Séance en hémicycle du 25 mai 2010 à 22h15

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • LME
  • agriculteurs
  • alimentaire
  • commerciale
  • fruits
  • fruits et légumes
  • l’observatoire
  • marge
  • producteur

La séance

Source

La séance, suspendue à vingt heures dix, est reprise à vingt-deux heures quinze, sous la présidence de M. Guy Fischer.

Photo de Guy Fischer

La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’article 4.

Le code de commerce est ainsi modifié :

1° L’article L. 441-2 est ainsi rédigé :

« Art. L. 441-2. – I. – Toute publicité à l’égard du consommateur, diffusée sur tout support ou visible de l’extérieur du lieu de vente, mentionnant une réduction de prix ou un prix promotionnel sur les produits alimentaires périssables doit préciser la nature et l’origine du ou des produits offerts et la période pendant laquelle est maintenue l’offre proposée par l’annonceur. La mention relative à l’origine est inscrite en caractères d’une taille égale à celle de l’indication du prix.

« Lorsque de telles opérations promotionnelles sont susceptibles, par leur ampleur ou leur fréquence, de désorganiser les marchés, un arrêté interministériel ou, à défaut, préfectoral fixe, pour les produits concernés, la périodicité et la durée de telles opérations.

« Toute infraction aux dispositions des alinéas premier et deuxième est punie d’une amende de 15 000 €.

« La cessation de la publicité réalisée dans des conditions non conformes aux dispositions du présent article peut être ordonnée dans les conditions prévues à l’article L. 121-3 du code de la consommation.

« II. – Pour un fruit ou légume frais ayant fait l’objet, entre le fournisseur et son client, d’un accord sur le prix de cession, l’annonce de prix, hors lieu de vente, est autorisée dans un délai maximal de soixante-douze heures précédant le premier jour de l’application du prix annoncé, pour une durée qui ne peut excéder cinq jours à compter de cette date.

« L’accord sur le prix de cession est formalisé dans un contrat écrit signé par les parties, dont un exemplaire est détenu par chacune d’entre elles avant la diffusion de l’annonce de prix hors lieu de vente. Les dispositions du présent alinéa ne s’appliquent pas aux annonces de prix réalisées sur le lieu des ventes au déballage mentionnées à l’article L. 310-2 du présent code.

« III. – Dans tous les autres cas, toute annonce de prix, hors lieu de vente, portant sur un fruit ou légume frais quelle que soit son origine doit faire l’objet d’un accord interprofessionnel d’une durée d’un an renouvelable, conclu conformément aux dispositions de l’article L. 632-1 du code rural. Cet accord précise les périodes durant lesquelles une telle annonce est possible et ses modalités.

« Cet accord peut être étendu conformément aux dispositions des articles L. 632-3 et L. 632-4 du même code.

« IV. – Les II et III ne sont pas applicables aux fruits et légumes frais appartenant à des espèces non produites en France métropolitaine. » ;

2° L’article L. 441-2-1 est complété par un dernier alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions des deux précédents alinéas ne sont pas applicables aux produits pour lesquels la conclusion de contrats écrits a été rendue obligatoire en application de l’article L. 631-24 du code rural. » ;

3° Au premier alinéa des articles L. 924-3 et L. 954-3, les mots : « dernier alinéa » sont remplacés par les mots : « dernier alinéa du I » ;

4° Après l’article L. 441-3, il est inséré un article L. 441-3-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 441-3-1. – Les fruits et légumes frais destinés à la vente ou à la revente à un professionnel établi en France doivent, lors de leur transport sur le territoire national, y compris dans l’enceinte des marchés d’intérêt national, être accompagnés d’un bon de commande établi par l’acheteur ou le commissionnaire. Le bon de commande doit mentionner le nom des parties, leur adresse, la date de la commande, la quantité, les modalités de détermination du prix et la dénomination précise des produits. » ;

5° Le I de l’article L. 442-6 est complété par un 11° et un 12° ainsi rédigés :

« 11° D’annoncer des prix hors lieu de vente, pour un fruit ou légume frais, sans respecter les règles définies à l’article L. 441-2 ;

« 12° De ne pas joindre aux fruits et légumes destinés à la vente ou à la revente à un professionnel établi en France lors de leur transport sur le territoire national un bon de commande établi conformément aux dispositions de l’article L. 441-3-1. »

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Claude Bérit-Débat, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec l’article 4, nous touchons un point central des relations commerciales dans le secteur des fruits et légumes. Cet article prévoit en effet de durcir les conditions de publicité des produits, notamment lorsque ces publicités mentionnent une réduction de prix ou un prix promotionnel.

On ne peut, effectivement, que partager l’idée selon laquelle une meilleure information des consommateurs constituerait une incitation à une plus grande transparence dans les relations entre les producteurs et les distributeurs. Pourtant, on pourrait dire que cette façon de voir revient à entériner une situation de fait plus qu’elle ne la remet en cause.

Cette situation de fait, ce n’est ni plus ni moins que le déséquilibre profond qui existe entre les contractants : tandis que les distributeurs sont relativement concentrés, les producteurs pâtissent de l’éclatement de leur profession. C’est cette asymétrie de fait qui rend les négociations entre distributeurs et producteurs si inégales.

Si l’on ne s’attaque pas aux racines du mal, à savoir la manière dont les contrats sont passés, on ne pourra pas remédier à cette situation.

Dans cette perspective, le durcissement des conditions de publicité est une bonne chose, mais il ne résout pas la question posée.

D’ailleurs, je considère que cet article 4 est surtout un révélateur, celui de l’échec de la loi de modernisation de l’économie, dite LME. En effet, celle-ci n’a eu d’autre conséquence que de renforcer le déséquilibre entre les protagonistes du secteur agricole. Elle a finalement accru la dépendance des producteurs envers les distributeurs puisqu’elle a permis une libre négociation des prix.

La situation est encore plus délicate pour les producteurs de fruits et légumes frais : leurs produits n’étant pas transformables, ils doivent les écouler rapidement, coûte que coûte, dirais-je ; aussi sont-ils encore plus totalement soumis aux diktats des distributeurs.

Le durcissement des conditions de publicité est certes une adaptation intéressante. Toutefois, je l’ai indiqué, elle ne nous semble pas suffisante. Ce n’est pas en fin de chaîne, sur les étiquettes, qu’il faut agir : c’est à la fois au début et à la fin de la chaîne que les choses doivent être repensées.

Enfin, certaines dispositions de l’article doivent indubitablement être précisées. Ainsi, l’alinéa 4, dans la rédaction qui nous est en donnée, est assez flou. Il dispose en effet que, si des offres promotionnelles « sont susceptibles, par leur ampleur ou leur fréquence, de désorganiser les marchés », alors un arrêté fixera la périodicité et la durée de ces opérations. Le problème qui se pose est donc de savoir ce que l’on entend en visant la désorganisation des marchés. S’agit-il d’une chute des cours ? S’agit-il d’une chute durable ? Qu’est-ce qu’une chute durable, d’ailleurs ? Peut-on la déterminer aussi facilement que, par exemple, une entrée en récession ?

Vous le constatez, la disposition est floue, et il me semble important, monsieur le ministre, que vous apportiez les précisions qui s’imposent.

Il en va de même pour l’ampleur et la fréquence des opérations promotionnelles. Pour ce qui est de la fréquence, d’ailleurs, la question est pour ainsi dire résolue avant même d’être posée puisque les distributeurs procèdent à de telles opérations tout au long de l’année. Dans ces conditions, la logique voudrait presque que l’on fixe d’ores et déjà la périodicité et la durée des opérations promotionnelles, ce qui serait assez cohérent avec la réalité.

Je soulignerai pour conclure que, si l’article 4 comporte des dispositions intéressantes, il résonne aussi, finalement, comme un aveu – un aveu de faiblesse, puisque le texte ne va pas au bout de ce qui devrait être fait pour aider les producteurs agricoles. Nous pourrons certainement l’améliorer, mais je doute que, en définitive, il soit suffisant.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Didier Guillaume, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Dans la droite ligne de l’intervention de notre collègue Claude Bérit-Débat, je voudrais me féliciter de ce que la question des promotions et de la publicité soit abordée dans le projet de loi, car, à travers elle, c’est la question des rapports commerciaux entre producteurs et distributeurs qui est posée, sujet qui nous occupe depuis déjà quelques heures. En effet, la « publicité hors lieu de vente », les « promotions ou autres annonces de réduction de prix », sont des termes qui désignent notamment les relations entre les producteurs et la grande distribution, autant le dire clairement dans cet hémicycle.

Dans tous les secteurs économiques, les opérations promotionnelles sont encadrées pour protéger principalement les consommateurs et veiller à ce qu’ils ne soient pas abusés. Dans le domaine agricole, on en est à devoir protéger le producteur : cela traduit bien un malaise réel ! Pourquoi protéger le producteur ? Tout simplement pour qu’il puisse vendre ses produits à un prix qui ne soit pas inférieur au prix de revient…

La logique commerciale qui consiste à attirer le consommateur en lui proposant un prix toujours plus bas met le secteur productif trop souvent en péril. Je crois qu’il faut avancer sur ce sujet et dire clairement que, si les producteurs doivent pouvoir vendre leurs produits à un prix leur permettant de vivre décemment, on ne peut pas continuer, à l’autre bout de la chaîne, de promettre aux consommateurs que les produits seront toujours les moins chers, ne serait-ce que parce que l’on constate que ce n’est pas toujours le cas – nous évoquions cet après-midi la différence entre le prix payé au producteur et le prix affiché en magasin.

Or que constate-t-on ? Tout au long de l’année, les agriculteurs sont confrontés à la puissance des distributeurs en matière de négociation commerciale. Ceux-ci mobilisent trop souvent l’outil promotionnel pour augmenter structurellement leurs marges. Car c’est bien de cela qu’il s’agit ! Nous souhaitons, effectivement, aborder les relations entre les producteurs et la grande distribution, mais il ne faut pas oublier les difficultés que peut rencontrer l’ensemble du circuit de distribution !

Les agriculteurs nous le disent d’ailleurs très clairement : leurs productions ne doivent pas servir de produits d’appel pour faire venir le client dans les grandes surfaces. Le distributeur a certes besoin d’attirer des consommateurs, mais son intérêt, contrairement à ce qui se passe parfois aujourd’hui, ne doit pas mettre en péril un secteur tout entier. Il importe que le long terme prenne le pas sur le court terme. Le principe d’une opération promotionnelle, c’est d’être conjoncturelle et de le demeurer.

La particularité du secteur agricole – Claude Bérit-Débat évoquait à l’instant la filière fruits et légumes – tient à la nature du produit. Sa principale qualité est sa fraîcheur, mais c’est aussi son principal défaut : les produits ont une durée de vie limitée, ils sont donc périssables. Nous ne sommes pas dans l’industrie de la chaussure ou de l’automobile, où le vendeur, pour faire rentrer de la trésorerie, fait du déstockage et vend les modèles de la saison précédente ! Le producteur de cerises, de pêches, de salades, est mécaniquement dans une position d’infériorité commerciale par rapport au distributeur : le temps joue contre lui. Pour résumer, soit il se résout à brader sa production et à diminuer sa marge, soit sa production est dépréciée, voire perdue.

Si le Gouvernement a choisi de traiter cette question dans le projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, c’est bien la preuve que, actuellement, il y a un problème. La question est donc de savoir si ce texte apporte les réponses nécessaires

À nos yeux, il faut réglementer ces pratiques et fixer des règles contraignantes. Nous partageons le constat et la finalité, monsieur le ministre, mais nous nous interrogeons sur les conséquences réelles du texte qui nous est soumis. Les dispositions proposées sont en effet en grande partie identiques à celles qui sont actuellement en vigueur. Ainsi, il est déjà obligatoire de préciser sur la publicité la nature et l’origine des produits, ainsi que la durée de l’offre.

Nous considérons que l’accord sur le prix de cession de fruits ou de légumes frais, désormais formalisé dans un contrat écrit avant l’annonce de prix hors du lieu de vente, peut représenter une avancée en termes de transparence. En revanche, nous regrettons que les possibilités d’amende soient restreintes : si le projet de loi était voté en l’état, les amendes ne s’appliqueraient qu’en cas d’infraction aux règles de publicité en période promotionnelle.

Monsieur le ministre, vos intentions sont louables, mais nous sommes perplexes quant aux résultats qui seront réellement obtenus. Nous essaierons de montrer pourquoi à l’occasion de la discussion de l’article 4, notamment lors de la présentation de nos amendements.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L’amendement n° 663, présenté par M. César, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Remplacer les mots :

alinéas premier et deuxième

par les mots :

premier et deuxième alinéas

La parole est à M. Gérard César, rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Il s’agit d’une amélioration purement rédactionnelle.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

M. Bruno Le Maire, ministre. Je suis favorable à cette percée conceptuelle !

Rires

L’amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L’amendement n° 266, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Compléter cet alinéa par les mots :

pour une personne physique et de 75 000 euros pour une personne morale

La parole est à M. Gérard Le Cam.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

L’article 4 du projet de loi a pour ambition de remédier aux dérives auxquelles peuvent conduire certaines pratiques commerciales de la distribution dans les secteurs des fruits et légumes et des produits frais.

Nous ne pouvons que nous en satisfaire, même si nous constatons que les évolutions proposées sont marginales pour ce qui est de la réécriture de l’article L. 441-2 du code de commerce. Pourtant, comme le reconnaît le rapporteur, il s’agit d’un secteur où nous ne pouvons que constater l’absence de formalisation des règles liant les producteurs aux acheteurs. Toute incitation à la contractualisation est donc positive.

Il reste en effet nécessaire d’encadrer ces pratiques, en particulier en matière de publicité hors des lieux de vente mentionnant une réduction de prix ou un prix promotionnel.

Ainsi, le présent article prévoit des règles spécifiques concernant, notamment, la nature et l’origine des produits vendus. Le non-respect de ces règles, selon le texte actuellement récrit par la commission, qui ne modifie pas le droit applicable aujourd’hui, peut être sanctionné par 15 000 euros d’amende.

Nous estimons, pour notre part, que le montant de cette sanction n’est pas suffisamment dissuasif et n’a pas fait la preuve de son efficacité. Pour cette raison, nous vous proposons, mes chers collègues, de distinguer entre personnes physiques et personnes morales et, pour ces dernières, de porter la sanction à 75 000 euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Les infractions aux dispositions prévues en matière de publicité hors du lieu de vente sont déjà sanctionnées par une amende administrative de 15 000 euros. La commission estime que prévoir une sanction de 75 000 euros pour les personnes morales serait disproportionné. L’avis est donc défavorable.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

L’avis est également défavorable. Je considère que la sanction déjà prévue est proportionnée.

L’amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L’amendement n° 265, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 11

Supprimer le mot :

métropolitaine

La parole est à M. Gérard Le Cam.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Nous l’avons dit, nous sommes plutôt favorables à un encadrement plus strict de la publicité hors des lieux de vente mentionnant une réduction de prix ou un prix promotionnel pour les fruits et légumes frais.

Cependant, nous nous interrogeons sur la disposition qui limite le champ d’application de ces mesures aux fruits et légumes frais appartenant à des espèces non produites en France métropolitaine.

Si nous pouvons comprendre que ces dispositions soient limitées aux produits français – notamment parce qu’il est fait référence à des accords interprofessionnels –, nous ne pouvons, à l’inverse, admettre la différence de traitement ainsi créée entre la France et l’outre-mer.

Pour cette raison, nous vous proposons de supprimer dans le présent alinéa la mention « métropolitaine », afin de respecter l’impératif constitutionnel d’égalité de traitement sur le territoire national, lequel ne se limite pas à la seule métropole.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Gérard Le Cam, par son amendement, propose d’étendre le dispositif aux fruits et légumes frais appartenant à des espèces produites dans les collectivités d’outre-mer.

Je rappelle que les fruits et légumes d’espèces non produites en France métropolitaine ne sont pas concernés par le dispositif. Il s’agit par exemple des litchis, mangues, ananas, bananes, et cætera. Cependant, plus aucune disposition particulière au titre de cet article ne contraint les annonces de prix de ces produits.

Il faut ajouter que l’arrivée massive sur le marché, à prix cassés, concerne surtout des produits provenant d’Europe continentale – tomates, fraises – pour lesquels il existe une concurrence de proximité.

Par conséquent, l’encadrement de la publicité promotionnelle est surtout justifié pour ces produits, mais est inutile pour les autres. L’avis est défavorable.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

L’avis est également défavorable, mais je suggère volontiers à Gérard Le Cam de retirer son amendement. En effet, les annonces sur les prix hors des lieux de vente sont régies par l’article L. 441-2 du code de commerce, et l’on ne peut y déroger que par accord interprofessionnel, pour adapter les modalités de ces promotions en fonction de la nature des produits.

Or, les fruits et légumes qui sont produits dans les départements d’outre-mer ne sont pas couverts par une interprofession leur permettant de prendre cet accord interprofessionnel. Par conséquent, il reste aux départements d’outre-mer à se « munir » de cette interprofession afin de pouvoir prendre cet accord interprofessionnel, et bénéficier ainsi de ces règles concernant les annonces de prix hors des lieux de vente.

Si l’on s’en tenait à votre amendement, monsieur Le Cam, les fruits et légumes produits dans les départements d’outre-mer ne pourraient faire l’objet de modalités particulières de promotion. En définitive, ils auraient été pénalisés. En l’absence d’interprofession, je pense donc qu’il est plus raisonnable de retirer l’amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Monsieur Le Cam, l’amendement n° 265 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 265 est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 337 rectifié, présenté par MM. Houpert, Beaumont, Frassa, Houel et Milon, Mmes Malovry et Hummel et MM. Jarlier, B. Fournier et Lefèvre, est ainsi libellé :

Alinéa 16, seconde phrase

I. - Supprimer les mots :

les modalités de détermination du prix et

II. - Compléter cette phrase par les mots :

, ainsi que le prix unitaire hors TVA des produits vendus et des services rendus ainsi que toute réduction de prix acquise à la date de la vente ou de la prestation de services et directement liée à cette opération de vente ou de prestation de services, à l'exclusion des escomptes non prévus sur la facture

La parole est à M. Alain Houpert.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Houpert

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet amendement est d’ordre rédactionnel. Il s’agit de préciser l’objet du bon de commande de manière que l’on y retrouve les éléments essentiels de la future facture. En d’autres termes, il s’agit de définir plus précisément le prix dans le bon de commande, afin de protéger le producteur vis-à-vis de la distribution, et en particulier de la grande distribution.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 268, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 16, dernière phrase

Après les mots :

détermination du prix

insérer les mots :

qui ne peut être inférieur au prix minimum indicatif

La parole est à Mme Évelyne Didier.

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous souhaitons revenir à l’idée du prix minimum indicatif.

Le présent article vise à encadrer les pratiques commerciales actuelles, contestables, qui consistent à introduire, notamment au sein des marchés d’intérêts nationaux et chez les grossistes, d’importantes quantités de marchandises non commandées, trouvant preneur à bas prix. Cette pratique a bien entendu pour conséquence directe de faire chuter le cours des prix des produits agricoles.

Ainsi, le présent article créé un article nouveau L. 441-3-1 au code de commerce, afin de rendre obligatoire la détention d’un bon de commande dans le cas particulier des transactions en différé de facturation pour les fruits et légumes frais destinés à la vente ou à la revente à un professionnel établi en France et circulant sur le territoire national.

Par cet amendement, nous souhaitons réintroduire la notion de prix minimum indicatif. En effet, comme vous le savez, nous proposons de longue date l’établissement de ce prix minimum pour chaque production, défini par l’interprofession compétente, et qui pourrait s’appuyer sur une concertation au sein de l’établissement national des produits de l’agriculture et de la mer, à défaut des offices agricoles que vous avez supprimés.

Ce prix minimum indicatif prenant en compte l’évolution des charges de production et des revenus des producteurs pourrait ainsi être revu régulièrement et servir de levier dans la négociation.

Ce serait également, par la définition d’une garantie minimum de revenu pour les producteurs, un élément permettant de lutter contre les marges abusives de la grande distribution.

Comprenons-nous bien : par cet amendement, nous ne rendons pas obligatoire la définition d’un prix minimum indicatif, mais nous encourageons les interprofessions à le faire.

Au regard de la crise actuelle de l’agriculture et de la situation déplorable de nombreux producteurs, nous considérons qu’il s’agit d’une priorité. Tel est le sens de notre amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

L’amendement n° 337 rectifié vise à inscrire dans le bon de commande le prix et les remises éventuelles. Je rappelle à M. Houpert que dans le rapport rédigé par nos soins, qu’il a lu, nous avons supprimé les « 3 R » : remise, rabais, ristourne.

Par conséquent, la mention d’une réduction du prix sur les bons de commande n’est pas vraiment utile. Je demande donc à M. Houpert de retirer son amendement, faute de quoi l’avis sera défavorable, puisque sa revendication est satisfaite par le rapport de notre commission.

En ce qui concerne l’amendement n° 268 de M. Le Cam, qui porte sur la mention du prix minimum indicatif sur le bon de commande, nous avons eu cette discussion tout au long de l’après-midi. Comme je le rappelais à l’instant, nous avons supprimé les « 3 R », mais également la pratique du « prix après-vente », en prévoyant la mention des modalités de détermination du prix sur le bon de commande. L’avis est donc défavorable.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

L’avis est également défavorable. Je voudrais juste rappeler qu’il s’agit d’un article important, qui encadre le « prix après-vente ». L’objectif est d’éviter des situations – que nous rencontrons tous dans nos régions – où, à force de laxisme et à force de développer le « prix après-vente » sans bon de commande, les producteurs de fruits et de légumes se retrouvent vers le début ou la fin du mois d’août avec des stocks importants de fruits et de légumes, qu’ils portent chez le négociant sans savoir s’il existe ou non un débouché.

Les producteurs « abandonnent » leurs marchandises au négociant, et sont soumis ensuite à son bon vouloir : celui-ci fixe le prix qu’il paie au producteur en fonction du prix auquel lui-même – le négociant – a réussi à vendre la marchandise. Le négociant dit en substance au producteur : « Circulez, il n’y a rien à voir ! De toute façon, vous ne pouvez pas vous plaindre puisqu’il n’existe aucun document écrit ».

Nous faisons ici une avancée très importante, puisque nous rendons systématique l’existence d’un bon de commande écrit. Cela revient à rendre systématique l’existence d’un contrat, puisque l’ensemble du texte est parcouru par la même philosophie : il n’est désormais plus possible, pour les producteurs, d’apporter leur marchandise aux négociants sans établir un contrat écrit.

Mais si l’on veut éviter que le remède ne soit pire que le mal, je crois que l’on doit s’efforcer, tout en imposant l’établissement d’un contrat écrit, de ne pas faire peser trop de contraintes quant aux stipulations contenues par ce dernier, comme cela est proposé dans les deux amendements. Nous risquerions de gêner le producteur lui-même en freinant la commercialisation de ses produits.

Nous estimons donc que l’équilibre de l’alinéa 16 est le bon équilibre, qu’il change déjà radicalement un certain nombre de pratiques, en particulier dans le domaine des fruits et légumes, et qu’il faut s’en tenir là.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Monsieur Houpert, l’amendement n° 337 rectifié est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 337 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 268.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 267, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 16

Compléter cet alinéa par les mots :

les dates de livraison et leurs modalités

La parole est à Mme Évelyne Didier.

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Par cet amendement très simple, nous souhaitons compléter les mentions du bon de commande par des éléments concernant la date et les modalités de livraison.

En effet, nous sommes particulièrement satisfaits que le problème de la pratique du « prix après-vente » soit reconnu. Nous sommes favorables à la mise en place de l’obligation générale de bon de commande dans le cas particulier des transactions en différé de facturation, et notamment sur les marchés d’intérêts nationaux.

Pour autant, nous pensons qu’une telle mesure ne permettra pas de lutter contre les pratiques d’anti-datage qui existent déjà. C’est la raison pour laquelle nous vous proposons cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

La date figure dans le texte, madame Didier. Ce point est bien mentionné dans le texte rédigé en commission.

Cette rédaction permet donc largement d’empêcher une pratique qui risque de déstabiliser le marché. Vous dites aussi qu’il est nécessaire de préciser les modalités de livraison au titre des mentions devant obligatoirement figurer sur le bon de commande. Or, dans la liste qui est proposée dans le rapport de la commission, figure justement tout ce qui concerne les dates, les quantités, les qualités, et cætera.

A priori, votre amendement me paraît donc satisfait.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

En partie seulement, car les amendements ne sont jamais complètement satisfaits !

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

Je comprends bien l’intention, tout à fait positive, qui anime les auteurs de cet amendement. Je rejoins néanmoins ce que dit le rapporteur.

Cet amendement est en partie satisfait sur la question de la date. J’attitre l’attention de Mme la sénatrice sur le fait que cet amendement pourrait se retourner contre les producteurs. Si l’on précise les modalités de livraison dans le bon de commande, la charge risque de se retourner contre les producteurs. Je propose donc un retrait de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Madame Didier, l’amendement n° 267 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 267 est retiré.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 214 rectifié est présenté par MM. Pointereau, Doligé, Laurent, Doublet, Pillet, Cornu, Billard et Houel.

