Cette hausse en est vraiment une dans la mesure où, dans le même temps, nous poursuivons notre politique de gestion rigoureuse et de modernisation de nos structures. Nous allons ainsi pouvoir financer une politique forte et pragmatique au service du monde combattant.
En 2005, est prévu le financement de l'application en année pleine de l'augmentation de quinze points des pensions des veuves de guerre, des veuves d'invalides et des grands invalides, et ce, monsieur Bockel, sans aucune condition de ressources.
Les veuves sont en effet, madame Garriaud-Maylam, au coeur de nos préoccupations. Elles seront les principales bénéficiaires de l'augmentation d'un demi-million d'euros des crédits sociaux de l'ONAC.
L'ONAC dispose désormais, mesdames, messieurs les sénateurs, d'une capacité d'intervention de 12, 6 millions d'euros, soit le plus haut niveau jamais atteint, et cela aussi peut être vérifié. Ces crédits sont destinés au financement des aides aux anciens combattants et aux veuves d'anciens combattants en grande difficulté financière, car il y en a, hélas ! C'est là notre réponse, rapide et pragmatique, au rapport remis récemment au Parlement, conformément à ce que prévoyait un amendement au projet de loi de finances pour 2004.
Mesdames, messieurs les sénateurs, puisque j'évoque l'ONAC, je tiens à dire que ce projet de budget vise à lui donner tous les moyens de remplir sa mission et de poursuivre sa modernisation dans les meilleures conditions. On nous avait prédit des jours difficiles, or c'est le troisième exercice pour lequel le contrat d'objectifs et de moyens est exécuté de façon satisfaisante.
Comme l'a souligné M. Baudot, dont chacun connaît la compétence, le contrat d'objectifs et de moyens assure l'avenir de l'ONAC bien au-delà de 2007, comme j'ai déjà eu l'occasion de l'indiquer à l'Assemblée nationale, grâce à une gestion plus rigoureuse et plus adaptée aux besoins réels des anciens combattants. La pérennisation de l'ONAC représente pour nous une exigence.
Autre pilier emblématique du monde combattant, l'Institut national des invalides poursuivra, en 2005, son effort d'adaptation, démarche qui est le gage de sa pérennité. Après le projet médical, après le projet d'établissement, c'est à l'élaboration du contrat d'objectifs et de moyens que nous allons nous atteler.
Par ailleurs, les crédits inscrits à ce projet de budget permettront de financer deux évolutions majeures qui concernent la retraite du combattant.
La première évolution est démographique. Les crédits prévus permettront de répondre aux besoins créés par l'arrivée à l'âge de soixante-cinq ans des nombreux contingents d'anciens combattants d'AFN.
La seconde évolution est démocratique. Il s'agit de la mise en oeuvre, en année pleine, de notre décision d'harmoniser à quatre mois les critères d'attribution de la carte du combattant d'AFN.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite profiter de ce débat pour répondre avec précision aux questions relatives au décret du 27 juillet 2004.
Je remercie les orateurs d'avoir tous salué sa publication. Nous ne devons jamais oublier que notre démarche fait suite au décret du 13 juillet 2000 qui réglait l'indemnisation des orphelins des victimes de la Shoah. Le gouvernement précédent ne voulait pas, c'est un fait, étendre son champ d'application à d'autres catégories. Avant de prendre notre décision, qui a rétabli la sérénité, nous avons donc conduit une concertation approfondie, avec le concours de M. Dechartre et du Conseil d'Etat.
En effet, il convenait d'être juste et de ne pas heurter les consciences. C'est pourquoi le décret du 27 juillet 2004 vise les orphelins des victimes d'actes de barbarie dont les circonstances et l'horreur dépassent le cadre habituel d'un conflit entre Etats.
A cet instant, je voudrais écarter une mauvaise interprétation du texte, monsieur Fischer : il doit être clair que le décret du 27 juillet 2004 concerne évidemment les orphelins des personnes fusillées, par exemple à Châteaubriant ou au Mont Valérien ; il concerne également, bien sûr, les orphelins des personnes massacrées à Oradour-sur-Glane, à Tulle, à Maillé, à Vassieux-en-Vercors et en tant d'autres lieux, ainsi que dans les cachots de la Gestapo.
Monsieur Baudot, les crédits prévus sont évaluatifs. Vous avez remarqué que 20 millions d'euros étaient inscrits, mais ils seront abondés automatiquement en fonction des besoins, comme tous les crédits évaluatifs. Vous pouvez être pleinement rassuré sur ce point.
S'agissant de la rétroactivité, j'indique de la façon la plus nette que son application reviendrait à créer une inégalité, au détriment des orphelins des victimes de la Shoah. En effet, l'application du principe de rétroactivité à la rente viagère conduirait à verser quatre années de rente en une seule fois, soit quasiment le montant du capital. Cela reviendrait donc à octroyer le cumul de la rente et du capital, alors que les orphelins des victimes de la Shoah ont dû choisir l'un ou l'autre.
