Intervention de Renée Nicoux

Réunion du 25 mai 2010 à 22h15
Modernisation de l'agriculture et de la pêche — Article 6

Photo de Renée NicouxRenée Nicoux :

Le présent article entérine la création d’un Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires qui sera « chargé d’éclairer les acteurs économiques et les pouvoirs publics sur la formation des prix et des marges ».

Nous pouvons nous féliciter de cette mesure.

Il est absolument nécessaire, aujourd’hui, d’instaurer une réelle transparence des transactions agricoles. C’est seulement ainsi que nous pourrons lutter contre certains abus et que nous permettrons aux agriculteurs français d’avoir accès à un revenu équitable et décent, d’une part, par un prix couvrant au minimum les coûts de production, rémunération du travail comprise, et, d’autre part, par une répartition équilibrée de la valeur ajoutée dans la chaîne de commercialisation alimentaire.

Or, depuis quelques années, le prix payé aux producteurs agricoles par la grande distribution est de moins en moins rémunérateur alors que, dans le même temps, le prix à la consommation est resté constant, s’il n’a pas augmenté !

Certains parlent d’« effet cliquet » sur le marché alimentaire.

L’exemple de la filière laitière illustre particulièrement ce mécanisme. Entre 2007 et 2009, le prix du lait payé aux producteurs a baissé de 7 % alors que, dans le même temps, le prix en rayon a augmenté de 9 %. Un phénomène identique peut être observé dans la filière de la viande bovine.

C’est une situation inique à laquelle il faut remédier.

Malheureusement, le phénomène est très difficile à appréhender, la situation française étant caractérisée par une très grande opacité dans la construction des prix agricoles.

Autrement dit, nous sommes incapables, aujourd’hui, de savoir comment le prix se construit entre le producteur et le consommateur !

Cette absence d’informations repose en partie sur une véritable omerta des professionnels de l’industrie et de la grande distribution, qui se refusent à communiquer des chiffres à ce sujet. Face à cela, il semble donc indispensable d’obtenir une transparence totale dans le secteur alimentaire, afin de pouvoir identifier les dérives et les sanctionner, le cas échéant.

Nous devons rompre cette loi du silence, qui fait du tort aux agriculteurs comme aux consommateurs !

Le renforcement de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires est donc une mesure très importante, surtout dans la crise que nous traversons.

Toutefois, malgré quelques avancées en commission, cet Observatoire semble, en l’état, s’apparenter plus à un thermomètre qu’à un organe de régulation. En effet, il n’a aujourd’hui qu’un pouvoir d’observation et ne remplit aucune fonction d’analyse et d’intervention. De plus, nous pouvons émettre des doutes quant à son utilité, étant donné qu’il ne s’attaque pas au cœur du problème, le partage de la valeur ajoutée dans la chaîne de commercialisation.

Il faut donc qu’il puisse étudier les coûts de transformation et de distribution afin de connaître précisément les marges de chaque opérateur.

C’est ainsi que nous pourrons sortir de cette omerta sur la construction des prix et en finir avec les dérives qui en découlent.

Cet Observatoire doit s’inscrire dans la perspective de l’avènement d’un système équitable pour tous. Il faut donc également qu’il soit doté d’outils le permettant.

Il est, par exemple, indispensable de lier, avec un coefficient fixe et constant, le prix agricole et le prix en rayon. Nous ne pouvons plus tolérer que des agriculteurs soient contraints de vendre à perte, alors que, dans le même temps, les consommateurs paient toujours le prix fort. Il faut que le futur Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires devienne un véritable outil de régulation.

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