Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, certains esprits chagrins pourraient dire que les années se suivent et se ressemblent ! Nous avions entamé en effet l’exercice 2009 avec un collectif budgétaire, alors que l’encre de la loi de finances initiale n’était pas encore sèche. Nous voici de nouveau, en ces premiers jours de 2010, avec un premier projet de loi de finances rectificative, qui pourrait en annoncer d’autres…
Cependant, en ce qu’il actualise notre taux de croissance, qui passe de 0, 75 % en loi de finances initiale à 1, 4 %, le présent collectif budgétaire est porteur d’une bonne nouvelle, qui peut sans doute nous laisser espérer, dès l’année prochaine, un retour à un calendrier plus classique pour l’examen des lois de finances.
Vous l’avez dit, monsieur le ministre, ces perspectives de progression de la richesse nationale nous placent, avec l’Allemagne, dans le peloton de tête des pays bénéficiant de la reprise la plus marquée, alors que le FMI prévoit une croissance de 1 % seulement du PIB de la zone euro en 2010.
Voilà un an, la crise économique, née des graves défaillances du système financier mondial, menaçait les équilibres sociaux de notre pays et portait en germe la ruine de notre pacte républicain.
Si la reprise se confirme aujourd’hui, nous le devons notamment à l’action énergique du Gouvernement, qui a su agir avec discernement et célérité, d’abord pour rompre la paralysie qui menaçait le système bancaire et, donc, le financement de l’économie, ensuite pour donner un coup de fouet indispensable à l’activité économique au travers du plan de relance.
Ce redémarrage, pour incontestable qu’il soit, ne doit cependant pas occulter deux constats.
Le premier, c’est que les mécanismes à l’origine de la très grave crise que nous venons de traverser seront de nouveau à l’œuvre si la communauté internationale ne parvient pas à parler d’une seule voix sur les sujets de la régulation et de la supervision des activités bancaires et financières.
Le second, c’est que le redémarrage de notre économie ne doit pas être une excuse pour ne pas s’attaquer aux handicaps qui l’affectent et qui nous rendent moins compétitifs que nos partenaires dans le cadre d’une économie mondialisée.
À sa manière, le présent collectif, qui instaure une taxation des bonus des professionnels des marchés financiers et fixe les modalités d’un grand emprunt supposé financer les « dépenses d’avenir », tente d’apporter des réponses sur ces deux terrains. Sont-elles convaincantes ? Vous me permettrez d’exprimer mes interrogations et mes doutes à ce sujet.
En ce qui concerne la taxation des bonus, l’examen des amendements nous permettra d’expliquer la position de la commission des finances, qui soutient le schéma adopté par l’Assemblée nationale, et d’insister sur la prudence nécessaire pour ne pas désavantager la place de Paris dans la compétition à laquelle elle est soumise.
Nous approuvons sans réserve l’affectation du produit de la taxe à Oséo, ce qui permettra de réduire le déficit budgétaire de près de 300 millions d’euros, tout en contribuant au soutien des PME, qui en ont tant besoin pour surmonter la crise, aller de l’avant en matière de recherche et développement et créer des emplois pérennes.
Par ailleurs, il est indispensable de soumettre l’ensemble de la chaîne décisionnelle et du contrôle à cette taxe, en incluant les responsables hiérarchiques des opérateurs des salles de marché. À cette condition, le dispositif me semble parfaitement lisible : il établit un lien très clair entre la prise de risques par les banques et l’obligation qui leur est faite de participer au rétablissement du fonctionnement normal de notre économie, qui passe par le renforcement des fonds dont disposent nos petites et moyennes entreprises.
Je conclurai sur ce point en exprimant cependant une inquiétude : la France - c’est tout à son honneur – s’est incontestablement placée à la pointe du combat pour un meilleur encadrement des rémunérations au sein du milieu bancaire. Or ce combat n’aura de sens que si nos partenaires nous suivent. Par ailleurs, la question des rémunérations, si sensible, car elle touche à notre conception de la justice sociale, n’est pas épuisée par la taxation des bonus. D’autres rendez-vous nous attendent, concernant notamment les retraites chapeau. Certes, ce sujet n’a pas sa place ici, …