Enfin, nous traitons les dossiers le plus rapidement possible et nous appliquons ce décret avec humanité, en tenant compte des circonstances du décès. En cas de contestations - il ne manquera sans doute pas d'en survenir, car il en est souvent ainsi dans ce genre d'affaire -, les intéressés saisiront très normalement le juge administratif et une jurisprudence s'établira.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, j'évoquerai maintenant plus rapidement les autres sujets.
Vous avez mis en relief, monsieur Baudot, notre décision de décristalliser les pensions des anciens combattants et des veuves ressortissants de territoires anciennement sous souveraineté française. A l'heure actuelle, 80 000 personnes réparties dans vingt-trois pays bénéficient de cette décristallisation. Les quatre années de rappel ont été versées, les droits ont été rouverts : les titulaires d'une pension militaire d'invalidité peuvent faire constater l'aggravation de leur état de santé, ce qui n'était pas possible auparavant, les veuves peuvent obtenir une pension de réversion. Voilà ce que la décristallisation a permis, et le Gouvernement auquel j'appartiens est fier d'avoir mené à bien le traitement de ce dossier vieux de quarante-deux ans.
S'agissant de la retraite du combattant, tous les intervenants ont regretté l'absence de revalorisation de l'indice de référence. Pour tout vous dire, cela constitue pour moi aussi un motif de regret.
Certes, en 2003 et en 2004, la priorité a été donnée à l'accroissement du nombre de bénéficiaires, cela a été souligné tout à l'heure, mais l'objectif n'est évidemment pas abandonné, bien au contraire ! Je puis vous assurer que nous répondrons, au cours du quinquennat, aux attentes des anciens combattants, dont les demandes ont été entendues par le Premier ministre, avec lequel j'ai échangé sur ce thème voilà quelques jours. La progression de la retraite du combattant constitue donc, désormais, notre première priorité.
Par ailleurs, M. Lesbros et plusieurs de ses collègues ont abordé la question de la campagne double pour les agents publics ayant servi en Afrique du Nord. M. Gal me remettra son rapport au deuxième trimestre de 2005, et nous étudierons alors avec attention quelles suites il conviendra de lui donner.
En réponse à M. Baudot, j'indiquerai que 205 millions d'euros ont été inscrits au projet de budget pour 2005 en vue de financer le relèvement du plafond majorable de la rente mutualiste. Même en l'absence d'un tel relèvement, les crédits connaîtront une progression de plus de 3 %. Naturellement, nous n'avons pas renoncé à porter ce plafond à 130 points, comme cela a été signalé, et nous ferons tout pour tenir nos engagements.
M. Baudot m'a également interrogé à propos du « conjoint survivant ». Je lui confirme que nous cherchons le bon support législatif pour insérer la mesure évoquée.
Enfin, MM. Baudot et Lesbros ont bien voulu saluer la réforme du « rapport constant », que vos collègues de l'Assemblée nationale ont d'ailleurs adoptée à l'unanimité. Je suis très heureux d'avoir, comme vous tous, apporté ma pierre à cet édifice. Désormais, l'indice du point de pension militaire d'invalidité sera directement lié à l'indice d'ensemble des traitements de la fonction publique calculé par l'INSEE. Il évoluera donc à chaque changement de ce dernier, sans plus de délais. Ce nouveau mécanisme est simple et surtout compréhensible par tous. Il permettra des ajustements immédiats, nous y gagnerons donc en rapidité, en cohérence et en clarté. Cela marque la fin de débats stériles qui duraient depuis plus de quinze ans.
Mme Printz, MM. Bockel et Baudot ont abordé la question douloureuse de l'indemnisation des anciens du RAD et du KHD.
A Strasbourg et à Mulhouse, le 21 novembre dernier, le Premier ministre et moi-même avons rappelé le long martyre de l'Alsace et de la Moselle pendant l'annexion. Le Premier ministre a eu des mots très forts pour affirmer le respect de la nation devant tant de souffrances. M. Bockel a souligné tout à l'heure avec quelle émotion la population a accueilli cette évocation.
S'agissant des anciens du RAD, je crois que vous savez tous que nous ne ménageons pas nos efforts pour aboutir à un accord. A la suite de la réunion que le Gouvernement avait organisée en mai 2003 à Strasbourg, un processus de concertation s'est engagé.
