Intervention de Bernard Vera

Réunion du 26 mars 2009 à 15h30
Bouclier fiscal — Article 1er

Photo de Bernard VeraBernard Vera :

Monsieur le président, je vais m’efforcer de suivre vos recommandations.

Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je souhaite commencer cette intervention par une citation, certes un peu longue mais très instructive, reprenant les propos d’un de nos collègues tenus très récemment dans cet hémicycle.

« On a donc inventé le bouclier fiscal, qui a connu deux versions successives : fixé d’abord à 60 % en 2006, il fut ensuite abaissé à 50 % l’année suivante.

« Or, mes chers collègues, à l’évidence, le bouclier fiscal, tel qu’il est appliqué, n’est pas conforme à l’idée que nous nous faisions de ses vertus supposées lorsque nous l’avons voté.

« En effet, le revenu de référence pris en compte n’est pas le revenu “normal”, puisque en sont déduites toute une série de dépenses liées à des opérations de défiscalisation et à d’autres niches fiscales.

« Prenons l’exemple d’un contribuable disposant d’un revenu de 100 et qui a conclu quelques opérations ultramarines, investi dans des locations meublées professionnelles, conduit des travaux dans des monuments historiques ou classés à l’inventaire, souscrit un PERCO ou un PERP, adhéré à la PREFON. Ce sont autant de dépenses qu’il pourra éventuellement déduire, en plus de la CSG déductible, de son revenu imposable.

« Dans ces conditions, contrairement à ce que nous pouvions penser, le coefficient de 50 % s’appliquera non pas sur un revenu de 100, mais, après toutes ces déductions faites, sur un revenu résiduel de 50, de 30, voire de 20.

« J’insiste sur ce point, mes chers collègues, l’application de cette mesure n’est pas conforme à l’idée que nous nous en faisions au moment où nous l’avons votée. »

Cette véritable mise en cause du bouclier fiscal a été prononcée lors de la discussion du projet de loi de finances initiale pour 2009 non par l’un des sénateurs de notre groupe, mais par le président de la commission des finances lui-même, notre collègue Jean Arthuis !

Même si je sais parfaitement qu’il n’en tire pas tout à fait les mêmes conclusions que nous quant à l’avenir notre système fiscal, cette diatribe ne fait que souligner pleinement pourquoi il convient aujourd’hui de mettre en question le bouclier fiscal et de décider de sa pure et simple abrogation.

Oui, mes chers collègues, le bouclier fiscal n’a pas d’effets avérés sur la situation économique.

Oui, il n’a pas d’impact sur le comportement des contribuables et leur domiciliation ! En effet, comme nous l’avons souligné dans la discussion générale, le nombre des expatriés fiscaux est sans commune mesure avec la réalité.

Que pèsent, en effet, quelques centaines de redevables potentiels de l’ISF au regard des 568 000 contribuables assujettis à cet impôt, nombre qui ne fait que croître et embellir au fil des ans ?

Le bouclier fiscal n’a pas rencontré le succès attendu par ses créateurs. Ce résultat plus que mitigé devrait nous conduire, plutôt que d’enferrer la représentation parlementaire dans une posture de plus en plus réprouvée par l’opinion publique, à procéder en toute sagesse à la suppression pure et simple de ce bouclier fiscal.

La presse s’est fait l’écho, ces derniers jours, des données du problème. Le bouclier fiscal attire peu, puisque les demandes, qui s’élevaient à 20 000 en 2007, ont été moins nombreuses en 2008, alors même que le dispositif était plus alléchant encore puisque le plafond a été abaissé à 50 %...

Ce sont aujourd’hui 458 millions d’euros qui sont remboursés aux quelques milliers de demandeurs : 458 millions d’euros, c’est plus, par exemple, que le financement que l’État accorde à la politique de la ville cette année.

Comme le nombre des bénéficiaires du bouclier fiscal s’est contracté, la moyenne du remboursement s’est sensiblement élevée, atteignant aujourd’hui 33 000 euros !

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