la mise en œuvre de la loi. J’ai pu constater avec satisfaction qu’aucune association de maires ne conteste plus le bien-fondé de la loi. Les maires souhaitent au contraire la mettre en œuvre dans les meilleures conditions possibles.

En vérité, tout montre que le droit d’accueil a désormais trouvé sa place dans la vie quotidienne et dans le patrimoine de nos compatriotes.

Sourires ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Xavier Darcos, ministre

Maintenant, la question que soulève la proposition du groupe RDSE est la suivante : y a-t-il plus d’obstacles pour les maires ruraux, ou pour les maires des petites communes, pour appliquer la loi ? Je ne le crois pas ! Faut-il croire en effet qu’il est plus dur d’appliquer cette loi dans une commune de moins de 2 000 habitants que dans une ville de plus de 100 000 habitants ?

Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire devant vous le 20 janvier dernier, je ne conteste pas que la mise en œuvre du droit à l’accueil les jours de grève constitue, pour les communes qui en sont chargées, un défi nouveau, avec son lot de contraintes plus ou moins faciles à surmonter. Cependant, mes rencontres avec l’association des maires ruraux ainsi que les remontées du terrain à la suite des dernières grèves qu’a pu connaître l’éducation nationale m’ont permis de faire le constat suivant : même si les difficultés qui peuvent exister dans la mise en œuvre ne sont pas les mêmes partout, il n’y en a pas plus dans les petites communes rurales qu’ailleurs. Est-il nécessaire de vous citer le nom de milliers de communes de moins de 2 000 habitants, voire de moins de 500 habitants, qui ont réussi à mettre en place sans difficulté un service d’accueil pour les élèves scolarisés sur leur territoire ?

Comme Philippe Richert, je considère par ailleurs, et je le dis solennellement devant la Haute Assemblée, qu’il ne serait pas justifié de différencier l’application de la loi selon la taille de la commune : comment expliquer que 75 % des maires seraient dispensés de mettre en œuvre la loi ?

De plus, introduire une distinction entre les familles des petites communes et celles des grandes communes, c’est se heurter au principe constitutionnel d’égalité.

Comment prétendre qu’une famille qui habite une petite ville a moins besoin de ce service qu’une famille d’une grande ville ? Faudra-t-il distinguer demain les enfants des villes des enfants des champs ?

Le droit d’accueil ne peut pas être à géométrie variable ! Introduire des différences entre les communes, au prétexte que certaines communes ont des difficultés particulières dues soit à leur nombre d’habitants, soit à leur situation géographique, ce serait risquer de stigmatiser celles qui n’arriveraient pas à mettre en œuvre le droit d’accueil.

Pour autant, je suis bien conscient que les petites communes ont évidemment des contraintes différentes de celles des grandes villes. C’est pourquoi je suis résolument décidé à poursuivre le dialogue avec elles et prêt à donner à mon administration les instructions qui apparaîtraient nécessaires pour les accompagner encore davantage dans la mise en œuvre du droit d’accueil. Le rapport remis au mois de septembre nous y aidera.

C’est pourquoi je vous demande aujourd’hui, mesdames, messieurs les sénateurs, de ne pas voter la proposition de loi présentée par vos collègues du groupe RDSE, dont je constate d’ailleurs qu’elle pourrait se heurter à l’article 40 puisqu’elle crée une nouvelle dépense pour l’État.

Ce droit d’accueil, c’est un progrès social et c’est un service sur lequel toutes les familles peuvent désormais compter. Les en priver sous tel ou tel prétexte, comme l’avance la proposition de loi dont nous discutons aujourd’hui, ce ne serait pas seulement un retour en arrière, ce serait tout simplement incompréhensible !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la loi instituant un droit d’accueil pour les élèves des écoles maternelles et primaires, votée l’été dernier, non sans une certaine précipitation, a, depuis, et très rapidement, révélé ses faiblesses et ses lacunes.

Ce service minimum d’accueil consiste avant tout pour l’État à faire porter, une nouvelle fois, suis-je tenté de dire, sur les collectivités locales l’organisation et le coût de l’encadrement des enfants les jours de grève des enseignants. II s’agit donc manifestement d’un nouveau désengagement de l’État et d’un nouveau transfert de charges vers les collectivités locales, lesquelles n’ont bien évidemment en l’occurrence rien demandé.

On peut se poser la question : pourquoi ce service d’accueil doit-il être à la charge des communes, alors que le conflit conduisant à la grève oppose un employeur, en l’occurrence l’État, à ses propres agents, les enseignants ?

Ainsi, il nous paraît inacceptable de renvoyer aux élus locaux la responsabilité de l’État sur des acteurs étrangers au conflit ayant conduit à la grève.

Mais, au-delà même du principe, l’expérience et la pratique de cette loi ont mis en évidence une réalité : le service minimum d’accueil dans les écoles soulève indéniablement de nombreuses difficultés d’application et, avant tout, dans les toutes petites communes.

II est impossible pour un maire, et à plus forte raison en milieu rural, d’organiser l’accueil des élèves en moins de 48 heures. La tâche est d’autant moins aisée que le seuil de 25 % à partir duquel le service minimum d’accueil devient obligatoire est très vite atteint dans de nombreuses communes. C’est d’ailleurs souvent le cas dans les écoles situées en milieu rural.

Par ailleurs, la question du recrutement des personnes chargées d’encadrer les élèves demeure problématique, monsieur le ministre. Selon la circulaire du 26 août 2008, aucune qualification minimale n’est exigée alors qu’il s’agit de l’encadrement d’enfants de deux à dix ans. Cette carence de la loi est d’autant plus surprenante qu’habituellement les conditions d’accès aux professions portant sur l’accueil d’enfants sont strictement encadrées et qu’est exigée au minimum la possession du brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur, BAFA.

Cette méthode de recrutement nous semble, en conséquence, bien hasardeuse. Elle confirme que cette loi est inapplicable et fait courir des risques aux élèves.

De plus, la loi a eu pour conséquence de placer dans l’illégalité les élus qui ne pouvaient pas l’appliquer ou qui ont refusé de le faire par respect des règles de sécurité, ce qui a donné lieu à de nombreuses condamnations, très disparates selon les juridictions. La décision d’arrêter les recours devant les tribunaux administratifs contre certains maires traduit d’ailleurs une prise de conscience des aberrations de ce texte particulièrement inadapté aux petites communes.

Il n’est donc pas honnête d’incriminer systématiquement la mauvaise volonté des maires, voire d’invoquer un positionnement politique, monsieur le ministre. Chacun est en effet conscient de la difficulté que vivent les familles en cas de grève. Mais force est de reconnaître que des communes, particulièrement les plus petites, qui sont aussi les plus nombreuses, ne sont pas en mesure de fournir ce service minimum. Nous le savons tous ici.

Chacun d’entre nous mesure combien les petites communes rencontrent des difficultés pratiques pour organiser ce service minimum qui devient, à chaque annonce de grève dans le monde enseignant, un véritable casse-tête pour les maires ruraux.

La situation est d’autant plus délicate que s’est désormais diffusée dans l’opinion et, donc, chez les parents d’élèves, l’idée selon laquelle le service minimum d’accueil fonctionne, qu’il est un droit, pour ne pas dire un dû ! Et dans les communes rurales où les parents d’élèves s’organisaient habituellement avec les grands-parents, la famille ou les voisins, en un mot, avec les moyens du bord, eh bien, désormais, ils s’en remettent au service minimum d’accueil, ce qui ne fait que compliquer sa mise en œuvre par le maire.