Nous avons en effet, monsieur Bockel, proposé une solution selon laquelle l'Etat participerait à hauteur de 50 % à la dépense, tandis que l'autre moitié de celle-ci serait supportée par la Fondation de l'entente franco-allemande. Mais cette dernière a rejeté notre proposition, et l'Etat ne peut pas s'engager seul dans la voie de l'indemnisation d'un préjudice à l'origine duquel il ne se trouve pas. Je persiste à penser que la sagesse finira par l'emporter.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais également évoquer la loi d'orientation relative aux lois de finances.
C'est là un sujet d'apparence technique, mais qui est en fait politiquement important, notamment pour les associations d'anciens combattants, qui doivent pouvoir s'y retrouver.
Les choix effectués par le Gouvernement assurent la visibilité et la lisibilité des crédits des anciens combattants. Les engagements pris seront donc scrupuleusement respectés.
Les crédits des anciens combattants seront tous inclus dans la mission « mémoire et liens avec la Nation ». Ils resteront donc identifiables.
Cette mission comportera deux programmes.
Le premier est intégralement consacré aux anciens combattants, et par conséquent isolé. II est intitulé : « mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant ». II regroupera les crédits relatifs à la retraite du combattant, aux droits liés aux pensions militaires d'invalidité, à la solidarité et à l'entretien des lieux de mémoire. Pour ce dernier point, il s'agit uniquement de la remise en état des nécropoles.
Le second programme concernera les « liens entre la nation et son armée ». Il inclura les crédits relatifs à la politique générale de mémoire. Ainsi sera attesté le lien du monde combattant avec la nation, le lien que le Gouvernement s'attache en permanence à valoriser avec le concours de tout le monde combattant.
Il me semble que cette présentation est lisible, sincère et cohérente.
Madame la présidente, mesdames et messieurs les sénateurs, j'en arrive au devoir de mémoire.
Demain, le 5 décembre, sera célébrée la journée d'hommage aux « morts pour la France » de la guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de Tunisie.
Le Premier ministre présidera la cérémonie nationale. Elle sera marquée par un hommage exceptionnel aux unités ayant participé aux combats d'Afrique du Nord. Leurs emblèmes porteront désormais l'inscription « AFN 1952-1962 ».
Pour le reste, le débat a eu lieu. Chacun s'est exprimé. L'important est de ne pas perdre de vue le respect et la dignité que méritent ceux qui sont morts pour la France.
Mesdames et messieurs les sénateurs, après une année 2004 dominée par des commémorations qui sont encore dans toutes les mémoires, 2005 sera également une année dense, avec le soixantième anniversaire de la victoire.
Nous célébrerons également, avec force, émotion et gravité, le 60ème anniversaire de la libération des camps de concentration.
Ce sera un temps très important, surtout dans le contexte actuel, où nous devons faire face à l'oubli et à ceux qui veulent réécrire l'Histoire.
Dans ce cadre, deux grands projets muséographiques seront menés à terme.
Le premier concerne le souvenir de la Shoah, avec la nouvelle exposition du pavillon français du musée d'Auschwitz. Elle sera inaugurée par le Président de la République le 27 janvier prochain, jour de la cérémonie internationale organisée par la Pologne.
Le second chantier portera la mémoire des Résistants déportés. En octobre, le Président de la République inaugurera au Struthof, dans le Bas-Rhin, le centre européen du résistant déporté.
D'autres cérémonies seront spécialement consacrées au retour des prisonniers de guerre et des requis du STO.
En 2005, sera également inauguré le mémorial de l'Alsace-Moselle à Schirmeck.
Je suis sensible aux propos de madame Garriaud-Maylam sur les lieux de mémoire à l'étranger. Vous avez raison, madame la sénatrice. Même si nous faisons des efforts importants, comme en Tunisie ou, récemment, à Sébastopol, il reste de réelles marges de progression. Je veillerai personnellement à ce que nos lieux de mémoire à l'étranger soient mieux entretenus et à ce que l'on reste très attentif à leur état.
Madame Garriaud-Maylam m'a aussi interrogé sur notre politique de « mémoire partagée ». Nous progressons de manière significative. Après les accords signés avec le Royaume-Uni, Madagascar, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, la Corée et le royaume du Maroc, d'autres sont en préparation avec la Tunisie, le Vietnam et le Canada. Le quatre-vingt-dixième anniversaire de Gallipoli, le 24 avril 2005, sera une illustration de nos accords avec l'Australie et la Nouvelle-Zélande.
Madame la présidente, mesdames et messieurs les sénateurs, dans le domaine de la mémoire - comme dans celui de la réparation - vous pouvez constater que le projet de budget des anciens combattants ne manque pas d'ambition, quoi qu'en disent des critiques, essentiellement formelles à mes yeux.
II mérite mieux que la caricature, car il permet de répondre, efficacement et effectivement, aux attentes de ceux qui ont tant donné pour la France et qui ont acquis le droit à la reconnaissance de la Nation.