Cet amendement appelle de notre part plusieurs observations.
Notre proposition de loi n’a pas vocation à résoudre l’ensemble des problèmes que soulève notre système fiscal, notamment celui qu’évoque l’exposé des motifs de l’amendement : la multiplication des dispositifs dérogatoires au droit commun dont notre droit fiscal est truffé.
Je dirai quelques mots sur cet amendement, afin que le débat soit au moins ouvert.
L’amendement n° 15 a un caractère d’orientation, voire de déclaration d’intention, que nous approuvons par principe. Pour autant, certains points méritent d’être relevés.
La législation fiscale de notre pays est devenue, au fil du temps, parfaitement incompréhensible. Pour tout dire, il semblerait qu’elle soit la plus complexe et la plus sophistiquée des législations fiscales de tous les pays développés, et les dernières lois de finances, initiales comme rectificatives, ont apporté leur dose de complexité supplémentaire à un édifice déjà fort tortueux.
Au-delà de la forme pour le moins abrupte de ces dispositions se profile la question essentielle : tout cela, tous ces efforts, pour quel résultat ?
La vérité commande de reconnaître que l’effort a surtout porté sur les revenus autres que les revenus d’activité quand il s’agissait de l’impôt sur le revenu, sur l’impôt de solidarité sur la fortune, ou encore sur la taxe professionnelle et l’impôt sur les sociétés. Son objet principal a donc été de réduire les impôts des ménages les plus aisés et d’alléger la contribution des entreprises au financement de la charge commune ; sans doute est-ce pour que ces mêmes entreprises soient en situation de mettre au chômage 80 000 personnes en un mois et de verser à leurs cadres dirigeants plus de 1, 5 milliard d’euros sous forme de stock-options et, à ceux qui partent à la retraite, plus de 1, 5 milliard d’euros de « retraites chapeau » !
Nous avons aujourd’hui un système fiscal dont la seule évidence réside dans ce paradoxe : plus votre revenu est élevé, plus vous avez de moyens et d’outils pour ne pas payer d’impôt ! La même remarque vaut d’ailleurs pour les entreprises : plus l’entreprise est importante, plus sa surface financière est étendue, et plus nombreux sont les outils disponibles pour alléger l’impôt.
Oui, nous devons nous attacher, dans le cadre de nos futures discussions budgétaires, à remettre en question l’ensemble de la dépense fiscale, la totalité des mesures dérogatoires, tout ce qui concourt à rompre le lien entre capacité contributive et contribution effective. Il faut procéder à une véritable révision générale de la dépense fiscale, exercice nécessaire qui nous permettra d’ailleurs d’appréhender le sens des politiques publiques.