Intervention de Alima Boumediene-Thiery

Réunion du 10 juin 2008 à 16h15
Adaptation du droit pénal à l'institution de la cour pénale internationale — Article 7

Photo de Alima Boumediene-ThieryAlima Boumediene-Thiery :

Cet amendement vise à inscrire dans notre droit pénal le principe d’imprescriptibilité pour les crimes de guerre, principe dont l’application est jusqu’à présent réservée aux crimes contre l’humanité.

Dans sa décision du 22 janvier 1999, le Conseil constitutionnel a rappelé le point suivant : « Considérant qu’aux termes de l’article 29 du statut : “Les crimes relevant de la compétence de la Cour ne se prescrivent pas” ; qu’aucune règle, ni aucun principe de valeur constitutionnelle, n’interdit l’imprescriptibilité des crimes les plus graves qui touchent l’ensemble de la communauté internationale ; ».

C’est d’ailleurs sur cette base que les crimes contre l’humanité sont, conformément à l’article 213-5 du code pénal, imprescriptibles.

En vertu du statut de la Cour pénale internationale, tous les crimes prévus par ce dernier sont imprescriptibles, y compris les crimes de guerre. Or, le projet de loi qui nous est présenté aujourd’hui fixe pour ces crimes un délai de prescription de trente ans. Même si celui-ci est supérieur au délai de prescription de droit commun pour les crimes, cela demeure contraire à l’esprit et à la lettre du statut de la Cour pénale internationale.

Certains pourront invoquer le paragraphe 34 de cette même décision, où le Conseil constitutionnel précise que « la France, en dehors de tout manque de volonté ou d’indisponibilité de l’État, pourrait être conduite à arrêter et à remettre à la Cour une personne à raison de faits couverts, selon la loi française, par l’amnistie ou la prescription ; qu’il serait, dans ces conditions, porté atteinte aux conditions essentielles d’exercice de la souveraineté nationale ».

Je crois qu’il ne faut pas se méprendre sur ce paragraphe : il signifie simplement que la remise d’une personne dont les actes sont couverts, selon la loi, par la prescription porte atteinte aux conditions essentielles de la souveraineté.

Ainsi, il est question non pas de modifier la Constitution, mais de changer la loi afin d’éviter un conflit de compétences.

L’amendement a donc pour objet de rendre les crimes de guerre imprescriptibles, conformément à l’article 29 du statut de la CPI. Il y va du respect de notre engagement à traduire de manière fidèle le droit issu de la mise en œuvre du statut de la Cour pénale internationale et du respect du principe « pacta sunt servanda », obligeant les États parties à respecter de bonne foi ce statut.

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