Intervention de Christine Lagarde

Réunion du 31 mars 2009 à 15h00
Loi de finances rectificative pour 2009 — Discussion d'un projet de loi

Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi :

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, l’usage voudrait que je vous rappelle un certain nombre de chiffres concernant notre économie et la manière dont, sur un certain nombre de points, tels la consommation des ménages, l’inflation, l’immobilier et le secteur bancaire - il faut en effet noter la stabilité de ce dernier -, la France fait un peu mieux que d’autres pays.

Dans un environnement international extraordinairement perturbé par une crise financière d’abord, économique ensuite, avec les conséquences sociales qu’elle emporte, où l’ensemble des économies mondiales sont affectées, notre pays résiste mieux que beaucoup de ses voisins.

Plutôt que de vous rappeler des chiffres que vous connaissez déjà et qui varient en fonction des prévisions – nombreuses et elles-mêmes environnées d’un halo d’incertitude, comme le soulignent l’ensemble des prévisionnistes, qu’il s’agisse des nôtres, de ceux de l’OCDE, du FMI, ou de la commission -, je soulignerai que l’action que vous engagez en examinant ce collectif budgétaire s’inscrit très précisément dans une mission à laquelle l’ensemble des gouvernements se sont attelés.

Cette mission consiste à tenter de juguler la crise internationale, de réorganiser l’ensemble du système financier, de nettoyer les bilans de l’ensemble des banques pour leur permettre de fonctionner à nouveau, de mettre en place des moyens financiers pour l’ensemble des pays en développement et des pays émergents, qui sont les premières victimes de la crise et les plus gravement touchés.

Tous ces sujets seront abordés à partir de demain soir et, plus généralement, pendant la journée de jeudi, lors du sommet du G20.

Ce sont des sujets cruciaux, que devront traiter tous les parlements, dans l’ensemble des pays du monde. Votre action s’inscrit dans ce cadre.

Permettez-moi de vous présenter rapidement la position de la France dans la perspective du G20.

Tout d’abord, notre pays, en accord avec l’ensemble de ses partenaires, s’attache à présenter une plate-forme de propositions qui visent à la relance coordonnée, selon des critères qui ont été énoncés par la Commission européenne et qui respectent la règle des trois T – « timely, targeted, temporary » -, c’est-à-dire des mesures temporaires, adéquates dans leur cible et appropriées dans leur montant.

Par ailleurs, nous voulons obtenir, vaille que vaille et coûte que coûte, une modification en profondeur du système de régulation, de manière que la réglementation et la supervision s’appliquent à l’ensemble des acteurs, des produits et des territoires.

Mon collègue Éric Woerth vous a rappelé tout à l’heure les modifications en profondeur qui ont affecté la scène internationale au cours des dernières semaines en ce qui concerne les centres non coopératifs et les paradis fiscaux, qui ont accepté de communiquer des informations en matière fiscale mais également d’adopter un certain nombre de principes dans le domaine prudentiel.

Dans le domaine de la régulation, nous serons extrêmement fermes en ce qui concerne les mécanismes de compensation des opérateurs de marché au niveau international. Si ces dispositions ne sont pas convenues sur un plan international, nous aurons beau prendre toutes les mesures que nous voudrons au niveau national, cela mettra tout simplement notre pays en situation de compétitivité défavorable pour nos opérateurs et nos institutions. Nous savons que, dans ce domaine, c’est évidemment à l’échelon international que doivent se prendre les décisions.

Dans le domaine de la régulation encore, nous prônerons une modification d’un certain nombre de principes comptables afin de tenir compte de la défaillance du marché qui empêche de déterminer la valeur d’un certain nombre d’actifs actuellement inscrits au bilan des banques.

D’autre part, dans le domaine des règles prudentielles applicables aux établissements bancaires, nous soutiendrons des mécanismes contra-cycliques, qui permettent de tempérer les effets extrêmement négatifs de la crise, et non de les accentuer, comme nous avons pu en avoir la démonstration ces derniers mois. Nous avons mené ces combats au niveau de l’Union européenne dans le cadre de la présidence française ; nous maintiendrons de tels efforts au niveau international.

Ce projet de loi de finances rectificative pour 2009 s’inscrit véritablement dans ce contexte : la France fera valoir à la fois ses exigences de relance coordonnée, selon les trois critères que j’évoquais tout à l’heure, de régulation et de gouvernance internationales.

