Intervention de Claude Lise

Réunion du 12 mai 2011 à 15h00
Collectivités de guyane et de martinique — Article 3, amendement 68

Photo de Claude LiseClaude Lise :

L’article 3 de ce projet de loi définit le schéma institutionnel applicable à la collectivité de Martinique.

Mon intervention portera sur l’une des instances prévues à cet article, à savoir le conseil exécutif.

Je veux appeler l’attention sur le fait qu’il est difficile de ne pas lier son mode d’élection à la question de la prime majoritaire prévue pour la liste arrivée en tête des élections à l’assemblée.

Dans le texte qui nous est proposé, le conseil exécutif est élu par l’Assemblée de Martinique après l’élection de son président, au scrutin majoritaire de liste, à la majorité absolue aux premier et deuxième tours et à la majorité relative au troisième tour. Le candidat en première position sur la liste arrivée en tête devient président du conseil exécutif.

Cela correspond au souhait très majoritaire qu’ont exprimé les élus réunis en congrès lorsqu’ils se sont prononcés sur la mise en place d’une collectivité unique. Mais ce souhait allait de pair avec une assemblée élue à la proportionnelle sans prime majoritaire.

Compte tenu de la volonté, que l’on sent partagée par le Gouvernement et la commission des lois, d’instaurer une prime majoritaire très importante, peut-on maintenir un tel mode d’élection des conseillers exécutifs ?

J’ai eu l’occasion d’aborder cette question avec de nombreux élus martiniquais, partisans, au congrès, d’un exécutif homogène. Ils redoutent que, dans une situation de cumul d’une prime importante et d’un exécutif homogène, l’opposition ne soit ainsi réduite à la portion congrue. Ils considèrent donc que, si la prime majoritaire de neuf sièges est maintenue, seule une représentation du conseil exécutif à la proportionnelle éviterait de laisser tout le pouvoir concentré dans une même main et de marginaliser ainsi des formations politiques pourtant très représentatives de la population martiniquaise.

Je partage pleinement cet avis. L’expérience m’a montré combien il est, hélas ! facile de museler une minorité dans un espace insulaire et, plus largement, dans tout territoire isolé.

Une minorité muselée qui ne dispose alors d’aucune possibilité d’expression dans un département peut, si ses amis de même sensibilité sont majoritaires sur le territoire voisin, s’exprimer par leur biais. Dans une île comme la nôtre, une minorité muselée n’a d’autre moyen de s’exprimer que la rue.

Mes chers collègues, j’appelle vraiment votre attention sur ce point et je vous invite à ne pas rester sourds à mes arguments. Je me souviens que, dans les années quatre-vingt, nous étions nombreux à mettre en garde contre les régions monodépartementales. Il aura fallu trente ans pour que l’on reconnaisse que nous avions raison. Aussi, j’espère que ceux qui veulent bien m’écouter ne regretteront pas, dans quelques années, de s’être obstinés à vouloir construire une collectivité unique sur un modèle antidémocratique.

Sur cette question du conseil exécutif, ma position dépendra donc du résultat de la discussion sur la prime majoritaire, qui sera abordée lors de l’examen de l’article 6 du projet de loi. C’est pourquoi je me verrai contraint de demander la réserve du vote sur l’amendement n° 68, par lequel je propose une élection à la proportionnelle du conseil exécutif, mais seulement dans le cas où serait maintenue une prime majoritaire importante. Il s’agit d’un point considéré comme très important par beaucoup d’élus martiniquais appartenant, il importe de le préciser, à différentes sensibilités politiques.

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