L'amendement n° 509 rectifié est présenté par MM. Jarlier, Alduy, Hérisson, Juilhard, Amoudry, Carle et Bailly.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 16

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Ce bon de commande contient une référence de prix.

La parole est à M. Rémy Pointereau, pour présenter l’amendement n° 214 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Rémy Pointereau

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet amendement concerne l’alinéa 16, qui dispose que « le bon de commande doit mentionner le nom des parties, leur adresse, la date de la commande, la quantité, les modalités de détermination du prix » – et non pas le prix – et « la dénomination précise des produits ».

L’objectif de notre amendement est de permettre l’établissement de relations commerciales tout à fait équilibrées entre les différents acteurs de filières, et d’éviter ainsi les pratiques abusives qui contribuent à déprécier le prix de vente et entraînent parfois même le refus d’un lot ou d’une marchandise. Il vise à instituer un prix que l’on pourrait qualifier de prix minimum garanti, de prix minimum indicatif, ou encore de prix d’intervention, afin de mieux protéger les producteurs.

En effet, quand bien même le bon de commande serait bien libellé, si les marchandises sur le marché sont en quantités trop importantes, on trouvera toujours un détail – la présence d’un insecte indésirable, ou quelque chose de ce genre – pour ne pas payer la marchandise livrée par le producteur, ou évacuer le lot.

Quand, au contraire, les marchandises sont en quantités insuffisantes, les bons de commande ne sont plus nécessaires puisque toutes les marchandises trouvent preneur au meilleur prix.

Au travers du présent amendement, il s’agit donc vraiment de protéger le producteur, en indiquant sur le bon de commande un prix de base, référentiel, afin d’éviter tout abus.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Pierre Jarlier, pour présenter l'amendement n° 509 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Jarlier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet amendement vise à compléter l’alinéa 16 de l’article 4 avec la phrase suivante : « Ce bon de commande contient une référence de prix ».

Parce qu’ils ont un coût de production, parce qu’ils ont un prix, parce qu’ils sont issus de longues heures de savoir-faire, les produits ne peuvent être mis en commercialisation sans prix. Or, cette pratique est malheureusement courante et déstabilise le marché. C’est pour remédier à cette situation que cet amendement a été déposé, à l’instar de celui qui a été présenté par M. Pointereau.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

M. Gérard César, rapporteur. Ce sont nos collègues sénateurs qui devraient être convaincus, monsieur le président. Leurs amendements sont satisfaits par la rédaction de notre commission. Ces amendements ne sont peut-être pas satisfaits à 100 %, mais ils le sont à 98 %

M. Rémy Pointereau hoche la tête.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Monsieur Pointereau, votre amendement est satisfait par la rédaction du texte de la commission qui prévoit que « le bon de commande doit mentionner le nom des parties, leur adresse, la date de la commande, la quantité » et surtout, comme vous l’avez relevé dans votre intervention, « les modalités de détermination du prix et la dénomination précise des produits ». Donc, si votre amendement n’est pas satisfait par le texte de la commission, j’attends de voir quelle pourrait être une meilleure formulation…

Je demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi l’avis de la commission serait défavorable.

Il en est de même concernant l’amendement identique de M. Jarlier.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

Je partage le point de vue de M. le rapporteur. Je voudrais simplement préciser à Rémy Pointereau que nous nous sommes beaucoup interrogés sur l’encadrement du « prix après-vente » et l’obligation d’établir un bon de commande. Nous en avons beaucoup discuté avec les producteurs, car le risque est évidemment d’empêcher l’écoulement des marchandises en excès, et notamment des fruits et légumes pendant le mois d’août.

Nous avons voulu maintenir un bon équilibre, en imposant un certain nombre de précisions sur le bon de commande, notamment les modalités de détermination du prix, mais en évitant de franchir une limite qui ferait que la règle se retournerait contre le producteur. C’est ce que j’ai indiqué tout à l’heure au groupe CRC-SPG. Je demande donc le retrait de ces amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Monsieur Pointereau, l’amendement n° 214 rectifié est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Rémy Pointereau

Je ne suis pas convaincu à 100 %, même si ma demande est satisfaite à 98 % ! Expliquez-moi ce que sont les « modalités de détermination du prix ». Les modalités ne fixent pas le prix. Elles précisent qu’une marchandise doit présenter certaines qualités pour que le prix puisse apparaître sur tel journal, tel quotidien. Ce que je souhaite, c’est que l’on indique un prix de référence, un prix indicatif. Mais ce n’est pas en parlant de « modalités de détermination du prix » que vous fixez le prix. Je vous demande donc à m’apporter des précisions supplémentaires, car je ne suis pas convaincu.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

C’est mon métier monsieur le président !

Je vous donnerai un exemple très concret. Dans beaucoup de prix après vente, on trouve des prix liés à la commission : ainsi, lorsqu’un producteur livre une cargaison de melons, il peut proposer, dans la modalité de fixation du prix, qu’il y ait une commission de 10 % ou de 15 % pour le négociant et celui-ci aura intérêt à tirer le prix le plus haut possible afin d’obtenir la commission la plus élevée possible. Ce n’est ni l’intérêt du producteur ni celui du négociant lui-même qu’un prix soit fixé au préalable dans le bon de commande ; il faut donc laisser une marge de manœuvre.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Monsieur Pointereau, qu’advient-il de votre amendement ?

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L’amendement n° 214 rectifié est retiré.

Monsieur Jarlier, qu’en est-il de l’amendement n° 509 rectifié ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Jarlier

M. Pierre Jarlier. Je le retire, monsieur le président, bien que, comme M. Pointereau, je ne sois pas convaincu par ce qui vient de nous être dit.

Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Jarlier

Les « modalités de détermination du prix », ce n’est véritablement pas un prix minimum. Or, ce dont nos producteurs ont besoin, c’est d’un prix minimum à la commande.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L’amendement n° 509 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l'article 4, modifié.

L'article 4 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 52 rectifié ter, présenté par MM. Pointereau, Pierre et Vasselle, Mme Des Esgaulx et MM. Cornu, Houel, Billard et Mayet, est ainsi libellé :

Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 440-1 du chapitre préliminaire du titre IV du livre IV du code de commerce, il est inséré un article L. 440-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 440 -2. - Le Gouvernement présente au Parlement un bilan annuel de la mise en œuvre du présent titre et de son impact sur le secteur agricole et agroalimentaire. Ce bilan est établi, notamment, sur la base des informations figurant dans le rapport d'activités visé à l'article L. 440-1 [rapport d'activité annuel de la Commission d'examen des pratiques commerciales], dans le rapport de l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires visé à l'article L. 692-1 du code rural et de la pêche maritime, des pratiques commerciales et de la jurisprudence en la matière, ainsi que de l'intensité de la concurrence observée dans les zones de chalandise. »

La parole est à M. Rémy Pointereau.

Debut de section - PermalienPhoto de Rémy Pointereau

La loi de modernisation de l'économie, ou LME, comporte en matière de négociations commerciales deux innovations majeures, en forme de contreparties : d'un côté, la libre négociation des tarifs des fournisseurs – avantage conféré aux commerçants – et, de l'autre, la réduction des délais de paiement des fournisseurs. Il faut rappeler que les agriculteurs sont parfois payés un an, voire dix-huit mois après la mise en culture de leur production. L'application de la LME aux campagnes commerciales devrait donc aboutir à de nouveaux équilibres dans les négociations.

Or les négociations commerciales en 2010 ont été plus difficiles que jamais : dates butoir insuffisamment respectées, interprétations abusives de la négociabilité des conditions générales de vente malgré les avis de la commission d'examen des pratiques commerciales, la CEPC. Les fournisseurs, qu'il s'agisse des entreprises agricoles ou des PME du secteur agroalimentaire, subissent les effets économiques de ces dérives.

Ainsi que le Conseil économique, social et environnemental l'avait recommandé dans son avis de 2009 sur la formation des prix alimentaires, « il convient de mesurer les effets de la liberté de négociation sur les fournisseurs de l'amont, producteurs et industriels. Il faut également s'assurer d'une transmission réelle des réductions de prix jusqu'aux consommateurs. »

C'est pourquoi il est proposé que le Gouvernement transmette chaque année au Parlement un bilan évaluant les incidences de la négociabilité des conditions générales de vente sur les secteurs agricoles et alimentaires, en s'appuyant sur les avis et recommandations émis par la CEPC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

M. Gérard César, rapporteur. Cet amendement ouvre le champ des rapports. Il est vrai que, par définition, je ne suis pas très favorable aux rapports, qui ont tendance à se mutiplier, encombrant nos étagères

M. Paul Raoult s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Je souhaite entendre au préalable le Gouvernement, car nous abordons, avec cet amendement, une série d’amendements sur la LME, et il serait intéressant de connaître la position du ministre.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

M. Bruno Le Maire, ministre. Je ne suis pas ministre du commerce, je suis simplement ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche, ce qui suffit largement à mes loisirs ! Par conséquent, nous ne souhaitons pas ouvrir le débat sur l’application en cours de la loi de modernisation de l’économie qui, elle, touche à d’autres sujets

M. Paul Raoult s’exclame de nouveau.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

Je souhaite que l’on restreigne notre débat aux seules questions agricoles, et celles qui ont été soulevées sont des questions de fond. Le débat que nous aurons sur le renforcement de l’Observatoire des prix et des marges, sur les moyens dont il disposera, est important. C’est sur ces sujets qu’il faut se concentrer, au lieu d’ouvrir un autre débat totalement différent sur les pratiques commerciales, les délais de paiement et autres questions qui ne sont pas de mon ressort.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Monsieur le ministre, s’agit-il d’une demande de retrait ?...

Sourires.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

Je demande donc le retrait de cet amendement, sur lequel, sinon, j’émettrai un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Je partage tout à fait la position du ministre. Le changement des règles de la LME concerne l’industrie agroalimentaire mais pas uniquement.

Le projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche n’a pas vocation à modifier les règles du jeu dans les relations entre la distribution et l’ensemble des secteurs industriels.

Dans son rapport d’information sur la mise en œuvre de la loi de modernisation de l'économie, notre collègue Mme Élisabeth Lamure préconisait d’abord de renforcer les contrôles afin de mieux faire appliquer la LME en ce qui concerne la négociabilité des conditions générales de vente, avant d’envisager des modifications législatives.

Le bilan de la LME n’est pas encore complet. Je rappelle que la convention unique n’existe que depuis mars 2009. Nous avons à peine une année de recul et je crois qu’il faudra, d’ici peu de temps – et Mme Lamure en est convaincue – refaire le point sur l’application de la LME, notamment pour ce qui est des règles de modernisation du commerce et de l’industrie.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Monsieur Pointereau, l’amendement n° 52 rectifié ter est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Rémy Pointereau

Qu’un bilan soit fait est justement ce que je souhaitais en demandant ce rapport. Si Mme Lamure présente un amendement qui va dans le même sens que le mien, je lui laisserai la priorité puisqu’elle a rapporté la LME. Je retire donc mon amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L’amendement n° 52 rectifié ter est retiré.

L'amendement n° 1 rectifié, présenté par M. Cornu, Mme Lamure et M. Chatillon, est ainsi libellé :

Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après la deuxième phrase du premier alinéa de l'article L. 441-6 du code de commerce, il est inséré une phrase ainsi rédigée : « Elles sont applicables de plein droit à tout acheteur de produits ou demandeur de prestations de services d'une même catégorie à la date d'entrée en vigueur qu'elles indiquent. »

La parole est à M. Gérard Cornu.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Mon amendement a justement été cosigné par Mme Lamure ! Il est d'ailleurs consécutif au rapport qu’elle a établi. Nous avons beaucoup travaillé sur ces sujets, et la série d’amendements portant articles additionnels après l’article 4 que nous avons déposés tend à montrer qu’un problème d’application de la LME se pose.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Monsieur le ministre, vous ne pouvez pas l’ignorer, vous qui êtes parfaitement au fait de ces sujets, surtout après avoir travaillé à Matignon.

Cela étant, je comprends bien la position de M. le ministre de l’agriculture et de M. César, rapporteur de ce projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche. Mais les amendements que nous avons déposés visent aussi à alerter, parce que les conditions générales de vente, les CGV, sont actuellement très fragilisées par une interprétation erronée, extrémiste, dirai-je même, de la LME.

Les fournisseurs sont de plus en plus confrontés à des conditions générales de vente dérogatoires, des demandes de report, voire des refus d'appliquer le tarif de l'année sur la base duquel ont été négociés et conclus les accords commerciaux.

L'objectif de la LME, qui était de garantir une négociation commerciale équilibrée à partir d'un socle commun à tous les clients, est donc détourné.

Comment garantir un revenu décent à la filière amont –et cela concerne particulièrement le milieu agricole – lorsque, en aval, le tarif n’est pas appliqué dans la majorité des cas ?

Il apparaît donc, selon moi, nécessaire de réaffirmer que les CGV constituent le socle incontournable de la négociation commerciale à partir desquelles peut s'ouvrir une négociation commerciale avec l'acheteur. C’est vraiment très important.

Je sais bien que cela vous pose un problème, monsieur le ministre, parce que vous n’êtes pas en charge du commerce. Mais cela pose aussi un problème à l’ensemble des fournisseurs, qui, face à quatre ou cinq centrales d’achat, sont très nombreux. La disproportion qui caractérise le rapport des forces justifie que l’on intervienne. Ce projet de loi est l’occasion d’adresser un signe fort à l’ensemble des producteurs et des fournisseurs pour leur dire que cela suffit, que la loi ne doit plus être ainsi bafouée.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Gérard Cornu, par cet amendement, ainsi que par ceux qui vont suivre, qui sont également relatifs à la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, soulève un vrai sujet.

En effet, le rééquilibrage des relations entre fournisseurs et distributeurs, qui était un des objectifs de la LME, comme vient de le rappeler Gérard Cornu, ne semble pas avoir été pleinement atteint.

Les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs demeurent marquées du sceau du déséquilibre.

Néanmoins, il apparaît que les modifications des conditions générales de vente dans le sens de leur renforcement dépassent largement le cadre des relations commerciales dans le secteur agricole, qui est l’objet même de cette loi.

Le bilan de l’application de la loi de modernisation de l’économie n’est pas encore complet. En effet, le groupe sénatorial chargé du suivi de la LME avait, dans son rapport, indiqué qu’il serait souhaitable de légiférer à nouveau sur cette question mais seulement après qu’un véritable contrôle aura été mis en place et aura permis d’établir un bilan complet.

C’est la raison pour laquelle j’ai répondu tout à l’heure à Rémy Pointereau que ce bilan était en cours et qu’il était nécessaire que Mme Lamure ou un autre de nos collègues de la commission de l’économie puisse refaire le point sur l’application de la LME, car c’est un vrai problème qui est posé aujourd’hui.

Monsieur le ministre, là encore, je souhaite connaître votre point de vue, étant rappelé que vous n’êtes pas ministre du commerce et de l’artisanat, comme vous l’avez fort opportunément souligné.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

Monsieur Cornu, rouvrir le chantier de la LME pose au ministre de l’agriculture que je suis un vrai problème de principe. Comme vous l’avez dit vous-même, j’ai suffisamment travaillé sur ces sujets dans d’autres fonctions pour ne pas ignorer les problèmes que posent les conditions générales de vente et le déséquilibre existant dans le rapport de force entre les uns et les autres.

La LME, qui a été bien portée par Hervé Novelli, avec le soutien de Christine Lagarde, a permis d’améliorer les choses. Donc, rouvrir l’un des points déjà traités me pose un vrai problème de principe.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Monsieur Cornu, l’amendement n° 1 rectifié est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Certes, il est normal que cela pose au ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche un vrai problème, mais nous sommes là aussi pour légiférer. Il n’est pas rare que, lors de l’examen de certains projets de loi, nous tentions, afin d’améliorer certains dispositifs, de faire passer quelques « cavaliers ». Notre rôle de législateur est d’être quand même à l’écoute du terrain, en l’occurrence des fournisseurs, qui sont confrontés à un grave problème.

Je retire mon amendement, …

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

… mais, j’y insiste, il faut régler ce problème, car, vraiment, cela suffit.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L’amendement n° 1 rectifié est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 2 rectifié, présenté par M. Cornu, Mme Lamure et M. Chatillon, est ainsi libellé :

Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au septième alinéa de l'article L. 441-6 du code de commerce, après le mot : « vente », sont insérés les mots : « justifiées par des contreparties concrètes et vérifiables de ce dernier, ».

La parole est à M. Gérard Cornu.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Effectivement ! Si j’ai bien compris, il n’est pas fait montre d’ouverture en ce qui concerne la LME. Je retire donc mon amendement, cela nous fera gagner du temps !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 2 rectifié est retiré.

L'amendement n° 141 rectifié, présenté par Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au septième alinéa de l'article L. 441-6 du code de commerce, après les mots : « conditions particulières de vente », sont insérés les mots : « justifiées par la spécificité des services rendus ».

La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

M. Jean-Jacques Mirassou. Monsieur le président, mes chers collègues, je le signale d’emblée, il y a très peu de chance que nous retirions notre amendement !

Sourires sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

En effet, notre amendement tend à apporter des corrections à l’article L. 441-6 du code de commerce, qui a été modifié par la loi de modernisation de l’économie.

Faut-il le rappeler, le groupe socialiste s’est toujours opposé à cette loi présentée il y a seulement deux ans par la majorité actuelle. Sous couvert de suppression des marges arrière, la LME a facilité la négociation de « marges avant », tout aussi opaques. Par la suppression du délit de pratiques discriminatoires, les tarifs du vendeur sont rendus librement négociables. L’acheteur peut donc se faire octroyer des avantages financiers sans justifier de contreparties réelles.

C’est bien la LME qui a entériné cette décision, puisque les services rendus par le client devaient auparavant justifier l’octroi des conditions particulières de vente. Et c’était bien l’objectif de cette loi de faire sauter tous les verrous au nom de la concurrence libre et non faussée. À l’époque, le Gouvernement affichait sa volonté de faire baisser les prix en prétendant augmenter – de manière artificielle ! – le pouvoir d’achat des ménages.

Deux ans plus tard, nous voyons les résultats de cette politique : d’un côté, des prix à la consommation qui n’ont pas baissé, voire qui ont augmenté, et, de l’autre, des fournisseurs – entreprises de l’agroalimentaire et producteurs agricoles – pressurés. Les deux extrémités de la chaîne alimentaire en ont pâti.

Les premiers bilans de la mise en application des dispositions de la LME relatives aux relations commerciales sont critiques : les relations commerciales se sont détériorées, les fournisseurs disposant d’encore moins de pouvoir de négociation et n’osant pas dénoncer les abus par peur d’être disqualifiés du marché. Il y a quelques mois, le Gouvernement a d’ailleurs assigné devant le juge neuf enseignes dont les pratiques et les contrats se sont révélés abusifs.

Le rapport de Mme Lamure au Sénat ou celui de MM. Ollier et Gaubert à l’Assemblée nationale soulignent que, dans la pratique, « les conditions d’achat » du distributeur se substituent purement et simplement aux conditions générales de vente et que les conditions particulières de vente permettent d’exercer une pression sur les fournisseurs, dans la mesure où le distributeur peut faire valoir ses prétentions particulières dans une relative opacité.

Ils notent aussi que des pratiques illégales se développent, comme l’obligation faite par les distributeurs à leurs fournisseurs de signer des contrats assortis de clause de garanties de marges ou de demandes de compensations financières, afin de s’aligner sur les prix du concurrent.

Mais comment pouvait-il en être autrement dans un secteur commercial où dominent, cela a été évoqué à plusieurs reprises, cinq ou six grosses centrales d’achat ?

Nous vous avions pourtant mis en garde il y a deux ans contre cette libéralisation sans encadrement des négociations commerciales, qui s’apparente à la loi du plus fort.

(Mme Patricia Schillinger s’esclaffe.) Comme en 2008, nous vous demandons de préciser que « tout producteur, prestataire de services, grossiste ou importateur peut convenir avec un acheteur de produits ou demandeur de prestation de services, de conditions particulières de vente justifiées par la spécificité des services rendus ».

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – Mme Françoise Laborde applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Nous vous proposons donc aujourd’hui, monsieur le ministre, en quelque sorte une session de rattrapage, la session de septembre. §

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Ma démarche sera la même que voilà quelques instants : mêmes causes, mêmes effets. Nous aurons, j’en suis certain, un débat dans cet hémicycle pour faire le point sur la LME et examiner les difficultés qu’elle soulève. Ce débat pourra en particulier être animé par Mme Lamure, si elle est choisie par le président de la commission de l’économie pour approfondir cette question.

Je ne m’en remets pas à la sagesse du ministre de l’agriculture, car, nous l’avons bien dit, c’est le ministre du commerce et de l’artisanat qui est compétent en la matière.

Si l’amendement est maintenu, la commission émettra un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

L’avis est défavorable, pour les mêmes raisons.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

M. Jean-Jacques Mirassou. Je maintiens bien sûr mon amendement. J’observe que la non-réponse du ministre et du rapporteur revient à reconnaître tacitement les dysfonctionnements que j’évoquais. Monsieur le ministre, vous n’arriverez pas plus à vous débarrasser de la LME que le capitaine Haddock de son sparadrap !

Rires sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Paul Raoult, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Raoult

Monsieur le ministre, il ne me semble pas très correct de refuser de répondre à la question qui vous est posée en vous défaussant sur un autre membre du Gouvernement ! Nous le savons très bien, le revenu des agriculteurs dépend forcément de la capacité à négocier avec les industriels et les centrales d’achat.

La LMA et la LME, c’est du pareil au même ! La LMA va dériver comme la LME et connaîtra le même échec.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Raoult

Monsieur le ministre, puisque vous ne voulez pas contrôler les prix et les volumes, la négociation devra se faire avec les 4 ou 5 centrales d’achat. Pour prendre un exemple que je connais assez bien, la coopérative laitière Yoplait-Candia, en concurrence avec Danone, a engagé avec les grands groupes de la distribution une négociation, qui s’est avérée difficile, et a finalement été obligée de « casser » les prix.

Quand Aldi et Lidl sont arrivés, Yoplait-Candia a, dans un premier temps, refusé de leur vendre du lait sans sa marque.

Mme Jacqueline Panis s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Raoult

La LMA n’apporte aucune solution à ce problème. Que peuvent des coopératives face à Carrefour, Auchan, Lidl ou Aldi ? La loi que nous élaborons restera lettre morte.

Monsieur le ministre, en Nouvelle-Zélande, une seule coopérative collecte 98 % du lait. C’est la même chose dans les pays scandinaves : au Danemark, il y a un seul collecteur qui négocie. À nous, on interdit de se grouper à plus de 400 producteurs, car nous serions alors en infraction aux règles du droit de la concurrence.

Nous devrions être tous traités de la même façon, alors qu’aujourd'hui les situations sont très différentes selon les pays. Les Allemands vendent leur lait en Europe, en France notamment, et non à l’extérieur, pour gagner des parts de marché sur le marché européen – tout comme d’ailleurs dans le secteur industriel, pour diverses raisons, sociales et économiques. C’est bien le signe que la politique européenne pose problème.

Monsieur le ministre, vous n’échapperez pas à cette question, à laquelle nous devons réfléchir, car, pour que les agriculteurs aient des revenus corrects, il faudra bien maîtriser les volumes et les prix aux niveaux européen et national.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Gérard Cornu, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Mon amendement est très proche de celui du groupe socialiste, mais, je tiens à le préciser, nos positions sont totalement divergentes.

Chers collègues de l’opposition, vous n’avez pas voté la LME. Vous auriez pourtant dû le faire, car c’est une excellente loi !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Le seul problème qui continue de se poser est celui de l’application de la loi. Actuellement, certains groupes s’autorisent à ne pas appliquer la LME, en ce qui concerne aussi bien les conditions générales de vente, les CGV, que les conditions particulières de vente, les CPV.

M. Gérard Le Cam s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Mes chers collègues, nous avons, le 12 janvier dernier, ici même, fait le point sur la LME. Excepté une modeste intervention de ma part qui portait sur RFI, le débat a concerné le statut de l’auto-entrepreneur. Il est vraiment dommage que toutes les observations faites aujourd'hui par les uns et les autres n’aient pas été formulées à cette occasion, lors du contrôle parlementaire de la loi. D’autant que M. Hervé Novelli s’est toujours montré extrêmement ouvert sur la question des ajustements qui pourraient être apportés à ce texte.

Les amendements présentés de part et d’autre de l’hémicycle sont tout à fait légitimes. Il faudra les représenter à la première occasion, dans l’une des prochaines navettes, même si notre ordre du jour est déjà très chargé.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Mes chers collègues, nous faisons tous dans cet hémicycle le même constat : la LME est contournée, elle ne joue pas son rôle. Pour notre part, nous pensons que nous avons vraiment bien fait de ne pas la voter, parce que les arguments avancés à l’époque sont ceux que nous retrouvons aujourd'hui.

