Intervention de Didier Guillaume

Réunion du 25 mai 2010 à 22h15
Modernisation de l'agriculture et de la pêche — Article 5

Photo de Didier GuillaumeDidier Guillaume :

Monsieur le président, le verbe « poursuivre » est approprié puisque je vais intervenir dans la continuité de notre collègue Claude Bérit-Débat, notamment sur cet article 5 qui va rétablir l’interdiction de la pratique des rabais, remises et ristournes. Il s’agit d’une bonne disposition, qui semble unanimement saluée dans cet hémicycle.

Vous le voyez, monsieur le ministre, au cours de l’examen cette loi nous ne sommes pas uniquement dans l’opposition, nous n’adoptons pas seulement des postures négatives. Nous faisons un certain nombre de propositions, même si rares sont celles qui sont acceptées.

Nous savons reconnaître aussi quand, dans votre projet de loi ou dans le texte résultant des travaux de la commission, il y a de bonnes choses. Nous le disons sans fard, car cela va dans l’intérêt de l’agriculture de notre pays.

Je m’interroge toutefois sur l’exception qui figurait dans le texte adopté en conseil des ministres pour les périodes de crise conjoncturelle. Claude Bérit-Débat a insisté sur ce point, je n’y reviens pas.

Permettez-moi cependant de me réjouir de la sagesse du Gouvernement pour avoir retenu, en commission, l’amendement du rapporteur sur lequel nous étions unanimes. C’est une bonne chose.

Mes chers collègues, si nous ne voulons pas faire adopter une loi « au rabais », une loi qui décevrait pour partie le monde agricole, ne devrait-on pas étendre cette interdiction générale pour tous les produits agricoles périssables et pas seulement pour les fruits et légumes ?

Particulièrement sensible à cette filière en tant qu’amateur des fruits du magnifique verger de la vallée du Rhône, il me semble souhaitable que notre réflexion profite à l’ensemble des produits agricoles périssables et donc singulièrement exposés à la volatilité des prix.

Je me permets de m’attarder un instant sur la notion même de crise conjoncturelle, point qui a déjà été évoqué par l’orateur précédent. Cette notion reste vague. On estime que l’on se trouve en situation de crise conjoncturelle lorsque le prix de cession du produit est anormalement bas par rapport à la moyenne des prix observés lors des cinq dernières campagnes.

Or la crise qui touche aujourd’hui les agriculteurs dure depuis plus d’un an. Malheureusement, cette crise ne se terminera peut-être pas du jour au lendemain.

Elle affecte l’ensemble des filières, elle est donc d’ordre structurel. Pour que cette loi de modernisation ait un sens, ce ne sont pas uniquement des mesures conjoncturelles qui doivent être prises, quand il y a lieu de s’attaquer à l’organisation structurelle de l’agriculture, j’ai déjà eu l’occasion d’évoquer ce point.

Monsieur le ministre, lors de votre audition, vous nous avez dit être prêt à poursuivre dans cette voie. Il est évident que nous soutenons cette démarche, à condition qu’elle trouve une certaine continuité dans l’hémicycle.

L’attitude volontariste adoptée par le Gouvernement en la matière est porteuse d’espoirs. Mais n’oublions pas que c’est ce même gouvernement qui a fait adopter la loi LME, en août 2008, ce qui a permis de faciliter la négociation des marges avant, les fameux « 3 R », dans le but de faire disparaître les marges arrière.

Le texte qui nous est proposé revient sur cette possibilité pour les fruits et légumes, le Gouvernement reconnaissant ainsi de façon implicite avoir fait une erreur manifeste de jugement.

Déjà, dans le code de commerce en vigueur, il est prévu un arsenal législatif destiné à sanctionner les pratiques visant à imposer des prix de première cession abusivement bas pour toute une liste de produits. Le code rural définit également des outils qui pourraient s’avérer précieux afin d’encadrer les relations commerciales, mais ces outils ne sont pas utilisés.

Par exemple, il est possible, puisque cette disposition existe d’un point de vue législatif, de conclure des accords entre l’État et les entreprises de commercialisation et de distribution afin de répercuter la baisse des prix de cession des produits agricoles sur les prix de vente à la consommation – c’est un peu technique, mais précis ! Il est aussi possible d’instaurer un coefficient multiplicateur dans le secteur des fruits et légumes, mesure que notre groupe soutient.

En matière de limitation des pratiques commerciales douteuses, nous pouvons faire changer les pratiques si nous le souhaitons collectivement. Tel est le sens de cette intervention et des amendements qui suivront.

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