Le rapport de la commission des finances sur le texte que nous avons proposé est pour le moins succinct. J’en citerai quelques extraits.
« Les chiffres de l’administration fiscale rendant compte des remboursements intervenus au 12 février 2009 ont montré l’utilité du bouclier fiscal pour deux catégories de contribuables […] :
« d’une part, des foyers aux revenus très modestes mais possédant leur résidence principale et pour qui le poids de la taxe foncière peut être difficilement supportable […] ;
« d’autre part, des contribuables assujettis à l’ISF subissant le “plafonnement du plafonnement” de cet impôt et qui devaient consacrer une très grande fraction de leurs revenus pour l’acquitter.
« Le bouclier fiscal a donc été créé par le législateur afin de répondre à des questions relevant du respect des droits fondamentaux de certains contribuables, aux profils divers […]. »
Quelques lignes plus loin, le rapport expédie la proposition inscrite dans l’article 1er en indiquant ceci : « Néanmoins, pour les raisons exposées supra, votre rapporteur général estime que l’éventuel réexamen du bouclier fiscal ne devrait intervenir que dans le cadre d’une réforme plus ambitieuse de notre fiscalité […].
« La mesure proposée par le présent article est donc à la fois incomplète et prématurée. C’est pourquoi votre rapporteur général ne préconise pas son adoption. »
Notre proposition de loi ne vise pas à résoudre, d’un coup de baguette magique, l’ensemble des problématiques de la fiscalité dans notre pays. Elle n’a pas vocation à être complète ; elle ne s’attache, dans cet article 1er, qu’à mettre en œuvre une mesure simple, immédiatement compréhensible par les citoyens de notre pays : la suppression du bouclier fiscal, dont il est avéré qu’il ne correspond ni aux attentes de la population ni même à celles de ses auteurs.
Votre rapport manque cruellement de précision.
La presse nous a informés de la réalité des faits : le volume des remboursements accordés à quelques-uns, à savoir moins d’un millier de personnes. Ces éléments simples ne figurent pas dans le rapport. Ce dernier aurait-il été rédigé dans la précipitation ?
En réalité, il est acquis que les principaux bénéficiaires du bouclier fiscal sont des contribuables de l’impôt de solidarité sur la fortune.
L’ISF est de surcroît une affaire très parisienne, qui obéit de longue date à la règle des quatre quarts : un quart perçu dans Paris intra muros, un quart dans l’un des sept autres départements de la région d’Île-de-France – plutôt dans les Yvelines et les Hauts-de-Seine que dans la Seine-Saint-Denis – et les deux autres quarts dans l’un des quatre-vingt-douze autres départements de métropole et d’outre-mer.
Pour le bouclier fiscal, il en est de même, voire plus
Une question simple se pose : la France qui travaille, qui crée des richesses, qui réussit, qui entreprend, qui prend des risques, habite-t-elle de manière quasi exclusive dans les beaux quartiers parisiens, à Neuilly-sur-Seine ou au Vésinet ?
Les chiffres du ministère sont pourtant extrêmement précis : un peu plus du quart des bénéficiaires du bouclier fiscal capitalisent 89 % des remboursements effectués !
C’est normal, direz-vous, ils ont en général un revenu imposable d’au moins 42 507 euros, qui devrait être taxé à un taux très éloigné des 50 %, mais surtout un patrimoine de 7, 3 millions d’euros. On comprend mieux l’utilité du bouclier !
Où habitent les plus heureux d’entre eux, c’est-à-dire les 834 bénéficiaires d’un remboursement de 368 221 euros en moyenne, soit onze fois la moyenne des remboursements, et, parmi eux, la petite vingtaine de contribuables dont le chèque dépasse 2, 5 millions d’euros ?
Selon des éléments en notre possession, le ministère des finances a renoncé à procéder à la production de statistiques « départementales » d’attribution des restitutions.
Sur le fond, je ne vois décidément pas pourquoi, pour maintenir en l’état les rentes de situation de quelques ménages parisiens fortunés, rentes n’ayant souvent qu’un très lointain rapport avec le travail personnel et beaucoup avec celui des autres, il faudrait que tous les autres contribuables de notre pays paient 458 millions d’euros d’impôt en trop !
C’est donc sous le bénéfice de ces observations que nous vous invitons à adopter cet article 1er.