Intervention de Nicole Bricq

Réunion du 26 mars 2009 à 15h30
Bouclier fiscal — Rejet d'une proposition de loi

Photo de Nicole BricqNicole Bricq :

Monsieur le rapporteur général, cette fuite en avant vous conduit à refuser le principe même d’une « surtaxation » de solidarité pour les revenus supérieurs, que nous défendrons dans un amendement de repli et à laquelle certains membres de la majorité présidentielle sont favorables.

L’argument de la concurrence étrangère tient de moins en moins au fur et à mesure que les gouvernements européens et nord-américain prennent des mesures visant à plafonner les rémunérations ou à limiter la part variable par une fiscalité dissuasive. Cette part variable a, on le sait, un lien direct avec la crise financière. Elle a fonctionné comme un pousse-au-crime, entraînant toutes les prises de risque, même les plus irresponsables.

Si nous ne prenons aucune mesure législative, lorsque la crise aura été surmontée – ce n’est malheureusement pas demain la veille –, toutes les vannes se rouvriront. Il faut prendre conscience que, dans le bouleversement actuel, ce modèle est obsolète.

Le second volet de la proposition de loi du groupe CRC-SPG traite des rémunérations des dirigeants d’entreprise. Il y a en effet un lien direct entre le bouclier fiscal et ces rémunérations.

Dès la loi de finances rectificative d’octobre 2008, les sénateurs du groupe socialiste ont dénoncé – ils n’étaient d’ailleurs pas les seuls – l’absence de contreparties réelles sur le volet « rémunérations » à l’octroi de la garantie de l’État ou de fonds propres. Nous avons inscrit notre proposition de loi à l’ordre du jour réservé de la séance du 4 novembre, mais, ce jour-là, la majorité sénatoriale a refusé d’aller au-delà de la discussion générale.

Toutefois, M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois, qui assumait alors les fonctions de rapporteur, a concédé un suivi de la mise en œuvre du code de bonne conduite auquel la majorité s’en était remise. Il s’agissait bien entendu du code de bonne conduite du MEDEF et de l’AFEP, l’association française des entreprises privées. M. Hyest a organisé une audition le 11 mars. Mme Parisot y a tenu son credo habituel : le code de bonne conduite suffit !

À ce jour, je ne crois pas qu’elle ait changé d’avis. Elle ne souhaite ni loi ni modification du code de bonne conduite.

Ce code de bonne conduite, je l’ai lu. Il prévoit que, « en cas de non-application d’une partie de ces recommandations, » – au demeurant fort vagues – « il revient au conseil d’administration et de surveillance d’en expliquer les raisons selon le principe appliquer ou s’expliquer ». Les explications ne valant évidemment pas sanction et encore moins restitution, les salariés comme les actionnaires seront toujours lésés par les écarts de conduite.

Faudra-t-il attendre que la jurisprudence se prononce pour combler le vide législatif ? Il y a des parties prenantes lésées, je viens de le rappeler. Aujourd’hui, deux actions sont en cours : une en appel concernant Rhodia et une au sujet des indemnités de M. Daniel Bernard, ancien président-directeur général de Carrefour. Pour l’heure, il y a un vide juridique, et la jurisprudence sera amenée à se prononcer sur l’action qui a été intentée par les actionnaires.

Au cours des dix dernières années, la rémunération des mandataires sociaux a progressé de manière linéaire de 15 % – sans rapport donc avec le moindre critère de performance –, alors que, dans le même temps, la rémunération des salariés n’augmentait que de 3 %.

On voit bien que ces modes de rémunération accentuent l’écart entre le haut et le bas de l’échelle.

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