Intervention de Odette Herviaux

Réunion du 25 mai 2010 à 14h30
Modernisation de l'agriculture et de la pêche — Article 3

Photo de Odette HerviauxOdette Herviaux :

Monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaiterais préciser notre position à l’égard de l’article 3, car nous abordons là le fond du problème, si je puis m’exprimer ainsi. Comme l’a si bien dit mon collègue Paul Raoult, on y trouve un certain nombre d’éléments qui soulignent combien nous pouvons parfois avoir une vision différente de l’agriculture.

Depuis le début des débats, nous n’avons cessé de défendre une régulation publique de l’offre au niveau européen, en insistant sur l’importance de prendre en compte la volonté plus ou moins forte des États de mettre en place les moyens humains et financiers nécessaires. Il convient de faire en sorte que le modèle agricole puisse se perpétuer, comme cela a été le cas en France.

Nous voulons une agriculture forte, performante si ce n’est compétitive, « écoproductive », une agriculture rémunératrice, plus juste, plus équitable, une agriculture pourvoyeuse d’emplois tout en garantissant des systèmes de production variés, une agriculture aménageuse du territoire.

Tel a été le discours que nous avons répété, comme un leitmotiv, tout au long de la défense de nos différents amendements.

Chacun l’a reconnu, les contrats peuvent avoir leur utilité : ils constituent parfois des garde-fous nécessaires contre certaines pratiques, notamment dans le cadre des coopératives ; il y a eu ainsi de très bons contrats, à l’image des CTE, permettant de prendre en compte l’ensemble des problèmes agricoles.

Toutefois, une contractualisation trop vague et limitée aux relations économiques entre producteurs et acheteurs peut, si l’on n’y prend garde, se révéler dangereuse.

Le dernier amendement dont nous avons débattu illustre bien les inquiétudes des agriculteurs. En effet, comment leur assurer que nous sommes contre tout ce qui pourrait les placer dans un état de dépendance ou de subordination vis-à-vis l’acheteur ?

On nous dit que ces contrats sont à même de garantir des prix plancher, alors même que le texte de loi ne fait référence qu’à des clauses relatives aux critères et modalités de détermination des prix. Vous avez d’ailleurs fait porter la responsabilité de cette faille à l’Europe, monsieur le ministre.

On nous dit également que les organisations professionnelles pourront demander l’application du principe de prix plancher. Il en va de même pour la durée minimale, qui peut varier selon les filières.

La médiation de la puissance publique est absolument nécessaire et les dispositions du texte de loi sont à cet égard insuffisantes. L’absence de reconnaissance expresse du droit à une rémunération équitable, à défaut de garantir les revenus, constitue la principale faiblesse de cet article.

Nous avons déposé des amendements, trop vagues pour certains, visant à garantir un niveau de rémunération décent. Nous avons proposé des contrats respectant le principe de juste rémunération des producteurs et de transparence dans la fixation des prix. Nous avons même demandé, toujours sans succès, que ces derniers soient au moins égaux aux coûts de production incluant la rémunération du travail.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, on ne peut pas se contenter de dire que la profession agricole serait la seule autorisée dans notre pays à vendre à perte !

C’est pourquoi, malgré la qualité de nos débats et les tentatives honorables de l’ensemble des membres de cette assemblée, nous sommes au regret de voter contre cet article.

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