Je salue à cet égard la subtilité du concept novateur de « fonds non consomptibles »…
Certes, par ce collectif, le déficit doit formellement passer de 117, 4 milliards d’euros, chiffre adopté en loi de finances initiale, à 149 milliards d’euros. Cependant, près de la moitié du grand emprunt, soit 16 milliards d’euros environ, est fléchée vers la mission « Recherche et enseignement supérieur ». Ces fonds sont « non consomptibles » : seuls les revenus procurés par leur dépôt au Trésor pourront être dépensés. Le versement aux opérateurs du solde, c'est-à-dire des 19 milliards d’euros restants, sera étalé dans le temps. En conséquence, la dette de l’État ne serait accrue que de 5 milliards d’euros cette année. Encore le commissaire général à l’investissement, René Ricol, a-t-il reconnu devant la commission des finances que les décaissements effectifs ne seraient sans doute pas supérieurs à 2 ou 3 milliards d’euros en 2010.
De 35 milliards d’euros à 2 milliards d’euros, les ordres de grandeur, vous en conviendrez, mes chers collègues, ne sont pas les mêmes ! Restent les apparences offertes aux Français…
En définitive, cette opération revient, d’une certaine façon, à substituer une dette à moyen et long terme à une dette à court terme dont le poids relatif s’était considérablement accru ces derniers mois, notre collègue Jean-Pierre Fourcade l’a excellemment démontré ici même. Vous l’avez compris, mes chers collègues, je ne m’opposerai donc pas à cet emprunt national.
Pour le reste, je partage l’idée selon laquelle nous devons faire preuve tout à la fois d’exigence dans la sélection des projets, afin de maximiser leur impact sur la croissance, et de vigilance s’agissant de la gouvernance du grand emprunt. Celui-ci, en effet, n’est pas seulement une illusion : il s’analyse aussi comme une débudgétisation, qui nous contraint à définir les voies et moyens d’un contrôle efficace du Parlement, conformément à l’esprit de la loi organique relative aux lois de finances.
Les amendements déposés par la commission des finances ont pour objet de nous permettre d’exercer pleinement nos prérogatives en ce domaine. Je voudrais assurer à cet égard nos deux collègues rapporteurs pour avis respectivement de la commission de la culture et de la commission de l’économie que la commission des finances ne jouit d’aucune prééminence en ce domaine ! Toutes les commissions permanentes et, bien sûr, tous les sénateurs sont impliqués dans cette véritable mobilisation générale pour le contrôle.