Par ailleurs, si les 35 heures expliquent les problèmes de l’agriculture française, pourquoi ne pas les avoir supprimées, alors que vos amis et vous-mêmes êtes au pouvoir depuis 2002 ? Ce n’est pas la peine de faire la LMAP ! Soyons sérieux, le différentiel de prix entre l’Allemagne et la France ne s’explique en réalité que pour 5 % ou 6 % par les 35 heures. Il ne faut pas lancer des arguments sans fondement.

Mme Esther Sittler s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

M. le ministre et M. le rapporteur nous disent que la LME, c’est un autre problème, qui sera abordé plus tard. Certes, mais il est impossible d’examiner la LMAP sans traiter parallèlement la LME. Sans cela, soit nous faisons fausse route, soit notre travail ne servira à rien.

Qui plus est, monsieur Le Maire, vous êtes certes le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche, mais vous êtes également un membre du gouvernement de M. Fillon et donc, à ce titre, un ministre transversal. Vous pouvez porter de nombreux sujets, comme les retraites, les déficits, l’éducation, l’économie.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Je comprends bien que cette situation peut vous poser problème eu égard à la « subsidiarité » institutionnelle entre collègues. Si cela est possible, peut-être faudrait-il faire venir ici Hervé Novelli, comme le suggère notre collègue Nathalie Goulet.

Je comprends tout à fait que notre collègue Gérard Cornu ait retiré son amendement par solidarité majoritaire, car cela lui a été demandé par le Gouvernement. Mais nous devons aller plus loin dans la réflexion. Selon nous, ne pas aborder dans ce projet de loi la refondation, ou la revoyure, de la LME serait une grossière erreur. En effet, tout ce que nous pourrons dire aujourd'hui pourra être contrecarré demain. Je le répète, la LME est complètement contournée. Elle n’est pas adaptée à la réalité des faits, ce qui pose un réel problème économique.

Cela a été excellemment souligné tout à l’heure par Paul Raoult, la question qui se pose est celle de l’agriculture que nous voulons demain. Voulons-nous garder notre tradition agricole française, qui est faite, vous l’avez tous évoqué, mes chers collègues, de multifonctionnalités, de polycultures, de petites entreprises agricoles comme de grands groupes agricoles performants et concurrentiels au niveau européen et mondial ?

Nous, nous pensons qu’il faut les deux.

Notre agriculture est compétitive, mais elle doit l’être davantage, peut-être grâce à la LMAP, en allant gagner des parts de marché en Europe et dans le reste du monde. C’est indispensable. Voilà pourquoi il faut de grandes structures.

Dans le même temps, si le Cantal, le Gers, la Drôme ou d’autres départements…

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

… ne conservent pas de petits éleveurs, de petits arboriculteurs, de petits semenciers, si notre histoire agricole ne peut continuer, ce sera la fin du modèle français.

Quel modèle agricole voulons-nous ? Voilà l’enjeu de ce débat !

Cette crise, nous l’avons tous dit, se situe à deux niveaux : elle est conjoncturelle et structurelle.

Vous essayez de répondre à la question structurelle. Oui, il faut moderniser, être concurrentiel, mieux exister à l’échelon européen. Reste que si l’on ne résout pas le problème conjoncturel, on aura eu beau faire, comme chercher à moderniser l’agriculture, il n’y aura plus de petits agriculteurs demain. De grandes entreprises auront été modernisées, mais notre modèle agricole aura été totalement transformé.

J’y insiste, mais ne pas faire le lien entre la LMAP et la LME, même si nous avons compris les explications de M. le ministre, nous semble participer d’une erreur de stratégie. Demain, comme l’a dit Paul Raoult, les mêmes causes produiront les mêmes effets. Nous craignons donc d’avoir à vous dire dans un an ou dans dix-huit mois au plus tard que la LMAP ne va pas dans la bonne direction, car elle n’a pas tenu compte de tous les paramètres.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Gérard Le Cam applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

M. Martial Bourquin. Je comprends parfaitement que M. le ministre ne veuille pas répondre de la LME devant les sénateurs. Je le comprends d’autant mieux que ce texte est un échec patent. Si nous sommes aujourd'hui dans cette situation, notamment dans le secteur agricole, c’est en grande partie à elle que nous le devons.

Protestations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

M. Martial Bourquin. La LME – je réponds à Gérard Cornu, car, s’il n’était pas intervenu, je me serais tu

Mme Jacqueline Panis s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Absolument !

On pourrait en rire, mais cela n’a rien de drôle. Des milliers d’agriculteurs font les frais de cette pensée libérale qui veut tout régler par la libre négociation entre le pot de fer et le pot de terre.

Pour rendre la LMAP efficace, il convient de rééquilibrer la situation en stoppant cette libéralisation. Nous pourrions alors défendre notre agriculture et offrir des protections aux producteurs et aux agriculteurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

M. Martial Bourquin. Las, chaque fois que nous proposons des amendements pour protéger nos agriculteurs, nous nous heurtons à une fin de non-recevoir.

Exclamations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

À ceux que j’entends rire ici et là, je rappelle que les agriculteurs manifestaient tout à l’heure…

Il y a quelques jours, dans notre département, Claude Jeannerot et moi-même avons participé à une réunion dans le Haut-Doubs. Dans ce département, pourtant protégé par une AOC, je peux vous dire que les agriculteurs, toutes opinions politiques confondues, vivent très mal la situation actuelle. Ils sont pessimistes pour leur avenir, car ils pressentent bien ce qui est en train de se passer : la mise en place d’une machine de guerre libérale. L’agriculture française à la fois familiale et très modernisée, dont parlait Didier Guillaume, est remise en cause avec la recherche de la productivité à tout crin.

Face à tous ces problèmes, on ne peut à aucun moment faire l’économie d’un débat sur la LME. Si on ne la réforme pas en profondeur, les mêmes causes produiront les mêmes effets. Mes chers collègues, ne vous attachez pas à des dogmes, ne défendez pas aveuglément une loi que vous avez votée !

En lisant l’objet des amendements présentés par Rémy Pointereau, j’ai constaté que notre collègue faisait exactement le même constat que nous. Admettez donc que la LME n’a pas augmenté le pouvoir d’achat des consommateurs et qu’elle n’est pas un succès pour les producteurs, qui paient très cher son existence.

Nous devons avoir le courage de nos opinions en nous opposant à cette machine de guerre qui, après l’industrie notamment, s’attaque maintenant à notre agriculture.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – MM. Gérard Le Cam et Michel Billout applaudissent également.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

Monsieur Bourquin, il ne faudrait pas pousser le bouchon trop loin ! D’un côté, je vous entends dire que l’on n’offre pas de protection aux agriculteurs et, de l’autre, vous votez contre les contrats, qui, à ce jour, sont la seule solution permettant aux agriculteurs de percevoir un revenu stable. Je dis bien « la seule » ! Depuis six mois que je travaille sur ce projet de loi, aucune proposition alternative crédible ne m’a été présentée.

Après avoir été battus en 1999 sur la suppression des quotas laitiers, vous n’avez apporté aucune solution de remplacement. Aujourd’hui, on vous en propose une avec les contrats, mais vous votez contre. Permettez-moi de vous dire que je trouve indécent que vous veniez ensuite me parler du manque de protection de l’agriculture !

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP. – Mme Françoise Férat et M. Jean Boyer applaudissent également.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

J’aimerais aussi répondre à M. Raoult, qui a cité l’exemple de la Nouvelle-Zélande. Là aussi, les bras m’en tombent. Dans ce pays, tous les producteurs de lait ont des contrats, il existe des marchés à terme, une seule interprofession et le monde agricole est économiquement équipé pour affronter le monde de demain.

En fait, vous rêvez du monde d’hier, du retour au prix administré, du retour aux quotas.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

Mais pas un seul pays européen n’en veut. Avec un tel projet, vous seriez à nouveau battu en 2010 ou en 2020, comme vous l’avez été en 1999.

Notre responsabilité n’est pas de pousser les agriculteurs à vivre dans le monde d’hier – « Dormez, braves gens, nous veillons à garantir les prix » –, mais de leur offrir des armes pour affronter le monde de demain, à savoir des contrats écrits pour stabiliser leurs revenus.

Je refuse catégoriquement de vous laisser dire que le projet loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche n’offre pas de nouvelle protection aux agriculteurs.

Vous avez pris une lourde responsabilité en refusant de voter le principe des contrats à l’article 3, surtout après les améliorations qui ont été apportées par nos débats.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

M. Bruno Le Maire, ministre. Une lourde responsabilité, car, lorsque tous les pays européens se seront dotés de ces instruments et que la Commission européenne elle-même proposera des contrats à l’échelle européenne, je me demande bien quel instrument nouveau vous proposerez aux agriculteurs pour stabiliser leur revenu.

Très bien ! et applaudissementssur les travées de l’UMP et sur plusieurs travées de l’Union centriste.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

S’agissant de la loi de modernisation de l’économie, je le répète, je veux bien avoir le dos large. J’assume donc pleinement tout ce qui a été fait par le Gouvernement. Cependant, je ne crois pas opportun d’ouvrir ce débat ici.

Jusqu’à présent, nos discussions, qui étaient de qualité, se sont concentrées sur des sujets de fond. En ce qui concerne les contrats, par exemple, j’estime que de nombreuses propositions émanant de toutes les travées ont permis d’améliorer considérablement le texte du Gouvernement.

S’agissant des relations commerciales, en revanche, l’encadrement du prix après vente, l’existence systématique d’un bon de commande écrit, la suppression des remises, des rabais et des ristournes, la possibilité de réduire les marges en période de crise, assortie d’une lourde sanction lorsque cette règle n’est pas appliquée

M. Gérard Cornu opine.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

Mes responsabilités consistent à stabiliser le revenu des agriculteurs et à leur permettre d’avoir de véritables perspectives d’avenir. Je peux vous garantir que ce projet de loi contient les instruments pour le faire. §

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 3 rectifié, présenté par M. Cornu, Mme Lamure et M. Chatillon, est ainsi libellé :

Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La seconde phrase du premier alinéa du I de l'article L. 441-7 du code de commerce est ainsi rédigée : « Rédigée d'un commun accord entre les parties, elle indique les contreparties concrètes et vérifiables correspondant aux avantages consentis, soit dans un document unique, soit dans un ensemble formé par un contrat-cadre annuel et des contrats d'application, comprenant : ».

La parole est à M. Gérard Cornu.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L’amendement n° 3 rectifié est retiré.

L'amendement n° 142 rectifié, présenté par Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le quatrième alinéa () de l'article L. 441-7 du code de commerce est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Les contreparties financières correspondant à ces services figurent sur les factures du fournisseur conformément aux dispositions de l'article L. 441-3. »

La parole est à M. Yves Chastan.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Chastan

Depuis la LME, l’ensemble de la relation commerciale entre le fournisseur et le distributeur ou le prestataire de services doit être retracée dans une convention écrite annuelle décrite à l’article L. 441-7 du code de commerce. Il s’agit des obligations auxquelles se sont engagées les parties en vue de fixer le prix à l’issue de la négociation commerciale, des remises éventuellement consenties par rapport aux conditions générales de vente et des autres obligations destinées à favoriser la relation commerciale. Néanmoins, ce plan d’affaire est loin d’être entré dans les mœurs.

De plus, alors qu’il est toujours précisé dans le code de commerce que les conditions générales de vente du fournisseur constituent normalement le socle de la négociation commerciale, ce n’est plus vrai dans la pratique du fait du déséquilibre significatif existant entre le pouvoir de négociation des différentes parties.

Comme nous l’avons précisé pour notre amendement précédent, l’assouplissement de la possibilité pour un fournisseur d’offrir à l’un de ses clients des conditions particulières de vente permet finalement à la distribution d’exercer une pression sur ses fournisseurs, soit directement sur les agriculteurs, les organisations de producteurs ou les entreprises du secteur agroalimentaire.

Nous proposons donc de préciser que, dans le cadre de la convention écrite, les contreparties financières des obligations destinées à favoriser la relation commerciale entre le fournisseur et le distributeur ou le prestataire de services doivent figurer sur les factures du fournisseur, conformément aux dispositions sur les facturations figurant à l’article L. 441-3.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 143 rectifié, présenté par Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au quatrième alinéa () de l'article L. 441-7 du code de commerce, les mots : « autres obligations » sont remplacés par les mots : « contreparties, substantielles et vérifiables, aux avantages consentis ».

La parole est à M. Marc Daunis.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

M. Marc Daunis. Monsieur le ministre, permettez-moi de vous faire remarquer que notre vote de tout à l’heure n’était pas contre la démarche, au contraire !

Exclamations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

L’honnêteté intellectuelle aurait voulu que vous précisiez que c’est précisément parce que les contrats n’allaient pas assez loin et que la démarche nous apparaissait insuffisante que nous avons voté contre.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

Notre débat touchait la question centrale du niveau de protection des agriculteurs, à l’instar de celui auquel il a été fait référence tout à l’heure avec la LME.

Quoi qu’il en soit, je ne sais pas si, face au malaise, le courage consiste à présenter des amendements, puis à les retirer sans les défendre. Toujours est-il que, pour répondre à M. le rapporteur, qui arguait que les amendements étaient satisfaits à 98 %, je veux simplement rappeler que 2 % peuvent faire la différence. Si mes souvenirs sont exacts, c’est l’écart chromosomique qui sépare le chimpanzé de l’être humain.

Sourires sur les travées du groupe socialiste. – Mme Jacqueline Panis s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

Face à des questions aussi importantes qu’un rapport de force disproportionné entre le fournisseur et le distributeur, en l’occurrence entre le producteur et la centrale d’achat, il est important de rétablir l’équilibre. Puisque la LME s’est occupée d’agriculture, la LMAP peut traiter d’économie et de questions liées au commerce et à l’artisanat. C’est pourquoi nous proposons de substituer la notion de « contreparties, substantielles et vérifiables, aux avantages consentis » à celle d’« autres obligations ».

Pour nous, il doit s’agir d’une véritable négociation commerciale et non d’une procédure coercitive permettant à l’un des acteurs d’user de sa position de force et de sa puissance d’achat sur le marché.

Les conditions générales de vente du fournisseur doivent constituer – c’est votre recherche, vous le disiez vous-même, monsieur le ministre – le socle de la négociation commerciale et non les conditions d’achat du distributeur qui sont souvent imposées sans négociation. Si des avantages sont consentis, ils doivent l’être sur la base de contreparties réelles. C’est effectivement un garde-fou important pour encadrer le grave déséquilibre de la relation commerciale.

Si vous êtes prêts à faire ce pas, à vouloir rétablir de façon un peu plus certaine le rapport de force, eh bien votez en faveur de l’amendement que nous proposons.

Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Quel est l’avis de la commission sur les amendements n° 142 rectifié et 143 rectifié ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

On revient à la LME. C’est donc, pour les deux amendements, le même avis que précédemment.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

Le Gouvernement émet également un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Odette Herviaux, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à ce moment du débat, je fais référence à ce que j’ai lu dans le dossier de presse qui accompagnait les annonces du Président de la République, lundi dernier, sur les relations commerciales et les marges de la distribution. Je vous renvoie à la fiche 6 sur l’accès du consommateur aux produits alimentaires qui, au sujet de la fameuse LME, indique : « Cette réforme pro-concurrentielle ne sera pas remise en cause en dépit des demandes qui commencent à être formulées en ce sens à l’occasion de la discussion de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche. Les éléments qui fondent la négociabilité ne seront pas remis en cause : […] le renforcement dans le contrat qui noue les relations d’affaires entre les industriels et les distributeurs des obligations de justification par les distributeurs des contreparties tarifaires réduirait la simplification contractuelle introduite par la LME ». Quand on entend cela, la messe est dite, comme on dirait chez nous.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

C’est, je crois, oublier un peu vite, comme souvent malheureusement, que le Parlement, dans une loi en débat, a toujours son mot à dire. Sur cette question importante, avec l’Assemblée nationale, nous avons réalisé des bilans critiques sur l’application de la loi, notamment s’agissant de dispositions sur les relations commerciales, en particulier en ce qui concerne les produits agricoles. Je me permets de le spécifier car, comme Marc Daunis le disait tout à l’heure, dans cette loi LME un sort a été fait à la production agricole ; pourquoi n’y a-t-il pas de réversibilité possible ?

Les amendements déposés par les sénateurs de tous bords – certains ont été retirés – qui visaient à réviser les articles en question du code de commerce démontrent que nous sommes tous préoccupés par le déséquilibre des relations commerciales, le développement des conditions particulières de vente sans contrepartie et la multiplication des pratiques abusives, notamment, je le soulignais, dans le domaine commercial.

Nous ne pouvons accepter d’être une simple chambre d’enregistrement. Nous sommes là pour débattre – c’est ce que nous faisons ; il me semble très important de le souligner – afin d’essayer de trouver ensemble des solutions et des possibilités d’adaptation de cette loi.

Bien sûr, ce n’est peut-être pas le moment, ce n’est peut-être pas le bon texte, mais au moins, ce débat a l’intérêt et l’avantage de poser les problèmes. D’ailleurs, le Gouvernement lui-même a ouvert la porte de la LME, puisque dans l’article 5 il est proposé la suppression des remises, rabais, ristournes. C’est quand même bien toucher à la loi LME ! Alors pourquoi ne pas aller un petit peu plus loin ?

MM. Marc Daunis et Martial Bourquin opinent.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Jeudi dernier, lors des questions d’actualité, vous avez reconnu, monsieur le ministre, que depuis plusieurs années les relations entre producteurs, industriels et distributeurs se caractérisent par la confrontation systématique, la confusion, voire l’opacité.

Vous avez répondu, à plusieurs reprises, à certains de mes collègues qu’il fallait plus de contrôle de la réglementation. Encore une fois – j’ai l’impression parfois de me répéter –, renforcer les contrôles demande des moyens humains, des moyens financiers et, malheureusement, ce n’est pas le chemin que nous prenons actuellement.

Nous pensons qu’il est nécessaire d’aller au-delà d’un accord de modération des marges en temps de crise. Il faut souligner que les conditions particulières que nous avons précisées dans nos trois amendements pourraient être justifiées par les spécificités des services rendus et que les conditions générales de vente sont bien le socle de la négociation commerciale. C’était le sens de ces trois amendements que je défends par le même vote.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 486 rectifié, présenté par MM. Hérisson, J. Blanc et Jarlier, est ainsi libellé :

Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au début du 1° de l'article L. 443-1 du code de commerce, le mot : « trente » est remplacé par le mot : « vingt ».

La parole est à M. Pierre Jarlier.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Jarlier

M. Pierre Jarlier. Il s’agit encore de la LME. J’ai une petite idée du sort qui va être réservé à cet amendement, donc je vais le retirer.

Marques d’ironie sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Jarlier

Cela dit, il pose également un problème important pour nos agriculteurs, pour nos producteurs. Cet amendement permettait en effet de réduire le délai de paiement alors même que la LME les a amenés à payer plus rapidement leurs fournisseurs. Une vraie difficulté existe.

Je veux rappeler que ces difficultés sont, aujourd’hui, beaucoup plus importantes. Tous les amendements que nous venons d’étudier nous montrent qu’il est sans doute urgent, monsieur le ministre, de revoir un certain nombre de dispositions de cette loi LME.

Je ne sais pas dans quel cadre. Peut-être faut-il constituer un groupe de travail. En tout cas, on ne peut pas ne pas entendre l’ensemble des demandes qui ont été faites sur toutes les travées pour régler les situations difficiles que connaissent les agriculteurs face à certaines dispositions de la LME.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 486 rectifié est retiré.

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

Je voulais saluer le geste constructif de Pierre Jarlier, qui a souligné un vrai problème. Je veux aussi, ce qui vous surprendra peut-être davantage, saluer l’intelligence de l’argumentation d’Odette Herviaux sur les amendements précédents.

I. – Après l’article L. 441-2-1 du code de commerce, il est inséré un article L. 441-2-2 ainsi rédigé :

« Art. L.441-2-2. – Par dérogation aux dispositions de l’article L. 441-2-1, un distributeur ou prestataire de services ne peut bénéficier de remises, rabais et ristournes pour l’achat de fruits et légumes frais.

« Le fait pour un fournisseur d’accorder ou pour un acheteur de solliciter un rabais, une remise ou une ristourne en méconnaissance des dispositions du premier alinéa engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé. Les III et IV de l’article L. 442-6 sont applicables dans ce cas.

II. – Le I de l’article L. 442-6 du même code est complété par un 13° ainsi rédigé :

« 13° De bénéficier de remises, rabais et ristournes à l’occasion de l’achat de fruits et légumes frais. »

III. – Le I entre en vigueur six mois après la publication de la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Claude Bérit-Débat, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec l’article 5, nous abordons la discussion d’un point crucial, celui de la réglementation des pratiques de rabais, remises et autres ristournes accordés par les producteurs aux distributeurs.

Je le dis d’emblée, je considère que ces pratiques, les fameux 3 R, même si certains en ajoutent un quatrième, constituent une véritable perversion.

En effet, alors même que chacun s’accorde à dire qu’il faut rééquilibrer les relations entre distributeurs et producteurs – nous venons d’en débattre longuement –, les 3 R sont la preuve que la libre concurrence, dans ce secteur, est une illusion.

La LMA peut donc être l’occasion de revenir sur un certain nombre de pratiques inadmissibles. En ce sens, la LMA permettra, je l’espère encore malgré vos réponses, monsieur le ministre, d’effacer les conséquences désastreuses de la LME.

La LME avait permis de faciliter les négociations des marges avant, les 3 R, dans le but de faire disparaître les marges arrière, ce qui a été dit précédemment. Les tarifs du vendeur ont ainsi été rendus librement négociables et le délit de pratiques discriminatoires a été supprimé.

Au final, et c’est bien ce qui se passe, un acheteur peut donc se faire attribuer des avantages financiers sans justifier d’une contrepartie réelle.

J’ai l’intime conviction, et je pense que beaucoup la partagent dans cet hémicycle, si l’on se réfère au débat qui vient d’avoir lieu, que nous devons être intransigeants avec les distributeurs.

On l’a dit, on l’a répété, les prix pour le consommateur ne baissent pas, quand ceux des producteurs sont sans cesse tirés vers le bas.

Nous avons donc l’occasion d’envoyer un signal fort, un signal clair aux acteurs du secteur. Nous avons l’opportunité ici et maintenant de dire aux distributeurs « assez » de façon catégorique.

Nous avons aussi, et surtout, la possibilité de faire entendre aux producteurs que nous partageons leurs préoccupations et que nous tenons compte de cette situation.

C’est pourquoi il nous faut être extrêmement strict sur cette question des 3 R. Vous-même, monsieur le ministre, lors de votre audition, vous vous étiez dit prêt à interdire ces pratiques de manière générale pour les produits agricoles. À la lecture de l’article 5, force est pourtant de constater que le grand coup de balai dont nous avons besoin en la matière est encore loin.

Certes, l’article comporte une avancée, puisqu’il interdit les 3 R en période de crise conjoncturelle. Cette avancée est néanmoins des plus minimes, permettez-moi de vous le dire monsieur le ministre.

D’abord, parce qu’elle prohibe une pratique exclusivement en période de crise. Autrement dit, elle l’autorise et la consacre le reste du temps. Le texte pose donc l’idée d’une interdiction, mais s’emploie immédiatement après à en encadrer le champ d’application. Ce que nous souhaitons, ce qui est souhaitable pour les producteurs, ce qu’ils attendent, c’est que les 3 R soient interdits, et qu’ils le soient tout le temps !

Comme si cela ne suffisait pas, on se heurte en plus à un autre problème. Le code rural dispose en effet qu’il y a une crise conjoncturelle quand le prix de vente des produits par les producteurs est anormalement bas par rapport à la moyenne des prix observés lors des cinq dernières années. C’est une définition qui peut prêter à interprétation, et qui, en tout état de cause, mériterait d’être précisée, notamment aux vues des circonstances actuelles !

Faut-il en effet considérer que la crise actuelle dans le monde agricole est conjoncturelle, alors qu’elle dure depuis plus d’un an ?

Le problème est crucial, on le voit, mais il est appréhendé par le petit bout de la lorgnette.

Pour aller au bout de la démarche, nous vous proposons plusieurs amendements visant à sortir de l’entre-deux, autrement dit, nous vous proposons d’interdire les 3 R, y compris en période de crise conjoncturelle.

Ces propositions ont le mérite de la cohérence. Elles mettraient fin à une distinction peu satisfaisante et contribueraient à rendre plus équitables les relations entre producteurs et distributeurs, ce qui devrait être une des priorités de ce texte.

Elles auraient, enfin, le mérite de la clarté, contrairement aux amendements que vous nous proposez après l’article 5, monsieur le ministre, et qui ne font que rendre plus complexe ce qui l’est déjà.

