J'ai défendu tout à l'heure un amendement qui tendait à supprimer l'article 13 du projet de loi et qui n'a pas été adopté.
L'une des raisons qui motivait notre rejet était qu'il nous semblait contradictoire de laisser à sa place le deuxième alinéa de l'actuel article L. 131-1 du code de l'éducation, selon lequel c'est l'élève qui élabore son projet d'orientation scolaire et professionnelle, alors que votre projet de loi prévoit que l'orientation est proposée à l'élève sans dire d'ailleurs par qui ni comment elle lui sera proposée.
En effet, la rédaction de ces deux alinéas illustre deux approches, deux conceptions fortes et différentes des mécanismes d'orientation. Le texte actuel du code place au coeur du dispositif l'élève lui-même, ses choix, ses aptitudes, ses envies. Il était donc prévu que l'élève élaborerait son projet éducatif, ce qui est contraire à votre projet de loi selon lequel son orientation lui est proposée.
Il s'agit, tout d'abord, de savoir par qui et comment elle lui est proposée. Ensuite, l'orientation lui sera-t-elle proposée ou imposée ?
Monsieur le rapporteur, vous nous avez dit que vous ne connaissiez pas de formation imposée. Malheureusement, nous connaissons tous des élèves à qui on a imposé une orientation et l'on sait le résultat que cela peut donner.
Cette orientation sera-t-elle proposée ou imposée à l'élève ? Comment ses parents ou ses tuteurs pourront-ils s'y opposer ? Ce sont deux questions auxquelles votre projet de loi ne répond pas.
Vous avez certainement compris la contradiction entre les deux alinéas de l'article du code de l'éducation et vous avez trouvé une parade en inversant leur position.
Vous hiérarchisez ainsi l'ordre de la démarche en commençant par imposer à l'élève, puis en lui laissant la possibilité d'élaborer son projet dans un cadre imposé.
Cette proposition de réécriture est pour nous inacceptable.
En effet, un grand nombre des jeunes en échec le sont du fait de l'orientation forcée jugée par eux inintéressante, voire dévalorisante.
Comment pouvez-vous espérer qu'un élève réussisse quand il n'aura pas choisi son orientation et que ses rêves de vie s'écroulent ?
C'est, au contraire des objectifs annoncés, vers l'échec que vous le dirigez. Vous le savez aussi, les jeunes en difficulté scolaire, souvent issus des familles les plus modestes, sont ceux à qui ces orientations seront le plus fréquemment proposées contre leur gré.
Dorénavant, à l'école comme dans la vie, en cas de difficulté, il faudra accepter ce que l'Autorité avec un grand « A » aura décidé pour nous.
Les chômeurs devront accepter n'importe quel travail disponible. Tel est le projet de société que vous nous proposez.