Le président de l’Association des maires ruraux ne rappelait-il pas, à propos du service minimum d’accueil, que « rendre obligatoire ne permet pas de rendre possible ce qui ne l’est pas » ?

C’est pourquoi, mes chers collègues, faute d’abroger le service minimum d’accueil, il apparaît du moins indispensable de prendre en considération la taille des communes. Et, sur ce point, mes collègues du RDSE et moi sommes disposés à faire évoluer le seuil proposé de 2 000 habitants, à la hausse comme à la baisse.

C’est donc dans cet esprit constructif et uniquement guidé par un souci pratique, sans tenir compte d’une posture a priori, que mon groupe, le RDSE, a déposé cette proposition de loi et en souhaite l’adoption.

Je remercie mes collègues Anne-Marie Escoffier et Michel Charasse, parmi les meilleurs spécialistes des collectivités que compte notre Haute Assemblée, d’être à l’origine de ce texte aussi simple qu’attendu par les maires ruraux.

Nous ne doutons pas que cette proposition de loi, qui a reçu l’approbation de plusieurs associations d’élus locaux, connaîtra ici le seul prolongement qui s’impose, son adoption.

Mes chers collègues, parce que je sais notre Haute Assemblée à l’abri des positionnements idéologiques et parce que, dans sa grande sagesse, elle est toujours soucieuse d’améliorer les conditions pratiques d’exercice des mandats des élus locaux et des maires en particulier, toute autre issue que l’adoption de ce texte par le Sénat apparaîtrait comme incompréhensible.

Enfin, et pour conclure, je m’adresserai à mes collègues de la majorité pour leur rappeler, si cela leur avait échappé, que cette proposition de loi bénéficie du soutien du Président de la République lui-même.

M. le ministre fait un signe de protestation.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

En effet, à l’occasion de son discours de clôture du dernier congrès des maires, il a prononcé ces mots pleins de bon sens, ces mots qui ont inspiré notre proposition de loi, ces mots que je cite dans leur intégralité et sans déformation : « On ne peut pas demander la même obligation de service à un maire d’une commune rurale qui n’a même pas dans ses collaborateurs un employé ayant le BAFA et au maire d’une grande ville. »

C’est donc un texte de bon sens que nous vous proposons, mes chers collègues. Il n’est absolument pas motivé par des considérations d’ordre politique ; vous le savez, le groupe du RDSE est un groupe d’ouverture. Je vous invite donc à y apporter votre soutien. §

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Monsieur le ministre, vous avez dit n’avoir entendu aucune protestation de la part de maires ou d’associations de maires. C’est à croire que nous ne rencontrons pas les mêmes personnes !

Comme l’affaire du lundi de Pentecôte, cette loi sur le service minimum d’accueil vous poursuit et va vous poursuivre encore longtemps, tel un chewing-gum collé sous la chaussure !

Sourires

Debut de section - Permalien
Xavier Darcos, ministre

M. Xavier Darcos, ministre. Et j’en suis fier !

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Jamais une loi n’avait fait l’objet, dans les six premiers mois de son application, autant de contestations, et de tous bords ! Le chahut et les sifflets qu’elle a provoqués au congrès des maires de novembre dernier en sont la manifestation publique la plus significative. Sans parler de l’émoi qu’elle a suscité localement chez les maires, toutes tendances confondues, émoi exacerbé par les recours introduits par des préfets, qui ont assigné des maires pour les punir de n’avoir pas appliqué ce service minimum !

Nous sommes donc dans une situation de véritable cacophonie juridique.

Dans ce contexte, votre note du 22 décembre 2008 tend à laisser croire que Mme la ministre de l’intérieur et vous-même découvrez une rafale de mises en cause de maires indisciplinés. Nous ne sommes pas dupes : tout cela a dû être bien orchestré !

Dans cette note, vous avez demandé aux préfets de maintenir les recours contre les communes et surtout les maires qui avaient refusé d’appliquer la loi, c’est-à-dire ceux qui, en quelque sorte, se comportaient en grévistes du SMA.

Comme vous, je considère que la loi doit être respectée. Cependant, lorsqu’un dispositif se heurte à une opposition de cette ampleur, venant de représentants du peuple, il faut se remettre en cause !

Voilà une loi irréaliste, car difficile à mettre en œuvre.

Le problème est bien là : il s’agit, en effet, pour les maires, d’organiser, dans un délai relativement court – 48 heures – un accueil, pour des enfants de deux à dix ans dans les meilleures conditions de sécurité.

Par-delà le malaise qu’elle peut créer chez ceux qui se considèrent comme des briseurs de grève, les maires sont désormais chargés d’une nouvelle obligation. Comme s’ils n’en avaient pas assez ! Le maire peut, bien sûr, faire appel à son personnel communal. Encore faut-il que le personnel non gréviste soit en nombre suffisant… Au demeurant, le maire peut également se trouver confronté à des agents qui refusent d’effectuer un travail soit parce qu’il doit être accompli dans des plages horaires où ils ne peuvent se rendre disponibles, soit parce qu’il ne correspond pas à leur cadre habituel d’intervention.

M. le secrétaire d’État chargé de la fonction publique, que j’ai questionné oralement le 18 mars dernier sur un autre sujet, m’a lui-même confirmé qu’un fonctionnaire territorial ne pouvait se voir imposer une tâche pour laquelle il n’avait pas été recruté.

Par ailleurs, cette astreinte, venant s’ajouter à un travail habituel, avant et après le service d’accueil, peut entraîner une trop grande amplitude d’horaire de travail, qui placerait le maire dans l’illégalité au regard du code du travail.

Le maire est donc autorisé à faire appel à des personnes n’appartenant pas à l’administration communale, retraités, membres d’associations, voire, plus absurde encore, des parents. Il est incité à constituer à l’avance un « vivier » de personnes susceptibles de présenter les « qualités nécessaires » à un encadrement sécurisé.

Ces listes doivent auparavant être transmises à l’inspection académique afin que celle-ci puisse notamment vérifier que les personnes en question ne figurent pas dans le fichier judiciaire des auteurs d’infractions sexuelles, le FIJAIS.

Premièrement, comment garantir que ces personnes listées seront disponibles le jour dit, c’est-à-dire plusieurs semaines, voire plusieurs mois après l’établissement de la liste ? Quelle sera la durée de validité de ce fichier, qui nécessitera forcément des mises à jour fréquentes ?

Deuxièmement, ces fichiers devront-ils être soumis à déclaration à la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL ?

S’agissant des « qualités nécessaires » exigées, je vais vous rapporter le point de vue du maire d’une commune rurale de mon département, qui me paraît bien résumer la situation. Il ne comprend pas que, pour conduire un tractopelle ou un engin de déneigement, ou accomplir la moindre intervention sur une installation électrique, une habilitation soit indispensable, alors que rien de tel n’est exigé pour encadrer des enfants !

Dans une même école, les enseignants non grévistes et leurs élèves travailleront-ils normalement, en présence ou à proximité du service d’accueil minimum dont l’unique activité, inévitablement bruyante, est axée sur les loisirs ?

Je profite de l’occasion qui m’est donnée aujourd’hui, monsieur le ministre, pour obtenir des réponses à des questions qui m’ont été souvent posées.

Concernant les locaux, les enseignants grévistes pourront-ils refuser l’accès à leur classe ? Le personnel assurant le service minimum d’accueil devra-t-il tenir le registre des présences ? Disposera-t-il des renseignements personnels concernant, notamment, la santé des enfants et les personnes habilitées à les prendre en charge à la sortie de l’école maternelle ?