En l’occurrence, je crois qu’il faut en finir avec les demi-mesures. C’est pourquoi je vous invite à reconsidérer nos propositions.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Monsieur le président, le verbe « poursuivre » est approprié puisque je vais intervenir dans la continuité de notre collègue Claude Bérit-Débat, notamment sur cet article 5 qui va rétablir l’interdiction de la pratique des rabais, remises et ristournes. Il s’agit d’une bonne disposition, qui semble unanimement saluée dans cet hémicycle.

Vous le voyez, monsieur le ministre, au cours de l’examen cette loi nous ne sommes pas uniquement dans l’opposition, nous n’adoptons pas seulement des postures négatives. Nous faisons un certain nombre de propositions, même si rares sont celles qui sont acceptées.

Nous savons reconnaître aussi quand, dans votre projet de loi ou dans le texte résultant des travaux de la commission, il y a de bonnes choses. Nous le disons sans fard, car cela va dans l’intérêt de l’agriculture de notre pays.

Je m’interroge toutefois sur l’exception qui figurait dans le texte adopté en conseil des ministres pour les périodes de crise conjoncturelle. Claude Bérit-Débat a insisté sur ce point, je n’y reviens pas.

Permettez-moi cependant de me réjouir de la sagesse du Gouvernement pour avoir retenu, en commission, l’amendement du rapporteur sur lequel nous étions unanimes. C’est une bonne chose.

Mes chers collègues, si nous ne voulons pas faire adopter une loi « au rabais », une loi qui décevrait pour partie le monde agricole, ne devrait-on pas étendre cette interdiction générale pour tous les produits agricoles périssables et pas seulement pour les fruits et légumes ?

Particulièrement sensible à cette filière en tant qu’amateur des fruits du magnifique verger de la vallée du Rhône, il me semble souhaitable que notre réflexion profite à l’ensemble des produits agricoles périssables et donc singulièrement exposés à la volatilité des prix.

Je me permets de m’attarder un instant sur la notion même de crise conjoncturelle, point qui a déjà été évoqué par l’orateur précédent. Cette notion reste vague. On estime que l’on se trouve en situation de crise conjoncturelle lorsque le prix de cession du produit est anormalement bas par rapport à la moyenne des prix observés lors des cinq dernières campagnes.

Or la crise qui touche aujourd’hui les agriculteurs dure depuis plus d’un an. Malheureusement, cette crise ne se terminera peut-être pas du jour au lendemain.

Elle affecte l’ensemble des filières, elle est donc d’ordre structurel. Pour que cette loi de modernisation ait un sens, ce ne sont pas uniquement des mesures conjoncturelles qui doivent être prises, quand il y a lieu de s’attaquer à l’organisation structurelle de l’agriculture, j’ai déjà eu l’occasion d’évoquer ce point.

Monsieur le ministre, lors de votre audition, vous nous avez dit être prêt à poursuivre dans cette voie. Il est évident que nous soutenons cette démarche, à condition qu’elle trouve une certaine continuité dans l’hémicycle.

L’attitude volontariste adoptée par le Gouvernement en la matière est porteuse d’espoirs. Mais n’oublions pas que c’est ce même gouvernement qui a fait adopter la loi LME, en août 2008, ce qui a permis de faciliter la négociation des marges avant, les fameux « 3 R », dans le but de faire disparaître les marges arrière.

Le texte qui nous est proposé revient sur cette possibilité pour les fruits et légumes, le Gouvernement reconnaissant ainsi de façon implicite avoir fait une erreur manifeste de jugement.

Déjà, dans le code de commerce en vigueur, il est prévu un arsenal législatif destiné à sanctionner les pratiques visant à imposer des prix de première cession abusivement bas pour toute une liste de produits. Le code rural définit également des outils qui pourraient s’avérer précieux afin d’encadrer les relations commerciales, mais ces outils ne sont pas utilisés.

Par exemple, il est possible, puisque cette disposition existe d’un point de vue législatif, de conclure des accords entre l’État et les entreprises de commercialisation et de distribution afin de répercuter la baisse des prix de cession des produits agricoles sur les prix de vente à la consommation – c’est un peu technique, mais précis ! Il est aussi possible d’instaurer un coefficient multiplicateur dans le secteur des fruits et légumes, mesure que notre groupe soutient.

En matière de limitation des pratiques commerciales douteuses, nous pouvons faire changer les pratiques si nous le souhaitons collectivement. Tel est le sens de cette intervention et des amendements qui suivront.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 140, présenté par Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. - L'article L. 441-2-1 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Après le mot : « ristournes », la fin du premier alinéa est supprimée ;

2° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Un distributeur ou un prestataire de services peut par contre prévoir la rémunération de services rendus à l'occasion de la revente de ces produits, propres à favoriser leur commercialisation et ne relevant pas des obligations d'achat et de vente, ou de services ayant un objet distinct, lorsque ces services sont prévus dans un contrat écrit portant sur la vente de ces produits par le fournisseur. »

II. - Le I de l'article L. 442-6 du même code est complété par un 13° ainsi rédigé :

« 13° De bénéficier de remises, rabais et ristournes à l'occasion de l'achat des produits agricoles périssables ou issus de cycles courts de production, d'animaux vifs, de carcasses ou pour les produits de la pêche et de l'aquaculture définis à l'article L. 441-1. »

III. - Le I entre en vigueur six mois après la publication de la présente loi.

La parole est à M. Claude Jeannerot.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Jeannerot

Cet amendement, vous l’avez compris, est la stricte mise en application des propos que mes deux collègues viennent de tenir sur l’article.

En d’autres termes, l’article L. 441-2-1 du code de commerce prévoit une liste de produits agricoles dits périssables pour lesquels les remises, rabais et ristournes ne sont autorisés que si ceux-ci sont prévus dans un contrat écrit portant sur la vente de ces produits par le fournisseur.

Le Gouvernement, dans son projet de loi initial, a souhaité proposer l’interdiction de cette pratique des « 3 R » pour ces produits agricoles en période de crise conjoncturelle. Il s’agissait en fait de rétablir un article du code rural qui avait été abrogé par la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux.

La commission a souhaité se concentrer sur les inconvénients de l’application des remises, rabais et ristournes dans le secteur des fruits et légumes frais parce que la crise des fruits d’été d’août 2009 a démontré la nécessité d’améliorer les pratiques commerciales entre les producteurs de fruits et légumes et leurs clients.

Les abus sont en effet nombreux. Comme nous en avons déjà discuté, il n’y a pas de contreparties réelles aux « 3 R » consentis, au point que certains parlent désormais des « 4 R » en y accolant le mot « racket ».

Ces pratiques sont aussi difficilement contrôlables en raison d’une grande dispersion des fournisseurs et d’une extrême concentration des clients. Les fournisseurs sont tenus de vendre rapidement leur production du fait du caractère extrêmement périssable des fruits et légumes et sont donc obligés de se plier aux exigences des acheteurs et à leurs prix.

Nous sommes tout à fait d’accord avec ces analyses du rapporteur qui ont conduit la commission à interdire de façon permanente cette pratique pour les fruits et légumes. Toutefois, nous ne comprenons pas pourquoi nous nous arrêtons en si bon chemin.

Selon nous, il faut interdire de façon permanente ces pratiques commerciales pour tous les produits agricoles périssables ou issus de cycles courts de production, d’animaux vifs, de carcasses ou pour les produits de la pêche et de l’aquaculture.

Par nature, les relations commerciales, particulièrement concernant les produits agricoles, seront toujours déséquilibrées au détriment des producteurs et les distributeurs seront toujours tentés d’abuser de leur puissance d’achat pour obtenir une ristourne sur le prix du marché.

C’est la LME qui a permis de faciliter la négociation des marges avant dans le but de faire disparaître les marges arrière, cela a été dit. Toutefois, dans le secteur des produits agricoles, dont les prix sont déjà très volatils, ce dispositif a des effets désastreux.

Cette question des remises, rabais et ristournes est loin d’être anodine, mes chers collègues, car l’interdiction des réductions de prix pour les produits agricoles périssables irait dans le sens d’une plus grande stabilité du marché des produits agricoles et d’une sécurisation des revenus des producteurs agricoles.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 270, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéas 2 et 5

Après les mots :

pour l'achat

rédiger ainsi la fin de ces alinéas :

de produits agricoles et alimentaires périssables et de tous les produits agricoles générant un coût pour leur maintien en exploitation.

La parole est à M. Michel Billout.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Billout

M. Michel Billout. Cet amendement va dans le sens des interventions qui viennent d’être faites sur cet article 5, ce qui me permettra de raccourcir mon propos

Marques d’approbation sur plusieurs travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Billout

Il y a quelques mois, à l’Assemblée nationale, lors de la discussion générale sur la proposition de loi de notre collègue et ami André Chassaigne, vous vous étiez engagé, monsieur le ministre, à soustraire en période de crise les producteurs à des pratiques que vous jugiez inacceptables.

Ainsi affirmiez-vous alors : « Je ne peux pas accepter que les distributeurs maintiennent en période de crise des dispositifs de remises, rabais et ristournes, alors même que les producteurs voient leurs marges se réduire et fondre comme neige au soleil, mois après mois ».

Ce constat, nous le partageons, et nous l’avions déjà fait voilà plusieurs mois lors de l’examen du projet de loi de modernisation de l’économie.

Avec l’article 5, le Gouvernement a, pour une fois, infléchi sérieusement sa position, et nous vous en félicitons, monsieur le ministre.

En effet, il était prévu d’interdire la pratique des remises rabais et ristournes pour les produits agricoles périssables, mais seulement en période de crise. Cette limite se justifie difficilement quand on connaît les abus qui entourent les pratiques commerciales visées.

C’est pourquoi le rapporteur a modifié le projet de loi initial. À l’unanimité, la commission a soutenu son amendement visant à élargir en tous temps la pratique de l’interdiction des rabais, remises et ristournes pour le secteur des fruits et légumes.

Nous pensons qu’il serait utile d’aller encore plus loin et de tirer les enseignements des bilans négatifs de la LME que nous avons entendus sur toutes les travées de cet hémicycle sur un panel plus large de produits.

Nous souhaitons que cette interdiction concerne également tous les produits agricoles et alimentaires périssables et les productions qui génèrent un coût pour leur maintien en exploitation. En effet, ce qui est vrai pour les fruits et légumes l’est aussi pour ces produits.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 664, présenté par M. César, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Compléter cet alinéa par les mots :

en méconnaissance des dispositions de l'article L. 441-2-2

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Il s’agit d’une simple clarification rédactionnelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 144, présenté par Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

- Après l'article L. 443-3 du code de commerce, il est inséré un article L. 443-4 ainsi rédigé :

« Art. L. 443 -4. - Les produits acceptés par le distributeur lors de la livraison ne peuvent faire l'objet de retour au fournisseur. »

La parole est à Mme Renée Nicoux.

Debut de section - PermalienPhoto de Renée Nicoux

Les premiers bilans de la loi LME ont souligné le basculement des « conditions générales de vente » vers des « conditions générales d’achat », …

Debut de section - PermalienPhoto de Renée Nicoux

… le distributeur imposant ses conditions d’achat au fournisseur sans négociation, et ce alors même que la loi réaffirmait que les conditions générales de vente constituaient le socle de la négociation commerciale.

Ils notent aussi que les abus sont persistants. Il s’agit par exemple des pénalités injustifiées ou des déductions unilatérales décidées par le distributeur et imposées aux fournisseurs. On note également la multiplication des clauses de garanties en matière de prix ou de demandes de compensations financières pour aligner les prix sur ceux des concurrents.

Dans le même ordre d’idée, l’une des principales clauses litigieuses imposée aux fournisseurs par les distributeurs est la reprise des invendus. Cette pratique est assez communément imposée aux vendeurs par les enseignes alimentaires. Pourtant, elle est illégale puisqu’elle dénote un déséquilibre profond entre les droits et obligations des différentes parties.

Cela veut dire que le distributeur n’assume pas les risques de la revente, qui sont pourtant au cœur de l’activité commerciale. Il passe des commandes largement supérieures au potentiel de vente, ce qui lui permet au passage de bénéficier de réductions tarifaires, puis il impose la reprise des invendus à son fournisseur. Parfois, les palettes n’ont même pas été défilmées et déballées ! Le fournisseur doit alors prendre en charge le coût d’un double transport, aller et retour, prévoir des frais de reconditionnement, de manutention ; il subit des pertes considérables du fait du caractère périssable des denrées alimentaires.

Cette pratique abusive découlant de la position dominante des distributeurs dans la négociation commerciale est inadmissible. Notre amendement vise donc à introduire, dans le chapitre III du titre IV du livre IV du code de commerce, un article additionnel sur les pratiques prohibées stipulant que les produits acceptés par le distributeur lors de la livraison ne peuvent faire l’objet de retour au fournisseur.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 533 rectifié, présenté par M. Collin, Mme Escoffier, MM. Fortassin, Tropeano, de Montesquiou, Mézard et Marsin, Mme Laborde et MM. Milhau, Vall, Plancade, Baylet, Barbier, Alfonsi et Detcheverry, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° L'article L. 611-4-1 est rétabli dans la rédaction suivante :

« Art. L. 611-4-1. -Pendant les périodes de crise conjoncturelle affectant les produits mentionnés à l'article L. 611-4, il est interdit, par dérogation aux dispositions de l'article L. 441-2-1 du code de commerce, d'accorder à tout acheteur de ces produits ou de solliciter de tout fournisseur de ces produits, des rabais, des remises ou des ristournes.

« Le fait pour un fournisseur d'accorder ou pour un acheteur de solliciter un rabais, une remise ou une ristourne en méconnaissance des dispositions du précédent alinéa engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé. Les dispositions des III et IV de l'article L. 442-6 du code de commerce sont applicables dans ce cas. » ;

Au second alinéa du I de l'article L. 671-1-1, les mots : « de l'article L. 611-4-2 et aux textes pris pour son application » sont remplacés par les mots : « des articles L. 611-4-1 et L. 611-4-2 et aux textes pris pour leur application ».

La parole est à Mme Françoise Laborde.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

L’article 5, tel qu’il a été adopté par la commission de l’économie, interdit complètement les rabais, remises et ristournes pour l’achat de fruits et légumes frais. Touchant une filière particulièrement fragile, cette mesure est très positive ; elle était attendue.

Cependant, nous partageons tout à fait les préoccupations exprimées par nos collègues du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. La pratique des remises, rabais et ristournes devrait être interdite de manière générale pour les produits agricoles périssables ou issus de cycles courts de production, d’animaux vifs, de carcasses, ainsi que pour les produits de la pêche et de l’aquaculture. Nous voterons donc en faveur des amendements n° 140 et 270.

L'amendement n° 533 rectifié est en quelque sorte un amendement de repli. Nous proposons en effet pour tous ces produits d’interdire les « 3 R », au moins en période de crise conjoncturelle.

Les crises conjoncturelles étant définies dans leur principe général à l’article L. 611-4 du code rural et de la pêche maritime, notre amendement vise à introduire un nouvel article L. 611-4-1. Pour espérer rendre son application effective, il faudrait néanmoins revoir la définition de la crise conjoncturelle, qui est aujourd’hui insatisfaisante. C’est d’ailleurs l’objet d’un autre amendement déposé par notre groupe.

Quoi qu’il en soit, le présent amendement devrait recueillir l’avis favorable du ministre puisqu’il réintroduit une disposition qui était prévue dans le projet de loi initial.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Je tiens tout d’abord à remercier très sincèrement nos collègues, en particulier Didier Guillaume, qui ont souligné le sens des responsabilités de la commission. Leurs arguments vont tout à fait dans le sens de ce que nous pensons à la commission ; nous allons donc travailler sur ce sujet.

J’en viens à l’amendement n° 140, défendu par Mme Odette Herviaux.

L’interdiction de la pratique des « 3 R » vise à remédier à des difficultés spécifiques, caractéristiques du secteur des fruits et légumes : des abus en matière de pratiques commerciales, notamment l’absence de contreparties réelles ; un contrôle difficile en raison d’une grande dispersion des fournisseurs et d’une extrême concentration des clients ; enfin, un déséquilibre entre les fournisseurs et les clients dans les négociations des tarifs.

Ces difficultés justifient pleinement l’interdiction totale de ces pratiques dans ce secteur précis, ce qui n’empêche pas que ces dernières continuent à être strictement encadrées pour les produits agricoles dits périssables prévus à l’article L. 441-2-1 du code de commerce.

Testons d’abord cette suppression des « 3 R », mes chers collègues. Laissons-la vivre ! Il s’agit d’une avancée importante, qu’il convient de maintenir. La commission a donc émis un avis défavorable sur l’amendement n° 140.

L’amendement n° 270 vise à étendre l’interdiction des remises, rabais et ristournes. De même que pour l’amendement précédent, la commission ne peut qu’émettre un avis défavorable.

L’amendement n° 144 est satisfait – non pas à 98 % mais à 100 % ! – par l'amendement n° 261 de M. Gérard Le Cam que nous avons adopté à l’unanimité à l’article 3. Aussi, je demande à ses auteurs de bien vouloir le retirer.

Je demande également le retrait de l’amendement n° 533 rectifié, pour les mêmes raisons. À défaut, la commission émettrait un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

Le Gouvernement partage l’avis du rapporteur sur ces amendements.

Je voudrais saluer l’esprit constructif qui a présidé à la nouvelle rédaction de cet article, puisque la commission a adopté à l’unanimité, concernant la suppression des remises, rabais et ristournes sur les fruits et légumes frais, un dispositif beaucoup plus ambitieux que celui qui avait proposé initialement par le Gouvernement. Ce dispositif est d’ailleurs en adéquation avec des propos que j’avais tenus lors de la présentation de la proposition de loi de M. Chassaigne.

Je tiens juste à préciser que le circuit de commercialisation des fruits et légumes est très particulier, compte tenu de la périodicité et de la fragilité de la production, ainsi que du caractère périssable du produit. Je précise que cette disposition répond également à une demande très forte et ancienne de la filière. Cela va donc dans le bon sens.

En revanche, je n’ai pas entendu les autres filières formuler les mêmes demandes de suppression des remises, rabais et ristournes. Certaines d’entre elles ont fait part de leurs inquiétudes. Je pense en particulier à la filière de l’élevage, qui est très satisfaite de pouvoir négocier son prix en échange d’une commercialisation plus facile, grâce, par exemple, au regroupement des achats sur un seul lieu à proximité de l’abattoir.

Comme M. le rapporteur, je suis tout à fait prêt à étudier l’extension du dispositif proposé, à consulter davantage les filières, à tirer les leçons de la suppression des remises, rabais et ristournes sur les fruits et légumes, mais je ne pense pas qu’il soit raisonnable de procéder à une telle extension dans l’immédiat, sans avoir approfondi le sujet.

À l’instar de M. le rapporteur, j’émets un avis défavorable sur les amendements n° 140, 270 et 533 rectifié. En revanche, je suis favorable à l’amendement n° 664 de la commission. Quant à l’amendement n° 144, je prie ses auteurs de bien vouloir le retirer, car son objet est identique à celui de M. Le Cam, qui a été adopté tout à l’heure.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Madame Herviaux, l'amendement n° 144 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Non, je le retire, monsieur le président, compte tenu de l’adoption de l’amendement de Gérard Le Cam.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 144 est retiré.

Madame Laborde, l'amendement n° 533 rectifié est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 533 rectifié est retiré.

La parole est à Mme Odette Herviaux, pour explication de vote sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

L’article 5 est un bel exemple, car il fait quasiment l’unanimité – nous aurions aimé qu’il en soit ainsi pour l’ensemble du texte –, même si on peut regretter de ne pas aller plus loin.

Je tiens à saluer le travail qui a été fait par la commission. Il est très important de montrer que, y compris dans ce qui a trait à la loi LME, il est possible de faire évoluer les pratiques du secteur des fruits et légumes, qui, vous l’avez dit, monsieur le ministre, est particulier. Plus que d’autres, ce secteur mérite d’être encouragé dans son organisation et dans sa structuration.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

C’est vrai !

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Nous nous réjouissons des avancées instaurées par l’article 5.

Aussi, je vous invite, mes chers collègues, à voter en faveur de cet article.

L'article 5 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 538 rectifié bis, présenté par MM. Fortassin et Collin, Mme Escoffier, MM. Plancade et Tropeano, Mme Laborde et MM. Marsin, de Montesquiou, Barbier, Baylet, Mézard, Milhau, Vall, Alfonsi, Chevènement et Detcheverry, est ainsi libellé :

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans le premier alinéa de l'article L. 611-4 du code rural et de la pêche maritime, après les mots : « groupements reconnus est », sont insérés les mots : « inférieur au coût de production, rémunération du travail compris, ou ».

La parole est à Mme Françoise Laborde.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

L’article L. 611-4 du code rural et de la pêche maritime définit la situation de crise conjoncturelle affectant les produits agricoles comme la période durant laquelle « le prix de cession par les producteurs ou leurs groupements reconnus est anormalement bas par rapport à la moyenne des prix observés lors des cinq dernières campagnes, à l’exclusion des deux périodes au cours desquelles les prix ont été respectivement le plus bas et le plus élevé ».

Cet article est important, car il conditionne la mise en œuvre d’un certain nombre de mesures, notamment des mesures temporaires d’encadrement des marges, comme l’application d’un coefficient multiplicateur pour les fruits et légumes.

Or, dans une période de recherche systématique de prix les plus bas possibles, le système n’indiquera bientôt plus aucune crise conjoncturelle puisque l’on comparera des prix bas à des prix bas ! Vous l’avez dit vous-même, monsieur le ministre, « la crise ne se définit pas seulement d’un point de vue statistique ou administratif. Il y a crise lorsque les prix agricoles ne couvrent plus les coûts de production ».

Cet amendement a précisément pour objet de modifier la définition proposée à l’article L. 611-4, qui, selon nous, est inopérante. La crise serait constituée dès lors que le prix de cession est inférieur au coût de production, rémunération du travail comprise. Cela paraît une évidence !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Une crise est définie par une variation de prix à la baisse par rapport au prix constaté dans le passé. Votre amendement, madame Laborde, vise à modifier la définition de la crise. Celle-ci serait constituée dès lors que le prix de cession baisse, en valeur absolue, en dessous d’un certain niveau, correspondant au coût de production, rémunération du travail comprise.

Cette position est certes intéressante – nous l’avons dit à plusieurs reprises –, mais il est très difficile de déterminer précisément le coût de production, car celui-ci peut varier d’une exploitation à l’autre. Il ne peut donc pas constituer un critère très fiable.

Les contrats doivent servir à fixer une rémunération en tendance au-dessus du coût de production et, ensuite, la crise conjoncturelle consiste en une variation des prix à la baisse ; sinon il faut parler non plus de crise conjoncturelle, mais de crise structurelle. Vous l’aurez compris, il est assez compliqué de définir une crise.

Telles sont les raisons pour lesquelles, ma chère collègue, je vous invite à retirer votre amendement. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

J’émets le même avis que M. le rapporteur et, comme lui, je suggère à Mme Laborde de retirer son amendement.

La crise conjoncturelle est définie sur la base d’un arrêté pris par le ministre de l’agriculture, lorsqu’un prix constaté est inférieur de 10 % à 20 %, selon le produit, à la moyenne des prix sur les cinq dernières années, en retirant la meilleure et la plus basse.

Votre intention, madame la sénatrice, est tout à fait claire et constructive : vous souhaitez que cela couvre le coût de production. Or la définition que vous proposez présente deux risques. En premier lieu, comme l’a dit M. le rapporteur, on ne parviendra pas à définir un coût de production moyen pour l’ensemble d’une filière. Les écarts sont beaucoup trop importants d’une exploitation à l’autre, en fonction des choix de production. La situation est différente selon qu’il s’agit de monoculture ou de polyculture. En second lieu, une telle définition risque de constituer un frein à l’amélioration des coûts de production dans une exploitation.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Madame Laborde, l'amendement n° 538 rectifié bis est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je mets aux voix l'amendement n° 538 rectifié bis.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 535 rectifié, présenté par MM. Collin et Fortassin, Mme Escoffier, MM. Plancade, Tropeano, Mézard, Vall, Baylet et Barbier, Mme Laborde et MM. Marsin, de Montesquiou, Milhau, Chevènement, Alfonsi et Detcheverry, est ainsi libellé :

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 611-4 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Dans le deuxième alinéa, les mots : « peuvent conclure » sont remplacés par le mot : « concluent » ;

2° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« Elles communiquent pendant la crise conjoncturelle aux services compétents les éléments démontrant leur engagement dans les démarches contractuelles mentionnées au précédent alinéa et l'effet de ces démarches, selon une procédure définie par arrêté conjoint des ministres de l'agriculture et de l'économie. En cas de manquement à leurs engagements ou si elles refusent de conclure un accord, elles se verront appliquer un coefficient multiplicateur d'au moins 1, 5 sur le montant de la taxe sur les surfaces commerciales prévue à l'article 3 de la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés. Un décret précise les modalités d'application du présent alinéa ainsi que le coefficient multiplicateur. »

La parole est à Mme Françoise Laborde.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

La baisse des prix agricoles constatée depuis deux ans ne s’est pas traduite, loin s’en faut, par une réduction des prix de vente à la consommation d’une ampleur analogue. Tandis que de nombreux producteurs sont contraints de vendre à perte, les grandes enseignes de la distribution continuent de réaliser des marges confortables ! Dans ce contexte, il est difficile de ne pas réagir, et trouver une solution.

