Monsieur le ministre, mon intervention a trait au patrimoine bâti, mais également aux fouilles archéologiques préventives. Patrimoine et fouilles archéologiques préventives sont en effet autant de domaines qui préoccupent beaucoup les collectivités locales, notamment les plus petites d'entre elles. Je peux en témoigner d'autant mieux que je préside l'association des maires d'un département dont 48% des communes comptent moins de deux cents habitants, alors que deux cents de ses églises sont classées.
Le premier sujet que j'aborderai est donc celui des crédits disponibles pour l'entretien et la restauration des monuments classés qui ne sont pas nécessairement historiques, mais pour lesquels l'Etat intervient de la même manière.
Je me félicite que les crédits inscrits à ce titre au budget 2005 du ministère de la culture soient en augmentation par rapport à ceux de 2004. Toutefois, depuis plusieurs années, on constate la même tendance dans la loi de finances initiale puis, en cours d'exercice, on se rend compte malheureusement qu'une part de ces crédits fait l'objet de gels. Il y a là un vrai problème !
Il arrive même que des collectivités locales, j'en connais un exemple dans mon département, à qui on a demandé de verser, avant que l'Etat n'engage les travaux de restauration, les sommes représentatives de leur participation sur un compte réservé et qui ont dû parfois emprunter pour être en mesure de le faire, voient les fonds bloqués parce que l'Etat ne dispose plus des crédits nécessaires pour engager lesdits travaux. Dans ce cas, la collectivité, elle, commence à rembourser ses emprunts ; néanmoins la participation qu'elle a versée ne lui est pas remboursée et reste inutilisée.
J'ai connaissance d'un cas plus grave encore où, faute de pouvoir engager les travaux de restauration, la commune voit le monument se dégrader davantage, de sorte que, finalement, les crédits sont utilisés non pour restaurer le monument, mais pour installer une sorte d'échafaudage de protection, ce que les spécialistes appellent un « parapluie ».
Cette situation, qu'on ne fait qu'aggraver, est évidemment lourde de conséquences à la fois pour le patrimoine, qui continue à se dégrader, et pour la collectivité qui a bloqué des fonds en pure perte.
Aussi, monsieur le ministre, je souhaiterais savoir ce que concrètement vous comptez faire pour que les opérations déjà attribuées à des entreprises ou déjà pré-financées par les collectivités locales ne soient pas interrompues faute de crédits disponibles de la part de l'Etat.
Le second sujet sur lequel je souhaite appeler votre attention concerne les fouilles archéologiques préventives et préalables aux opérations d'aménagement menées par les collectivités locales.
L'insuffisance évidente des moyens dont dispose l'INRAP, l'Institut national de recherches archéologiques, notamment dans certaines régions, et le caractère excessif de certaines prescriptions de fouilles archéologiques décidées par les services archéologiques des DRAC - elles prennent parfois un caractère quasi systématique et peuvent être sans rapport avec l'importance relative de l'opération et l'intérêt du lieu -, aboutissent à ce que des opérations d'aménagement sont bloquées pendant des mois, en attente de la réalisation des fouilles. Cela peut remettre en cause des opérations importantes en matière de développement économique.
Ajoutons à cela que le coût de ces fouilles - je n'évoque pas le diagnostic, mais les fouilles prescrites après le diagnostic - est, dans les faits, fixé unilatéralement par l'INRAP - peut-être n'est-ce pas tout à fait règlementaire -, qui établit son devis et demande à l'aménageur de donner son accord avant même d'indiquer la date et la durée de l'intervention.
Je suis, pour ma part, confronté à ce problème dans mon département et je ne suis pas le seul.
Ces pratiques remettent en cause l'équilibre des opérations.
Il est clair que, dans un certain nombre de cas, on est aujourd'hui face à une contradiction entre la manière dont agissent les services chargés de l'archéologie préventive et les impératifs économiques auxquels sont confrontés les aménageurs. Notre pays n'est pas dans une situation économique et financière telle qu'il puisse accepter sans réagir la remise en cause d'opérations d'aménagement du territoire.
Aussi, monsieur le ministre, je souhaiterais que vous nous précisiez ce que vous comptez faire pour résorber les retards accumulés dans certaines régions et pour que les fouilles archéologiques ne soient prescrites qu'à bon escient et sans méconnaître les nécessités de l'aménagement du territoire et du développement économique.
Je serais tenté de vous demander, en bref, ce que vous comptez faire pour réconcilier l'archéologie et l'aménagement du territoire !