Certes, la loi a prévu de transférer la responsabilité administrative de la commune à l’État. Mais, pour se prémunir en cas de faute, les intervenants occasionnels doivent-ils souscrire une assurance en responsabilité civile personnelle, à l’instar des enseignants ?

Voilà une loi dont l’application future comporte bien des incertitudes.

Monsieur le rapporteur, vous indiquez que le SMA a été mis en place dans près de 80 % des communes, alors que M. le ministre avance le pourcentage de 90 %.

Debut de section - Permalien
Xavier Darcos, ministre

Je le confirme !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Or, souvent, il n’a été mis en place que partiellement et, joli paradoxe, pour un petit nombre d’élèves accueillis. L’encadrement est donc souvent surévalué, ce qui peut se révéler à la fois rassurant, car les enfants ont été bien gardés, et inquiétant, car on est en droit de se demander à quoi sert la loi.

Cette loi instaure finalement un nouveau service public. Si l’on se réfère aux effectifs recensés, il est aujourd’hui peu utilisé. Mais qu’en sera-t-il demain ?

Monsieur le ministre, vous avez été maire : vous devez donc savoir que l’on recourt toujours peu, au début, à un nouveau service public ; son utilisation se développe progressivement.

Debut de section - Permalien
Xavier Darcos, ministre

J’espère bien que ce sera le cas, en l’occurrence ! Le dispositif est fait pour cela !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Si le service minimum est de plus en plus utilisé – ce qui pourra, me direz-vous, signifier qu’il était nécessaire –, …

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

… les communes seront-elles à même d’accueillir tous les élèves ? Avec un adulte pour quinze élèves, comme le prévoit la loi ? Je pense que cela va poser un problème.

Voilà une loi inutile.

Pourquoi se croire obligé de voter une loi au moindre événement ou au moindre caprice ?

Loin de moi l’idée que le Gouvernement aurait joué habilement en voulant casser ainsi les effets de la grève. Mais permettez-moi de rappeler le dispositif en vigueur avant le 20 août 2008, fondé sur des circulaires : le directeur d’école avait alors la charge d’organiser l’accueil, comme en attestent de nombreuses réponses ministérielles. En voici quelques-unes prises au hasard.

« L’article 2 du décret n°89-122 du 24 février 1989 modifié relatif aux directeurs d’école précise que le directeur d’école prend toute disposition utile pour que l’école assure sa fonction de service public. »

Ou encore : « En cas de grève du personnel enseignant, il appartient aux directeurs d’école, qui ont notamment pour mission d’organiser l’accueil et la surveillance des élèves, de rechercher des solutions pour les accueillir, que ce soit avec la participation d’enseignants volontaires, de services municipaux ou des associations de parents d’élèves. Dans l’hypothèse où aucune solution n’a pu être trouvée, les parents doivent être informés en temps utile que l’accueil ne pourra être assuré et que l’école sera fermée. »

Cela confirme bien que le directeur d’école ne doit pas être présent, contrairement à ce qui a pu être dit. En témoigne d’ailleurs une réponse explicite : « Le droit de grève est reconnu aux enseignants du premier degré, y compris aux directeurs d’école. »

Finalement, dans les faits, la nouveauté de la loi d’août 2008, c’est que le maire est désormais totalement responsable de l’accueil, en lieu et place de l’État.

Pour reprendre une expression un peu triviale, il semblerait que vous ayez pris un marteau-pilon pour écraser une mouche ! Comme pour le lundi de la Pentecôte, vous devrez revenir, un jour ou l’autre, sur cette loi inapplicable, tant sur le fond que sur la forme. Si vous ne le faites pas, croyez-moi, lorsque la majorité changera, nous le ferons !

J’en viens plus précisément à la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui et qui vise à exclure les communes de moins de 2 000 habitants du dispositif de service d’accueil des élèves d’écoles maternelles et élémentaires, soit une bonne partie des communes rurales.

Vous l’aurez compris, je vous confirme que le groupe socialiste est toujours opposé à la loi du 20 août 2008. D’ailleurs, nous avons déposé un amendement pour en demander l’abrogation ; j’y reviendrai donc au cours de la discussion des articles.

Il ne s’agit donc, dans l’article unique de ce texte, que d’exclure les communes de moins de 2 000 habitants. Mais pourquoi pas celles de 3 500, 5 000 ou 20 000 habitants ? Voire toutes les communes ? Car, comme vous l’avez indiqué, monsieur le ministre, les difficultés rencontrées et les risques concernent toutes les communes.

Enfin, sans m’attarder sur le sujet, car j’y reviendrai là encore lors de la discussion de l’article unique, je tiens à vous faire également faire part de nos réserves concernant le dernier alinéa de l’article unique, qui jette un trouble sur le rôle et la présence du directeur d’école en cas de grève.

Cette proposition de loi nous donne-t-elle pleinement satisfaction ? Non. Toutefois, comme l’indique M. Philippe Richert dans son rapport, « sur le fond, l’adoption de la présente proposition de loi ouvrirait alors la voie à la remise en cause de la compétence communale pour toutes les collectivités ». En l’espèce, je partage votre point de vue, monsieur le rapporteur.

Cette proposition de loi amorce en effet la démonstration de la fragilité du système et c’est pourquoi le groupe socialiste la soutient. Elle a le grand mérite d’enfoncer un premier coin pour faire éclater une loi populiste, irréaliste, inapplicable à terme et inutile.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.- Mme Jacqueline Gourault applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Monsieur le ministre, vous le savez, je n’ai pas voté la loi instituant un droit d’accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire ; je m’en étais alors expliquée.

Après avoir écouté vos propos, j’aimerais revenir sur quelques points.

Le fil rouge des réflexions en cours sur la réforme des collectivités territoriales, qu’il s’agisse de celles du comité Balladur ou de celles du groupe de travail sénatorial dont je fais moi-même partie, c’est la diversité des territoires. Il ressort du rapport du comité Balladur qu’il n’est pas possible d’appliquer les mêmes recettes partout sur le territoire, indistinctement à toutes les communes quelle que soit leur taille. Je m’étonne donc que l’on ne puisse reprendre ce principe lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre telle ou telle loi ou telle ou telle méthode d’organisation.

Tout à l'heure, vous avez dit qu’il ne saurait y avoir l’école de la ville et l’école de la campagne. Justement, je crois, pour ma part, qu’il faut s’appuyer sur cette diversité française pour répondre aux besoins des collectivités, car on ne peut apporter une réponse similaire dans les grandes métropoles et dans les très petites communes. Je souhaitais donc vous rendre attentif à cet élément du rapport Balladur.

Par ailleurs, selon vous, les associations d’élus auraient demandé ce service d’accueil en cas de grève. Je tiens à faire remarquer au passage qu’il n’existe d’ailleurs qu’une seule association réunissant tous les maires, même si elle comprend différentes branches. Quoi qu’il en soit, personne n’a jamais demandé un service minimum d’accueil. Vous l’avez institué dans les circonstances que vous connaissez encore mieux que moi !

Pour ma part, j’ai toujours proposé, en tant que maire, un service minimum d’accueil en cas de grève lorsque c’était nécessaire. Les élus savent se débrouiller et répondre aux besoins de leurs concitoyens.

Ainsi, lorsqu’un instituteur, sur les six ou sept instituteurs que comptait l’école, faisait en grève, on répartissait les enfants dans les autres classes. §Quand il y avait davantage de grévistes, on mettait en place un service de garderie, avec des personnes compétentes, afin d’aider les parents. Maintenant, pour assurer le service d’accueil, on prend presque la première personne venue pour garder les enfants, alors que, dans d’autres circonstances, il faut prévoir pratiquement un accompagnateur pour cinq enfants lors d’une sortie en bus ! Franchement, il y a là quelque chose d’un peu choquant !