La semaine dernière, le Président de la République a en dévoilé les grandes lignes. Les distributeurs s’engagent à modérer leurs marges sur un produit lorsque celui-ci sera déclaré « en crise » par l’État.

Il est dommage que cette prise de conscience arrive si tard alors que l’article L. 611-4 du code rural et de la pêche maritime prévoit déjà des accords de modération des marges. Il est vrai néanmoins que, en l’absence de sanction, il était difficile de contraindre les entreprises concernées.

L’amendement n° 535 rectifié vise donc à envoyer un message fort à ces entreprises. Il s’agit d’appliquer à celles qui ne sont pas parties à des accords ou qui manquent à leurs engagements un coefficient multiplicateur sur le montant de la taxe sur les surfaces commerciales.

Cela étant dit, monsieur le ministre, nous prenons acte des efforts que vous avez déployés sur ce point. Vous aviez annoncé, lors du débat d’orientation en commission, votre détermination à obtenir des engagements de la part des distributeurs. Vous avez tenu parole, nous le reconnaissons.

L’amendement n° 657 rectifié du Gouvernement nous satisfait, bien qu’il ne concerne que la filière des fruits et légumes. Il va d’ailleurs plus loin que le nôtre, puisqu’il prévoit une amende civile pouvant atteindre 2 millions d’euros pour les distributeurs qui n’auraient pas respecté l’accord signé ou qui l’auraient mis en œuvre avec retard.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Cet amendement vise à sanctionner les entreprises de la distribution qui refuseraient de conclure des accords répercutant les baisses de prix agricoles aux consommateurs, ou qui les appliqueraient mal.

Votre amendement, ma chère collègue, est satisfait à 99, 5 %

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Dans ces conditions, je vous prie, ma chère collègue, de bien vouloir retirer votre amendement.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

M. Bruno Le Maire, ministre. J’avoue avoir une petite divergence – cela m’arrive rarement ! – avec M. le rapporteur. Pour ma part, j’estime que cet amendement est satisfait à 110 % !

Rires.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

J’ajoute que nous avons maintenu dans la loi, contrairement à ce qu’elles souhaitaient, le principe d’une taxe additionnelle, dont le montant est supérieur à celui que vous proposez, madame la sénatrice.

Telle est la raison pour laquelle, je le répète, votre amendement est satisfait à 110 %

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Madame Laborde, l'amendement n° 535 rectifié est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

Mme Françoise Laborde. Je suis tellement rassurée et assurée que je le retire, monsieur le président !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 535 rectifié est retiré.

Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 269 rectifié, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 611-4-2 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Dans la première phrase du premier alinéa, les mots : « fruits et légumes » sont remplacés par les mots : « produits agricoles et alimentaires » et après les mots : « de celles-ci », sont insérés les mots : «, sur la base des propositions de l'Observatoire des prix et des marges » ;

2° Au début du deuxième alinéa, sont insérés les mots : « Après consultation des syndicats et organisations professionnelles agricoles, » et les mots : «, dans une limite qui ne peut excéder trois mois, » et « après consultation des organisations professionnelles agricoles » sont supprimés.

La parole est à M. Gérard Le Cam.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Notre amendement vise à étendre l’application d’un dispositif introduit par l’article 23 de la loi n° 2005-157 du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, issu d’un amendement sénatorial : le coefficient multiplicateur.

Permettez-moi de rappeler en quoi il consiste. Le principe de cet outil est extrêmement simple : l’État fixe un taux légal à ne pas dépasser entre le prix d’achat au fournisseur et le prix de vente au consommateur, taux qui s’applique à la chaîne des différents intermédiaires prise dans son ensemble, et non pas individuellement à chacun d’eux.

Par ce simple mécanisme, les prix à la production sont protégés dans la mesure où une augmentation des marges des intermédiaires passe obligatoirement par une augmentation du prix d’achat au fournisseur, mais les prix à la consommation sont de leur côté également protégés, compte tenu du fait que le mécanisme interdit aux intermédiaires de dépasser un certain niveau de prix à la revente finale.

Prenons l’exemple d’un coefficient multiplicateur fixé à 1, 5. L’intermédiaire achète un produit X au prix du marché, par exemple des salades à 40 centimes pièce. Il ne peut revendre ce produit à plus de 60 centimes pièce. Sa marge est donc de 20 centimes. Si l’intermédiaire décide d’acheter des salades en dessous du prix du marché, mettons à 20 centimes pièce, il ne peut dès lors les revendre au-dessus de 30 centimes pièce. Sa marge n’est plus que de 10 centimes.

En période de crise conjoncturelle définie à l’article L. 611-4 du code rural et de la pêche maritime, ou en prévision d’une telle crise, les ministres concernés peuvent décider de l’application d’un coefficient multiplicateur entre le prix d’achat et le prix de vente des fruits et légumes périssables à un taux et pour une durée qu’ils définissent, dans une limite qui ne peut excéder trois mois. Les mêmes établissent la liste précise des produits visés par cette mesure.

Si depuis l’instauration de ce dispositif son activation a été évoquée à plusieurs reprises, jamais la démarche n’a été concrétisée.

Jusqu’à présent, l’idée selon laquelle le coefficient multiplicateur serait, en quelque sorte, une « arme de dissuasion » à l’égard des distributeurs a prévalu.

Quand au mois de juillet 2008 la chute des prix a atteint jusqu’à 30 % pour certains fruits, la seule réponse des pouvoirs publics fut d’autoriser à titre exceptionnel la vente directe de fruits et légumes à l’extérieur des magasins pour huit catégories de produits durant trois week-ends à la fin du mois de juillet et au début du mois d’août.

Le coefficient multiplicateur, s’il était utilisé, serait pourtant un outil très efficace pour éviter les situations dans lesquelles les producteurs sont obligés de travailler à perte.

Certains craignent que ce mécanisme ne présente plus d’inconvénients que d’avantages. Vous aviez évoqué, monsieur le ministre, la question des importations en provenance d’Amérique du Sud ou d’autres continents.

La concurrence libre et non faussée, qui exacerbe les rapports déséquilibrés dans les relations commerciales, a déjà des effets pervers. Nous l’avons vu récemment en Europe avec la crise du lait.

Aussi, nous vous demandons d’élargir le dispositif du coefficient multiplicateur à l’ensemble des produits agricoles et alimentaires périssables.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 534 rectifié, présenté par M. Collin, Mme Escoffier, MM. Fortassin et Tropeano, Mme Laborde et MM. de Montesquiou, Plancade, Marsin, Baylet, Barbier, Mézard, Milhau, Vall, Chevènement, Alfonsi et Detcheverry, est ainsi libellé :

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 611-4-2 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Dans la première phrase du premier alinéa, les mots : « fruits et légumes périssables » sont remplacés par les mots : « produits mentionnés à l'article L. 441-2-1 » ;

2° La première phrase du premier alinéa, est complété par les mots : « ou lorsque l'Observatoire défini à l'article L. 692-1 constate une évolution injustifiée des prix et en alerte les pouvoirs publics » ;

3° Dans le deuxième alinéa, les mots : «, dans une limite qui ne peut excéder trois mois, » sont supprimés.

La parole est à Mme Françoise Laborde.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

Mêmes causes, mêmes effets !

La loi relative au développement des territoires ruraux a introduit la possibilité d’instaurer un coefficient multiplicateur entre le prix d’achat et le prix de vente des fruits et légumes en cas de crise conjoncturelle ou en prévision de celle-ci.

Cet amendement vise à étendre ce dispositif à l’ensemble des produits agricoles périssables et à prévoir sa mise en œuvre non seulement en cas de crise, mais aussi lorsque l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires constate une évolution injustifiée des prix et en alerte les pouvoirs publics.

C’est un des rôles que nous aurions aimé voir jouer par cet Observatoire ; nous en reparlerons à l’article 6.

Enfin, nous le constatons aujourd’hui, une crise conjoncturelle peut se prolonger. C’est pourquoi notre amendement prévoit de supprimer la mention aux termes de laquelle la durée d’application d’un tel coefficient est limitée à trois mois.

Cela étant, nous sommes réalistes : cette mesure restera lettre morte si elle ne s’accompagne pas d’une réelle volonté des pouvoirs publics de la mettre en œuvre. Rien ne s’opposait à son application pour les fruits et légumes : le décret d’application est paru au Journal officiel en juillet 2005 et la crise a été avérée.

On peut comprendre l’hostilité de la distribution, monsieur le ministre, mais un coup de semonce de trois mois n’aurait pas été inutile !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 151 rectifié bis, présenté par M. Guillaume, Mme Herviaux, M. Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La première phrase du premier alinéa de l'article L. 611-4-2 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigée :

« Un coefficient multiplicateur entre le prix d'achat et le prix de vente des produits agricoles périssables mentionnés à l'article L. 441-2-1 du code de commerce peut être instauré en période de crises conjoncturelles définies à l'article L. 611-4 ou en prévision de celles-ci.

La parole est à M. Didier Guillaume.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Il s’agit du troisième amendement portant sur le coefficient multiplicateur, le quatrième sera présenté par M. Teston dans quelques instants.

Comme cela a déjà été dit, grâce à la loi relative au développement des territoires ruraux, qui a été votée en février 2005, l’État dispose d’un outil – le coefficient multiplicateur – qui pourrait lui permettre de fixer un taux légal à ne pas dépasser entre le prix d’achat au fournisseur et le prix de vente au consommateur, taux qui s’appliquerait, d’ailleurs, à l’ensemble des intermédiaires dans le secteur des fruits et légumes en période de crise conjoncturelle.

Je rappelle que le problème essentiel n’est pas uniquement celui de la relation entre l’amont et l’aval, entre le producteur et la grande surface. Il concerne tout le circuit de distribution.

L’article L. 611-4 du code rural et de la pêche maritime précise que nous sommes en situation de crise conjoncturelle lorsque le prix de cession des produits agricoles par les producteurs ou leurs groupements reconnus est anormalement bas par rapport à la moyenne des prix observés lors des périodes correspondantes des cinq dernières campagnes.

Au regard de la situation du secteur des fruits et légumes et de la plupart des filières agricoles, la crise conjoncturelle est incontestable. Nous pouvons même craindre qu’il ne s’agisse d’une crise structurelle, autrement dit une crise conjoncturelle qui reviendrait tous les ans.

Vous notez, monsieur le ministre, dans le dossier de presse du 17 mai 2010 – Odette Herviaux a cité un autre extrait de ce dossier : vous le constatez, nous lisons les dossiers de presse –, que « la filière des fruits et légumes est confrontée à des variations de prix majeures qui peuvent atteindre le stade de la crise conjoncturelle avérée. Cette crise se caractérise par une baisse importante des prix de cession des producteurs aux différents acheteurs. Or le prix payé par le consommateur ne diminue pas systématiquement dans les mêmes proportions. ».

Vous faites le bon constat, mais vous n’êtes pas disposé à utiliser un outil existant pour les fruits et légumes : le coefficient multiplicateur.

Vous avez préféré introduire dans le projet de loi un nouveau dispositif permettant d’inciter les distributeurs à s’engager dans un accord de modération des marges, en mettant en place une imposition spécifique additionnelle à la taxe sur les surfaces commerciales. Je ne reviens pas sur ce point qui a été évoqué à plusieurs reprises.

Nous considérons que cette intervention est tardive – néanmoins, mieux vaut tard que jamais – puisque le secteur des fruits traverse depuis l’année dernière une crise majeure.

Nous pensons également que ce dispositif sera difficile à mettre en œuvre et n’aura que peu de conséquences concrètes.

Quel sera le bénéfice réel pour les agriculteurs en temps de crise ? Il serait important de considérer les deux bouts de la chaîne de commercialisation et l’ensemble du circuit.

Nous vous demandons d’activer le coefficient multiplicateur en parallèle des accords de modération des marges afin de confirmer votre volonté d’agir sur la transparence des relations commerciales et sur la répartition de la valeur ajoutée. Selon nous, c’est, si vous me permettez cette expression, ceinture et bretelles ! Cela aurait un effet très positif.

Notre amendement vise à élargir la possibilité de recourir à cet outil en période de crise conjoncturelle pour tous les produits agricoles périssables ou issus de cycles courts de production, ainsi que pour les produits de la pêche ou de l’aquaculture, mais j’ai cru comprendre que les professionnels de ces deux derniers secteurs ne demandaient rien de tel.

Si le secteur des fruits et légumes a été particulièrement sinistré, il occupe le devant de la scène médiatique. À l’approche de l’été, nous adresserions un signe important aux arboriculteurs et aux maraîchers en adoptant cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 152 rectifié, présenté par M. Guillaume, Mme Herviaux, M. Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La première phrase du premier alinéa de l'article L. 611-4-2 du code rural et de la pêche maritime est complétée par les mots :

ou lorsque l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires défini à l'article L. 692-1 fait la constatation de marges excessives ou injustifiées au cours des transactions au sein de la chaîne alimentaire

La parole est à M. Michel Teston.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

L’article L. 611-4-2 du code rural et de la pêche maritime introduit la possibilité, en période de crise conjoncturelle, d’instaurer un coefficient multiplicateur encadrant les marges des fruits et légumes périssables par la limitation du rapport entre le prix d’achat et le prix de vente.

Ce sont les ministres chargés de l’économie et de l’agriculture qui décident d’utiliser cet instrument, et qui fixent le taux du coefficient multiplicateur, sa durée d’application, dans une limite qui ne peut excéder trois mois, ainsi que les produits visés après consultation des organisations professionnelles agricoles.

Or, même en cas de crise avérée, le Gouvernement n’a pas souhaité activer cet outil.

Nous regrettons ce choix, car une activation rapide du coefficient multiplicateur aurait permis de modérer les marges de la distribution et de répercuter la baisse des prix agricoles sur les prix à la consommation.

L’article 6 du projet de loi institutionnalise l’existence de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires au sein de la chaîne de commercialisation.

Nous vous présenterons quelques amendements visant à renforcer ses missions et à rendre plus effectifs ses travaux.

Dès à présent, nous vous proposons de lier le déclenchement du coefficient multiplicateur aux analyses de l’Observatoire.

Monsieur le ministre, vous avez annoncé que, en plus du rapport transmis chaque année au Parlement, l’Observatoire serait amené à présenter des publications mensuelles et à analyser les données brutes sur les prix.

Nous estimons donc que lorsque l’Observatoire fera le constat de marges indues dans la chaîne de commercialisation, il devra alerter les pouvoirs publics, ce qui pourra conduire à l’activation du coefficient multiplicateur.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Le coefficient multiplicateur a été mis en place en 2005 par la loi relative au développement des territoires ruraux, dont notre collègue Jean-Paul Emorine a été rapporteur au Sénat.

Notre collègue Daniel Soulage avait beaucoup œuvré pour le coefficient multiplicateur, qui concerne le seul secteur des fruits et légumes frais.

Le mécanisme est le suivant : en période de crise ou lorsqu’une crise s’annonce, le Gouvernement fixe par décret pour trois mois au maximum un rapport entre le prix de vente du produit au consommateur et le prix payé au producteur.

Le coefficient multiplicateur ne garantit pas le relèvement des prix à la production, mais assure la répercussion à l’acheteur des baisses de prix pour relancer la consommation et ainsi mieux écouler les produits.

Ce mécanisme n’a jamais été mis en œuvre, et ce pour au moins deux raisons.

La première tient à la complexité du système, qui prévoit un taux identique quel que soit le stade de commercialisation auquel le coefficient multiplicateur s’applique. Or il existe plusieurs intermédiaires dans la chaîne : le producteur, le grossiste, le distributeur. Comment décomposer le coefficient multiplicateur aux différentes étapes ?

En outre, l’application du coefficient multiplicateur, comme tout mécanisme de contrôle des prix, demande des moyens administratifs de contrôle considérables.

La seconde raison est que le coefficient multiplicateur pourrait favoriser les importations provenant de pays à bas coûts, comme M. le ministre nous l’a rappelé lors des questions cribles thématiques du 13 octobre 2009.

Voilà pourquoi le mécanisme du coefficient multiplicateur est à examiner avec beaucoup de prudence.

Le projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche met en œuvre d’autres instruments. Le Gouvernement propose un mécanisme de modération des marges, notre collègue Didier Guillaume l’a rappelé à l’instant, qui vise à faire face aux situations de crise conjoncturelle.

La commission est donc défavorable aux amendements n° 269 rectifié, 534 rectifié, 151 rectifié bis et 152 rectifié.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

L’avis est également défavorable. Je ne reprendrai pas l’excellente argumentation développée par M. le rapporteur.

À titre personnel, je n’ai jamais été tout à fait convaincu par le coefficient multiplicateur. Quand je vois l’empressement de la grande distribution à accepter ce mécanisme, je me dis qu’il ne doit pas être très favorable pour les producteurs.

En revanche, le temps qui a été nécessaire pour aboutir à la signature de l’accord qui a été conclu lundi dernier tend à prouver que ce dispositif sera sans doute plus efficace. Testons donc ce dispositif.

Je présenterai dans quelques instants un amendement, qui prévoit un régime de sanctions très dur. Il sera à même d’apporter une réponse à la difficile modération des marges en période de crise pour donner du revenu aux producteurs.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote sur l'amendement n° 534 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Je souhaitais m’exprimer sur l’amendement n° 151 rectifié bis, mais mon explication de vote vaut pour les quatre amendements que nous examinons.

Nous avons déjà eu cette discussion en commission. Nous ne sommes pas à l’origine de la loi instaurant le coefficient multiplicateur.

Ce mécanisme n’a jamais été mis en œuvre, au grand désespoir de notre collègue Daniel Soulage. Avant de dire qu’il ne fonctionne pas, testons-le !

Monsieur le ministre, je vous ai proposé de mixer les deux dispositifs. Lorsque nous avons déposé l’amendement n° 151 rectifié bis, qui porte sur le coefficient multiplicateur, nous ne connaissions pas encore la position du Gouvernement et l’accord conclu avec la grande distribution.

S’il n’y a pas eu d’empressement autour du coefficient multiplicateur, il n’y en a pas eu non plus pour l’accord qui a été signé lundi dernier ! Les choses sont ouvertes.

Compte tenu des contraintes que vous faites peser en prévoyant de retenir la moyenne des prix observés lors de trois des cinq dernières campagnes, le dispositif risque de ne pas avoir suffisamment d’effet pour les producteurs.

Or si cette loi est faite pour la grande distribution, pour les consommateurs, pour la modernisation de notre agriculture, elle est faite également pour les producteurs, afin qu’ils puissent vivre de leur production.

Essayons au moins ce coefficient multiplicateur puisque la loi nous y autorise ! Sur quasiment toutes nos travées, un consensus se dégage pour considérer qu’il s’agit d’un bon mécanisme. Pourquoi ne pas le tester ? Si son application se révélait inefficace, dont acte !

Ne pas essayer ce dispositif, au moins de manière temporaire, pour faire face à la crise conjoncturelle de la campagne d’été, par exemple, reviendrait à se priver d’un élément, d’une « cartouche » susceptible de regonfler le moral et le budget de nos arboriculteurs !

J’avais initialement rédigé cet amendement pour le seul secteur des fruits et légumes, mais après en avoir discuté avec les collègues de mon groupe il nous a semblé pertinent de l’étendre aux denrées périssables. Si une telle extension pose un problème et constitue un danger au regard des importations, je suis prêt à modifier mon amendement afin qu’il ne concerne plus que les fruits et légumes.

Essayer ce mécanisme, ce ne sera peut-être pas l’adopter, mais cela pourrait sans doute permettre d’ouvrir de nouvelles perspectives pour nos arboriculteurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Gérard Le Cam, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

On peut comprendre que la grande distribution n’ait pas peur du coefficient multiplicateur…

Cette mesure a été adoptée sur la proposition de notre collègue Daniel Soulage, lors de la discussion du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux. Nous déposions des amendements en ce sens depuis des années, nous avons donc voté cet amendement.

Par la suite, quand cette disposition aurait pu être appliquée, un certain nombre de décrets sont intervenus pour introduire des références aux années précédentes, au cours moyen, à une définition de la crise dont les critères sont quasi impossibles à réunir. On a donc créé les conditions pour que ce coefficient multiplicateur soit totalement inapplicable, raison pour laquelle il est totalement inappliqué.

On nous dit maintenant que ce coefficient multiplicateur pourrait favoriser les importations. Effectivement, jusqu’à aujourd’hui, on n’a pas trouvé la recette pour freiner les importations abusives, qui permettent à la grande distribution de gagner beaucoup d’argent sur le dos des clients, en achetant à très bas prix et en dégageant des marges exceptionnelles.

La seule solution qui nous reste consiste à agir auprès des consommateurs, en leur expliquant qu’acheter des produits étrangers – venant du Chili ou de je ne sais où, peut-être de certains pays communautaires, puisque, en Europe même, on ne joue pas le jeu communautaire ! – revient à tuer nos paysans. Il faut vraiment faire prendre conscience aux consommateurs qu’en achetant étranger ils tuent leurs agriculteurs !

L’amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je mets aux voix l’amendement n° 151 rectifié bis.

L’amendement n’est pas adopté.

L’amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L’amendement n° 657 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le chapitre XIII du titre II de la première partie du livre premier du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :

« Chapitre XIII : Taxe additionnelle à la taxe sur les surfaces commerciales

« Art. 302 bis Z. - I. - Sont soumises à une taxe additionnelle à la taxe sur les surfaces commerciales prévue par l’article 3 de la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés, les personnes assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée qui satisfont aux conditions suivantes :

« - elles achètent et revendent en l’état ou après conditionnement à des personnes autres que des assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée agissant en tant que tels, des pommes de terre, bananes et des fruits ou des légumes mentionnés à la partie IX de l’annexe I du règlement (CE) n° 1234/2007 du Conseil du 22 octobre 2007 portant organisation commune des marchés dans le secteur agricole et dispositions spécifiques en ce qui concerne certains produits de ce secteur ;

« - elles ne sont pas parties à des accords de modération des marges de distribution des fruits et légumes frais mentionnés à l’article L. 611-4-1 du code rural et de la pêche maritime.

« II. - Sont exonérées de cette taxe les personnes qui satisfont aux conditions suivantes :

« - elles exploitent des établissements dont le chiffre d’affaires annuel afférent aux ventes de fruits et légumes mentionnés à l’alinéa 2 du I est inférieur à 100 millions d’euros ;

« - elles ne sont pas liées contractuellement à un groupement de distributeurs dont le chiffre d’affaires annuel afférent aux ventes de fruits et légumes mentionnés à l’alinéa 2 du I est supérieur à 100 millions d’euros.

« III. - Pour l’application du II, le chiffre d’affaires d’un groupement de distributeurs est réputé correspondre à la somme des chiffres d’affaires des membres de ce groupement.

« IV. - Le montant de la taxe est égal à trois fois le produit entre, d’une part, le montant dû au titre de la taxe sur les surfaces commerciales par les personnes mentionnées au premier alinéa du I, d’autre part, le rapport entre le montant total des ventes de fruits et légumes mentionnés à l’alinéa 2 du I, et le chiffre d’affaires total.

« V. - La taxe est déclarée et acquittée lors du dépôt de la déclaration relative à la taxe sur les surfaces commerciales, et due au titre de l’année. Toutefois, pour l’année 2010, la taxe est déclarée sur une déclaration conforme à un modèle fixé par l’administration et déposée au plus tard le 31 décembre 2010.

« VI. - La taxe est liquidée, recouvrée et contrôlée sous les mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée.

« Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe.

« VII. - L’exonération prévue au II est subordonnée au respect du règlement (CE) n° 1998/2006 de la Commission du 15 décembre 2006, concernant l’application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides de minimis. »

II. - Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

a) Les alinéas 2 et 3 de l’article L. 611-4 sont supprimés.

b) Après l’article L. 611-4, il est rétabli un article L. 611-4-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 611-4-1. - Les personnes mentionnées au I de l’article 302 bis Z du code général des impôts peuvent conclure chaque année avec l’État des accords de modération des marges de distribution des fruits et légumes frais.

« Ces personnes doivent, lorsqu’elles sont liées contractuellement à une centrale d’achat ou à une centrale de référencement ou associées à un groupement d’achat, mandater le responsable de cette centrale ou de ce groupement pour signer en leur nom les accords prévus à l’alinéa précédent.

« La marge de distribution visée au premier alinéa s’entend de la différence entre le prix de revente hors taxe au consommateur du produit et son prix d’achat hors taxe.

« Ces accords, dont le contenu est précisé par décret en Conseil d’État, sont signés avant le 1er mars de chaque année. Pour l’année 2010, ils sont signés au plus tard un mois après la publication de ce décret. Ils entrent en application dès que la situation de crise conjoncturelle définie à l’article L. 611-4 est constituée.

