Intervention de Jean-Luc Mélenchon

Réunion du 18 mars 2005 à 15h00
Avenir de l'école — Articles additionnels après l'article 18

Photo de Jean-Luc MélenchonJean-Luc Mélenchon :

Cet amendement s'inscrit dans le même ordre de préoccupation que le précédent. Il s'agit d'améliorer la fluidité de la voie technologique et - essentiellement - de la voie professionnelle.

Je n'approuve pas la définition du baccalauréat professionnel dans la rédaction actuelle du rapport annexé.

Le livret prévoit le baccalauréat général, le baccalauréat technologique et le baccalauréat professionnel.

Après le baccalauréat général, tous les élèves doivent aller dans l'enseignement supérieur : c'est écrit.

Le baccalauréat technologique prépare ceux qui souhaitent à aller dans l'enseignement supérieur technologique, alors que nous savons tous que les élèves ne passent pas de l'un à l'autre, et notamment de la voie technologique aux IUT.

Le baccalauréat professionnel aurait, lui, vocation à faire entrer les jeunes directement dans la vie active.

Je ne suis pas d'accord avec cette idée : le baccalauréat professionnel doit être une qualification acquise après laquelle le cursus peut se poursuivre naturellement.

Mon souhait, et celui de mes amis socialistes, serait qu'à chaque palier d'études corresponde une qualification reconnue. En effet, ces dernières sont reconnues dans les conventions collectives : une qualification égale un niveau de salaire et une certaine reconnaissance sociale.

Vous le savez bien : le bac professionnel représente une certaine élite dans le monde des élèves des filières professionnelles. Ce sont les meilleurs qui le préparent et leur niveau vaut largement celui d'autres bacheliers, je vous prie de le croire, y compris dans les matières générales, par leur capacité à comprendre, à abstraire et à théoriser.

Nous devons donner à ces bacheliers professionnels la possibilité, s'ils le souhaitent, de passer dans le supérieur.

Cependant, pour que cela se fasse, deux conditions doivent être réunies.

D'abord, il faut une période de transition. Dans le passé, on m'a objecté que si on ouvrait des classes préparatoires après les baccalauréats professionnels, il faudrait alors en ouvrir pour toutes les autres filières, et notamment pour l'enseignement général. C'était l'argument de l'égalité utilisé dans le sens contraire : comme on ne peut pas ouvrir ces classes pour tout le monde, on ne les ouvre pour personne, et que chacun se débrouille !

Ensuite, nous tenons compte de la réalité sociale. Dans la réalité, de telles classes existent. Elles ont été ouvertes par certains établissements, sans rien demander à personne, avec l'accord du recteur. Il y en à Paris. Je sais qu'il y en a ailleurs. Par exemple, au lycée de l'Estaque, au nord de Marseille. Une vingtaine de jeunes extraordinairement motivés y sont scolarisés : ils font trois, quatre voire cinq heures de route, chaque jour, dans un sens et dans l'autre, pour suivre les études qui leur permettront d'atteindre le niveau nécessaire pour tenter le BTS ou entrer en IUT. Ces jeunes n'ont cependant aucun statut : il ne sont ni lycéens ni étudiants et, partant, n'ont droit à aucune bourse ni aide d'aucune sorte.

Une manière de faciliter la fluidité est de mettre en place les moyens pour permettre cette transition. Il faut accepter de dire que cela s'appliquera à une voie d'enseignement particulière, et pas aux deux autres, car c'est là que se situent les plus grands besoins.

C'était l'argument humain et pédagogique.

Je suis à présent obligé de faire valoir un argument économique. Si nous ne prenons pas les moyens qui s'imposent pour disposer dans notre pays, en formant les jeunes, d'ouvriers hautement qualifiés, d'ingénieurs, de techniciens dont notre économie a besoin, nous allons vers un bug démographique total.

Au cours des dix prochaines années, nous devons parvenir, même avec un taux de croissance extrêmement faible - disons 1, 5 % à 2 % - à mettre huit millions de personnes au travail pour remplacer les partants et pourvoir les nouveaux postes de travail. Il en sort 700 000 de nos établissements scolaires par an ! Ce qui signifie que, du fait de la déperdition, nous allons tout droit au bug. On peut penser que les besoins seront en partie satisfaits par une élévation du niveau de mécanisation de notre économie, de nos services et de notre industrie productive. Tant mieux : cela nous poussera vers le haut. Ceux qui seront disponibles pour l'économie devront néanmoins être au plus haut niveau technique, scientifique et culturel. C'est la raison pour laquelle tout doit être fait pour faciliter la fluidité des parcours des jeunes qui étudient afin de leur permettre d'atteindre le niveau le plus élevé possible : nous avons besoin d'eux, et c'est urgent.

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