Personnellement, je ne suis pas contre l’aide aux parents, au contraire, puisque je l’ai toujours fait ! Mais je ne comprends pas les raisons pour lesquelles on veut légiférer pour tout organiser au niveau central plutôt que de laisser les élus, dans cette République décentralisée – une décentralisation d’ailleurs consacrée par la Constitution –, s’organiser sur le terrain. Pourquoi ne pas reconnaître le savoir-faire des élus ? Vous avez demandé aux inspecteurs d’académie d’aider les maires. Mais enfin, monsieur le ministre, nous sommes assez grands pour organiser un service de ce genre !

Je vous le dis franchement, j’ai mis en place le SMA dans ma commune, parce que je suis respectueuse de la loi, mais la procédure est bien compliquée. Alors que tout se faisait très simplement auparavant, je suis maintenant obligée d’envoyer des fax ici et là, de communiquer l’identité des personnes qui gardent les enfants, leur nom, leur numéro de téléphone. J’irai même jusqu’à dire que c’est presque une usine à gaz que vous avez montée !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Enfin, vous avez invoqué l’article 40 de la Constitution. Mais comment pouvez-vous le faire ? C’est vous qui avez créé, par la loi, une dépense supplémentaire de l’État, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

… financée, à vous entendre, par les économies réalisées sur les salaires des personnels grévistes

Si l’on supprime aujourd'hui le SMA obligatoire dans les communes de moins de 2 000 habitants, quelle sera la dépense nouvelle pour l’État ? Ce sera au contraire une économie !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je suis donc stupéfaite que vous invoquiez l’article 40 de la Constitution !

Monsieur le ministre, je vous ai parlé très directement. Je ne comprends pas pourquoi le Gouvernement se braque dans cette affaire.

Pour ma part, je voterai cette proposition de loi, avec quelques autres collègues du groupe Union centriste, car, vous le savez, nous votons différemment selon nos convictions profondes. C’est d’ailleurs ce qui fait la particularité et le charme des centristes !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Mais j’espère que nous serons un certain nombre à voter ce texte, car, franchement, il est empreint de bon sens.

(Applaudissements sur certaines travées de l ’ Union centriste, ainsi que sur les travées du RDSE, du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Trois propositions de loi relatives à ce texte ont déjà été déposées au Sénat, dont celle que j’ai défendue au nom de mon groupe le 20 janvier dernier et qui tendait à l’abroger. Trois propositions de loi, c’est beaucoup, mais c’est justifié tant les difficultés entraînées par ce texte voté en urgence sont réelles. Car, nous le savons tous ici, ces difficultés ne sont pas le fruit de l’imagination de maires réfractaires.

Comme je l’avais souligné le 20 janvier la loi instituant un droit d’accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire, nous sommes face à une loi aux contours imprécis, ne fixant aucun taux d’encadrement, alors que sont

De nombreux maires ont conscience que les conditions de sécurité, de responsabilité et de qualité en matière d’encadrement ne sont pas réunies pour appliquer cette loi. De surcroît, ils rencontrent des difficultés pour trouver des personnels. Pour les communes de petite taille, notamment rurales, il suffit qu’un enseignant soit en grève pour que l’organisation de ce service incombe aux maires. Or, faute de personnel, cette obligation est impossible à respecter.

Ces problèmes se retrouvent dans les communes urbaines à forte densité, car le nombre d’écoles, et donc d’élèves, est important alors que l’effectif des personnels communaux mobilisables est insuffisant.

La proposition de loi dont nous débattons aujourd’hui fixe le seuil

Dans une proposition de loi déposée en octobre dernier, notre collègue Jean-Louis Masson a, pour sa part, fixé ce seuil à moins de 1 500 habitants. Toutefois, nous n’avions pu avoir ce débat le 20 janvier dernier, car la commission des affaires culturelles avait demandé au Sénat de se prononcer sur ses conclusions et non sur notre texte. De ce fait, les amendements déposés par nos collègues, dont celui de Pierre-Yves Collombat visant à introduire dans la loi une dérogation pour les communes de moins de 3 500 habitants, n’avaient pu être examinés.

Ce débat dérange, semble-t-il, au sein même de votre majorité.

En réalité, les aménagements de la loi que nous proposons tentent de préserver les petites communes, notamment rurales. Ils montrent bien que cette loi, telle qu’elle a été conçue et votée, n’est tout simplement pas applicable de manière égale sur tout le territoire.

Le Gouvernement a présenté ce service d’accueil aux parents comme un droit relevant du service public, interprétation qu’a d’ailleurs confirmée le Conseil constitutionnel dans sa décision du 7 août 2008.

Or les éléments constitutifs d’un service public sont loin d’être réunis puisque la loi porte en elle une inégalité de traitement des enfants. Elle ne leur garantit pas, notamment, d’être accueillis partout dans les mêmes conditions d’encadrement et de qualification. La notion de « qualités nécessaires » est en effet laissée à l’appréciation du maire. De fait, ces derniers sont contraints de faire avec les moyens du bord !

Le Gouvernement avait été amplement alerté sur ces points de blocage, tous pointés avec force en juillet dernier par nombre d’entre nous. Ces blocages ont du reste entraîné des recours devant les tribunaux contre les maires et vous ont ensuite conduit, monsieur le ministre, à adresser coup sur coup aux inspecteurs d’académie deux notes leur enjoignant d’aider les communes, notamment dans la constitution de la liste « vivier ».

De ce point de vue, le recours aux jeunes retraités de l’éducation nationale a provoqué de l’indignation, d’autant que le SMA a d’abord été instauré par le Gouvernement en prévision de conflits qui l’opposeraient à ses fonctionnaires, conflits qui découlent de la dégradation des conditions du bon exercice du service public de l’éducation.

Que penser d’une inspection académique qui sollicite les élèves, majeurs bien sûr, d’un lycée professionnel à Angers en formation de brevet d’études professionnelles sanitaires et sociales et d’aide-soignant ?

Les communes se heurtent à une autre difficulté : anticiper le nombre d’enfants à accueillir.

Sur cette question, dans votre note du 25 février, vous incitez les inspecteurs d’académie à veiller « à ce qu’au sein des écoles concernées par la mise en œuvre du droit d’accueil, un relevé du nombre prévisionnel d’élèves désireux de bénéficier du droit d’accueil puisse être établi ».

Or la loi précise bien, en son article 5 : « La commune met en place le service d'accueil à destination des élèves d'une école maternelle ou élémentaire publique située sur son territoire lorsque le nombre des personnes qui ont déclaré leur intention de participer à la grève en application du premier alinéa est égal ou supérieur à 25 % du nombre de personnes qui exercent des fonctions d'enseignement dans cette école.

« Les familles sont informées des modalités d'organisation du service d'accueil par la commune et, le cas échéant, par les maires d'arrondissement. »

La loi ne dit pas que les familles doivent faire part de leur intention de bénéficier du service d’accueil.

Pourtant, le compte rendu fait par l’Association des maires ruraux de France, l’AMRF, d’une rencontre qu’elle a eue avec vous le 28 janvier dernier indique qu’un compromis à destination des communes de moins de 3 500 habitants serait intervenu, compromis aux termes duquel les communes de moins de 3 500 habitants ne seraient obligées d’organiser un service d’accueil qu’à partir de la volonté déclarée des familles d’en bénéficier. Le délai préalable dans lequel les familles devraient formuler expressément leur demande reste à déterminer.