« Les personnes mentionnées au I de l’article 302 bis Z du code précité ou le groupement de distributeurs dont elles dépendent rendent compte à la demande des ministres chargés de l’agriculture et de l’économie de l’application des accords.

« Le non-respect des accords ou le retard dans leur mise en œuvre est sanctionné d’une amende civile dont le montant ne peut être supérieur à 2 millions d’euros. L’amende doit être proportionnée à la gravité des faits constatés, au vu notamment du volume de produits en cause et de la durée des périodes de crise. L’action est introduite devant la juridiction civile compétente par le ministère public, par le préfet, par le ministre chargé de l’agriculture ou le ministre chargé du commerce. »

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

Cet amendement est important puisqu’il définit le régime de sanctions applicable dans le cadre de l’accord sur la modération volontaire des marges en période de crise pour les fruits et légumes, signé récemment.

La situation est très simple : un accord a été proposé à l’ensemble des distributeurs – je souhaite d’ailleurs l’ouvrir également au hard discount et à d’autres distributeurs qui n’auraient pas participé à la négociation.

Soit les distributeurs refusent de signer cet accord, en vertu duquel ils réduisent automatiquement leur marge en période de crise. Dans ce cas, ils encourent une imposition supplémentaire qui prendra la forme d’une taxe additionnelle à la taxe sur les surfaces commerciales, la TASCOM, et dont les règles de calcul sont fixées dans cet amendement.

Une sanction crédible et forte pèse donc sur les distributeurs.

Soit les distributeurs ont signé l’accord – ce qui est aujourd’hui le cas pour l’ensemble des grandes enseignes, qui ont fait preuve de compréhension au terme d’un certain nombre de démarches – et il faut s’assurer qu’ils le respectent. Si tel n’était pas le cas, nous prévoyons une amende de 2 millions d’euros, montant qui nous paraît particulièrement dissuasif.

Ce dispositif a le mérite d’être simple, de s’appuyer sur le volontariat et d’être crédible, dans la mesure où le régime de sanctions applicable est particulièrement dissuasif.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

La commission est favorable à cet amendement du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Odette Herviaux, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Mme Odette Herviaux. Monsieur le ministre, je vous admire quand vous dites que votre amendement est très simple !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Votre amendement précise que seront exonérés les établissements réalisant un chiffre d’affaires sur la vente des fruits et légumes inférieur à 100 millions d’euros. Quand on connaît le mode de fonctionnement de la plupart de ces grandes centrales d’achat et les différents systèmes régissant les entreprises – le statut des magasins varie énormément d’une enseigne à une autre –, on peut s’interroger : comment prévoir que le dispositif s’applique à titre personnel dans certains cas, au groupement ou à la centrale d’achat dans d’autres ? Comment s’y retrouver et comment vérifier sur le terrain que cet accord est appliqué ?

Le montant de la taxe me paraît en outre très complexe à calculer. Si les spécialistes sont particulièrement bien armés pour le faire, nous avons du mal à nous y retrouver.

Enfin, monsieur le ministre, vous dites que cet accord est applicable en temps de crise conjoncturelle. Nous n’avons toujours pas de référence aux coûts de production, mais, comme le disait tout à l’heure mon collègue Didier Guillaume, en 2010, si l’on se fonde sur les trois dernières années pour calculer les marges, alors que ces années ont été particulièrement difficiles et caractérisées par des prix très bas, l’exercice risque d’être délicat pour les producteurs.

Par ailleurs, monsieur le ministre, vous n’avez pas évoqué les conséquences de cet accord sur les prix à la consommation ni sur les prix payés aux producteurs. C’est pourquoi j’aurais souhaité que vous nous apportiez un certain nombre de précisions sur ces questions, avant que nous nous déterminions.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

M. Bruno Le Maire, ministre. C’est toujours lorsque l’on approche des heures tardives qu’il faut expliquer le mode de calcul d’une taxe !

Sourires

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

Premièrement, s’agissant du calcul, pour respecter le principe d’égalité devant l’impôt, nous avons voulu, en accord avec la direction de la législation fiscale, faire en sorte que l’augmentation du produit de la taxe soit rapportée au volume du chiffre d’affaires réalisé par les distributeurs sur les fruits et légumes. C’est pourquoi le montant de la taxe additionnelle est égal à trois fois le montant dû au titre de la TASCOM, multiplié par le rapport entre le montant total des ventes de fruits et légumes et le chiffre d’affaires total.

En d’autres termes, l’augmentation de la taxe due est proportionnelle au volume du chiffre d’affaires sur les fruits et légumes, dans un souci d’équité fiscale.

Deuxièmement, s’agissant de la réduction des marges et du retour aux producteurs, à partir du moment où les distributeurs s’engagent à réduire volontairement leur marge, nous estimons que les producteurs vendront automatiquement à un prix plus élevé que celui qu’ils auraient obtenu si les distributeurs avaient maintenu leur marge au même niveau. L’effet est assez automatique.

Troisièmement, nous avons fixé à 100 millions d’euros de chiffres d’affaires le seuil d’application de la taxe additionnelle parce que nous souhaitons toucher uniquement les grands distributeurs, afin d’épargner les détaillants en fruits et légumes, ainsi qu’un certain nombre de grands groupes qui vendent aussi des fruits et légumes, mais en jouant un rôle positif. Par exemple, si vous allez acheter un bureau pour l’un de vos enfants chez IKEA à Paris Nord, vous y trouverez un point de vente de fruits et légumes, dont le chiffre d’affaires reste inférieur à 100 millions d’euros. Nous n’avons pas voulu que ces distributeurs soient concernés par le dispositif, car nous risquerions sinon de limiter le nombre de points de vente de fruits et légumes en France.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Le groupe socialiste s’abstient également !

L’amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 5.

L’amendement n° 677, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après la première phrase du deuxième alinéa du I de l’article L. 310-2 du code de commerce, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Les ventes au déballage de fruits et légumes effectuées en période de crise conjoncturelle ne sont pas prises en compte pour le calcul de cette limite. ».

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

Cet amendement tend à assouplir les conditions de vente au déballage pour les fruits et légumes, en faisant en sorte que ces ventes ne soient pas prises en compte pour le calcul de la limite de deux mois maximum par année civile.

Le Gouvernement a déposé cet amendement parce qu’il répond à une demande complémentaire de l’ensemble de la filière des fruits et légumes, qui estime que nous avons amélioré les conditions de commercialisation, mais qui veut garder une capacité d’écoulement rapide de stocks, en cas de crise conjoncturelle.

Je précise que le déclenchement de la période de vente au déballage reste étroitement encadré par l’État, puisqu’il fait l’objet d’une décision conjointe des ministres, après consultation des interprofessions. Il ne peut avoir lieu qu’en période de crise conjoncturelle, notion définie précisément par l’article L. 611-4 du code rural et de la pêche maritime.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

La commission émet un avis favorable, parce qu’il faut absolument prévoir les ventes au déballage en cas de crise.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Gérard Le Cam, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Le projet de loi de modernisation de l’économie a fourni l’occasion de simplifier la procédure administrative des ventes au déballage, en substituant notamment au régime d’autorisation préalable un régime de déclaration.

Avec cet amendement n° 677, monsieur le ministre, vous souhaitez élargir encore le champ d’application de cette procédure, en précisant que les ventes au déballage des fruits et légumes effectuées en période de crise conjoncturelle ne sont pas prises en compte pour calculer le nombre maximal de ventes pouvant avoir lieu par année civile.

Cet amendement est très intéressant, car il montre combien le Gouvernement reste hostile à la mise en œuvre du coefficient multiplicateur, comme vous venez de le confirmer tout à l’heure. Vous avez déjà autorisé de telles ventes en lieu et place du déclenchement du coefficient multiplicateur. Or, selon nous, ces ventes ne constituent pas une solution satisfaisante pour le monde rural.

Le groupe CRC-SPG votera donc contre cet amendement.

L’amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 5.

Après l’article L. 311-2-1 du code rural, il est inséré un article L. 311-2-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 311-2-2. – Il est créé un inventaire verger dont les conditions d’application sont définies par décret. » –

Adopté.

Le livre VI du code rural est ainsi modifié :

1° Après le 7° de l’article L. 621-3, sont insérés un 8° et un 9° ainsi rédigés :

« 8° Transmettre les données économiques nécessaires à l’Observatoire mentionné à l’article L. 692-1 pour l’exercice de ses missions. » ;

« 9° Mettre à la disposition des organisations interprofessionnelles reconnues, des instituts et centres techniques et des établissements publics relevant du domaine de l’agriculture, de la pêche et de l’aquaculture les données relatives aux filières, aux marchés et à la mise en œuvre des politiques publiques. » ;

2° L’article L. 621-8 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le service statistique public transmet à l’établissement mentionné à l’article L. 621-1 selon des modalités précisées par convention, les résultats des enquêtes obligatoires au sens de la loi n° 51-711 du 7 juin 1951 sur l’obligation, la coordination et le secret en matière de statistiques répondant aux besoins de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires. » ;

3° Le titre IX est ainsi modifié :

a) L’intitulé est ainsi rédigé : « Observatoires » ;

b) Il est inséré un chapitre Ier intitulé « Observatoire des distorsions » comprenant l’article L. 691-1 ;

c) Après le premier alinéa de l’article L. 691-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’Observatoire des distorsions évalue, à la demande des organismes visés au troisième alinéa, l’impact des mesures législatives ou réglementaires affectant les modes de production agricole. Cette expertise comporte une analyse comparative entre la France, les États membres de l’Union européenne et les pays tiers, une étude d’impact économique, social, et environnemental et le chiffrage des coûts et bénéfices attendus de cette mesure. » ;

d) Il est inséré un chapitre II ainsi rédigé :

« Chapitre II

« Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires

« Art. L. 692-1. – L’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, placé auprès du ministre chargé de l’alimentation et du ministre chargé de la consommation, est chargé d’éclairer les acteurs économiques et les pouvoirs publics sur la formation des prix et des marges au cours des transactions au sein de la chaîne alimentaire, qu’il s’agisse de produits de l’agriculture, de la pêche ou de l’aquaculture.

« Les modalités de désignation du Président de l’Observatoire, le fonctionnement de l’Observatoire ainsi que sa composition sont fixées par arrêté.

« Il recueille les données nécessaires à l’exercice de ses missions auprès de l’établissement mentionné à l’article L. 621-1 et bénéficie du concours du service de statistique public. »

« Il étudie également les coûts de production au stade de la production agricole. Il remet chaque année un rapport au Parlement. »

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Didier Guillaume, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Je saisis cette occasion pour préciser les raisons de notre abstention sur l’amendement n° 677 du Gouvernement.

Un accord a été signé avec la grande distribution et notre rôle ne consiste pas à entraver son application. Au contraire, nous espérons que cet accord sera appliqué et qu’il donnera satisfaction ! Nous ne nous sommes donc pas opposés à cet amendement, ni au précédent, bien que nous persistions à émettre des doutes quant à leur efficacité.

Nous pensons en effet que cet accord, adossé au mécanisme du coefficient multiplicateur – ou l’inverse ! –, aurait pu donner de meilleurs résultats, mais nous attendrons la fin de la campagne de cet été pour faire le point.

Nous serons prêts à saluer l’initiative du Gouvernement, si elle donne des résultats positifs. Dans le cas contraire, nous ne pourrons que constater qu’il fallait peut-être aller plus loin.

Telle était donc, très brièvement, l’explication de vote que nous souhaitions faire sur cet amendement du Gouvernement.

Mais j’en viens à l’article 6 et au cinquième grand sujet que nous avons identifié dans ce projet de loi.

Nous avons fondé beaucoup d’espoir sur l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires. Vous me direz, mes chers collègues, qu’au regard de la situation constatée à ce jour, il était facile de progresser dans ce domaine, tout le monde l’a reconnu !

Néanmoins, sans vouloir faire de surenchère, et tout en reconnaissant les avancées consenties par M. le ministre en commission – avancées que nous avons saluées –, nous estimons que nous pouvons être un peu plus audacieux.

Le projet de loi tend à conférer à cet Observatoire, créé en 2008, une réalité législative. C’est une bonne chose, nous le reconnaissons.

En outre, deux nouveautés principales sont à relever.

Première nouveauté, l’Observatoire se voit chargé de l’étude des coûts de production au stade de la production agricole. C’est bien, mais il nous semble que cette étude est pour le moins inadaptée par rapport aux problèmes que connaissent les producteurs.

Qui peut aujourd’hui penser que les dysfonctionnements de la chaîne de commercialisation apparaissent seulement au premier niveau, à l’échelon de la production agricole ? Ils sont présents sur l’ensemble de la chaîne !

Tous les acteurs du monde agricole, mais également tous les élus locaux, le savent bien : l’étude des coûts ne peut se limiter à la seule production agricole. Elle doit englober l’ensemble de la chaîne de commercialisation, notamment les coûts liés aux activités de transformation et de mise sur le marché. C’est effectivement à ce niveau que se forment les marges les plus importantes, celles qui désabusent le consommateur. Ce sont ces intermédiaires qui achètent des produits toujours moins cher pour les revendre à des prix déraisonnables.

Si le Gouvernement persiste à ne vouloir étudier les coûts de production qu’au stade de la production agricole, je peux d’ores et déjà prédire, sans même avoir besoin d’un Observatoire, que cela ne servira pas plus que par le passé. C’est pourquoi, en commission, nous avions défendu un amendement visant à inclure les coûts de transformation et de distribution dans le champ d’étude de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires. Malheureusement, cette proposition n’a pas été retenue.

Seconde nouveauté, l’Observatoire est tenu de transmettre un rapport annuel au Parlement.

M. le rapporteur se bat contre les rapports en tous genres, mais, s’agissant de surcroît d’une avancée proposée par le Gouvernement, reconnaissons qu’il peut être intéressant que le Parlement se penche, chaque année, sur un rapport de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires. Sur le fond, cette association du Parlement aux travaux de l’Observatoire est une idée intéressante.

Cependant, à y regarder de plus près, s’il s’agit simplement de constater année après année, sur la base de ce rapport, que les marges ne se forment pas au niveau de la production agricole, ce sera insuffisant. Il faut aller plus loin ! Le travail de l’Observatoire sera plus productif s’il est suivi d’une analyse permettant de reconstituer ce qu’est la marge de chaque opérateur sur les différents produits.

Monsieur le ministre, j’ai attiré votre attention sur la situation des agriculteurs en septembre dernier, lors d’une séance de questions d’actualité au Gouvernement, parce que la demande du monde agricole était alors claire et pressante. Elle l’est toujours aujourd’hui !

En décembre 2009, lors de l’examen du budget de l’agriculture, je vous faisais part du dépôt, avec mon groupe, d’une proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête ou d’une mission d’information sur l’organisation de la chaîne de commercialisation des produits agricoles et le mécanisme de formation des prix. Il nous semble indispensable, en effet, que l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, au-delà des avancées importantes que vous lui permettez de faire, puisse également travailler sur ces deux sujets.

C’est dire si l’annonce du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche a suscité des espoirs sur cette question et nous espérons voir retranscrites, dans ce texte, les propositions évoquées à l’instant.

Selon nous, l’Observatoire ne peut être cantonné dans un travail d’observation. Il doit aussi pouvoir proposer quelques remèdes.

Permettez-moi, mes chers collègues, d’en citer un en guise de conclusion.

Ne serait-il pas envisageable de prévoir un dispositif d’alerte quand les prix et les marges constatés sont excessivement bas ou élevés ? Cette alerte pourrait d’ailleurs être transmise, dans le même rapport, au Parlement, ce dernier bénéficiant ainsi d’une vraie prérogative.

Nous venons de défendre, à la suite de l’examen de l’article 5 du projet de loi, des amendements relatifs à l’instauration d’un coefficient multiplicateur. Si nous avions adopté ces dispositions, le dispositif d’alerte aurait pu enclencher la mise en œuvre du coefficient multiplicateur et l’extension de son champ d’application à toutes les filières, au-delà du seul secteur des fruits et légumes.

Ainsi, mes chers collègues, il est encore possible de faire évoluer l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, en lui permettant, au-delà de sa mission d’observation, de mettre en œuvre des remèdes.

La formation des prix et des marges est un sujet qui nous préoccupe tous : nous sommes tous concernés ! Essayons donc de donner à cet Observatoire les moyens de s’attaquer aux racines du problème et nous pourrons peut-être favoriser l’émergence d’une plus grande transparence des prix, ce qui profiterait d’abord aux producteurs, mais également aux consommateurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

Le recours à l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires est une proposition que l’on ne peut critiquer sur le fond et à laquelle je me rallie volontiers.

Elle part en effet d’un constat que nous partageons tous : le manque de clarté dans ce domaine conduit à des discussions stériles. Nous en avons eu un exemple précis lors de la crise de lait. Le rapport sur ce sujet, soumis à la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, montre bien comment les acteurs de la filière se renvoient mutuellement la responsabilité. À chaque crise, nous voyons surgir ce type de commentaires.

Les prix doivent être vérifiables, tout comme les marges, afin que la part de chacun dans leur constitution soit connue sans équivoque.

La question fondamentale est donc, me semble-t-il, de savoir quelles ambitions le Gouvernement place réellement dans ce nouvel organisme et quelle sera l’efficacité de celui-ci. En effet, si cet Observatoire, comme son nom l’indique, se borne à observer sans que l’on connaisse l’usage qui sera fait ultérieurement de ses travaux, il s’apparentera plus au « machin » cher au général de Gaulle qu’à un outil véritablement efficace.

Les conclusions de l’Observatoire doivent donc être exploitées. En bonne logique, elles doivent aussi déboucher sur diverses actions : une publicité d’abord, puis des avertissements, voire, le cas échéant, des mesures plus coercitives, plus contraignantes.

Je souscris à l’idée que l’Observatoire produise un rapport annuel, mais également des publications à échéances plus rapprochées. Il importe par-dessus tout qu’il puisse aussi intervenir de façon ponctuelle, c’est-à-dire en cas de crise, avec la rapidité exigée par les circonstances.

Cela suppose tout d’abord de lui donner des moyens d’action significatifs. Or, en ces périodes de rigueur budgétaire et de révision générale des politiques publiques, allouer des moyens ne paraît pas être la priorité du Gouvernement. L’exemple qui illustre le mieux cette politique est sans doute celui de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes – ou DGCCRF –, de plus en plus absente de ses missions.

Si l’on ajoute à cela que le précédent Observatoire des distorsions a vraisemblablement eu une fonction et une production toute symboliques, il conviendra que le Gouvernement fasse preuve de concret s’il veut convaincre sur les nouvelles dispositions.

Nous connaissons parfaitement le contexte dans lequel l’Observatoire devra agir. Il a été évoqué au sein de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, à plusieurs reprises et par tous les groupes, et encore dans cet hémicycle ce soir. Je veux parler de la formidable asymétrie du rapport des forces au sein de la filière.

Face à des producteurs qui n’ont aucun pouvoir, face à des industriels contraints de négocier avec six ou sept centrales d’achat seulement, la grande distribution a les coudées franches, et un certain savoir faire en la matière… Elle est la seule à avoir la possibilité d’agir avec réactivité et opportunisme.

C’est comme si deux armées étaient en présence, l’une condamnée à être statique quand l’autre est en mouvement… On sait d’avance à qui ira la victoire !

Des dispositifs devraient donc être mis en place pour déclencher, à la suite du travail de l’Observatoire, des mesures d’encadrement des prix et des marges. Ces mesures opérationnelles viendront bien évidemment prolonger ce travail.

Plusieurs d’entre elles ont été proposées par notre groupe et par d’autres. À cet égard, monsieur le ministre, j’ai apprécié la touche d’humour que vous avez eue pour nous expliquer que l’amendement n° 657 rectifié était plus simple que le coefficient multiplicateur.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

En tout cas, comme cela a été mentionné par les uns et par les autres, ce coefficient multiplicateur permettrait de garantir, aux consommateurs, un prix de vente reflétant la réalité des cours et, aux producteurs, un écoulement de leur production plus conforme à l’évolution des prix du marché. En effet, que de fois avons-nous pu entendre que les cours baissent, voire s’effondrent, pour le producteur sans que le consommateur s’en aperçoive ! Il y a là une anomalie évidente.

Par ailleurs, le déclenchement d’un dispositif d’alerte a aussi été largement évoqué. Des mesures d’encadrement des prix et des marges devraient pouvoir être engagées très rapidement.

Ce sont de telles dispositions qui donneraient un sens au travail de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires. À défaut, monsieur le ministre, je crois qu’il paraît difficile de présager l’efficacité de cet organisme.

Debut de section - PermalienPhoto de Renée Nicoux

Le présent article entérine la création d’un Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires qui sera « chargé d’éclairer les acteurs économiques et les pouvoirs publics sur la formation des prix et des marges ».

Nous pouvons nous féliciter de cette mesure.

Il est absolument nécessaire, aujourd’hui, d’instaurer une réelle transparence des transactions agricoles. C’est seulement ainsi que nous pourrons lutter contre certains abus et que nous permettrons aux agriculteurs français d’avoir accès à un revenu équitable et décent, d’une part, par un prix couvrant au minimum les coûts de production, rémunération du travail comprise, et, d’autre part, par une répartition équilibrée de la valeur ajoutée dans la chaîne de commercialisation alimentaire.

Or, depuis quelques années, le prix payé aux producteurs agricoles par la grande distribution est de moins en moins rémunérateur alors que, dans le même temps, le prix à la consommation est resté constant, s’il n’a pas augmenté !

Certains parlent d’« effet cliquet » sur le marché alimentaire.

L’exemple de la filière laitière illustre particulièrement ce mécanisme. Entre 2007 et 2009, le prix du lait payé aux producteurs a baissé de 7 % alors que, dans le même temps, le prix en rayon a augmenté de 9 %. Un phénomène identique peut être observé dans la filière de la viande bovine.

C’est une situation inique à laquelle il faut remédier.

Malheureusement, le phénomène est très difficile à appréhender, la situation française étant caractérisée par une très grande opacité dans la construction des prix agricoles.

Autrement dit, nous sommes incapables, aujourd’hui, de savoir comment le prix se construit entre le producteur et le consommateur !

Cette absence d’informations repose en partie sur une véritable omerta des professionnels de l’industrie et de la grande distribution, qui se refusent à communiquer des chiffres à ce sujet. Face à cela, il semble donc indispensable d’obtenir une transparence totale dans le secteur alimentaire, afin de pouvoir identifier les dérives et les sanctionner, le cas échéant.

Nous devons rompre cette loi du silence, qui fait du tort aux agriculteurs comme aux consommateurs !

Le renforcement de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires est donc une mesure très importante, surtout dans la crise que nous traversons.

Toutefois, malgré quelques avancées en commission, cet Observatoire semble, en l’état, s’apparenter plus à un thermomètre qu’à un organe de régulation. En effet, il n’a aujourd’hui qu’un pouvoir d’observation et ne remplit aucune fonction d’analyse et d’intervention. De plus, nous pouvons émettre des doutes quant à son utilité, étant donné qu’il ne s’attaque pas au cœur du problème, le partage de la valeur ajoutée dans la chaîne de commercialisation.

Il faut donc qu’il puisse étudier les coûts de transformation et de distribution afin de connaître précisément les marges de chaque opérateur.

C’est ainsi que nous pourrons sortir de cette omerta sur la construction des prix et en finir avec les dérives qui en découlent.

Cet Observatoire doit s’inscrire dans la perspective de l’avènement d’un système équitable pour tous. Il faut donc également qu’il soit doté d’outils le permettant.

Il est, par exemple, indispensable de lier, avec un coefficient fixe et constant, le prix agricole et le prix en rayon. Nous ne pouvons plus tolérer que des agriculteurs soient contraints de vendre à perte, alors que, dans le même temps, les consommateurs paient toujours le prix fort. Il faut que le futur Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires devienne un véritable outil de régulation.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Nous avions initialement déposé un amendement visant à renforcer les pouvoirs de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, dont la création est prévue à l’article 6 du projet de loi. Or cet amendement a été jugé irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution parce que son adoption aurait engagé des dépenses allant au-delà d’une simple charge de gestion.

Pourtant, par cet amendement, nous ne demandions qu’à y voir un peu plus clair dans les données que la grande distribution devrait utilement transmettre à cet organisme, mais qu’elle juge confidentielles.

À l’instant même, nous avons tenté de sous-amender l’amendement n° 147 de notre collègue Didier Guillaume, mais, à notre grand regret, le service de la séance vient également de nous opposer un refus. L’opacité restera donc la règle entre la grande distribution, qui ne veut pas communiquer ses données, et l’Observatoire, qui devrait disposer de celles-ci pour être plus efficace.

Si nous partageons la volonté du Gouvernement de donner une assise législative à cet Observatoire, créé en mars 2008, nous voulons, pour notre part, que cet organisme dispose de l’ensemble des moyens lui permettant de mener à bien sa mission.

