Intervention de François Autain

Réunion du 28 mai 2009 à 15h00
Réforme de l'hôpital — Article 15

Photo de François AutainFrançois Autain :

L’article 15 prévoit des mesures destinées à remédier aux difficultés que nous connaissons du fait de la dégradation de la démographie médicale. Ces difficultés tiennent moins au nombre de médecins qu’à leur inégale répartition territoriale et disciplinaire.

La note récente de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, la DRESS, et les résultats de février 2009 démontrent – vous l’avez rappelé, madame la ministre – qu’il n’y a jamais eu autant de médecins dans notre pays. Ils étaient 208 000 au 1er janvier 2007, ce qui constitue un véritable record. En revanche, à l’horizon 2020, la densité médicale pourrait atteindre son point bas, avec 276 médecins pour 100 000 habitants.

Si nous voulons rattraper notre retard, il ne suffira pas de maintenir le numerus clausus à son niveau de 2008. Il faudra l’augmenter pour pouvoir prétendre, en 2030, retrouver une situation semblable à celle que nous connaissons actuellement.

Les médecins sont nombreux, mais ils sont inégalement répartis sur le territoire. Le ministère de la santé a fait paraître, l’année dernière me semble-t-il, une note démontrant qu’un nombre très important de Français n’a pas accès à des soins dans des conditions normales.

Ce nombre avait été évalué à près à 2, 5 millions. Lors du débat que nous avons eu sur la démographie médicale dans le cadre de l’examen du projet de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, vous avez déclaré, que, en fait, ce sont 4 millions de Français qui n’auraient pas accès aux soins dans des conditions normales. Il y a là un grave déficit que les dispositions que vous nous proposez à l’article 15 ne sont malheureusement pas à même de combler.

Vous avez recours à deux types de mesures : l’augmentation et la régionalisation du numerus clausus, d’une part, la création de contrats de solidarité, d’autre part.

En tout état de cause, il ne suffit pas d’augmenter le numerus clausus, ni même de le régionaliser, pour répondre aux difficultés actuelles. Ces difficultés, je le répète, sont liées moins au nombre de médecins qu’à la mauvaise répartition de ces derniers.

Il ne suffit pas d’augmenter le numerus clausus pour obtenir une meilleure répartition entre disciplines médicales ou une progression du nombre de médecins généralistes

Supposons que l’on décide d’accroître le nombre de postes d’internes en spécialité de médecine générale. D’abord, il n’y a pas de certitude que tous les postes seront pourvus. Ensuite, l’évasion est considérable : aujourd’hui, seuls 40 % des internes en spécialité de médecine générale exerceront effectivement le métier de médecin généraliste.

Un nombre croissant d’internes en spécialité de médecine générale choisissent d’autres options ou des modes d’exercice particuliers. On pourrait d’ailleurs s’interroger sur les raisons – mais elles sont multiples – pour lesquelles la spécialité de médecin généraliste n’attire pas autant qu’on pourrait le souhaiter les internes en spécialité de médecine générale.

L’article 15 n’apporte pas de réponse à ces problèmes. On augmente certes le numerus clausus, mais on ne prévoit pas les moyens qui permettront de former les médecins.

Les contrats de solidarité ne permettent pas davantage de répondre à ce problème, d’autant qu’ils ont été sensiblement modifiés par la commission. Désormais, ils ne constituent plus une obligation pour les médecins. En outre, ils ne s’appliqueront qu’en 2016. Ils ne nous permettront donc pas de faire face à l’urgence de la situation.

L’article 15 ne répond absolument pas aux questions ni aux problèmes de l’heure. C’est pourquoi nous ne pourrons sans doute pas le voter s’il reste en l’état.

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