Depuis cette rencontre, vos services et l’AMRF travailleraient à la définition – je cite ici l’Association – « des modalités concrètes d’application qui seraient inscrites dans un texte d’application de la loi ».

Des aménagements de la loi ont donc bien déjà été envisagés pour les communes rurales.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Pourtant, le 20 janvier dernier, devant cette assemblée, en évoquant, monsieur le ministre, le souhait exprimé par certains de distinguer le cas des communes rurales de celui des zones urbaines, vous aviez expliqué – et vous venez de le redire – que, « en créant une telle inégalité, nous nous heurterions à un principe constitutionnel », ...

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

... avant d’ajouter : « Comment prétendre en effet qu’un enfant des champs ait moins besoin de ce service qu’un enfant des villes ? »

Il y a donc les principes et la réalité !

Cette réalité, c’est celle d’une mauvaise loi...

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

... qui, à notre avis, doit toujours être abrogée.

Pour autant, nous estimons aujourd’hui, comme M. Philippe Richert l’indique dans son rapport, que l’adoption de cette proposition de loi « ouvrirait la voie à la remise en cause de la compétence communale pour toutes les collectivités ». Elle constituerait donc une première brèche pour remettre en cause le service d’accueil dans son ensemble.

Cette occasion d’ouvrir une brèche, que nous considérons comme une première étape, nous avons décidé de la saisir ; c’est pourquoi nous soutenons cette proposition de loi.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi défendue par notre collègue du groupe du RDSE soulève des questions légitimes quant aux contraintes spécifiques rencontrées par les petites communes dans la mise en place du service minimum d’accueil.

Le groupe UMP a parfaitement conscience de ces contraintes et comprend la motivation de la demande de dérogation pour les communes de moins de 2 000 habitants.

Pour autant, nous estimons que toute évolution de cette loi doit être compatible avec son fondement, à savoir la nécessité de permettre l’égalité entre tous les parents : ceux qui ont les moyens de faire garder leurs enfants en cas de grève et ceux dont les revenus ou les conditions de vie les en empêchent.

Pour nous, cet égal accès de tous au service public est une condition indispensable pour que celui-ci soit considéré comme tel. Or ce principe risquerait d’être remis en cause par un traitement différencié entre les parents en fonction de la population des communes où ils résident.

En outre, il me semble nécessaire de rappeler que de nombreuses avancées ont été réalisées depuis la promulgation de la loi, le 21 août 2008. Nous avons eu l’occasion de les évoquer lors de l’examen de la proposition de loi de nos collègues du groupe CRC-SPG visant à abroger la loi qui a institué le SMA. Permettez-moi néanmoins de revenir sur ces avancées, qui ont pour objet de prendre en compte les problèmes que pouvaient rencontrer les communes, notamment les plus petites d’entre elles.

En premier lieu, le décret instaurant une négociation préalable, paru le 2 décembre 2008, a été pour la première fois mis en application à l’occasion de la grève du 29 janvier dernier. Cette négociation préalable permet de mieux anticiper l’ampleur potentielle de la grève grâce au dispositif d’alerte. Les inspecteurs d’académie peuvent ainsi évaluer avec davantage de précision la portée du conflit, et parfois l’apaiser, voire y mettre fin. C’est le cas dans ma commune.

En second lieu, le dialogue et la concertation avec les élus, par l’intermédiaire des associations des maires, vous ont amené, monsieur le ministre, à adresser une instruction aux inspecteurs d’académie pour aider les communes concernées à faire face aux difficultés suscitées par les grèves.

Votre instruction demande aux inspecteurs, premièrement, de procéder à un comptage précis du nombre de grévistes et de transmettre au fur et à mesure ces données aux communes, deuxièmement, d’aider les communes qui auraient des difficultés à constituer un vivier de personnes susceptibles de participer à l’accueil des élèves et, troisièmement, de transmettre, dans la mesure du possible, des données prévisionnelles sur le nombre d’enfants qui pourraient être accueillis.

En troisième lieu, dans l’esprit d’apaisement qu’a fait valoir le Président de la République lors du dernier congrès des maires, vous avez, monsieur le ministre, conjointement avec le ministre de l’intérieur, envoyé une instruction aux préfets leur demandant de mettre fin aux actions contentieuses engagées contre les municipalités qui n’avaient pas fait connaître d’opposition de principe à l’application de la loi, mais qui n’avaient pas pour autant réussi à mettre en place le service minimum.

Car il convient de bien faire la différence entre certaines grandes communes qui ne voulaient pas en place ce service et celles qui se heurtaient, à cet égard, à des difficultés objectives. Vous avez donc eu raison, monsieur le ministre, de donner de telles instructions aux préfets pour calmer le jeu.

Comme l’avait souhaité notre excellent rapporteur, Philippe Richert, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

... vous avez mis en place un comité de suivi de la loi, afin que chacun puisse s’exprimer et signaler ses éventuelles difficultés, de manière que, à partir de la confrontation des idées et des pratiques des uns et des autres, puissent être esquissées des solutions.

Ces aménagements sont ainsi susceptibles de répondre aux préoccupations mises en avant par nos collègues du groupe du RDSE, dont la présente proposition de loi manifeste à l’évidence le souci qu’ils ont de l’intérêt général.

Les dernières grèves ont, me semble-t-il, apporté un début de réponse à ces inquiétudes : près de 90 %, avez-vous dit, monsieur le ministre – mais, pour ma part, je dirais plutôt 85 % –, des communes qui devaient mettre en œuvre ce service y sont effectivement parvenues à cette occasion, dont de nombreuses communes de moins de 2 000 habitants, comme l’a indiqué notre rapporteur, ce qui montre que cette loi est parfaitement applicable sur l’ensemble du territoire.

Mes chers collègues, si nous votions cette proposition de loi, nous risquerions de compromettre le principe d’égalité qui est à la base de cette loi et m’a personnellement conduit à la voter : égalité entre les enseignants des petites communes et ceux des autres – avec cette proposition de loi, en effet, les uns et les autres ne seraient plus soumis aux mêmes obligations –, égalité entre les familles, égalité entre les communes. C’est pourquoi le groupe UMP souhaite le rejet de cette proposition de loi.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion de l’article unique.

L'article L. 133-3 du code de l'éducation est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« L'obligation de service d'accueil n'est pas opposable aux communes de moins de 2 000 habitants.

« En outre, elle n'est opposable dans les autres communes que sous réserve du respect, par le directeur de chaque établissement ou celui qui le remplace, de ses obligations de service en ce qui concerne l'accueil des élèves. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

Je voudrais, en cet instant, préciser la position de l’une des collègues de notre groupe.

Mme Françoise Laborde n’avait pas voulu, au départ, cosigner cette proposition de loi. La raison était simple : elle était, par conviction, opposée au principe du service minimum d’accueil, et cela essentiellement pour deux motifs.

D’une part, ce dispositif remet en cause le droit de grève des enseignants et, surtout, la sécurité des élèves. En effet, aucune garantie de compétences n’a été exigée pour les personnels d’encadrement qui pallient l’absence des grévistes.

D’autre part, le SMA alourdit inutilement le poids des responsabilités que doivent assumer les collectivités locales.

Toutefois, notre collègue rejoint désormais le point de vue des cosignataires de cette proposition de loi.

Jusque-là, selon les circulaires d’application des textes réglementaires, les directeurs d’école étaient seuls responsables de l’organisation du service pendant le temps scolaire ainsi que de l’information des parents et des autorités communales. Ils s’acquittaient très bien de cette tâche.

Inutile de mettre en place un dispositif aussi compliqué et contesté pour résoudre les problèmes ponctuels qui peuvent se poser.

