Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question traite des difficultés rencontrées par les éleveurs de chevaux de trait.
En effet, dans le cœur des Bretons et, plus généralement, des Français, le cheval de trait garde une place toute particulière. Comme le postier, il fait partie de notre patrimoine régional. À ce titre, on le valorise à travers des concours pour la préservation de la race.
Nous devons en effet au cheval de trait une partie de notre prospérité économique au cours du siècle précédent, particulièrement dans le domaine agricole, avant que l’avènement du tracteur et la révolution technique et technologique des mécanismes agricoles ne le relèguent, dans nos campagnes, au second rang des moyens de traction. Le cheval de trait est aujourd’hui essentiellement utilisé dans le domaine du tourisme, du sport et du loisir.
Nos éleveurs nous présentent pourtant de magnifiques spécimens, qu’ils soignent avec passion. Dans nos régions, des hommes et des femmes continuent d’agir et de travailler non par simple souci de rentabilité, mais parce qu’ils aiment ce qu’ils font. Grâce à eux, nous portons aujourd’hui un autre regard sur l’espèce chevaline et nous redécouvrons que cet animal est indispensable aux travaux, puisqu’il permet l’entretien et l’exploitation du bocage, des zones humides et des zones sensibles, inaccessibles aux engins motorisés sous peine de destruction d’un milieu à préserver. Le cheval respecte les sols fragiles et humides : il ne les tasse pas ; il est silencieux et respecte la faune.
C’est au moment où l’État se désengage massivement de ses responsabilités dans l’ensemble de la filière équine, abandonnant ses haras, pourtant lieux d’excellence pour les différentes races sur le plan génétique et la connaissance de cet animal, que le cheval se révèle l’un des éléments forts, si ce n’est central, de la mise en œuvre de politiques soucieuses de la nature et conformes au Grenelle de l’environnement.
Le cheval retrouve son heure de gloire, mais les éleveurs sont désespérés. Ils n’ont plus les moyens de poursuivre un élevage qui coûte cher, qui n’est pas soutenu et qui ne bénéficie que d’une faible reconnaissance. Les éleveurs français, particulièrement bretons, ont réussi à transmettre leur passion au-delà de nos frontières. Ils ont pu développer des marchés vers l’Espagne, l’Allemagne, le Brésil et le Japon, transformant leur savoir-faire en atout économique, mais leur manque de moyens les empêche de répondre à la demande. À terme, cette situation risque d’entraîner la disparition de nombreux élevages et, de fait, d’une partie de notre patrimoine vivant, à l’échelle régionale et nationale.
Aussi la filière du cheval de trait demande-t-elle son intégration dans le paysage de la politique agricole commune. Reconnue comme une filière agricole en juillet 2004 par la France, cette production ne peut cependant prétendre à aucun soutien européen. Son intégration dans la PAC lui permettrait d’accéder à un soutien de l’Europe dans les domaines où elle intervient fortement, à savoir l’environnement, l’aménagement du territoire et le maintien d’un véritable tissu rural. Il convient d’encourager la démarche de mixité du pâturage dans un souci de gestion économique et écologique des espaces, pour la protection de la biodiversité et des ressources en eau. Le cheval constitue un élément dynamique de la politique de protection des espaces. Sa reconnaissance dans le cadre de la PAC permettrait d’obtenir un statut agricole, et donc d’aider réellement les éleveurs. Ce serait par conséquent un véritable atout pour le développement durable des territoires ruraux. Je souhaiterais donc connaître, monsieur le ministre, les dispositions que vous comptez prendre au niveau européen pour que l’apport du cheval de trait, particulièrement du cheval breton, soit reconnu dans toutes ses dimensions.