Il s’agit de permettre au FMI, en liaison avec le Forum de stabilité financière, de financer les pays émergents avec des instruments beaucoup plus flexibles et mieux dotés financièrement. Dans le même temps, celui-ci devra se réformer pour assurer une meilleure représentation de l’ensemble des grands acteurs économiques et financiers mondiaux, quel que soit leur stade de développement. Je pense notamment à des pays comme la Chine, dont la représentation devra être modifiée au cours des mois à venir. Nous soutenons, pour notre part, une accélération du processus de réforme du FMI.

Par ailleurs, nous serons évidemment favorables aux mesures permettant l’amélioration du financement des échanges, afin d’éviter la diminution importante du commerce mondial qui est aujourd'hui annoncée par les instituts de prévision.

Mesdames, messieurs les sénateurs, ce nouveau projet de loi de finances rectificative pour 2009 s’inscrit dans le cadre d’une politique de relance dans laquelle la France s’est engagée plus tôt que d’autres pays : en effet, le Parlement français a été parmi les premiers parlements à voter des mesures de relance. Ce texte est donc construit, vous le savez, sur l’hypothèse d’une évolution du PIB de moins 1, 5 % pour 2009, hypothèse qui nous a paru raisonnable mais qui, comme l’indique l’ensemble des prévisionnistes, est auréolée d’une grande incertitude, dans la mesure où les paramètres qui permettent de l’établir sont régulièrement révisés.

Cette prévision est assortie d’un risque majeur de destructions d’emplois qui pourraient atteindre 350 000 en 2009. Toutefois, ce chiffre pourrait être ramené à 300 000 avec le développement des emplois aidés dans les secteurs marchand et non marchand, auxquels il pourra être recouru dans des conditions plus favorables qu’aux conditions actuelles, qui, je le sais pertinemment, posent des difficultés aux collectivités locales.

En revanche, dans cette hypothèse, nous attendons en 2010 une reprise de l’activité qui conduirait à une hausse du PIB de 1 %. Nous espérons en effet que la coordination des plans de relance permettra d’avoir des effets sur la croissance dès l’année prochaine. Par ailleurs, nous aurons inévitablement un mouvement de restockage, qui sera consécutif au déstockage de l’année 2009, dans une proportion de l’ordre d’un tiers de la prévision

Sur le plan international, l’action du Gouvernement face à la crise pourrait être comparée à celle d’un architecte associé qui participe à la reconstruction du système financier internationale et à la stimulation de la relance.

Parallèlement, l’État français est obligé d’assumer un rôle de pompier. En effet, nous avons engagé plus de 50 milliards d’euros pour assurer le fonctionnement des circuits bancaires – garantir les dépôts et l’épargne – et les maintenir en état de financer la vie économique. Je le répète, ce plan, que nous exécutons régulièrement au fur et à mesure de nos émissions, n’est évidemment pas destiné à faire des cadeaux aux banquiers, mais tout simplement à maintenir le circuit financier en état de fonctionner et lui permettre d’aider nos entreprises.

Nous avons également mis en place un plan de soutien, que vous avez voté, de 22 milliards d’euros pour venir en aide aux PME, qui sont les premières à rencontrer des difficultés de financement. D’Oséo à la Caisse des dépôts et consignations, tous les acteurs publics du financement ont été mobilisés. Quant au travail du médiateur du crédit, relayé par les médiateurs départementaux que sont les directeurs départementaux de la Banque de France, il a permis de trouver des solutions de financement pour plus de 2 600 entreprises, et, partant, a permis le maintien de l’emploi de 63 000 personnes.

Dans le même esprit, comme l’a annoncé le Président de la République, des « commissaires à la réindustrialisation » seront nommés dans chaque bassin d’emploi en difficulté. M. le rapporteur général le sait, c’est déjà le cas dans la région de Compiègne, dont certains secteurs d’activité sont particulièrement touchés, notamment ceux de l’automobile et du caoutchouc. Ces commissaires auront les pleins pouvoirs pour mobiliser l’ensemble des agences et des guichets – ils sont multiples aux niveaux national et européen – et pour agir par des moyens d’intervention financiers destinés à soutenir l’activité ou à pallier les difficultés rencontrées par les entreprises.

Le plan de relance voté le 4 décembre dernier est largement axé sur l’investissement sur tout le territoire. Plus de 1 000 projets ont été identifiés. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance, est allé au-delà et a recensé d’autres projets qui sont prêts et qui pourront être activés soit dans le cadre du redéploiement des moyens non utilisés soit tout simplement parce qu’ils sont éligibles. Comme Éric Woerth l’a indiqué, plus d’une centaine de projets ont déjà été lancés, qui permettront, tout au long de l’année 2009, d’irriguer l’activité économique de l’ensemble des territoires.