Inutile d’accroître encore le fardeau des collectivités locales, en particulier les plus petites d’entre elles, qui, sur le terrain, rencontrent le plus de difficultés à garantir ce service minimum d’accueil.

La proposition de loi présentée par le groupe du RDSE assouplit le dispositif pour les communes de moins de 2 000 habitants. Ces dispositions sont d’ailleurs attendues par les associations des maires, comme l’a tout à l’heure rappelé l’un de nos collègues.

C’est donc en pensant au sort des 495 communes de moins de 2 000 habitants que compte le département de la Haute-Garonne que notre collègue Françoise Laborde, dans un souci de pragmatisme, s’est rapprochée de notre position.

Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

Monsieur le ministre, je n’étais pas encore parlementaire lorsque le texte instituant un droit d’accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire a été présenté au Sénat. Si je l’avais été, je crois vraiment que je ne l’aurais pas voté.

En effet, comme l’a dit Mme Anne-Marie Escoffier, ce texte a été élaboré sans concertation et de manière précipitée. Alors que j’étais en campagne pour les élections sénatoriales à cette période, j’ai d’ailleurs pu mesurer sur le terrain l’inquiétude des maires.

Pourtant, contrairement à Mme Escoffier, en tout cas lorsqu’elle se fait l’interprète de Mme Laborde, je suis, moi, extrêmement attaché au fait que les enfants puissent être accueillis les jours de grève. En effet, le droit de grève est, certes, un droit constitutionnel, mais le droit de travailler aussi. Par conséquent, il me paraît tout à fait important de permettre aux parents qui ont des enfants dont les enseignants sont en grève d’aller travailler.

Le premier reproche que je fais à cette loi est de transférer à d’autres une obligation de service minimum qui devrait normalement incomber à l’État : une fois de plus, celui-ci se décharge sur les communes.

Comme me l’ont dit nombre de maires au cours de ma campagne, heureusement qu’on ne nous demande pas d’aller faire les piqûres en cas de grève à l’hôpital ou de conduire les locomotives en cas de grève à la SNCF !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

Cela illustre bien le côté choquant et quelque peu surréaliste de cette loi, qui constitue la première raison de mon hostilité résolue à son égard.

Mais il est une deuxième raison, dont je veux m’expliquer.

Il me paraît très bien que les communes assurent l’accueil des élèves, quand elles le peuvent. Pour ma part, maire d’une commune de près de 12 000 habitants, j’effectue cet accueil depuis des années, comme mon prédécesseur le faisait avant moi, et cela ne me cause pas de grandes difficultés.

Mais comment le maire d’une toute petite commune qui ne dispose pas de personnel peut-il s’organiser ? Au reste, le Président de la République, dans les propos auxquels il a déjà été fait allusion aujourd'hui, a lui-même repris cette interrogation à son compte.

En revanche, je trouve scandaleux que les enfants scolarisés à Paris n’aient pas été accueillis lors de la grève qui s’est déroulée jeudi dernier.

Traiter de la même manière petites et grandes communes, ce n’est pas normal ! Invoquer l’égalité constitutionnelle dans ce domaine ne tient pas, car, on le sait bien, celle-ci ne vaut que pour des situations comparables. Sur ce point, la jurisprudence du Conseil constitutionnel est d’ailleurs tout à fait claire.

A priori, je suis donc tenté de voter la présente proposition de loi. Deux aspects, cependant, me gênent.

Premièrement, le seuil de 2 000 habitants me paraît tout de même très élevé. Un élu d’une commune d’au moins 1 000 habitants est, selon moi, en mesure d’assumer cette obligation d’accueil.

Deuxièmement, aucune solution de substitution n’est proposée. Pour ma part, j’aurais préféré que l’État soit mis devant ses responsabilités et qu’il assure lui-même le service minimum d’accueil en cas de grève.

À ce stade du débat, je suis donc quelque peu partagé sur cette proposition de loi. Cependant, quand j’entends M. le ministre nous dire, en substance, « tout va très bien, madame la marquise », j’avoue avoir un peu de mal à le suivre ! J’aimerais recevoir des réponses plus précises et savoir ce qui va être fait concrètement.

Aujourd’hui, des maires de mon département, de passage à Paris, m’ont raconté spontanément les difficultés qu’ils avaient rencontrées la semaine dernière sur le terrain. Pour ma part, je doute que l’on prenne vraiment en compte leurs préoccupations.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 1 est présenté par MM. Domeizel, Lagauche, Bérit-Débat, Collombat et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 4 est présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rédiger comme suit cet article :

La loi n° 2008-790 du 20 août 2008 instituant un droit d'accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire est abrogée.

La parole est à M. Yannick Bodin, pour présenter l’amendement n° 1.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Bodin

Lors des débats précédant l’adoption de la loi du 20 août 2008, nous avions longuement développé les arguments juridiques qui nous semblaient s’opposer à la mise en place du dispositif en question, en confrontant deux droits à valeur constitutionnelle, à savoir le droit de grève et le principe de continuité du service public. Or le Gouvernement a choisi de « casser » le premier pour, prétendument, assurer le second.

Le service d’accueil les jours de grève ne permet pas d’assurer la continuité du service public puisqu’il s’agit en fait de remplacer le service public d’éducation par un service d’accueil.

Outre ces raisons juridiques, nous avions également dénoncé, en juillet dernier, tous les motifs d’ordre organisationnel et financier qui nous semblaient faire du dispositif proposé une usine à gaz : responsabilités multiples mal définies, laps de temps dérisoire pour permettre aux communes de s’organiser, interrogations sur les personnes à même d’accueillir les enfants, absence d’exigences sur les qualifications minimales requises pour ces encadrants et compensation financière de l’État imprécise.

Tous ces points concernent d’ailleurs l’ensemble des communes. Et ceux qui pensent qu’il est plus facile d’organiser un service d’accueil dans une grande ville plutôt que dans une petite commune se trompent complètement ! Bien que je ne veuille pas allonger le débat sur cette question, j’insiste cependant sur le fait qu’il est extrêmement compliqué d’organiser un service d’accueil dans une ville de 50 000 ou de 100 000 habitants, en s’appuyant sur des personnels compétents et reconnus comme tels.

L’an dernier, les raisons de notre refus de cautionner cette cote mal taillée étaient nombreuses. Depuis, les faits nous ont donné raison, l’application de la loi se révélant ubuesque.

Les contentieux fleurissent ici et là, souvent nourris par des représentants de l’État un peu trop zélés. Ainsi certaines communes ont-elles été assignées en référé devant les tribunaux administratifs, lesquels ont prononcé à leur encontre des injonctions assorties d’astreintes financières allant jusqu’à 10 000 euros par heure de grève.

Parfois, en revanche, les préfets, souvent sur les mêmes motifs, ont heureusement été déboutés, les tribunaux établissant le constat que, si la loi est inappliquée, c’est tout simplement parce qu’elle est inapplicable !

Je remarque d’ailleurs, monsieur le ministre, que les préfets sont devenus beaucoup plus prudents, après le mouvement de grève du 19 mars dernier. « Évidemment, allez-vous me répondre, puisque tout a bien marché ! » Évidemment, la meilleure manière de considérer que tout va bien, c’est de fermer les yeux ! Pourtant, les problèmes demeurent.

Nous avions entrevu un espoir d’aménagement du dispositif du service minimum d’accueil, à défaut de son abrogation, lorsque le Président de la République, lors de son discours devant le congrès de l’Association des maires de France, le 3 décembre 2008, avait annoncé qu’il était prêt à revoir les modalités d’application de la loi, notamment pour les petites communes rurales.

