Intervention de Jacques Blanc

Réunion du 22 juin 2011 à 14h30
Débat préalable au conseil européen du 24 juin 2011

Photo de Jacques BlancJacques Blanc, en remplacement de M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, intervenant dans ce débat au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, je centrerai mon propos sur un point qui nous est apparu très important : l’entrée de la Croatie dans l’Union européenne. En effet, notre commission a travaillé en profondeur sur cette question, qui a donné lieu à un rapport d’information que Didier Boulaud et moi-même avons cosigné. J’évoquerai également l’Union pour la Méditerranée.

Vous constatez, mes chers collègues, qu’il y a une coordination parfaite entre la commission des affaires européennes, qui a établi un rapport sur la Grèce, et la commission des affaires étrangères, qui, de son côté, a présenté un rapport sur la Croatie.

Alors que le Conseil s’apprête à ouvrir la porte de l’Union européenne à la Croatie, vingt ans après son indépendance, quel est l’état de préparation de ce pays, qui – nous l’espérons, comme vous-même d'ailleurs, monsieur le ministre –, sera le vingt-huitième État membre de l’Union ?

Peuplée de 4, 5 millions d’habitants, d’origine slave, de religion catholique et utilisant un alphabet de caractères latins, au carrefour des influences de la Méditerranée, de l’Europe centrale et des Balkans, la Croatie, ancienne république de la Fédération Yougoslave, a une histoire douloureuse, puisqu’elle n’a acquis son indépendance qu’au terme d’un conflit meurtrier, au début des années quatre-vingt-dix.

Sur le plan économique, La Croatie est, après la Slovénie, le pays le plus avancé de la région, avec un revenu moyen par habitant égal à 65 % de la moyenne européenne, deux fois supérieur à celui de la Roumanie, par exemple.

Le système politique croate a été rééquilibré en 2000 en faveur d’un régime parlementaire. Les élections ont amené l’alternance et le pays vit aujourd’hui une cohabitation constructive, autour de trois priorités : adhérer à l’Europe, redresser l’économie et lutter contre la corruption.

Membre de l’OTAN depuis 2009, la Croatie maintient un contingent de 350 hommes en Afghanistan et soutient les opérations en Libye. Elle est membre, depuis l’origine, de l’Union pour la Méditerranée.

La Croatie a obtenu le statut de pays candidat à l’Union européenne en juin 2004 et a entamé ses négociations d’adhésion en octobre 2005 – un processus de longue haleine, qui a connu plusieurs phases d’accélération ou de ralentissement.

Aujourd’hui, le « consensus renouvelé sur l’élargissement » de 2006 a renforcé, vous l’avez souligné, monsieur le ministre, la rigueur du processus d’adhésion. Vous avez rappelé la position de la France, qui a visé non pas à ralentir cette adhésion, mais, au contraire, à la faciliter, comme nous avons pu l’expliquer aux responsables croates, qui l’ont bien compris d’ailleurs.

Une sévérité plus grande que par le passé, c’est vrai, s’attache aux conditions d’élargissement, et il faut reconnaître que les Croates ont, à cet égard, accompli un effort considérable. Les chapitres d’adhésion qui avaient été ouverts ont créé des conditions exigeant des réformes en profondeur.

Ces différents chapitres devaient être clos. Dans le chapitre 8, « Concurrence », et dans le chapitre 23, « Justice et État de droit », un certain nombre de difficultés sont à un moment apparues, mais les autorités – gouvernement et président de la République de Croatie – ont su les maîtriser et les dépasser.

Le problème de la restructuration des chantiers navals n’était pas simple. La Croatie a su, là aussi, faire preuve d’une capacité à analyser objectivement la situation et à prendre les décisions qui s’imposaient.

Dans le chapitre 23 « Justice et État de droit », un sujet politiquement très sensible et exigeant, après qu’un rapport plutôt critique eut été établi par la Commission européenne, on peut constater que les problèmes ont été maîtrisés et que les Croates ont répondu à l’attente qui avait été exprimée.

C’est pourquoi, avec la clause de suivi renforcé, nous espérons bien, monsieur le ministre, que tout pourra être débloqué le 23 ou le 24 juin prochain, lors du sommet. Il faut comprendre l’attente de la population croate, qui risquait de se désespérer. Le signal fort, porté par le Conseil, d’une adhésion à la date du 1er juillet 2013 répondrait à l’attente de ce peuple qui a été si meurtri par le passé.

Vous rappeliez – et on l’oublie souvent – que l’Europe est facteur de paix. Ce n’est qu’au travers d’une démarche volontaire d’adhésion, à laquelle nous devons exprimer notre soutien, que la paix sera assurée dans ce secteur des Balkans.

Aujourd’hui, je peux donc dire – au nom de la commission des affaires étrangère, puisque le rapport que j’ai coécrit avec mon collègue Didier Boulaud a été adopté à l’unanimité – que nous souhaitons ardemment que la France continue de soutenir l’entrée de la Croatie dans l’Union. J’espère que notre pays sera ensuite parmi les premiers à ratifier le traité d’adhésion.

Je voudrais dire à présent un mot de l’Union pour la Méditerranée. À l’heure où s’ouvrent de formidables perspectives démocratiques en Égypte et en Tunisie et où se produisent au Maroc les évolutions, que vous avez rappelées, monsieur le ministre, il n’est pas opportun d’abandonner le grand projet que le Président de la République a proposé à la France et à l’Europe. Au contraire, il faut renforcer les moyens qui lui sont alloués, en garantissant que la règle des « deux tiers-un tiers », qui résulte de l’accord de Barcelone, soit respectée lors de la réforme de la politique de voisinage.

Il faudrait, me semble-t-il, un véritable plan Marshall pour l’ensemble de la Méditerranée, afin que la démocratie ait une chance de s’implanter. Pour cela – je partage votre analyse, monsieur le ministre –, il faut adresser un geste fort à la jeunesse de ces pays, pour qu’elle retrouve foi en son avenir social, politique et économique.

L’énergie déployée par le Président de la République pour défendre l’Europe force notre admiration. Par son intermédiaire, par celui du Gouvernement et, plus précisément, par le vôtre, monsieur le ministre, la France porte un message très fort : ce n’est pas à cause de l’Europe que naissent les crises, c’est, au contraire, grâce à elle que nous pouvons les dépasser dans de meilleures conditions. Nous comptons sur vous pour faire avancer l’Europe !

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