C’est au niveau international que la France doit jouer un rôle d’architecte. Si nous n’arrivons pas à résoudre les problèmes du système bancaire et du système financier dans son ensemble, notamment la question de la coordination et de la supervision, nous n’arriverons pas à remettre sur pied nos économies, tant elles dépendent manifestement des circuits financiers et de la manière dont les risques sont pris au sein de ces établissements.

Comme l’a dit le Président de la République à Saint-Quentin, « cette crise et les souffrances qu’elle engendre nous concernent tous ». Nous devons tous nous engager dans un effort d’unité et de mobilisation non seulement au niveau international, mais également au niveau national. D’ici à la reprise, que nous attendons pour 2010, l’État va venir en aide à ceux de nos concitoyens qui sont le plus touchés par la crise. Tel était l’objet du sommet social du 18 février voulu par le Président de la République.

Les principales victimes de la crise qui se développe actuellement et affecte des pans entiers de notre économie, en particulier de notre industrie, sont les classes modestes et moyennes. C’est à cette France-là que le Chef de l’État, en concertation avec les partenaires sociaux, a décidé de consacrer 2, 6 milliards d’euros, qui font l’objet de ce collectif budgétaire.

L’État, dans un souci de justice, va renforcer son aide aux plus vulnérables par des mesures ciblées, temporaires et à effets quasi immédiats. J’insiste sur l’importance de ces trois critères définis par l’Union européenne, qui sont indispensables pour garantir à la fois la durabilité et la solidité de nos finances publiques dans le long terme, sur lesquelles Éric Woerth a insisté tout à l’heure. Si les mesures respectent ces trois critères, cela signifie que, lorsque la crise sera passée, le ciblage ne sera plus nécessaire et la réversibilité sera assurée, puisque les effets quasi immédiats, nous l’espérons, se seront fait sentir.

C’est bien à l’aune de ces trois critères qu’il convient donc d’analyser et de mesurer les propositions qui figurent dans ce projet de loi ou dans les amendements.

Quand je parle d’unité et de mobilisation, c’est au plan interne que je pense en même temps qu’au plan international.

Actuellement, l’annonce quotidienne de bonus ou de stock-options exceptionnels, qui arrivent au plus mauvais moment pour les uns et au meilleur pour les autres, vient brouiller la ligne très claire que le Gouvernement s’est fixée depuis deux ans, particulièrement lorsqu’ils sont présentés de manière agrégée pour affoler tout le monde. Le Gouvernement souhaite que la valeur travail soit véritablement instaurée comme la clé de voûte, l’impératif absolu, du fonctionnement de notre économie, afin de la rendre plus compétitive, plus attractive et plus satisfaisante pour ceux qui y participent ; que le mérite soit reconnu ; que l’incompétence soit sanctionnée. Il n’est pas tolérable que ces trois principes, sur lesquels nous devons nous appuyer, soient bafoués, car il y va de l’intérêt des entreprises, mais également de l’intérêt général.

C’est d’ailleurs dans le même esprit que le Gouvernement souhaite établir un partenariat véritable entre le contribuable et l’État en instaurant le « principe du 50-50 », parfaitement incarné par le bouclier fiscal.

Hier, le Premier ministre a ainsi, sur ma proposition, signé un décret qui interdit aux dirigeants des entreprises soutenues par l’État de bénéficier des outils que j’évoquais tout à l’heure, en particulier les stock-options ou les attributions gratuites d’actions. Cette démarche va dans le sens des amendements que certains d’entre vous ont évoqués ou déposés.

Le Premier ministre a expliqué, lors de son point de presse, pourquoi nous avons eu recours au règlement : dans la mesure où un décret est effectif dès sa publication, il permet une action rapide, ce que ne peut nous garantir la meilleure des lois, compte tenu du processus législatif.

Interdire les stock-options, les attributions gratuites et certains dispositifs de rémunération lorsque les établissements envisagent des licenciements d’ampleur, c’est évidemment le sens de l’action que nous entendons mener dans le cadre de la valorisation du travail et du mérite, de la juste reconnaissance de ces valeurs et de la sanction des incompétences.

J’aimerais à présent détailler les mesures que nous prenons pour les classes modestes et moyennes, qui sont consécutives aux annonces du sommet social. Elles concernent ceux qui ont du mal à vivre avec un revenu modeste ou moyen, ceux qui travaillent dans des secteurs particulièrement menacés – je pense à l’automobile –, enfin ceux qui sont les plus fragilisés par la crise, les victimes de baisses d’activité ou du chômage.