Certes, le travail de l’Observatoire est d’ores et déjà important. Il a notamment permis d’établir, lors de la crise du lait, que la baisse du prix du lait était partiellement répercutée sur les prix des produits payés par les consommateurs, ainsi que les éleveurs le dénonçaient.

Afin de renforcer l’efficacité de cet Observatoire, nous proposions, comme principale innovation, de faire en sorte qu’il soit en mesure d’imposer aux producteurs, distributeurs et transporteurs de produits alimentaires, quelle que soit leur forme juridique, la transmission des données de nature technique, socio-économique et commerciale relatives à la production, à la transformation, à la commercialisation, à la consommation et au transport de ces produits.

Il s’agissait par cette disposition d’établir un suivi précis au niveau de chacun des acteurs de la filière afin de régler la question de l’opacité de la formation des prix et des marges.

En effet, nous estimons que le recours à la statistique publique, tel que proposé par ce projet de loi et tel qu’il existe aujourd’hui, ne suffit pas. Il faut que les membres de l’Observatoire disposent d’informations au plus près du terrain et que l’ensemble des acteurs des filières soient impliqués.

Nous souhaitions également doter ce nouvel Observatoire d’une compétence nouvelle en lui permettant de proposer au ministre l’instauration d’un coefficient multiplicateur. Nous espérions, en offrant à l’Observatoire une telle faculté, inciter le Gouvernement à déclencher la mise en œuvre du coefficient multiplicateur plus souvent qu’il ne l’a fait jusqu’à présent, puisque, pour l’instant, il ne l’a malheureusement jamais engagée, préférant au coefficient multiplicateur des dispositifs moins favorables aux producteurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 502 rectifié, présenté par MM. Jarlier, Alduy, Hérisson, Juilhard, J. Blanc et Carle, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Après le mot :

Transmettre

insérer les mots :

, en collaboration avec les centres de gestion,

La parole est à M. Pierre Jarlier.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Jarlier

Pour nourrir utilement et plus précisément les données de l'Observatoire, FranceAgriMer, qui dispose d’une bonne source d’information, doit, toutefois, confronter les données qui lui sont transmises avec celles qui lui sont communiquées par les centres de gestion, lesquels sont plus proches du terrain, de la réalité économique du monde agricole et de sa diversité. Les données doivent donc être recoupées.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Cet amendement met en lumière une réalité indéniable : le rôle important que jouent les centres de gestion, proches du terrain et de la réalité économique du monde agricole, comme vient de le souligner notre collègue Pierre Jarlier.

Néanmoins, il ne semble pas utile de préciser, au niveau législatif, cette collaboration entre FranceAgriMer et l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produites alimentaires, ni de l’institutionnaliser.

En effet, cher Pierre Jarlier, l’INSEE a déjà l’obligation de fournir tous ces éléments, ce qu’elle fait naturellement. Si jamais cet institut rencontre des difficultés pour obtenir un certain nombre d’informations, FranceAgriMer peut lui apporter son concours.

Je vous rappelle que les centres de gestion agréés sont tenus au secret comptable et fiscal. L’adoption de votre amendement n’irait pas sans poser des problèmes importants aux adhérents de ces centres.

C’est pourquoi je vous demande, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, la commission émettra un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

Pour notre part, nous estimons que cet amendement est satisfait.

En effet, pour étudier les coûts de production, l’Observatoire des prix et des marges mobilise déjà toutes les données dont disposent les pouvoirs publics, non seulement celles du service statistique public, mais également celles du réseau d’information comptable agricole, qui regroupe toutes les données relatives à l’économie des exploitations agricoles ; le RICA s’appuie précisément sur les centres de gestion pour obtenir les données comptables.

Je précise, à cette occasion, que nous avons signé avec les centres de formation de la profession comptable et les producteurs de lait un accord relatif à l’amélioration et la simplification de la fourniture de ces données comptables, ce qui va, là encore, faciliter la transmission des données à l’Observatoire.

Même si toutes ces précisions ne figurent pas dans le texte, monsieur le sénateur, c’est de cette manière que cela fonctionnera concrètement.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Monsieur Jarlier, l’amendement n° 502 rectifié est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L’amendement n° 502 rectifié est retiré.

Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 457, présenté par MM. Dubois, Biwer, Merceron et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 8

Remplacer le mot :

Observatoires

par les mots :

Observatoire de la compétitivité de l'agriculture française

II. - Après l'alinéa 8

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

...) Avant le chapitre Ier, il est inséré un article L. 690-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 690-1. - L'Observatoire de la compétitivité de l'agriculture française est chargé d'une mission globale d'information, de veille, et d'amélioration de la compétitivité de l'agriculture française.

« Il est composé de deux sections, l'Observatoire des distorsions et l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, régies par les dispositions de chacun des chapitres du présent titre.

« Les modalités de la collaboration entre les sections de l'Observatoire sont fixées par décret. »

III. - Après l'alinéa 11

Insérer six alinéas ainsi rédigés :

...) Au deuxième alinéa de l'article L. 691-1, les mots : « et par les organisations de consommateurs », sont remplacés par les mots : «, par les organisations de consommateurs, par les acteurs économiques, et les pouvoirs publics » ;

...) Après le quatrième alinéa de l'article L. 691-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les statistiques et informations qu'il délivre sont accessibles, lisibles, et organisées de manière à constituer un outil simple et efficace à disposition des acteurs économiques et des pouvoirs publics, dans des conditions fixées par décret. » ;

...) Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Il remet un rapport annuel au Parlement, en collaboration avec l'organisme visé à au chapitre II, relatif à l'état de la compétitivité de l'agriculture française, et aux mesures permettant de l'améliorer. »

IV. – Alinéa 15

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

« L'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, placé auprès du ministre chargé de l'alimentation et du ministre chargé de la consommation, est chargé d'analyser les éléments relatifs à la formation des prix et des marges, pour toutes les filières agricoles et alimentaires, aux différentes étapes de la chaîne de transformation et de commercialisation des produits de l'agriculture, de la pêche ou de l'aquaculture.

« Les statistiques et informations qu'il délivre sont accessibles, lisibles, et organisées de manière à constituer un outil simple et efficace à disposition des acteurs économiques et des pouvoirs publics, dans des conditions fixées par décret. »

V. – Alinéa 18, seconde phrase

Compléter cette phrase par les mots :

en collaboration avec l'organisme visé au chapitre Ier

La parole est à M. Daniel Dubois.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

Depuis le début du débat, le groupe de l’Union centriste ne cesse de répéter que, dotées d’une meilleure organisation, les filières gagneraient évidemment en efficacité dans la négociation avec les centrales d’achat. Même si le contrat est de nature à améliorer les choses, il nous semble essentiel de prévoir en quelque sorte un troisième étage à la fusée, alliant à la fois compétitivité et transparence.

La transparence veut que le consommateur soit mieux informé. Certes, le Gouvernement répond à cet objectif dans ce texte avec l’étiquetage et les circuits courts, mais cela passe aussi par l’Observatoire des prix et des marges et l’Observatoire des distorsions.

Aujourd'hui, ces deux Observatoires existent, mais ne fonctionnent pas bien. L’Observatoire des prix et des marges est une boîte noire, et les centrales d’achat se font plus que tirer l’oreille pour répondre aux enquêtes obligatoires. D’ailleurs, elles ne prennent pas beaucoup de risques en ne répondant pas, puisqu’elles n’encourent que des amendes minimes.

Pour notre part, nous estimons nécessaire de réunir ces deux Observatoires sous une même entité, à savoir un « Observatoire de la compétitivité de l’agriculture française », composé de deux sections dédiées respectivement aux distorsions de concurrence et à la formation des prix et des marges des produits alimentaires. Cet Observatoire serait tenu à certaines obligations, notamment celle de remettre un rapport annuel au Parlement, qui comprendrait un bilan de la situation, mais aussi des propositions visant à améliorer la compétitivité de l’agriculture française. Bien entendu, il serait également doté d’un pouvoir de sanction en cas notamment de non-réponse des centrales d’achat.

Tel est le triptyque que nous proposons, dans le but de donner plus de force à l’organisation des filières et à la signature des contrats.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 145, présenté par M. Guillaume, Mme Herviaux, M. Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 15

Après les mots :

des transactions

insérer les mots :

entre producteurs, transformateurs et distributeurs

La parole est à M. Michel Teston.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

L’article 6 du projet de loi consacre dans la loi, en insérant dans le code rural un article L. 692-1, l’existence de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, en définissant les missions qui lui sont confiées.

La définition proposée par le Gouvernement n’apporte pas beaucoup de nouveautés par rapport à l’Observatoire que nous connaissons depuis mars 2008, qui n’a pas été des plus efficaces pour faire la transparence sur les relations commerciales et le partage des marges entre les différents opérateurs.

Contrairement à ce qui prévalait jusqu’alors, le constat est fait que, premièrement, l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires étudiera bien les coûts de production mais uniquement au stade de la production agricole, et pas aux autres stades de la chaîne de commercialisation ; deuxièmement, un rapport annuel sera remis au Parlement, ce qui nous laisse espérer que l’Observatoire ne se contentera pas de publier des données brutes sans les analyser.

Il faut noter que la commission de l’économie a introduit une précision importante, à savoir l’existence physique de cet Observatoire, en prévoyant que les modalités de désignation de son président ainsi que sa composition seront fixées par arrêté.

Symboliquement, cette existence physique va changer la donne, en accordant plus de poids et de crédit à une institution qui demeure, pour l’instant, « virtuelle », puisqu’elle n’est accessible que par le biais d’Internet.

M. le ministre paraît même déterminé à nommer une personnalité de poids à la tête de cet Observatoire, ce qui nous paraît essentiel.

Toutefois, il faut passer du symbole aux actes, en allouant à cet organisme les moyens lui permettant d’assurer son bon fonctionnement, afin qu’il ne soit pas une coquille vide.

Le groupe socialiste souhaite apporter quelques précisions quant au fonctionnement de l’Observatoire.

Nous voulons que celui-ci puisse assurer efficacement le suivi du processus de formation des prix, de l’amont à l’aval, reconstituer les marges nettes de chaque opérateur et ne pas se limiter à prendre la température, si je puis dire, mais bien proposer de véritables remèdes.

Par cet amendement, nous proposons de dénommer précisément les acteurs participant à la négociation commerciale, producteurs, transformateurs et distributeurs.

En effet, on oublie trop souvent, dans les discussions concernant les pratiques commerciales l’un des maillons clefs de la chaîne que sont les entreprises de l’agroalimentaire, qui procèdent à la transformation des matières premières agricoles achetées aux exploitants agricoles pour les vendre aux centrales d’achat des supermarchés. Cette précision nous paraît utile.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 146, présenté par MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni et Antoinette, Mme Herviaux, M. Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 15

Remplacer les mots :

chaîne alimentaire

par les mots :

chaîne de commercialisation des produits alimentaires

La parole est à M. Yves Chastan.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Chastan

Il s’agit sans doute d’un amendement rédactionnel, mais, sur un sujet aussi important que les pratiques commerciales et le processus de formation des prix agricoles et des prix à la consommation, il me semble nécessaire d’être précis dans les termes employés.

En l’occurrence, nous proposons de remplacer les termes : « chaîne alimentaire » par l’expression : « chaîne de commercialisation des produits alimentaires. »

Comme vous le savez tous, mes chers collègues, la notion de chaîne alimentaire renvoie plutôt aux sciences de la vie, et plus spécifiquement à la biologie, puisqu’il s’agit de la suite d’êtres vivants qui se nourrissent les uns des autres dans la nature.

À moins de sous-entendre que les agriculteurs se font manger par les industriels, lesquels se font manger, à leur tour, par la grande distribution – c’est peut-être d’ailleurs ce à quoi doit conduire la lecture, que je qualifierai de « subliminale », de la rédaction actuelle du texte

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Quel est l’avis de la commission sur les trois amendements en discussion commune ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Concernant l’amendement n° 457, nous avons eu l’occasion, mon cher collègue, d’en discuter longuement en commission.

Il est vrai que l’Observatoire des prix et des marges et l’Observatoire des distorsions opèrent à des niveaux tout à fait différents, l’un œuvrant au niveau franco-français et l’autre au niveau européen, des pays tiers pouvant même être concernés par les problèmes traités.

La commission souhaitait maintenir les deux Observatoires, car leur objet est différent. Certes, on pourrait les fusionner – un jour ou l’autre, nous serons d’ailleurs obligés de créer deux sections –, mais, pour l’instant, laissons-les vivre en l’état.

Dans ces conditions, la commission vous demande, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

Puis-je vous interrompre, monsieur le rapporteur ?

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Daniel Dubois, avec l’autorisation de M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

Je ne suis pas complètement convaincu par les arguments que vous avancez. À mon sens, il est évident qu’il existe un réel trait d’union entre la compétitivité, le prix de vente et la marge.

Réunir ces deux sections au sein d’une même et unique entité permettrait peut-être de réduire les coûts de fonctionnement tout en renforçant les liens qui peuvent exister entre les deux.

M. le rapporteur nous a affirmé que des réponses, réelles, cette fois-ci, seraient apportées par ces deux Observatoires. Car s’il s’agit, encore une fois, de fabriquer des boîtes noires qui ne fonctionnent pas, cela ne présente aucun intérêt et risque de rendre le texte que nous allons voter quelque peu illusoire, ce qui n’est pas de nature à aider les agriculteurs, eux qui en ont pourtant bien besoin.

Monsieur le rapporteur, me fondant sur votre engagement plutôt que sur l’argumentation que vous venez de développer, je retire l’amendement n° 457. Je resterai cependant extrêmement attentif à ce qui se passera dans ce domaine, dans l’intérêt du Gouvernement et, bien entendu, des agriculteurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L’amendement n° 457 est retiré.

Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Monsieur Dubois, nous serons tous des observateurs attentifs et vigilants s’agissant de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires.

Sur l’amendement n° 145, la commission émet un avis défavorable.

En effet, la mission de l’Observatoire est d’éclairer les différents acteurs, nous venons d’en parler à l’instant. La formulation prévue dans le projet de loi initial, qui est la plus générale possible, garantit une analyse exhaustive et efficace. Il semble au contraire restrictif d’inscrire dans la loi une énumération précise et définitive.

Sur l’amendement n° 146, la commission émet un avis favorable. Il paraît en effet utile de préciser qu’il s’agit en réalité de la chaîne de commercialisation des produits alimentaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Quel est l’avis du Gouvernement sur les deux amendements restant en discussion ?

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

Le Gouvernement, comme la commission, est défavorable à l’amendement n° 145. En effet, il restreint la mission de l’Observatoire, ce qui ne correspond pas à notre intention.

Sur l’amendement n° 146, qui vise à apporter une précision sans doute utile, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

Monsieur Dubois, je vous remercie d’avoir retiré l’amendement n° 457. Nous constatons une attente très forte des producteurs agricoles quant au renforcement de l’Observatoire. Dans cette perspective, nous n’avons pas intérêt à fusionner deux Observatoires dont la création répondait par ailleurs à des logiques différentes.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote sur l’amendement n° 145.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Je me réjouis que la commission ait émis un avis favorable sur l’amendement n° 146. En effet, l’expression « chaîne alimentaire » manquait de précision, les termes « chaîne de commercialisation des produits alimentaires » paraissant plus précis.

Je retire donc l’amendement n°°145, monsieur le président, compte tenu de l’avis favorable de la commission sur l’amendement n° 146.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 145 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 146.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.

L'amendement n° 536 rectifié, présenté par MM. Collin et Plancade, Mme Escoffier, MM. Fortassin et Tropeano, Mme Laborde et MM. Barbier, Baylet, Chevènement, Marsin, Mézard, Milhau, de Montesquiou, Vall, Alfonsi et Detcheverry, est ainsi libellé :

Alinéa 17

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Il analyse les données nécessaires à l'exercice de ses missions, recueillies auprès de l'établissement mentionné à l'article L. 621-1 et du service de statistique public.

La parole est à Mme Françoise Laborde.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

Nous en arrivons à un point crucial de ce projet de loi.

Depuis le début du débat, l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires est présenté comme l’instance qui permettra de moraliser les relations entre les producteurs et les acheteurs.

Au cours de l’examen de l’article 1er, notre groupe avait souhaité inscrire dans le champ d’action de la politique de l’alimentation, d’une part, la transparence sur les prix et les marges, d’autre part, la juste répartition de la valeur ajoutée au sein de la filière. On nous a rétorqué que nos amendements étaient satisfaits par l’article 6, l’Observatoire étant justement censé jouer ce rôle !

Or je ne vois rien dans la rédaction de cet article qui le laisse espérer. Le mot « transparence », qui a son importance, n’y figure pas. Par ailleurs, de quels moyens disposera l’Observatoire pour contraindre la grande distribution à se mettre autour de la table pour répartir la marge ?

Le Président de la République a pris des initiatives en ce sens et a obtenu quelques résultats. Je ne suis pas sûre que la profession pourra en tirer des avantages et des profits, mais, quoi qu’il en soit, je ne voudrais pas que le chef de l’État soit obligé d’aller systématiquement négocier pour obtenir un partage des marges !

Monsieur le rapporteur, si les missions de l’Observatoire sont bien celles que vous nous avez décrites, ce qui vous a permis de repousser les amendements que nous avons déposés sur l’article 1er, pourquoi opposer l’article 40 de la Constitution à l’amendement visant à les énumérer clairement ? Il nous semble que la commission des finances dégaine parfois un peu vite l’article 40 !.)

Est-ce créer une charge publique nouvelle que de vouloir préciser que l’Observatoire identifie clairement les marges au sein de la filière, étudie les coûts de production aux différents stades de la production agricole, de la transformation et de la distribution, assure une diffusion régulière de ses travaux et alerte les ministres lorsqu’il constate des baisses ou des hausses de prix excessives ?

Si tel est le cas, que l’on nous dise à quoi servira cet Observatoire ! Se contentera-t-il de recueillir des données auprès de FranceAgriMer et de l’INSEE et de les diffuser sur Internet, comme c’est d’ailleurs le cas aujourd’hui ?

À défaut d’avoir pu préciser ses missions dans la loi, nous espérons au moins que l’Observatoire sera chargé d’analyser les données recueillies.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Madame Laborde, vous posez un problème qui nous concerne tous. Cet amendement très utile permet de préciser que l’Observatoire ne se contentera pas de recueillir les données auprès de FranceAgriMer et de l’INSEE, mais qu’il les analysera.

La commission y est favorable.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

Le Gouvernement émet également un avis favorable, puisque cet amendement s’inscrit dans le sens de notre démarche.

L’Observatoire aura désormais une assise législative ; il sera doté d’un président et chargé de collecter les données sur les coûts de production et, grâce à l’amendement déposé par Mme Laborde, de les analyser.

J’ai pris l’engagement, cela a été rappelé tout à l’heure, de mettre à la tête de cet Observatoire une personnalité qui aura le poids suffisant pour transmettre au public de manière convaincante les données analysées. Tout cela, selon moi, va dans le bon sens !

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.

Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers amendements sont identiques.

L'amendement n° 53 rectifié ter est présenté par MM. Pointereau, Pierre et Vasselle, Mme Des Esgaulx et MM. Cornu, Houel, Billard, Pinton et Mayet.

L'amendement n° 338 rectifié est présenté par MM. Houpert, Beaumont, Frassa, Houel et Milon, Mme Malovry et MM. Jarlier, B. Fournier et Lefèvre.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 18, première phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. Rémy Pointereau, pour présenter l’amendement n° 53 rectifié ter.

Debut de section - PermalienPhoto de Rémy Pointereau

Nous souhaitons supprimer cette disposition pour deux raisons.

Tout d’abord, il est très difficile d’étudier, sur un territoire comme le nôtre, des coûts de production qui diffèrent fortement selon les régions et les modes de gestion.

Ensuite, M. le rapporteur m’a fait savoir tout à l’heure que, finalement, ce rapport supplémentaire irait encombrer les armoires du ministère…

Pour ces deux raisons, il ne paraît pas utile d’établir un rapport sur les coûts de production. Cet exercice complexe pourrait se heurter à un certain nombre de difficultés, les coûts pouvant se révéler fort différents d’un bout à l’autre de l’Hexagone.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Alain Houpert, pour présenter l’amendement n° 338 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Houpert

J’ajoute simplement qu’il faut un même degré de transparence pour la production et la distribution, sans stigmatiser la première.

Cet amendement a également pour intérêt de simplifier le texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 503 rectifié, présenté par MM. Jarlier, Alduy, Hérisson, Juilhard, J. Blanc, Carle et Bailly, est ainsi libellé :

Alinéa 18, première phrase

Remplacer cette phrase par trois phrases ainsi rédigées :

Il étudie également les coûts de production au stade de la production agricole sur la base d'un référentiel d'exploitation défini par l'interprofession, avec une adaptation selon les systèmes d'exploitation et les spécificités régionales. Il permet d'établir un prix de revient. Le calcul est réactualisé annuellement afin de prendre en compte l'évolution des charges et des gains de productivité.

La parole est à M. Pierre Jarlier.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Jarlier

Le projet de loi prévoit que l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires étudie les coûts de production au stade de la production agricole.

Cet amendement vise à garantir que cette étude établit les charges effectivement supportées par les producteurs, en se fondant sur un référentiel d’exploitation défini par l’interprofession elle-même, avec une adaptation selon les systèmes d’exploitation et les spécificités régionales et territoriales.

C’est ce même référentiel qui offrira un revenu minimum aux producteurs, puisqu’il constituera le socle permettant de calculer le prix de revient.

C’est la raison pour laquelle il est primordial que la réalité des charges supportées par l’agriculteur soit intégrée dans le calcul du référentiel, en tenant compte, précisément, des spécificités des productions et des territoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 147, présenté par M. Guillaume, Mme Herviaux, M. Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 18, première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

, les coûts de transformation et les coûts de distribution

La parole est à M. Paul Raoult.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Raoult

L’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires doit collecter les différents prix pratiqués : prix à la production, prix après transformation et prix à la consommation.

Mais, comme son nom l’indique, il doit aussi éclairer les acteurs économiques et les pouvoirs publics sur les marges réalisées à chaque niveau, par chaque acteur de la chaîne de commercialisation des produits alimentaires.

Or l’article 6 ne prévoit pour l’instant qu’un examen des coûts de production au stade de la production agricole.

Cette disposition est utile, puisque les producteurs interviennent au début de la chaîne. Cela permettra de veiller à ce que les prix payés aux producteurs couvrent au moins leur prix de revient et la rémunération de leur travail, ce qui est de moins en moins souvent le cas. Toutefois, elle est bien insuffisante pour étudier les marges réalisées par chaque acteur et déterminer si l’un d’eux n’accapare pas une trop grande partie de la valeur ajoutée créée.

On peut d’ailleurs craindre qu’en dévoilant uniquement les coûts de production au stade de la production agricole, les acheteurs n’en profitent pour « coller » à ce prix plancher, refusant de revaloriser la marge des producteurs en dehors des crises conjoncturelles. Les agriculteurs y perdraient encore plus en capacité de négociation.

Nous souhaitons donc, pour assurer une plus grande transparence et une plus grande équité, que les coûts de chaque opérateur soient étudiés : coûts de production, coûts de transformation et coûts de distribution. C’est le seul moyen pour connaître réellement les marges nettes.

Par ailleurs, je m’interroge sur les prix qui seront collectés par l’Observatoire. FranceAgriMer lui transmettra les données économiques qui lui sont nécessaires et l’INSEE les résultats de ses enquêtes. Mais l’Observatoire disposera aussi de moyens humains permettant de faire des contrôles et de collecter des informations directement auprès des opérateurs. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous apporter des précisions sur ce point ?

J’ai entendu parler des indices des prix à la consommation, mais, parce qu’ils mesurent l’inflation, ils ne sauraient constituer la base des analyses menées par l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 148, présenté par M. Cazeau, Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 18

I. - Première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

et l'évolution du revenu final des producteurs

II. - Seconde phrase

Compléter cette phrase par les mots :

et formule le cas échéant des préconisations en faveur d'une répartition équitable des marges dans la chaîne de commercialisation des produits alimentaires

La parole est à M. Yannick Botrel.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

La question de l’impact des prix agricoles dans la formation des prix alimentaires est délicate et complexe. La volatilité croissante, ces dernières années, des prix des matières premières agricoles et la crise que connaît aujourd’hui le monde agricole en font un problème majeur.

Des efforts importants de productivité tant dans l’agriculture que dans l’industrie ont permis, depuis plusieurs décennies, une baisse des prix agricoles et alimentaires. D’une manière générale, les produits alimentaires consommés sont de plus en plus transformés, et leur valeur ajoutée ne cesse de croître. Ce mouvement de fond se traduit par un poids généralement plus faible du prix de la matière première agricole dans celui du produit consommé.

Malgré cela, le poids des produits agricoles est encore très dominant dans l’ensemble des filières des produits frais et certaines variations de prix méritent des explications. Les filières alimentaires sont nombreuses et diversifiées ; elles font intervenir plusieurs intermédiaires et possèdent chacune leurs spécificités.