Magie du verbe, rudesse des faits : force est de constater que, pour l’heure, le Gouvernement n’a envoyé aucun message supplémentaire qui permettrait aux maires confrontés au casse-tête du SMA d’espérer une issue…

Même la proposition, bien modeste, qui vous est faite aujourd’hui ne vous sied point !

Nous préférons donc demander l’abrogation pure et simple de ce dispositif inapplicable et source de contentieux. Peut-être y reviendrons-nous un jour, car je pense, monsieur le ministre, que la loi du 20 août 2008 a d’ores et déjà du plomb dans l’aile !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter l’amendement n° 4.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Comme je l’ai rappelé lors de la discussion générale, mon groupe continue de défendre le principe de l’abrogation de la loi instituant le SMA.

J’insiste une nouvelle fois sur les difficultés rencontrées par les maires pour l’appliquer. Ce qui est vrai pour les maires des très petites communes, notamment rurales, l’est aussi pour ceux des communes urbaines, moyennes aussi bien que grandes. Tous sont confrontés à la même interrogation : comment assurer ce service, avec un personnel suffisant, qualifié et compétent pour encadrer, en toute sécurité, des enfants âgés de deux à dix ans ?

En effet, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, la question des conditions d’application du service d’accueil est tout de même essentielle.

C’est la raison pour laquelle j’attends avec une grande impatience le rapport d’évaluation que le Gouvernement doit déposer avant le 1er septembre prochain sur le bureau de notre assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La commission est bien évidemment défavorable à ces deux amendements identiques.

M. Bodin a bien compris que la proposition de loi déposée par le groupe du RDSE ne règle pas le problème qu’il pose. Il estime en effet que le SMA entraîne des difficultés dans toutes les communes, qu’elles soient petites ou grandes, et que, de toute façon, ce n’est pas aux communes de régler des problèmes dont la solution, à ses yeux, incombe à l’État.

Nous en avons discuté longuement. Comme je l’ai dit tout à l’heure, si l’on supprime le SMA dans les communes de moins de 2 000, de moins de 3 000 ou de moins de 5 000 habitants, la même question pourra se poser pour les très grandes agglomérations.

C’est la raison pour laquelle j’avais indiqué que le principe de la suppression de ce service d’accueil des élèves les jours de grève n’était pas envisageable. Nous souhaitons que ces élèves puissent être accueillis, pour rendre service aux familles.

Je le répète, cette demande, à laquelle nous avons apporté une réponse très claire, nous avait été expressément adressée. J’ai rencontré, à titre personnel, les associations familiales qui avaient souhaité que ce service soit mis en place.

C’est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements de suppression du service d’accueil dans l’ensemble des communes.

Debut de section - Permalien
Xavier Darcos, ministre

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous imaginez bien que je pourrais difficilement émettre un avis favorable sur des amendements qui visent à abroger la loi du 20 août 2008 !

Je profite de l’occasion qui m’est donnée pour dire aux divers intervenants que nous ne méconnaissons pas les difficultés qui se posent aux communes les plus petites. Voilà d’ailleurs pourquoi nous avons mis en place une commission chargée de nous faire des propositions. Nous serons ainsi en mesure de vous remettre, au mois de septembre prochain, un rapport qui analysera la façon dont la situation pourra éventuellement être améliorée par nos propres services, en accord avec les élus.

Par ailleurs, nous avons passé un certain nombre d’accords avec l’Association des maires ruraux de France, ce qui explique que nous ayons renoncé à de nombreux contentieux, nous fondant, comme l’a rappelé Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur le principe selon lequel les maires ont surtout à connaître des personnes ayant l’intention d’utiliser le service, ce qui permet un meilleur calibrage et une application plus souple.

Monsieur Bodin, il serait absurde d’abroger une loi au moment où elle commence précisément à donner satisfaction puisqu’elle a permis, voilà quelques jours, d’assurer l’accueil de quelque 450 000 élèves, ce qui n’est pas rien ! Nous avons rendu service à un grand nombre de familles, et ce dans un contexte de grève générale qui rendait l’application de la loi encore plus difficile.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 2, présenté par M. Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Supprimer le dernier alinéa de cet article.

La parole est à M. Yannick Bodin.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Bodin

Le second alinéa du texte proposé par l’article unique conditionne l’obligation d’organiser le service d’accueil dans les communes de plus de 2 000 habitants au « respect, par le directeur de chaque établissement ou de celui qui le remplace, de ses obligations de service en ce qui concerne l’accueil des élèves ».

La lecture de l’exposé des motifs de la proposition de loi, supposé nous éclairer sur ces « obligations de service », précise : « Depuis la loi Jules Ferry, le directeur de l’école doit être présent et accueillir les élèves même s’il est gréviste. Aussi, la présente proposition de loi impose la présence du directeur d’établissement ou de son représentant dans l’école. »

Cette fameuse obligation de présence d’un directeur gréviste dans son école ne repose, à ma connaissance, sur aucune base légale. J’ai bien relu non pas « la », mais les lois Jules Ferry, et je me suis aperçu qu’aucune n’abordait ce problème : ni les deux lois du 16 juin 1881, l’une relative aux titres de capacité de l’enseignement primaire, l’autre établissant la gratuité absolue de l’enseignement primaire public, ni celle du 28 mars 1882, qui rend l’école obligatoire, ni celle du 30 octobre 1886, qui porte sur l’organisation de l’enseignement primaire.

Le seul texte réglementant ce rôle du directeur d’école était la circulaire n° 81-141 du 26 mars 1981, qui a été abrogée par la circulaire n° 81-222 du 5 juin 1981, d’après le Bulletin officiel de l’éducation nationale n° 23 du 11 juin 1981. Le décret relatif aux fonctions, à la nomination et à l’avancement des maîtres-directeurs du 2 février 1987, qui remettait en cause, dans les faits, le droit de grève des directeurs d’écoles, a également été abrogé par le décret du 24 février 1989.

Je rappelle que le directeur d’une école maternelle ou élémentaire n’est pas chef d’établissement. Lorsqu’il est en grève, il n’est aucunement tenu de rester à l’école pour s’assurer que tout va bien : il est en grève !

L’organisation du SMA, qu’il s’agisse du dispositif légal ou de la circulaire d’application du 26 août 2008, ne modifie en rien ces règles. Le directeur est seulement tenu d’informer le maire et les parents d’élèves de la situation de grève et de l’éventuelle fermeture de l’école.

Il est donc tout à fait inopportun de laisser croire, par le biais d’un alinéa dans une loi visant précisément à limiter l’obligation de service d’accueil les jours de grève, que les directeurs d’école grévistes devraient suppléer ou seconder l’autorité municipale, en garantissant eux-mêmes l’accueil des enfants. Cette disposition serait, certes, d’une grande aide pour de nombreux élus, je le comprends bien, mais nous nous y opposons, au nom du respect du droit de grève des directeurs d’école.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La commission étant défavorable à l’ensemble de la proposition de loi, elle est donc bien évidemment défavorable à cet amendement, ce qui n’ôte rien à la pertinence des remarques que M. Yannick Bodin vient de formuler sur l’alinéa ici visé.

Selon moi, il s’agit surtout d’un amendement d’appel destiné à M. le ministre, pour lui permettre de préciser un certain nombre d’éléments.

Debut de section - Permalien
Xavier Darcos, ministre

Bien entendu, le Gouvernement est défavorable à un amendement portant sur un texte auquel il est globalement défavorable.