L’Assemblée nationale a déjà apporté sa contribution à ce texte, et je vous remercie, mesdames, messieurs les sénateurs, de nous aider à l’améliorer encore. À cet égard, je salue particulièrement le travail et les propositions du président de la commission des finances, Jean Arthuis, et du rapporteur général, Philippe Marini.

Pour les classes modestes et moyennes, une mesure phare de ce collectif est mise en œuvre, celle qui consiste à diminuer leurs impôts. Nous voulons réduire des deux derniers tiers l’impôt des contribuables de la première tranche à 5, 5 %, et étendre cette diminution à ceux qui sont situés dans le bas de l’échelle de la tranche à 14 %. Éric Woerth l’a évoqué tout à l’heure, plus de 6 millions de foyers verront ainsi leur impôt diminuer significativement. Le gain de pouvoir d’achat qui en résultera pour les classes modestes et moyennes représentera 1, 1 milliard d’euros.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous le savez, notre objectif n’est pas d’augmenter les impôts – nous n’avons pas été élus pour cela, et le Président de la République ne l’a pas prévu dans son programme – mais, bien au contraire, de les diminuer chaque fois que cela est possible ou justifié, y compris par des mesures ciblées comme celle que je viens d’évoquer.

Vous le voyez, un calendrier précis a été mis en place. D’autres mesures ont été prévues dans le cadre du sommet du 18 février, dont l’aboutissement législatif se trouve dans ce collectif budgétaire. Je songe par exemple à la prime exceptionnelle de 150 euros pour les familles ayant des enfants scolarisés de plus de 6 ans, qui sera délivrée au mois de juin et concernera 3 millions de familles. Je songe aussi aux 230 000 salariés précaires sans droit à l’allocation chômage, à qui sera versée la somme de 500 euros dès le mois d’avril.

L’Assemblée nationale a adopté un amendement, présenté par MM. Censi, Bouvard et de Courson, qui aligne le régime de réduction d’impôt pour l’investissement locatif dans les résidences avec services sur le régime dit « Scellier ». De l’aveu même des spécialistes, ce dispositif, allié au doublement du prêt à taux zéro, a permis d’engager un léger mouvement d’amélioration dans le secteur immobilier français. Il s’agit donc d’un amendement particulièrement bienvenu dans la mesure où il élargit le champ d’application du dispositif « Scellier ».

Nos mesures de soutien portent également sur les salariés qui travaillent dans des secteurs particulièrement frappés par la crise. Je pense au premier chef au secteur automobile, qui emploie environ 10 % de la population active. C’est pourquoi mon ministère, avec l’aide très active de Luc Chatel, s’est mobilisé pour conclure le pacte automobile, le 9 février dernier, à la suite des états généraux de l’automobile, qui a rassemblé tous les représentants de la filière, y compris les distributeurs et l’ensemble des sous-traitants.

L’État va donc octroyer à l’ensemble de la filière – vous savez qu’elle est touchée dans le monde entier et pas seulement en France – un soutien ciblé sous forme de prêt, à hauteur de 6, 5 milliards d’euros sur une durée de cinq ans, et augmenter de 1 milliard d’euros la garantie de prêts aux sous-traitants des entreprises automobiles.

Ce plan a bien entendu été présenté à la Commission européenne, en particulier aux responsables chargés de la concurrence. En l’état actuel, il est parfaitement compatible avec les règles relatives aux aides d’État et au principe de non-discrimination. En effet, il ne profitera pas uniquement aux constructeurs automobiles français. Ainsi, une partie de ce concours financier bénéficiera notamment à Renault Trucks, qui est une société détenue en réalité par Volvo, et nous sommes actuellement en négociation avec Iveco, société appartenant à Fiat. En contrepartie, les constructeurs bénéficiaires s’engagent à accélérer les programmes de véhicules décarbonés.

Dans le même souci d’allier relance économique et développement durable, l’État veut octroyer 150 millions d’euros de prêts bonifiés pour les nouveaux véhicules innovants en matière écologique, ces « véhicules verts » en quelque sorte que nous appelons de nos vœux.

Je précise que le Fonds stratégique d’investissement est également mobilisé pour un certain nombre d’acteurs de la filière, dont certains méritent évidemment toute notre attention non seulement sur le plan économique et technologique, mais également sur le plan social.

De plus, pour les toutes petites entreprises qui peinent à trouver des capitaux, l’Assemblée nationale a proposé, grâce au député Nicolas Forissier, une modification judicieuse du dispositif ISF-PME, qui permet en quelque sorte aux redevables de l’impôt sur la fortune de payer l’entrepreneur plutôt que le percepteur, en autorisant les « holdings ISF » à compter de plus de cinquante associés, à condition que les investissements qu’elles réalisent soient ciblés sur les petites entreprises de moins de dix ans. Ce dispositif, dont le champ d’application est restreint, aura un effet de levier important pour les petites entreprises jeunes et innovantes, auxquelles nous pensons tous.

