Intervention de Serge Larcher

Réunion du 12 mai 2011 à 21h30
Collectivités de guyane et de martinique — Article 9

Photo de Serge LarcherSerge Larcher :

L'article 9, qui institue un pouvoir de substitution renforcé du représentant de l’État, est constitutionnellement injustifié. En effet, cette disposition ne concerne que l’outre-mer et devrait donc répondre à une caractéristique particulière fondée sur l'article 73 de la Constitution. Or il n’en est rien !

La seule justification que j’ai pu relever dans le rapport est que ce dispositif permettrait de régler les difficultés posées aux autorités françaises par l’absence d’application de certaines règles fixées par le droit communautaire. En effet, la France a été condamnée pour non-respect de dispositions communautaires. Est-ce particulier à l’outre-mer ? Je ne le crois pas !

En réalité, ce renforcement des pouvoirs du préfet est un choix politique stigmatisant pour tous les élus de l’outre-mer. Nous voilà revenus à une tutelle qui nous éloigne de la logique de décentralisation et de responsabilisation des élus qui semblait prévaloir dans ce texte !

Je tiens par ailleurs à souligner que ce pouvoir de substitution existe déjà sous une forme générale dans le droit des collectivités territoriales. En fait, ce renforcement s’inspire de dispositifs existants pour certaines collectivités régies par l’article 74 de la Constitution. Or, lors des consultations du mois de janvier 2010, les électeurs de Martinique et de Guyane ont choisi une collectivité unique demeurant régie par l’article 73 de la Constitution.

De plus, la mesure proposée est inopérante et la nouvelle rédaction adoptée par la commission des lois n’y change rien, et ce parce qu’il n’est tenu aucun compte des raisons qui pourraient provoquer l’état de carence de la collectivité concernée. Dans la réalité, la négligence prêtée aux élus est bien souvent la conséquence de situations financières et budgétaires dégradées. Cela est dû à deux facteurs principaux : la faiblesse des moyens dont disposent les collectivités d’outre-mer et, en grande partie, le désengagement de l’État.

Que peut faire le préfet en de telles circonstances ? Comment mettra-t-il en place les financements qui font défaut et les contreparties aux financements communautaires possibles dans les programmes opérationnels européens, du moins ceux de la génération actuelle ?

Dans son étude intitulée « Collectivités territoriales et obligations communautaires » du mois d’octobre 2003, le Conseil d’État précisait : « De façon générale, l’État doit veiller à définir avec clarté et simplicité les compétences des collectivités territoriale, à ne pas compliquer le droit interne applicable à celles-ci et à leur donner les moyens financiers de faire face aux compétences qui sont les leurs. » Il mettait également en garde contre la fausse solution qui consisterait à doter sur ce point les préfets d’un pouvoir de substitution.

Mes chers collègues, c’est pour cet ensemble de raisons que je vous demande de voter la suppression de cet article 9.

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