Je vous remercie, monsieur le ministre, de vos précisions, car il était nécessaire d'entendre une telle détermination. Sur cette question, en effet, la mollesse l'a trop souvent emporté.
Nous devons conserver l'esprit des négociations de Seattle. J'étais sur place à l'époque, et les premiers combats qui ont été menés ont réussi à mettre l'OMC en échec. Il faut donc continuer.
Cela dit, je voudrais vous donner lecture d'autres remarques de l'universitaire américain que j'ai cité tout à l'heure, qui a aussi déclaré : « La France a besoin de la culture américaine » - ce que je trouve incontestable - « pour faire contrepoids à la montée de sa population islamique. Les moeurs nord-américaines telles que véhiculées par Hollywood ou d'autre formes de culture populaire peuvent encourager la révolte des adolescents contre leurs parents. Cela aiderait à assimiler les enfants islamiques dans l'ensemble de la société française. Je me demande même si les Français ne devraient pas subventionner l'importation de films d'Hollywood dans leur pays. »
Il a même osé ajouter : « Bien des Français veulent consolider la culture française sur la scène internationale tout en supprimant la diversité chez eux. »
C'est dire la taille de l'obstacle auquel nous avons à faire face, d'autant que les Etats-Unis, depuis qu'ils ont réintégré l'UNESCO, contribuent à hauteur de 25 % à son budget. Dans cet univers marchand, vous connaissez tous l'adage : « Qui paie décide. » Le combat s'annonce donc très difficile.
Plusieurs réunions sont organisées sur la place de la culture dans les accords internationaux par rapport aux autres marchandises. Il y en a une aujourd'hui même à Trèves, et je me suis personnellement rendu à la maison des cultures du monde mercredi dernier, pour rencontrer sur ce thème soixante-dix stagiaires étrangers, venant de cinquante-deux pays, en présence de l'ambassadeur Musitelli et de la directrice du département de l'UNESCO qui s'occupe de la question.
Par ailleurs, dans leur rapport mondial sur le développement, les responsables du PNUD, le programme des Nations unies pour le développement, écrivent : « Il est certainement vrai que de permettre la diversité dans les pratiques culturelles peut se révéler extrêmement important, puisque l'exercice de la liberté culturelle en dépend. Cela ne revient cependant pas à défendre la diversité culturelle pour elle-même. » Si ! bien au contraire, il faut défendre la diversité culturelle pour elle-même, comme vous l'avez d'ailleurs très bien expliqué, monsieur le ministre !
En effet, il ne faudrait pas que les Etats-Unis se comportent à l'égard de l'UNESCO comme ils l'ont fait à l'égard du protocole de Kyoto. Heureusement, avec désormais vingt coalitions culturelles, la France compte de plus en plus de soutiens, notamment en Europe.
Monsieur le ministre, je me réjouis de vous voir résolu sur la question. Nous pourrons marcher côte à côte et « frapper ensemble ». Comme dirait Saint-Just, il faut oser, car c'est le seul chemin de l'avenir. Or, pour oser, il faut être inventif : soyons-le, ensemble !