Madame le garde des sceaux, par votre projet de loi, vous obligez le juge qui souhaite appliquer des peines inférieures aux peines minimales à motiver sa décision quelle que soit la nature de la peine prononcée : emprisonnement ferme, emprisonnement avec sursis, peine alternative à l'emprisonnement.
Cet amendement, comme, d'ailleurs, l'amendement n° 22, qui sera examiné dans quelques instants, tend à éviter d'imposer au juge de devoir motiver systématiquement ses décisions.
En effet, l'obligation de motivation est un facteur d'inflation procédurale : elle induit un allongement de la procédure, si bien qu'il pourra être reproché aux juges, parce qu'ils seront débordés, d'être laxistes. Leur imposer un rallongement des procédures ne peut que justifier cette lourdeur et cette impossibilité à motiver.
L'obligation de motivation du juge ne devrait porter que sur les peines les plus graves, autrement dit les peines d'emprisonnement ferme, et ne devrait pas concerner toutes les peines, y compris les peines alternatives à la prison.
Je rappelle les termes du second alinéa de l'article 132-19 du code pénal : « En matière correctionnelle, la juridiction ne peut prononcer une peine d'emprisonnement sans sursis qu'après avoir spécialement motivé le choix de cette peine. Toutefois, il n'y a pas lieu à motivation spéciale lorsque la personne est en état de récidive légale. »
Ce projet de loi va donc mettre en distorsion ce second alinéa de l'article 132-19 et le futur article 132-19-1, puisqu'il va imposer une obligation de motivation en cas de peine prononcée contre un récidiviste.
Enfin, parce qu'il est de notre devoir non seulement d'éviter toute inflation judiciaire, mais aussi de permettre un traitement diligent des affaires et de veiller à ce que les juges bénéficient de conditions de travail respectueuses et dignes, nous refusons la motivation obligatoire et systématique. Cet amendement vise donc à supprimer la référence à une obligation de motivation en laissant jouer, bien entendu, l'alinéa 2 de l'article 132-19, qui - je le rappelle - tend à exclure l'obligation de motivation en cas de récidive légale.