Il faut enfin répondre aux difficultés du crédit interentreprises, qui est l’un des mécanismes de financement de nos entreprises.

En cette période de risques parfois difficiles à assumer, mais en tout cas mesurés de manière beaucoup plus rigoureuse, un certain nombre de nos entreprises subissent les effets de la réduction du crédit interentreprises. En effet, les assureurs-crédit réduisent, voire retirent leurs couvertures aux entreprises.

Face à cette situation, le Gouvernement a très vite mis en place le complément d’assurance-crédit public, le CAP, afin de prendre le relais des assureurs-crédit qui ne couvrent pas la totalité du risque. Les encours garantis au titre du CAP sont ainsi passés de 18 millions d’euros début février à plus de 100 millions d’euros début mars. Toutefois, nous savons que ce mécanisme n’est pas suffisant, car il a été conçu pour répondre aux cas de réductions de garantie et non aux cas de coupure pure et simple de garantie.

Conformément à ce qu’a annoncé le Premier ministre, le Gouvernement propose donc que l’État garantisse jusqu’à 5 milliards d’euros de crédits interentreprises au bénéfice des entreprises qui perdent la totalité de leur couverture d’assurance-crédit. Nous aurons l’occasion de discuter de la mise en place de ce nouveau dispositif, le CAP+, au cours de l’examen de ce projet de loi de finances rectificative. Je le répète, il ne s’agit pas d’un complément de l’assurance-crédit, mais d’un substitut à l’assureur-crédit qui retire purement et simplement sa couverture.

L’autre catégorie de Français que nous voulons aider, ce sont les salariés en activité partielle.

Au-delà de ce plan spécifique, certains secteurs tournent au ralenti. Nous espérons que cette situation sera provisoire. En attendant, nous devons soutenir le versement d’indemnités aux salariés concernés. Aussi, nous souhaitons prendre deux mesures.

La première mesure touche au relèvement des plafonds.

Le contingent d’heures de chômage partiel maximum par salarié et par an, aujourd’hui de 600 heures, sera porté à 800 heures et même à 1 000 heures pour certains secteurs comme l’automobile et le textile. De même, la durée maximale de chômage partiel consécutif sera portée de quatre semaines à six semaines. Le projet d’activité de longue durée permettra de conclure des conventions de six mois en contrepartie d’un engagement de la part de l’employeur à maintenir le salarié dans son emploi pendant le double de cette durée selon le principe « donnant-donnant ».

La seconde mesure, directement issue du sommet social, a trait à l’amélioration du pouvoir d’achat.Le taux d’indemnisation du chômage partiel pourra atteindre jusqu’à 90 % du salaire net, l’État augmentant sa participation au remboursement.

Enfin, nous envisageons des mesures pour ceux qui peinent à trouver ou à retrouver un emploi.

Nous sommes bien conscients que les mesures en faveur du chômage partiel ne sont pas suffisantes, en particulier lorsque des entreprises sont contraintes par la crise à mettre fin à une partie de leur activité et à procéder à des licenciements collectifs pour motif économique. Dès lors, le fonds d’investissement social sera mobilisé. L’État a décidé de l’abonder directement à hauteur de 800 millions d’euros pour agir sur trois volets : la formation et le reclassement à destination de ceux qui seront licenciés pour motif économique ; le soutien des bassins d’emploi en difficulté avec le CTP ; l’accompagnement des jeunes à travers des contrats de professionnalisation, des contrats aidés, des écoles de la deuxième chance, qui s’avèrent très efficaces.

S’agissant du reclassement, je rappelle que la convention de reclassement personnalisé, la CRP, a déjà été améliorée par un accord national interprofessionnel du 23 décembre. La durée pendant laquelle le salarié est pris en charge par la CRP est allongée de huit à douze mois et l’indemnisation est augmentée à hauteur de 80 % du salaire antérieur brut pendant les huit premiers mois, puis de 70 % pendant les quatre mois restants.

Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, ce que nous vous proposons dans le cadre de ce collectif budgétaire. Je le répète, nous ciblons les ménages modestes et moyens, les salariés qui souffrent d’une diminution d’activité ou d’une perte d’emploi. Notre action s’inscrit dans le cadre des relances concertées à l’échelon international, qui feront l’objet de débats lors de la réunion du G20, réunion qui m’empêchera malheureusement de participer à l’intégralité de cette discussion, ce dont je vous prie de bien vouloir m’excuser.

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