Dès lors, l’étude des mécanismes de formation des prix au sein de la chaîne alimentaire doit se faire filière par filière. C’est pourquoi l’Observatoire des prix et des marges, chargé d’établir une plus grande transparence dans la formation des prix, a été doté, en novembre 2008, d’un comité de pilotage spécifique pour les produits alimentaires.

Celui-ci a pour mission la mise en place d’outils opérationnels de suivi et d’analyse des prix et des marges sur l’ensemble des maillons des filières alimentaires. Les travaux de cet Observatoire ont été publiés tout au long de l’année 2009 sur la viande de porc, les produits laitiers et les fruits et légumes frais ; accessibles à tous sur internet, ils sont régulièrement mis à jour. Toutefois, nous constatons aujourd’hui l’impuissance de cet Observatoire.

Aussi, je vous propose à travers cet amendement de permettre à l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires de formuler des préconisations en faveur d’une répartition équitable des marges. Il s’agit ici de donner au Parlement les moyens concrets d’améliorer le revenu des paysans.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 603, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Alinéa 18, première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

en prenant en compte l'ensemble des facteurs de production, dont le travail

La parole est à M. Jacques Muller.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Muller

Depuis le début de l’examen de ce projet de loi, nous avons évoqué les questions de politique alimentaire et de compétitivité, les contrats, les coûts de production. Nous en sommes maintenant parvenus à l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires.

Tout cela est très intéressant, mais où sont passés les êtres humains, ces femmes et ces hommes au nom desquels nous débattons aujourd’hui, ces femmes et ces femmes qui, dans la situation actuelle, travaillent de plus en plus pour gagner de moins en moins ?

Aussi, je propose d’affiner la notion de coûts de production, que l’Observatoire aura pour mission d’étudier, en précisant que celle-ci recouvre également le travail de l’agriculteur.

Classiquement, dans les analyses de groupe, les coûts de production recouvrent les charges variables, les intrants – les énergies et les semences, ainsi que, dans les systèmes conventionnels, les pesticides et les engrais –, les autres charges affectées – irrigation, assurances spécifiques. Dans certains cas, on y intègre aussi les charges fixes que sont les amortissements, les intérêts des emprunts et les autres charges de structure.

Il se trouve que nous examinons un projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche. Introduire le principe d’une rémunération descente de l’agriculteur, reconnaître à celui-ci le droit de vivre de son travail, voilà qui serait innovant !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

S’agissant des amendements identiques n° 53 rectifié ter et 338 rectifié, je rappelle à Rémy Pointereau et à Alain Houpert que la mission de l’Observatoire est d’éclairer les pouvoirs publics. Son champ d’investigation est suffisamment balisé par le nouvel article L. 692-1 créé par le projet de loi : l’Observatoire analyse en effet la formation des prix et des marges au cours des transactions au sein de la chaîne alimentaire.

Il ressort de ces dispositions que, pour les distributeurs et les autres étapes de transformation de la chaîne alimentaire, les coûts entrants et sortants seront connus, puisque l’Observatoire étudie les transactions.

Par ailleurs, il est nécessaire de préciser que l’Observatoire étudiera également les coûts de production au stade du premier maillon de la chaîne, avant que n’aient lieu les premières transactions.

Aussi, la commission demande à chacun des auteurs de ces deux amendements de bien vouloir les retirer ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

L’amendement n° 503 rectifié, présenté par Pierre Jarlier, vise à étendre les missions de l’Observatoire à l’étude générale de la situation des producteurs. C’est peut-être aller un peu loin, mon cher collègue…

Le projet de loi garantit un équilibre dans la mesure où il inclut, dans le champ des compétences de l’Observatoire, le suivi de la formation des prix et des marges aux différents stades de la commercialisation des produits alimentaires et où il prévoit, par ailleurs, l’étude des coûts de production au stade de la production.

De plus, mentionner de manière précise l’étude du revenu final des producteurs pourrait entraîner un double effet potentiellement négatif pour les producteurs en cas de remontée des prix agricoles.

Enfin, d’une rédaction complexe, cet amendement ne permettra sans doute pas d’éclairer réellement la filière.

Aussi, la commission demande à son auteur de bien vouloir le retirer ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

S’agissant de l’amendement n° 147, présenté par Paul Raoult, l’étude des coûts de transformation et de distribution est déjà prévue par le texte dans la mesure où le champ d’investigation de l’Observatoire est clairement énoncé : il analyse « la formation des prix et des marges au cours des transactions ».

Il est donc seulement nécessaire de prévoir, en plus, l’étude des coûts de production au stade du premier maillon de la chaîne de commercialisation des produits alimentaires.

La commission émet un avis défavorable.

S’agissant de l’amendement n° 148, comme pour l’amendement n 503 rectifié, le texte garantit un équilibre dans la mesure où il inclut, dans le champ des compétences de l’Observatoire, le suivi de la formation des prix et des marges aux différents stades de la commercialisation des produits alimentaires et où il prévoit, par ailleurs, l’étude des coûts de production au stade de la production.

En outre, mentionner de manière précise l’étude du revenu final des producteurs pourrait entraîner un double effet, avec le risque d’une stigmatisation en cas de remontée des prix agricoles.

La commission émet un avis défavorable.

L’amendement n° 603, présenté par M. Muller, vise à préciser que l’Observatoire étudie les coûts de production au stade de la production « en prenant en compte l’ensemble des facteurs de production, dont le travail ».

Cette précision, si elle s’inscrit effectivement dans l’esprit de la disposition, semble néanmoins superfétatoire dans la mesure où, dans la prise en compte générale de tous les facteurs, elle ne mentionne spécifiquement que le travail.

Un tel ajout n’apporterait rien à l’impartialité et à la rigueur des travaux de l’Observatoire, qui n’a pas pour vocation de privilégier un facteur de production en particulier.

La commission émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

Tous ces amendements sont sous-tendus par une seule et même question : l’Observatoire doit-il traiter de la question des coûts de production ?

Pour ma part, j’estime en conscience qu’il faut répondre par l’affirmative à cette question, précisément parce qu’il est bien difficile, comme vous l’avez indiqué, monsieur Pointereau, de définir les coûts de production. Ceux-ci sont très variables d’un endroit à un autre du territoire, d’une région à une autre, et c’est bien pourquoi, tout au long de l’examen de ce projet de loi, j’ai constamment refusé, par souci de cohérence, que les coûts de production servent de référence.

Précisément, un Observatoire du type de celui que nous souhaitons n’a pas à prendre les coûts de production comme référence mais doit nous permettre d’avoir une vue plus claire de ce que sont ces coûts de production à l’échelle du territoire national et, partant, d’évaluer de façon plus pertinente les marges.

Dès lors que nous connaîtrons les coûts de production dans les différentes régions, il sera plus facile d’évaluer les marges que réalisent, par exemple, les industriels Lactalis, en Savoie, ou Entremont – qui, je l’espère, deviendra prochainement Entremont-Sodiaal – en Bretagne.

Si nous avons comme références des coûts de production distincts d’une région à l’autre, l’évaluation de la marge sera plus pertinente.

Pour l’ensemble de ces raisons, je le répète, il me paraît nécessaire de maintenir parmi les missions de l’Observatoire l’étude des coûts de production, étant entendu que ceux-ci seront appréhendés non pas de manière uniforme, mais en tenant compte de la diversité des situations d’un point à un autre du territoire.

Aussi, je demanderai à Rémy Pointereau, à Alain Houpert et à Pierre Jarlier de bien vouloir retirer leurs amendements.

Cela étant dit, il ne faut pas non plus aller au-delà du raisonnable, monsieur Raoult, au risque de définir ce que doivent être les marges nettes et, par voie de conséquence, de porter atteinte à la liberté d’entreprendre.

Monsieur Raoult, je ne conteste pas vos bonnes intentions, mais l’adoption de votre amendement conduirait à divulguer les secrets de fabrication et de commercialisation des industriels ou des distributeurs.

Que l’on qualifie, le cas échéant, les marges brutes d’excessives, je l’admets ; mais vouloir ensuite fixer leur niveau à un stade ou un autre de la transformation ou de la distribution d’un produit porterait atteinte à la liberté du commerce, voire à la liberté d’entreprendre, ce qui serait réellement problématique.

Aussi, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 147.

Monsieur Botrel, vous proposez, à travers l’amendement n° 148, que l’Observatoire formule des préconisations en faveur d’une répartition équitable des marges. Or il me semble que c’est au Parlement qu’il appartient de tirer les enseignements des analyses qui lui seront communiquées par le président de l’Observatoire dans son rapport annuel. C’est bien là tout l’objet de ce rapport !

L’Observatoire ne doit pas, me semble-t-il, être prescripteur ; son rôle est d’analyser précisément les situations qu’il aura à étudier, quitte à ce que le Parlement, ce qui est son rôle, en tire les conséquences politiques.

Aussi, le Gouvernement émet un avis défavorable.

Monsieur Muller, votre amendement n° 603 est satisfait puisque l’Observatoire aura pour mission d’étudier les coûts de production, lesquels incluent naturellement le facteur « travail ».

Aussi, je vous prierai de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Gérard Bailly, pour explication de vote sur les amendements identiques n° 53 rectifié ter et 338 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bailly

Le monde agricole attend beaucoup de cet Observatoire, dont il espère qu’il pourra identifier la part de chacun dans la formation des prix.

Une fois n’est pas coutume, je suis en désaccord avec mon collègue Rémy Pointereau : il me paraît nécessaire de connaître les coûts de production, en tenant compte, bien entendu, des spécificités de chacun des secteurs, car la formation des prix n’obéit pas partout aux mêmes règles. Or, depuis des décennies, les organismes agricoles évaluent chaque année le coût de production moyen d’un kilogramme de viande ou d’un litre de lait. Par souci d’efficacité, il conviendrait de connaître en outre le coût de transformation des produits et les marges qui sont réalisées à cette occasion, lesquels demeurent largement ignorés à ce jour.

Tous les agriculteurs souhaitent que les organismes de transformation réalisent des marges suffisantes pour leur permettre d’investir, de préparer l’avenir, car nous ne souhaitons pas du tout leur mort !

Les grandes surfaces s’approvisionnent auprès de sept grandes centrales d’achat. Comme beaucoup dans cette enceinte, j’ignore combien coûte aux grandes surfaces la commercialisation d’un kilogramme de sucre, de fruits, de légumes, ou d’un litre d’huile.

Des propos très durs ont été tenus, ici même, y compris par moi, à l’encontre de la grande distribution. Mais peut-être ces critiques ne sont-elles pas fondées.

Pour que cet Observatoire soit réellement opérationnel, il faudra qu’il puisse déterminer la part de chacun des acteurs dans la formation des prix et des marges, de manière à leur permettre à tous de poursuivre leurs activités dans des conditions normales. À défaut, monsieur le ministre, je crains que, dans trois ou quatre ans, on ne déplore l’incapacité de l’Observatoire à permettre une répartition équitable.

J’avoue que je m’interroge.

Monsieur le ministre, je le répète, il est important de connaître ces informations pour savoir combien il faut laisser à la grande distribution et quelle compensation il sera possible de lui demander pour tel ou tel produit de sorte que les producteurs puissent avoir en quelque sorte une part du gâteau.

Le monde agricole réclame une transparence complète et, si ce projet de loi n’y contribuait pas, il lui manquerait quelque chose.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Paul Raoult, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Raoult

La création de cet Observatoire ne manque pas d’intérêt, mais elle soulève deux questions de fond.

D’une part, monsieur le ministre, vous décidez subitement de créer ce nouvel organe chargé d’établir des statistiques, mais où trouverez-vous le personnel pour le faire fonctionner, alors même que, depuis deux ans, des postes sont supprimés notamment au sein de l’INSEE ? Je ne demande pas mieux que de vous croire, mais je suis un peu sceptique.

D’autre part, on a tendance à faire fi de la complexité de la vie économique dans notre pays. Ainsi, il est possible de produire du lait à partir d’une herbe poussant naturellement en zone de montagne, à partir d’une herbe de culture ou à partir du maïs. De même, les conditions de production diffèrent selon que l’on fait le choix de telle ou telle race, entre une Prim’Holstein, qui produit 10 000 litres de lait par an, ou une race mixte lait-viande.

Cette même complexité se retrouve au sein de l’industrie laitière. Une délégation de la commission de l’économie s’est rendue à Moscou, où nous avons visité une usine Danone. Ses 500 employés fabriquent quinze produits de référence différents.

Si l’on considère la palette de tous les produits fabriqués à partir du lait, du lait en poudre qui dégage très peu de valeur jusqu’au beurre industriel de pâtisserie exporté en Italie, ou au beurre utilisé par les ménages, en passant par les innombrables sortes de yaourts que l’on s’ingénie à trouver, il est difficile de déterminer la rentabilité de l’industriel.

Cela soulève une vraie question.

De surcroît, on le sait, ces groupes industriels – je pense à Danone -, parce qu’ils sont menacés d’absorption par des groupes américains, tentent, pour distribuer des dividendes et maintenir leurs cours en bourse, de dégager les marges les plus importantes.

Des pressions diverses s’exercent donc à tous les niveaux, sans même évoquer la commercialisation.

Tout le monde pointe du doigt les hypermarchés. Je vais me faire l’avocat du diable, mais le cours de l’action de Carrefour ou d’Auchan baisse aujourd’hui du fait de marges réduites, en tout cas sur le territoire français ! Cela nourrit d’autant la pression exercée par les groupes sur les coûts de distribution.

À partir de là, j’ignore comment nous pourrons résoudre le problème de fond de la relation entre le producteur, l’industriel et le distributeur. Le problème est d’autant plus complexe que, derrière les Lidl, les Aldi et les autres, il reste la petite épicerie du coin, aussi, et il ne faut pas oublier cette forme de distribution.

Je suis donc tout à fait d’accord pour que l’information soit la plus complète possible. Néanmoins, il faut également appréhender la complexité de la vie économique dans notre pays aujourd’hui. Vouloir donner un peu plus à l’agriculteur par rapport à l’industriel ou au distributeur, c’est déjà s’engager dans une réflexion très délicate, mais s’imaginer de surcroît pouvoir en faire la solution de tous les problèmes de revenus que connaissent les agriculteurs, cela me laisse quelque peu sceptique…

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Je ne partage pas nécessairement à 100 % l’avis de mon collègue Paul Raoult.

Cela étant, monsieur le président, je souhaite surtout intervenir sur l’amendement n °147, car je n’ai pas compris l’avis défavorable du rapporteur. En revanche, j’ai bien entendu le Gouvernement quand il évoque le risque de divulgation de secrets industriels et, si cela peut tout arranger, je suis prêt à ôter de mon libellé la mention des coûts de transformation.

Comme mes collègues Gérard Bailly et Paul Raoult, je défends un Observatoire ambitieux. Nous sommes d’accord, monsieur le ministre, sur la place essentielle que doit y tenir l’analyse de la production agricole. Sans elle, il n’y a rien ! Il me paraît toutefois nécessaire d’aller plus loin.

Car, ce que nous demandent les agriculteurs, plus globalement, c’est le pourquoi de cette multiplication par 4, 5, 6, 7, voire 10 qu’ils constatent entre le prix de départ chez le producteur, l’éleveur, l’exploitant, et le prix de vente au consommateur, en grande surface ou non.

Pour certaines raisons, pour certains produits et pour certaines étapes, ces multiplications peuvent s’expliquer, mais, pour la plupart des produits, elles ne sont nullement justifiées. C’est la raison pour laquelle cet Observatoire revêt une telle importance.

Dans la mesure où nous partons de loin, cela ne peut qu’améliorer la situation !

Paul Raoult évoquait tout à l’heure les conséquences de la RGPP sur les personnels, en l’occurrence ceux qui seront chargés d’accomplir ce travail d’analyse. Je n’y reviens pas longuement, sinon pour insister, monsieur le ministre : dans une ambition partagée, nous souhaitons que cet Observatoire des prix et des marges fonctionne au mieux. Vous nous avez donné des assurances concernant les moyens dont il disposera. Dont acte ! Cependant, s’il doit étudier les coûts au stade de la production agricole, sans qu’il lui soit possible de connaître avec exactitude les marges liées à la distribution, alors il me semble que ses analyses seront incomplètes.

Monsieur le ministre, pourquoi ne pas essayer ? Essayons, et, si la tâche s’avère trop complexe, malgré les moyens humains que vous allez mettre à disposition de cet Observatoire, ce ne sera pas un drame, nous en reviendrons au dispositif tel qu’il ressort du texte initial de la commission.

Il serait dommage de ne pas avoir plus d’ambition pour pouvoir répondre aux questions que se posent les agriculteurs français.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Yannick Botrel, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

M. le ministre nous a affirmé que l’Observatoire fournirait des rapports et des analyses, en particulier sur la question, centrale, celle qui revient constamment dès lors que l’on a des contacts réguliers avec des producteurs, des coûts de production et du partage des marges.

Il y aura donc des analyses et un rapport, je vous en donne acte, monsieur le ministre, mais tout cela ne nous fait guère dépasser le stade du simple constat. La formule que nous proposons – l’Observatoire « formule, le cas échéant, des préconisations » – permet d’aller plus loin que le simple constat pour tirer les conséquences de ces analyses. De toute manière, il faudra bien à un moment que le constat débouche sur des propositions. Si quelqu’un doit s’en charger, pourquoi pas l’Observatoire ?

Dans le cas contraire, la démarche serait dénuée d’intérêt. Si des dysfonctionnements, quels qu’ils puissent être, sont observés, des préconisations doivent être formulées afin de parvenir à une meilleure répartition.

Je n’ai donc pas saisi le sens de votre avis négatif.

Je rejoins ici les propos de notre collègue Gérard Bailly. Les producteurs, comme cela a été illustré par les dernières crises que nous avons connues, ont le sentiment, me semble-t-il légitime, que, dans cette chaîne de production, dans cette filière, ce sont eux qui servent constamment de variable d’ajustement.

En outre, Paul Raoult l’a redit après moi tout à l’heure, en tout état de cause, l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires aura un travail considérable, pour ne pas dire énorme. C’est en effet tout le territoire national qui sera concerné. L’activité d’une multiplicité de filières et de partenaires économiques devra en conséquence être analysée.

Vous n’avez pas pu me répondre quand j’ai soulevé ce problème en intervenant sur l’article et je constate que cet aspect n’a pas du tout été évoqué, mais, si l’on souhaite que l’Observatoire produise des rapports dans de bonnes conditions, des moyens considérables devront lui être alloués. Nous voudrions avoir la certitude que l’Observatoire sera bien à la hauteur des ambitions que nous lui prêtons les uns et les autres.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

Malgré l’heure tardive, je souhaiterais cadrer ce débat, qui porte sur des sujets importants.

Je rejoins Gérard Bailly dans son analyse : il importe que l’Observatoire puisse couvrir le spectre le plus large possible.

Sans l’étude des coûts de production, nécessaire aux producteurs, on pourra toujours étudier les marges, mais sans référence de base. Or c’est précisément l’une des énormes faiblesses actuelles de l’Observatoire des prix et des marges !

Observer des marges sans connaître le coût de production ne peut en effet mener à aucune conclusion utile au producteur. Si nous ne faisons pas figurer dans la mission de l’Observatoire l’analyse des coûts de production, alors nous retombons dans ce qui s’est fait depuis des mois et nous nous condamnons à ne pas tirer des travaux de cet Observatoire toutes les conséquences qui seraient utiles aux producteurs.

Quant aux remarques de Didier Guillaume, je comprends très bien sa volonté d’aller le plus loin possible. Cependant, je pense que l’on franchirait réellement une ligne rouge en incluant les coûts de transformation.

Malgré l’heure tardive, ces questions sont trop importantes pour que je n’insiste pas sur les conséquences du dispositif que vous proposez, monsieur le sénateur.

En effet, concrètement, cela revient à mettre sur la place publique les secrets de fabrication d’une entreprise industrielle. Cela ne concerne d’ailleurs pas uniquement les très grosses entreprises industrielles comme Danone. Cela va concerner la petite entreprise d’industrie agroalimentaire qui fabrique du saucisson à côté de chez vous, à qui vous allez demander ses secrets d’innovation, la part du chiffre d’affaire qu’elle consacre à sa politique salariale, celle qu’elle affecte à sa politique de l’énergie, si elle a installé des panneaux solaires ou non. Bref, c’est toute sa stratégie de développement économique que vous allez dévoiler !

Ce n’est pas là ce que nous souhaitons, car cela n’est pas dans l’intérêt des entreprises.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre

Très bien, je n’avais pas compris.

Pour répondre à M. Botrel enfin, l’Observatoire doit être dédié à l’analyse. Je tiens à ce que les préconisations politiques restent du ressort des responsables politiques, c'est-à-dire des élus du peuple.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Convaincu par les arguments du ministre, je souhaitais supprimer de cet amendement les termes « coûts de transformation », tout en laissant subsister la mention des « coûts de distribution », ce qui permettra sans doute d’aller plus loin.

Je pensais avoir déjà rectifié mon amendement en ce sens, mais sans doute n’avais-je pas été assez clair, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis en effet saisi d’un amendement n° 147 rectifié, présenté par M. Guillaume, Mme Herviaux, M. Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, et ainsi libellé :

Alinéa 18, première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

et les coûts de distribution

Monsieur Pointereau, l'amendement n° 53 rectifié ter est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Rémy Pointereau

Je suis tout à fait d’accord pour que soient étudiés les coûts de production. Mais, encore une fois, il sera difficile de faire des moyennes. Les centres d’économie rurale ont déjà des chiffres, qu’ils peuvent vous communiquer demain. Mais y a-t-il besoin d’un rapport pour cela ?

C’est pourquoi je souhaitais que l’on supprime ce rapport annuel et la référence à l’analyse des coûts de production au stade de la production agricole.

Néanmoins, comme je m’apprête, dans quelques heures, à vous demander un autre rapport, cette fois, sur les contraintes environnementales, monsieur le ministre, je vais retirer cet amendement, en espérant que vous émettrez un avis favorable sur celui que je présenterai demain

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Rémy Pointereau

… non sans avoir attiré votre attention sur le risque qu’il y aurait à stigmatiser les régions sur la base des coûts de production. Cela risque de les monter les unes contre les autres, et il pourrait y avoir un retour de manivelle…

Monsieur le président, je retire l’amendement n° 53 rectifié ter.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 53 rectifié ter est retiré.

Monsieur Houpert, l'amendement n° 338 rectifié est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 338 rectifié est retiré.

Monsieur Jarlier, l'amendement n° 503 rectifié est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Jarlier

Non, je le retire également, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 503 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 147 rectifié.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Odette Herviaux, pour explication de vote sur l’amendement n° 148.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Je ne souscrivais pas complètement à l’idée de supprimer la première phrase de l’alinéa 18 de l’article 6.

Il faut toutefois insister sur le fait que la profession agricole a parfois ressenti ces mots comme une mise en accusation, comme une façon de pointer du doigt son incapacité à obtenir des références sur ses coûts de production. Il faut veiller à ne pas la stigmatiser davantage.

Aussi avions-nous pensé, pour en quelque sorte rétablir l’équilibre, à mentionner tout à la fois les coûts de transformation et les coûts de distribution.

Vous avez argué, monsieur le ministre, que cela n’était pas possible, sous peine de dévoiler des secrets de fabrication. Je note au passage que les professionnels de la distribution pourraient sans doute invoquer le même risque, dans l’absolu.

Reste qu’il faut envoyer un signe fort à la profession agricole, en faisant bien passer le message qu’il ne s’agit pas de stigmatiser le manque de compétitivité de certains sur certaines parties du territoire, mais, bien au contraire, de lui permettre, par la connaissance de ses coûts de production, de voir où sont les marges et, espérons-le, d’agréger les différentes composantes du revenu des agriculteurs.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Monsieur Muller, l'amendement n° 603 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Muller

Oui, monsieur le président, même si M. le rapporteur l’a qualifié de superfétatoire, et si M. le ministre, plus diplomate, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Muller

… l’a jugé simplement satisfait.

Je maintiens cet amendement pour deux raisons.

D’abord, sur le plan pratique, quand on parle de coûts de production, on n’intègre généralement pas le travail. Dans toutes les analyses de gestion, on raisonne en marge brute, on compare des techniques de production ou des pratiques, mais, culturellement, on ne prend pas en compte le travail. C’est pourquoi il me semblait pertinent de l’inscrire expressément dans la loi.

Par ailleurs, il y a également un aspect éthique : insister sur le travail, c’est reconnaître celui des agriculteurs, c’est-à-dire leur métier. Pour ma part, je pense que tous les facteurs de production ne se valent pas. Le sac d’engrais est une chose, le travail humain en est une autre.

Mettre le travail humain en exergue revient donc tout simplement à remettre l’être humain à sa place !

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 26 mai 2010, à quatorze heures trente et le soir :

- Suite du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche (Procédure accélérée) (n° 200, 2009-2010).

Rapport de M. Gérard César et M. Charles Revet, fait au nom de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire (436, 2009-2010).

Texte de la commission (n° 437, 2009-2010).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée le mercredi 26 mai 2010, à deux heures.