Monsieur le secrétaire d’État, finalement, la discussion de ce projet de loi arrive à son terme !
Vous devez cet aboutissement au soutien de votre majorité parlementaire, qui a adopté la finalité de votre projet et n’en conteste pas la faisabilité. Or c’est précisément l’une et l’autre que le groupe socialiste ne partage pas.
Sans revenir sur nos débats initiaux, l’absence de navette parlementaire ne nous a pas permis de nous faire entendre suffisamment, mais la commission mixte paritaire, qui s’est déroulée dans un bon climat, ne nous a pas laissé davantage d’espace. Il faut dire que l’affaire était bouclée dès l’abord, monsieur le secrétaire d’État, grâce au compromis que vous aviez négocié avec votre majorité.
La finalité qui nous inspire a été exprimée par les Franciliens et leurs élus : ils veulent disposer d’un réseau de transports apte à leur faciliter la vie, de villes à vivre et, d’une manière générale, d’un cadre de vie épanouissant.
Vous avez voulu faire de la double boucle de transports le symbole de votre projet de loi en l’opposant tout au long des débats à Arc Express, projet de la région, mais le compromis majoritaire de la commission mixte paritaire sur le débat public simultané ne doit pas masquer l’essentiel.
Nul ne peut contester les deux points forts du projet Arc Express de la région, à savoir son financement, qui est assuré, et son maillage avec le réseau francilien, qui assure la desserte de la zone dense. La double boucle, quant à elle, repose sur une finalité théoriquement guidée par le souci économique, mais la démonstration n’est toujours pas faite de son insertion dans le réseau existant, ni dans celui que va construire la région.
En renvoyant au débat public le soin de choisir entre les deux visions, la commission mixte paritaire, et donc la majorité parlementaire, a refusé de trancher. Avouons-le, ce « choix » n’est pas très glorieux de la part du législateur ! Le rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale n’a pas craint de prétendre avoir « sauvé le soldat Huchon ». C’est une forfanterie, car nous n’avions pas compris que le président Huchon fût en danger, au vu du score réalisé dans les urnes le 21 mars dernier !
Mais revenons aux choses sérieuses !
En entretenant le flou, le risque est grand in fine que ne soit réalisé à moyen terme qu’un tout petit morceau du Grand huit, qui serait commun à Arc Express, et, compte tenu des délais de réalisation, le non-choix de la majorité parlementaire renvoie à plus tard, beaucoup plus tard – peut-être même trop tard ! – les vrais choix.
Le développement économique en pâtira, alors qu’il était la motivation initiale du secrétaire d’État et du rapporteur, et tout le monde y aura perdu : les Franciliens, dont les besoins de mobilité rythment la vie quotidienne, et l’ensemble du territoire français, qui n’a rien à gagner à l’affaiblissement de sa région capitale. En effet – je le rappelle, car on l’oublie trop souvent – l’Île-de-France a une très forte capacité de redistribution à l’égard des autres régions.
Quant à la faisabilité d’une telle infrastructure, et donc sa crédibilité et son délai de réalisation, elle est mise en doute par la faiblesse du financement apporté par le Gouvernement.
Vous avez égrainé, monsieur le secrétaire d’État, un certain nombre de possibilités de financement tout au long de l’examen du texte, mais, au final, votre schéma repose soit sur des financements virtuels, soit sur des financements hasardeux.
La seule réalité tangible est l’affectation au budget de la Société du Grand Paris de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux, l’IFER, qui est due par le réseau de transport et donc, dans ce cas précis, par l’autorité organisatrice des transports – le STIF –, émanation des collectivités territoriales de l’Île-de-France. C’est tout de même extravagant ! En effet, vous n’avez eu de cesse d’écarter et la région et le STIF de la gouvernance effective de votre projet.
Les deux rapporteurs se sont engagés, lors de la commission mixte paritaire, à aménager le tarif de cette IFER due par le STIF dans le cadre d’une prochaine loi de finances.
Monsieur Fourcade, ce renvoi à la loi de finances est une commodité de langage que nous connaissons bien, mais qui est très rarement suivie d’effets ! Je ne veux pas parler de promesse de Gascon – j’ai trop de respect pour les rives de la Garonne, du Tarn et de bien d’autres fleuves que nous aimons les uns et les autres…