Intervention de David Assouline

Réunion du 4 décembre 2004 à 15h30
Loi de finances pour 2005 — Communication

Photo de David AssoulineDavid Assouline :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais tout d'abord insister sur l'extrême importance du débat qui nous réunit aujourd'hui.

En effet, le bon fonctionnement du secteur public de l'information est, à n'en pas douter, en lien étroit avec le bon fonctionnement de la démocratie. L'Etat doit garantir le pluralisme de l'information en aidant à la création de nouvelles chaînes et de nouveaux journaux, tout en assurant leur indépendance.

L'Etat doit également empêcher la concentration des médias dans la main de grands groupes, peu scrupuleux, dont le seul objectif est d'accaparer en leur sein une chaîne ou un journal de plus.

Enfin, l'Etat doit impérativement contribuer à la diffusion sur le service public de programmes divers d'éducation, de culture, de loisir, de sport, car l'enrichissement se fait dans la diversité. Cette diversité culturelle, qui fait tellement défaut dans le secteur audiovisuel privé, ne peut être atteinte qu'en s'éloignant de la sacro-sainte politique de l'offre et de la demande. Et qui est mieux placé que l'Etat pour s'en éloigner ?

Nous devons donc, mes chers collègues, tout mettre en oeuvre pour donner à l'audiovisuel public les moyens de la qualité ! C'est parce que le monde de l'audiovisuel trouve un écho important dans les foyers de France, c'est parce que la « télé » et la radio ont une influence considérable sur le comportement de nos concitoyens, et notamment sur les jeunes, que nous devons être particulièrement attentifs aux moyens que l'Etat entend attribuer à ce secteur.

A la lecture du dernier budget Sarkozy, je peux vous affirmer, mes chers collègues, que le Gouvernement fait fausse route.

Il fait fausse route parce que la publicité occupe une place de plus en plus grande dans les ressources propres des chaînes de télévision publiques, notamment de France 2, où le financement publicitaire dépasse 40 % de son budget. Et plus la publicité prend part au financement d'une chaîne, plus elle étouffe les programmes et pollue à la fois les ondes et nos cerveaux.

On ne peut concevoir que la plus grande chaîne du service public ait des objectifs de rentabilité pour remplir ses caisses. On ne peut pas non plus concevoir que l'Etat, impuissant, se contente de regarder cette absurde bataille de l'audimat que TF 1 livre à France 2 et que je n'oserai pas appeler « bataille culturelle » tant elle nivelle la culture vers le bas. Aussi longtemps que la publicité occupera une place importante dans le financement de l'audiovisuel public, le seul critère retenu sera l'audimat. Il ne peut en être ainsi !

Nous devons aider France 2, qui se bat avec le peu de moyens alloués par l'Etat pour sortir tant bien que mal de cette logique marchande en essayant de réhabiliter des programmes documentaires. Nous croyons en l'intelligence des téléspectateurs, qui attendent ces programmes enrichissants et ne feront pas baisser l'audimat, même si, dans ce domaine, il faut aussi laisser du temps pour que de nouvelles habitudes s'installent dans la façon de « consommer » la télévision.

La République doit prendre ses responsabilités en pérennisant et en stabilisant le financement de cet outil potentiel de pédagogie, d'ouverture d'esprit, mais aussi d'esprit critique que peut représenter la télévision publique. Que vaut une heure d'éducation civique enseignée par de valeureux professeurs à nos enfants face aux dizaines d'heures de télévision qui prônent souvent des valeurs contraires ?

La réforme de la redevance, dont les principales mesures sont l'exonération des résidences secondaires et l'arrondissement à l'euro inférieur de son montant, ne fait que réduire les aides que l'Etat apporte à son service public de l'audiovisuel. Cette réforme ne peut que conduire à asservir un peu plus la plus grande chaîne de notre service public aux règles de la concurrence.

Au contraire, il faut se donner les moyens de renforcer encore plus ce secteur, qui, ne pouvant lutter à armes égales avec le privé dans la concurrence sauvage que celui-ci lui impose, risque d'être un jour privatisé. Nous connaissons le scénario : on laisse la situation se dégrader ; puis on dit qu'il n'y a pas d'autre solution que la privatisation.

Sachez que nous ne laisserons pas faire cela sans réagir à temps, avec tous les citoyens attachés au service public de l'audiovisuel !

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