Intervention de Paul Raoult

Réunion du 25 mai 2010 à 14h30
Modernisation de l'agriculture et de la pêche — Article 3

Photo de Paul RaoultPaul Raoult :

Une fois encore, je me retrouve assez largement dans les propos de M. Deneux.

En revanche, je ne crois absolument pas à ce que vous proposez, monsieur le ministre. Cela supposerait que l’agriculture française soit complètement tournée vers les marchés mondiaux et qu’elle s’aligne sur les prix de ces marchés. Ce n’est pas possible, nous allons à la catastrophe !

Il faut définir précisément le rôle de l’agriculture française et européenne à l’époque actuelle : si l’objectif est de partir à la conquête des marchés mondiaux, on pourra toujours courir après ceux qui ont des prix très inférieurs aux nôtres.

C’est donc la philosophie de la politique agricole européenne que nous contestons fondamentalement. Le rôle de l’agriculture européenne est de nourrir la population, en appliquant la préférence communautaire. Au lieu d’aller acheter du soja américain pour nourrir nos bêtes, nous ferions mieux de nous fournir auprès de nos propres agriculteurs.

Les conditions du marché mondial font que notre agriculture, j’y insiste, doit d’abord servir à nourrir notre population. Nous devons rétablir une stricte préférence communautaire. En effet, quel pays applique réellement les règles de la libre concurrence aujourd’hui ? Dans le domaine agricole, personne n’est plus protectionniste que les États-Unis, le Japon ou le Brésil ! L’Europe est finalement la seule à ouvrir grand les portes, tout en déplorant que ses agriculteurs ne puissent pas vivre décemment.

On peut faire des contrats, ici ou là, avec les agriculteurs que l’on aura réussi, après moult efforts, à rassembler dans les interprofessions, quand beaucoup d’autres refuseront une telle démarche, et négocier avec des industriels ou des centrales d’achat. De toute façon, ces derniers resteront les plus puissants et imposeront leurs diktats, quelles que soient les lois que nous voterons.

Votre texte est sans doute plein de bonne volonté, et l’on peut faire semblant d’y croire. Mais, fondamentalement, il ne changera pas la donne en termes de fixation des prix, il ne permettra pas aux agriculteurs de vivre de leur production. Il faut donc redéfinir la philosophie de notre politique agricole européenne, pour que nos agriculteurs puissent vivre en nourrissant la population européenne !

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