Sans vouloir être désobligeant à l’égard des auteurs de cette proposition de loi, je dois dire que cet article unique est mal rédigé dans la mesure où il évoque des « directeurs d’établissement », alors que les directeurs d’école n’ont pas cette qualité, ainsi que M. Bodin l’a fait observer.

Monsieur Bodin, vous avez fait référence au décret du 24 février 1989, qui définit les missions des directeurs d’école et qui fait autorité en la matière. Les directeurs d’école sont statutairement des professeurs des écoles, à la différence des principaux de collège ou des proviseurs de lycée qui sont, pour leur part, des chefs d’établissement. Les directeurs d’école disposent donc pleinement du droit de grève.

Vouloir les en priver par la réquisition ou par tout autre moyen, en les obligeant à assurer un accueil des élèves serait non seulement injuste et inopportun, mais surtout parfaitement inconstitutionnel. Je ne souscris donc pas à cette idée.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Jacqueline Gourault, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Monsieur le rapporteur, vous ne pouvez pas dire de façon schématique que les partisans du service minimum sont soucieux des intérêts des familles tandis que ses adversaires sont indifférents à ces mêmes intérêts.

Je l’ai dit, dans ma commune, lorsque cela s’est révélé nécessaire, j’ai toujours accueilli les enfants. Il ne faut donc pas simplifier à l’excès : c’est vraiment désagréable.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je ne prétends pas que ceux qui sont défavorables au droit d’accueil ne se soucient pas des problèmes des familles ou ne souhaitent pas que les enfants soient pris en charge.

C’est comme si l’on disait que les sénateurs qui ont voté en faveur du texte sur le droit d’accueil ne sont pas sensibles à la situation des communes ou des élus !

Je ne veux donner de leçon à personne, mais il faut que chacun fasse l’effort d’écouter les autres. Tout élu, dès lors qu’il siège à la Haute Assemblée, possède une expérience de terrain et une bonne connaissance des dossiers, qu’il s’agisse d’éducation nationale ou de fonctions électives.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Charles Gautier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Je voterai contre ces amendements et cet article unique pour une raison simple : lorsqu’on a la volonté de répondre à l’attente des familles, on trouve des solutions. Le texte que nous avons adopté l’an dernier est pragmatique ; il fixe des grandes règles et permet, à travers des réponses adaptées et variables selon la taille de la commune, de satisfaire ce besoin d’accueil dans les écoles.

Je suis maire depuis plus de vingt ans et, comme d’autres, j’ai toujours mis en place ce service sans rencontrer de difficultés, avant même que la loi soit votée.

Lors des deux dernières grèves, dans mon département, une très grande majorité de communes a mis en place ce service d’accueil. La plus grande ville, qui compte 105 000 habitants, comme la plus petite, qui en compte 1 500, ont accueilli les enfants. Les quelques villes qui ne l’ont pas fait sont toutes dirigées par des communistes ou des socialistes : c’était donc pour des raisons strictement politiques.

Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

.Monsieur Biwer, ainsi que vous me le demandez, je vais vous donner la parole pour explication de vote, mais je me permets de vous inviter à la brièveté : songez à ceux, sénateurs et personnels des services, qui travaillent sans interruption depuis quinze heures trente, alors même que la séance de ce matin ne s’est achevée qu’à quatorze heures passées…

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Biwer

Monsieur le président, vous me permettrez à votre tour de souligner que, en tant qu’élus et citoyens, nous sommes aussi quelquefois amenés à travailler, sans regimber, plus longtemps que nous ne l’avions prévu. N’oublions pas que nous sommes là au service des uns et des autres.

Monsieur le ministre, en tant que maire – et c’est un mandat que j’exerce depuis fort longtemps ! –, j’ai toujours appliqué la règle selon laquelle chacun assume ses responsabilités : l’éducation à l’État, le logement à la commune, etc.

J’ai souvent constaté qu’il était souvent bien plus facile de régler ce que j’appellerai les problèmes d’intendance dans les communes rurales, où les rapports humains sont plus proches que dans les grandes villes.

J’ai toujours pensé que, pour les communes rurales de moins de 1 000 ou de 2 000 habitants, les difficultés venaient non pas de l’obligation d’accueillir les élèves, mais de la manière dont on a entendu nous imposer l’organisation de cet accueil. Dès lors que nous sommes libres de nous organiser, nous entrons dans un système que je qualifierai de quasi périscolaire. De nombreuses activités périscolaires étant organisées au profit des familles et des enfants, je ne vois pas pourquoi il ne devrait pas continuer à en être ainsi.

Monsieur le ministre, vous avez évoqué à plusieurs reprises la situation des maires ruraux. Je puis vous dire, à mon modeste niveau de président de l’association des maires de mon département, que nous avons la volonté de fournir un service à ceux qui ont en ont besoin.

Je voterai contre ces amendements parce que je considère que nous pouvons agir efficacement, à notre manière, sur le terrain.

Applaudissements sur certaines travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je mets aux voix les amendements identiques n° 1 et 4.

Je suis saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe CRC-SPG, l'autre, du groupe du RDSE.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 135 :

Le Sénat n'a pas adopté.

Je mets aux voix l'amendement n° 2.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble de la proposition de loi.

Je suis saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe du RDSE, l'autre, du groupe CRC-SPG.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 136 :

Le Sénat n'a pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

J’informe le Sénat que j’ai été saisi de la question orale avec débat suivante :

n° 31 - Le 2 avril 2009 - Mme Christiane Demontès attire l’attention de Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi sur le bilan de la politique de défiscalisation des heures supplémentaires.

L’emploi est au cœur des préoccupations de nos concitoyens. Comment pourrait-il en être autrement lorsqu’après 92 000 demandeurs d’emplois de plus au mois de janvier, 72 200 autres se sont ajoutés en février ? À ce rythme, le nombre de chômeurs supplémentaires atteindra le million en fin d’année. Par ailleurs, les destructions d’emplois n’auront jamais été aussi importantes. On est donc bien loin du « travailler plus pour gagner plus ».

Face à cette crise qui ne cesse de s’approfondir, le Gouvernement a choisi de ne pas opérer de changement en matière de politique de l’emploi. Fidèle au credo néolibéral, le Gouvernement maintient la politique de défiscalisation des heures supplémentaires mise en œuvre par l’article 1er de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007, dite loi TEPA. À ce titre, et au lieu d’embaucher, ce sont 4, 3 milliards d’euros qui ont été dépensés l’an dernier pour encourager les entreprises à faire effectuer des heures supplémentaires par leurs propres salariés. Au dernier trimestre de 2008, ce volume horaire représentait l’équivalent de 90 000 emplois de plus par rapport au dernier trimestre de 2007. Au-delà, cette politique d’exonération impacte nécessairement les finances publiques, qui enregistreront, selon toute vraisemblance, un déficit voisin de 6 % du PIB à la fin de 2009.

La crise est encore devant nous. Aussi, elle lui demande de l’informer de l’impact financier et de l’impact sur l’emploi que représente, depuis sa mise en application, la défiscalisation des heures supplémentaires.

déposée le 26 mars 2009 – annoncée en séance publique le 26 mars 2009

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Conformément aux articles 79, 80 du règlement, cette question orale avec débat a été communiquée au Gouvernement et la fixation de la date de la discussion aura lieu ultérieurement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

J’informe le Sénat que la question orale n° 485 de M. Jean-Pierre Godefroy est retirée du rôle des questions orales, à la demande de son auteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 31 mars 2009 :

À neuf heures trente :

1. Questions orales.

À quinze heures et le soir :

2. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de finances rectificative pour 2009 (297, 2008-2009).

Rapport de M. Philippe Marini, fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation (306, 2008-2009).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée à vingt et une heures.