L’article 14 du projet de loi définit avec précision les soins de premiers recours, ainsi que la manière dont les médecins généralistes les administrent.
Il s’agit d’une définition plutôt exhaustive, qui élargit la notion de soins de premier recours au-delà du périmètre traditionnel des soins proprement dits, puisque s’y trouvent incluses, notamment, les missions de prévention, de dépistage et d’éducation à la santé. L’objectif est ambitieux, car nous savons tous que notre système de protection sociale pèche, entre autres, par la prévention.
Je le répète, nous considérons que l’évolution de ce qu’il était convenu d’appeler la « médecine généraliste » doit impliquer un changement dans les modes de rémunération des médecins qui exerceront la médecine de premier recours.
D’après un sondage réalisé par Le Quotidien du Médecin en mars 2008, quelque 44 % des médecins libéraux seraient aujourd'hui partisans d’une expérimentation de modes de rémunération qui ne seraient pas des rémunérations à l’acte.
Ce mouvement est par ailleurs déjà engagé dans d’autres pays européens, par exemple en Angleterre ou en Suède, où les médecins généralistes sont rémunérés non en fonction des actes qu’ils réalisent mais à raison du nombre de patients inscrits dans leur cabinet médical. Le système est alors financé sur une enveloppe globale, mais aussi grâce à des points supplémentaires attribués chaque année au cabinet médical si les objectifs de santé sont atteints, ce que signifie que mieux un praticien soigne les patients, plus il est rémunéré !
À titre indicatif, je rappelle que les médecins généralistes anglais bénéficient des rémunérations les plus élevées d’Europe…
Certes, nous ne reprenons pas à notre compte tous les aspects du modèle anglais, notamment parce que celui-ci suppose un parcours de soins très contraignant et entraîne de longues listes d’attentes, mais nous devons tout de même nous interroger !
En effet, si cet article était adopté, certaines des nouvelles missions qui lui sont confiées conduiraient le professionnel de santé à prendre des mesures en amont, afin d’éviter la survenue de maladies – nous reconnaissons que ce souci est pertinent, la prévention étant porteuse d’économies considérables, surtout réalisée à l'échelle nationale -, et donc de réduire le nombre d’actes réalisés par les médecins.
Or c’est précisément la quantité d’actes accomplis qui déterminent les revenus des médecins de premier recours.
C’est pourquoi nous considérons que cette réforme, pour être pleinement efficace, devrait s’accompagner d’une rémunération particulière, tenant compte des nouvelles missions, des nouveaux objectifs et de la réduction programmée et attendue du nombre d’actes réalisés.
En effet, si nous ne doutons pas de la déontologie des professionnels de santé, nous considérons qu’il appartient au législateur de prendre toutes les mesures nécessaires pour associer pleinement les principaux acteurs de cette réforme, à savoir les médecins généralistes.
À travers cet amendement, nous proposons un mode de rémunération complémentaire, qui ne pénalise pas le médecin effectuant ces missions. Il convient également de favoriser des formes d’organisation collective pluri-professionnelles, qui se développent d'ailleurs déjà : les maisons de santé pluridisciplinaires ou les centres de santé, notamment, constituent les embryons d’une médecine généraliste porteuse d’une vision plus globale du patient.