Intervention de Robert Badinter

Réunion du 5 juillet 2007 à 15h30
Récidive des majeurs et des mineurs — Article 1er

Photo de Robert BadinterRobert Badinter :

En fait, les seuls qui pourront justifier de garanties exceptionnelles de réinsertion à leur sortie - cela se voit en particulier aux États-Unis, mais cela pourrait également se produire chez nous -ce sont les fils de famille, ceux dont les parents peuvent affirmer devant la cour d'assises que, dans dix ans, ils assureront à leur fils, au moment de sa sortie de prison - on pense à certains crimes qui ont défrayé dans le temps la chronique -, les garanties d'une réinsertion grâce aux moyens dont ils disposent et parce qu'ils auront pu produire au préalable des contrats indiquant que leur fils sera, à ce moment-là, apte à entrer dans telle ou telle entreprise étrangère.

Mais croyez-vous que les autres pourront justifier de telles garanties ? Ce sera toujours, et seulement, le fils du banquier ou de la grande avocate qui pourra en bénéficier.

Par conséquent, en ne retenant que cette disposition, on crée, à l'intérieur d'une disposition pénale d'exception, un véritable clivage social en permettant à certains, en fonction de leur situation sociale ou de celle de leurs parents, de pouvoir, remplir les conditions qu'il sera impossible aux justiciables des banlieues de jamais réunir !

Voilà pourquoi il faut absolument en revenir au principe général que j'ai mentionné : les circonstances, la personnalité de l'accusé.

C'est la raison pour laquelle nous soutenons l'amendement de la commission des lois.

Comme d'autres, je me suis, moi aussi, demandé si la mention « à titre exceptionnel » ne voulait pas dire « garanties exceptionnelles ».

Nous proposons une formule que je crois plus satisfaisante, à savoir les circonstances de l'infraction, la personnalité de son auteur, des garanties suffisantes d'insertion ou de réinsertion, et nous supprimons l'expression « à titre exceptionnel ».

Quoi qu'il en soit, sur le principe et en dehors de ces mentions de texte, il ne fait aucun doute qu'on ne peut laisser figurer seulement la garantie de réinsertion tant il est vrai que cela revient à nier le principe de l'individualisation des peines et, pis encore, à effectuer une sélection entre des accusés en fonction de leur situation sociale ou de celle de leur famille.

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