Intervention de Thierry Foucaud

Réunion du 24 novembre 2006 à 15h00
Loi de finances pour 2007 — Article additionnel avant ou après l'article 2

Photo de Thierry FoucaudThierry Foucaud :

Cet amendement tend à revenir sur la notion de « bouclier fiscal », qui s'apparente plus à une armure fiscale dans la mesure où il protège intégralement les plus riches.

Selon les calculs réalisés par les organisations syndicales du ministère des finances, cette disposition, dont le coût n'est pas encore répertorié dans le document portant évaluation des voies et moyens, ne s'appliquera véritablement qu'à quelques milliers de contribuables.

Le bouclier fiscal sera particulièrement luxueux, puisque le plafonnement des impôts en fonction du revenu profitera, pour l'essentiel, comme le disent les syndicalistes, à « ceux qui sont déjà concernés par le plafonnement de l'impôt de solidarité sur la fortune, soit environ 5 000 personnes, parmi lesquelles les deux tiers ont un patrimoine net supérieur à 6, 9 millions d'euros, ou qui s'en approchent, soit environ 8 000 personnes ».

Sur un coût global estimé à 400 millions d'euros, la mesure se traduira par le versement de plus de 250 millions d'euros « à une poignée de contribuables - entre 12 000 et 15 000 -», une somme que nous ne pouvons manquer de rapprocher de la majoration de la prime pour l'emploi, qui sera, quant à elle, partagée entre 8, 8 millions de foyers fiscaux, ce qui démontre le caractère profondément inégalitaire de la mesure et illustre la conception de la justice fiscale de ce gouvernement, monsieur le ministre.

Mais les foyers modestes, qui se verront, quant à eux, privés d'une partie des financements publics de nature à soulager notamment des familles, ne seront pas les seuls à supporter les conséquences de cette mesure. En effet, celle-ci touche également les collectivités locales, qui peuvent être tenues pour responsables du dépassement du plafond des impositions, au regard du revenu fiscal de référence du contribuable concerné.

Au demeurant, indépendamment du fait que nous attendons les effets de l'application des articles 1er et 1649-OA du code général des impôts, il est parfaitement évident que c'est dans le champ de l'impôt de solidarité sur la fortune que le bouclier fiscal jouera pleinement son rôle.

Je m'attarderai quelques instants sur les conditions de la mise en oeuvre de cette mesure.

Alors que le taux d'imposition maximum du revenu est fixé à 40 % pour la tranche la plus importante, nous sommes loin du plafond de 60 % retenu pour la mise en oeuvre du bouclier fiscal. Il faut en effet, pour que le dispositif s'applique, que les impositions locales relatives à l'habitation principale et le montant de la cotisation de l'impôt de solidarité sur la fortune représentent plus de 20 % du revenu fiscal de référence.

Eu égard aux revenus qui sont, je le répète, imposés au taux de 40 %, il faut donc que la taxe d'habitation et la taxe foncière atteignent 13 336 euros annuels par part. Pour peu qu'il s'agisse d'une famille comprenant trois enfants, l'imposition locale doit s'élever à plus de 40 000 euros annuels pour atteindre ce plafond ! Soit vous êtes propriétaire d'un appartement de très grand luxe ou d'un château classé monument historique comptant plusieurs dizaines de pièces, soit les taux d'imposition locaux sont particulièrement exorbitants !

Je rappelle, pour mémoire, que la moyenne nationale au titre de la taxe foncière sur les propriétés bâties s'établit à 1 070 euros environ en 2005 et que la taxe d'habitation est, pour sa part, de 456 euros. N'est donc clairement visée que la réduction de l'impôt de solidarité sur la fortune, dont le caractère confiscatoire est, comme vous le savez, mes chers collègues, régulièrement dénoncé ici par certains.

À ce stade de la controverse, permettez-moi simplement de relever l'une des réalités de l'impôt de solidarité sur la fortune.

Quand vous disposez d'un patrimoine imposable au titre de l'ISF d'un million d'euros, vous devez a priori vous acquitter d'une cotisation ISF de 1 474 euros, hors tout abattement pour personne à charge ou autre disposition correctrice.

Si cela représente 60 % de votre revenu, c'est que votre revenu mensuel imposable est inférieur au RMI, ce qui signifie donc bien que le bénéfice du bouclier fiscal ne vise réellement que les très gros contribuables tant de l'impôt sur le revenu que de l'impôt de solidarité sur la fortune.

Par conséquent, nous n'avons pas à laisser subsister dans notre législation une disposition parfaitement injuste et qui ne profitera décidément qu'à quelques-uns. Tel est le sens de cet amendement que nous vous invitons à adopter.

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