Intervention de Jack Ralite

Réunion du 4 décembre 2004 à 9h30
Loi de finances pour 2005 — État b

Photo de Jack RaliteJack Ralite :

J'avais prévu de faire une intervention complète sur les intermittents du spectacle. Cependant, compte tenu de ce qu'a dit Marie-Christine Blandin à ce sujet, je limiterai mon propos. Je soutiens très vivement sa position et y adhère de A jusqu'à Z.

Je suis satisfait de la façon dont Jean-Paul Guillot a rédigé son rapport. Son expertise conforte tout ce que nous disions. La qualité de son travail tient au fait qu'il ne s'est pas considéré comme un expert isolé, prétendant tout savoir et se contentant de nous demander d'approuver. Il a travaillé avec les experts du quotidien, ceux qui se retrouvent au comité de suivi, à savoir les élus, les intermittents ou leurs représentants syndicaux. Le document auquel il a abouti conforte de manière heureuse la position que nous avions adoptée le lendemain du 26 juin 2003. Par ailleurs, je trouve bien que vous ayez exprimé ici, monsieur le ministre, tout l'intérêt que vous portez aux conclusions de M. Guillot.

Cela dit, je me pose une question. Je m'en suis fait l'écho au cours de la récente conférence de presse du comité de suivi et lors d'une rencontre avec vous. Marie-Christine Blandin l'a évoquée elle aussi : il s'agit de l'agenda.

Vous parlez d'un « Valois de la culture ». La formule est belle. La symbolique compte en politique. Cependant, le problème est bien celui du calendrier. Sans aller jusqu'à dire que vous vous opposez au MEDEF et - ce que je regrette, bien évidemment - à son alliée, la CFDT, à tout le moins, vous avez quelque difficulté à aboutir dans les discussions que vous menez avec ces deux organisations.

Il ne faudrait pas que les mesures provisoires et positives que vous avez heureusement prises pour 2004, mesures appelées à devenir transitoires en 2005 et destinées à permettre à la négociation de s'ouvrir, deviennent définitives. En effet, le MEDEF et la CFDT, se transformant en mur anti-intermittents, c'est-à-dire en mur anti-art et anti-culture, pourraient être tentés d'accepter la formule provisoire, transitoire, donc limitée, qui deviendrait alors une solution bas de gamme. Cette question, sérieuse, angoisse les intermittents, et m'angoisse aussi.

Si cette situation devait durer trop longtemps, la spécificité du régime des intermittents, à laquelle nous tenons - et vous aussi, dites-vous -, risquerait d'être englobée dans la discussion générale sur la réforme de l'UNEDIC et pourrait y perdre des plumes.

De toute façon, il faut et il faudra de l'argent. Or il n'y en a pas de prévu. J'ai eu l'occasion de vous parler récemment de cette question du financement. A cet égard, la situation de l'orchestre de chambre national de Toulouse me préoccupe. Il comptait onze permanents. Les collectivités locales ont accepté de se mettre autour de la table pour étudier, dans l'esprit énoncé, quelle part pouvait être la leur. Or le directeur régional des affaires culturelles, dès la première réunion, a annoncé qu'il diminuait la subvention, pour la passer de 460 000 euros à 50 000 euros.

Soit les collectivités locales prennent tout à leur charge, mais elles sont présentes sur tellement de fronts à la fois qu'elles n'y parviendront pas, soit on trouve un mécène, mais je n'en vois pas qui se présente pour soutenir l'Orchestre de chambre national de Toulouse, soit encore on transforme les personnels permanents en intermittents. Il y a là une interrogation, et nous devons y répondre rapidement.

Par ailleurs, je saisis au vol l'information selon laquelle un débat sur l'emploi culturel et artistique aura lieu à l'Assemblée nationale, le 9 décembre, sur votre initiative, monsieur le ministre - j'y assisterai pour ma part dans les tribunes -, ainsi qu'au Sénat, au mois de janvier.

Il faut que nous approfondissions désormais les idées mises en avant par le comité de suivi. Comme Marie-Christine Blandin, je pense en effet que nous devons tous réfléchir à la qualité de ce comité, dans lequel se retrouvent la « coordination », toutes les organisations syndicales, sauf celles qui « collent », provisoirement je l'espère, aux positions du MEDEF. En font partie aussi une organisation patronale extérieure au MEDEF, ainsi que des élus de toutes les couleurs de l'arc-en-ciel des sensibilités politiques de ce pays, ce qui ne signifie pas qu'ils y représentent leur groupe.

Lorsque l'on va au fond des choses, on peut donc trouver au plan national des solutions qui dépassent la pensée « bissectrice ». En effet, comme je l'ai dit un jour à M. Fillon, je ne me résous pas à être seulement dans l'opposition. Nous ne devons jamais nous mettre dans cette situation, car cela empêche de trouver des solutions, cela nous abîme, et cela vous abîme également.

Fort heureusement, monsieur le ministre, la façon dont vous abordez la question évite l'écueil de cette pensée bissectrice. Mais cela nous demande un travail beaucoup plus important.

Je n'énumérerai pas le contenu des revendications du comité de suivi, car vous les connaissez aussi bien que moi. Mais elles sont fondamentales !

Vous avez évoqué tout à l'heure, et vous avez eu raison, les difficultés que rencontrent les intermittents. Je n'insisterai donc pas, mais il y a tout de même une difficulté que je veux rappeler.

Animant récemment un débat des états généraux de la culture au Théâtre de la Commune, j'évoquais la question des congés de maternité des intermittents, me félicitant de la solution qui venait d'être trouvée. Et Léonore Faucher, la réalisatrice de ce premier beau film, Brodeuses, enceinte de sept mois, de me répondre que c'était faux, qu'elle s'était rendue la veille aux ASSEDIC, où on lui avait dit que ces nouvelles règles ne s'appliquaient pas.

Dans la salle, plusieurs personnes ont affirmé le contraire. L'un d'entre nous a ensuite pris contact avec l'un de vos collaborateurs, qui s'occupe des affaires sociales au ministère de la culture, M. Abecassis, qui a lui-même appelé les ASSEDIC. Fort heureusement, ce cas a été réglé.

Mais je connais une autre jeune femme (, une technicienne du cinéma qui, elle, a dû faire sept démarches, pour obtenir satisfaction. Je l'avais empêchée de se résigner car, pour ma part, je ne me résigne jamais. Sept démarches ! Je pense qu'une autre personne, renvoyée dans les cordes, au bout de deux ou trois démarches, ne serait pas revenue.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion