Intervention de Aymeri de Montesquiou

Réunion du 31 mars 2009 à 15h00
Loi de finances rectificative pour 2009 — Discussion d'un projet de loi

Photo de Aymeri de MontesquiouAymeri de Montesquiou :

L’environnement international est mauvais, voire catastrophique pour les pays les plus atteints par la crise.

Les États-Unis, première puissance économique, voient leur production industrielle tomber au plus bas depuis sept ans. Selon la Réserve fédérale, 48 % des entreprises industrielles estiment que leurs conditions d’activité ne cessent d’empirer, avec un indice de commandes plongeant de 14 points, pour s’établir au niveau record de moins 44, 8 points !

En France aussi, l’environnement économique demeure très difficile. Les chiffres sont tous, ou presque, convergents. La révision des hypothèses économiques conduit à des moins-values de recettes fiscales de 6, 3 milliards d’euros, dont 3, 5 milliards d’euros pour la TVA. Les recettes non fiscales sont également revues à la baisse de 1, 1 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale, sous l’effet de la diminution des recettes attendues des participations de l’État et malgré les recettes nouvelles issues de la garantie apportée par l’État en faveur de la Société de financement de l’économie française.

Le solde budgétaire associé à ce collectif est de moins 103, 8 milliards d’euros ; il se creuse de 17 milliards d’euros par rapport à la dernière loi de finances rectificative ! À ce propos, madame le ministre, vous avez le courage de ne pas dissimuler que le problème est grave et que la dégradation de nos finances publiques conduira à un déficit de 5, 6 %, voire de 6 % du PIB.

Ce contexte de récession économique mondiale ne nous impose que davantage de maîtriser notre niveau de dépense et d’endettement publics : plus nous maîtriserons notre déficit, plus vite nous pourrons rétablir nos finances.

Le débat d’aujourd’hui nous offre l’occasion de dresser un premier bilan des mesures mises en œuvre ces derniers mois et de convaincre du bien-fondé de celles qui sont proposées aujourd’hui.

Le Gouvernement, qui s’est montré très réactif, s’est fixé deux objectifs majeurs : d’une part, mobiliser l’ensemble de nos partenaires européens pour parler d’une même voix et fixer de nouvelles règles de politique économique ; d’autre part, mettre en place une fiscalité incitative, afin d’encourager l’investissement de nos entreprises tout en prenant les mesures indispensables d’aide aux ménages les plus fragiles.

Dans une telle situation de crise, l’opportunité du bouclier fiscal peut, une fois de plus, être contestée. En effet, à un moment où le chômage augmente, avec des risques certains d’aggravation d’ici à la fin de l’année, il est impossible à ceux qui ont perdu ou qui craignent de perdre leur travail de ne pas éprouver un profond sentiment d’injustice lorsque l’État signe des chèques en faveur des plus hauts revenus, même s’ils comprennent l’idée selon laquelle on ne peut pas faire payer des impôts supérieurs à 50 % des revenus. Ce sentiment d’injustice va nuire à la stabilité de la France, ce qui pourrait avoir un effet très négatif sur les investissements étrangers et donc susciter une aggravation du chômage.

Donnons tort à Michel Colucci, dit Coluche, qui, sous le premier septennat de François Mitterrand, observait : « Il paraît que la crise rend les riches plus riches et les pauvres plus pauvres. Je ne vois pas en quoi c’est une crise : depuis que je suis petit, c’est comme ça ! »

Au vu des circonstances économiques exceptionnelles, il serait opportun de suspendre ce système afin de réconcilier équité fiscale et justice sociale. Il s’agit non pas de s’engager sur la voie stérilisante d’une hausse des impôts, mais plutôt d’adapter le système du bouclier fiscal aux impératifs de la crise. Ici aussi, ce serait faire preuve de réactivité !

Dans cet état d’esprit, je souligne l’initiative prise par le Sénat et la commission des finances en décembre 2008 afin que nos marges de manœuvre budgétaire ne soient pas réduites par nos moins-values fiscales. En premier lieu, je demeure persuadé que la réorganisation des niches fiscales, voire la suppression de certaines d’entre elles doivent être engagées au plus vite. En second lieu, il me semble indispensable que tout avantage fiscal ou social accordé aux entreprises soit compensé par des engagements fermes en termes de créations d’emplois, de relocalisation sur notre territoire et de politique salariale.

Face à la crise, notre capacité de proposition est essentielle, et ce collectif budgétaire concrétise de nouveaux engagements du Gouvernement pour accompagner notre pays sur le chemin de la relance économique et de la justice sociale. Si M. le rapporteur général laisse espérer que le creux de la crise n’est pas loin, je conclurai avec Khalil Gibran : « Nul ne peut atteindre l’aube sans passer par le chemin de la nuit. »

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